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lundi 27 novembre 2023

MARSEILLE (1)

Le cul entre deux chaises d’aller trop loin dans une exploration d’un Sud intime, que presque je voudrais imposer à une perception communément partagée... en la volant aux autres qui plus est, à ceux, reconnus et autrement plus respectés par leur renom, la reconnaissance reçue en retour sinon l’effort de vulgarisation... entre une retenue qui me remettrait à ma place d’être lambda et la prétention d’avoir à dire, privilège d’un temps qui ne saurait durer, quitte à renverser des règles de bienséance, je franchis mon Rubicon... Je me laisse aller à vider mon sac, prétentieux écrivaillon que je suis, pétant plus haut que mon derrière. Plus prosaïquement, emporté par cette exploration, le projet « SUD ? C’EST ÇA ! » dans son deuxième tome, devra-t-il déborder dans un cinquième volume, le troisième dédié au printemps ? C’est dans cet état d’esprit que le titre “ Marseille ” est abordé, depuis des jours, d’où le dilemme et ma confession de tout à l’heure. Bof, il suffira d’évoquer Pagnol et nous passerons à la suite, principalement en remontant la Durance.

Enfant des marges et des armasses (des talus et des friches), campagnard, en véritable “ pacoule ” (on dit “ pacoulin ”, pas “ cul terreux ” par chez nous, la terre étant trop sèche pour accrocher nos séants), si la petite ville, Narbonne, Béziers, ne rebute pas, même si une trajectoire personnelle me fait penser avec tendresse à Perpignan, par contre les grandes villes... Toulouse, Montpellier, Marseille, je ne les aime que de loin. Autre souci : ce voyage va géographiquement dépasser les limites d’un Sud perçues parfois en tant que frontières (voir à ce propos la présentation de l’opus) alors que j’ai choisi de rester libre, émancipé plutôt qu’enfermé. Ne vous méprenez pas, rien de désinvolte dans cette indépendance affichée. Et puis si on ne peut plaire à tout le monde, qui m’aime me suive ! Nous verrons bien. 



Alors, des clichés, des raccourcis pour évoquer Marseille ?  En vrac, le crayon au coin des lèvres, presque les yeux en l’air du rêveur qui n’écoute plus en classe... la peste de 1720, la sardine de 1779-80, le Vieux-Port, Marius, Fanny, le Bar de la Marine, le « ferriboate », les poissonnières au langage fleuri, la bouillabaisse, le camion pizza, le château d’If et l’abbé Faria, la Canebière, la maison du fada, la Bonne Mère, Marius et Olive, la cathédrale de la Major, les Goudes et les calanques du Sud, la plage des Catalans, le mondial de pétanque “ La Marseillaise ”, la French Connection (pour ne plus savoir écrire correctement “ connexion ” ensuite), le juge Michel, la drogue, les règlements de comptes, Robert Guédiguian de Marius et Jeannette, des Italiens, des Arméniens, des Pieds-Noirs, des Comoriens, le bleu du drapeau et de l’OM, tous ceux que le port a attirés... Rimbaud, Conrad, Cohen, Benjamin... N’en jetez plus, c’est criminel de le dire ainsi, plus encore que dans un numéro du Reader Digest, Marseille mérite mieux...

Cité_radieuse,_Marseille 2017 Creative Commons CC0 1.0 Universal Public Domain Dedication Author Karmakolle
 

Alors, si cette liste n’est venue qu’au bout d’une maturation certaine c’est que Marseille interpelle, « Marseille est la plus belle ville de France. Elle est tellement différente de toutes les autres. » Arthur Schopenhauer (1788-1860). À vouloir l’éluder, cette pensée de Schopenhauer m’arrête, Marseille s’impose comme capitale d’un Sud intime.   

Marseille,_aerial_view_from_plane 2022 Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International Author Naioli


mercredi 19 avril 2023

FAUT SE LANCER !

 Le Bon À Tirer (BAT) est validé !


c'est au mot, même au caractère près... mais les 296 pages sont là !

mercredi 3 juin 2020

CHEMIN FAISANT / Jacques Lacarrière

"Chemin faisant", encore un de ces livres qui font en vous leur petit bonhomme de chemin et vous marquent pour longtemps.

" Rien ne me paraît plus nécessaire aujourd'hui que de découvrir ou redécouvrir nos paysages et nos villages en prenant le temps de le faire. Savoir retrouver les saisons, les aubes et les crépuscules, l'amitié des animaux et même des insectes, le regard d'un inconnu qui vous reconnaît sur le seuil de son rêve. La marche seule permet cela. Cheminer, musarder, s'arrêter où l'on veut, écouter, attendre, observer. Alors, chaque jour est différent du précédent, comme l'est chaque visage, chaque chemin.

" Ce livre n'est pas un guide pédestre de la France, mais une invitation au vrai voyage, le journal d'un errant heureux, des Vosges jusqu'aux Corbières, au cœur d'un temps retrouvé. Car marcher, c'est aussi rencontrer d'autres personnes et réapprendre une autre façon de vivre. C'est découvrir notre histoire sur le grand portulan des chemins. Je ne souhaite rien d'autre, par ce livre, que de redonner le goût des herbes et des sentiers, le besoin de musarder dans l'imprévu, pour retrouver nos racines perdues dans le grand message des horizons. "
Jacques Lacarrière. 

Il y a des livres qui vous font signe : ceux qui, vendus au poids, affranchis de la condamnation au pilon, celui de Vincenot sur le rail évoqué hier, d'autres, qui échouent dans des magasins d'occasion, abandonnés pour diverses raisons. Ceux-là pour moi sont comme ces petits chiens des refuges qui viennent spontanément à vous. Celui-ci s'appelle "Chemin Faisant", le genre de nom à me faire craquer. Je l'ai adopté. Un vrai petit bonheur qui, depuis les Vosges, m'a entraîné vers le Midi et son protecteur. L'auteur, sensible au feu chaleureux des Sud, relève parmi ses sensations celle qui fait passer des terres du Nord à l'Occitanie. Du petit lait pour moi, même sur une île au lait de coco... Quel dépaysement ! Et ce grand saut dans la plaine à partir du Causse du Larzac ! Les villages sous les eaux du Salagou... les hippies, les chasseurs, le Minervois, les viticulteurs contre le vin d'Algérie... Et oui, les années 70... 

Mais celui qui finit en sa compagnie avec les bleus de la mer, du ciel, les falaises de Leucate à la blancheur grecque (Lacarrière était particulièrement attaché à cet éclat hellène sur toute la Méditerranée), ne peut que ressentir un vent d'éternité aussi intemporel qu'universel... être porté par un sentiment de destinée commune à travers l'Histoire. Ceux qui marchent vers la nature et les autres, pas seulement pour Compostelle, comme nos aïeux le faisaient par force il y a encore un siècle, le ressentent mieux encore sous la plante des pieds.  

     

lundi 1 juin 2020

L'ESPAGNOL / Bernard Clavel, Jean Prat.

L'Espagnol ! 

Qu'il sonne ce nom quand on est du Sud puisque leur immigration est aussi sobre qu'ancienne... Et comme il fait sonner faux l'ouverture contemporaine tous azimuts au nom de principes aussi aveugles qu'éculés. 

Qu'il carillonne ce nom au souvenir de ces colles de vendangeurs dignes et qui apportaient dans nos villages centrés sur leurs vignes un exotisme, un intérêt et une acceptation de la différence. 

Qu'il est poignant ce tocsin lorsque 450.000 Républicains passent en France lors de la Retirada pour être hébergés si indignement. 

Pourtant, en dépit de notre veulerie gouvernementale (malheureusement c'est un travers récurrent de nos politiques), les rapports entre humains eux, rapprochent et savent être généreux. 

Pablo et Enrique sont réfugiés. Ils arrivent dans le Revermont, sur les premiers contreforts du Jura, pour les vendanges. Si Enrique, obnubilé par la lutte contre les fascismes ne s'attache ni aux gens ni au pays, ce ne sera pas le cas de Pablo. 

Quand on aime la terre et qui plus est quand ce sentiment devient passion parce que la vigne sous n'importe quelle latitude sait nourrir un amour paysan exclusif et parce que Bernard Clavel a su si bien dépeindre la réalité des relations humaines, la mentalité petit propriétaire, les rapports de couple ou homme-femme, ceux intergénérationnels avec des vieux aussi dignes que respectés (un abime avec leur situation en EHpad et le covid... terrible la régression !), la vie familiale avec une fille trisomique. 

Une histoire, un livre formidables avec en prime, ce qui est rare, une adaptation magnifique de Jean Prat à la télé (disponible sur le site de l'INA).
Jean-Claude Rolland qui joue le rôle de Pablo s'est suicidé en prison alors qu'il ne s'agissait que d'une banale pension alimentaire non versée... 

Et quand on est pour les sensations fortes et non pour une ligne de vie plate, L'Espagnol, le livre, son auteur et le film vous font vite passer d'un pic d'exaltation à un repli de détresse... mais sans ces forces qui déstabilisent, remettent en question et obligent à plonger au fond de soi, que vaudrait la vie ?  


mercredi 16 janvier 2019

DE CEUX QUI HONORENT LEURS PROMESSES, IL VA VENIR, C’EST SÛR ! / Fleury d'Aude en Languedoc.


Mon premier, de 2017, entre le moulin et  le coteau de Fontlaurier.

Ne jouons pas les Nostradamus ! Plus facile d’énoncer une lapalissade, d’annoncer que le printemps viendra après l’hiver, pardi ! Il n’empêche, une petite voix me dit que les amandiers vont fleurir… C’est que les quelques jours frisquets de ce début janvier devraient avoir causé ce choc thermique indispensable à la floraison de l’amandier… Alors gageons, même si je Nostram’amuse, que l’amandier ne me fera pas attendre plus de quinze jours ! C’est entre lui et moi, en seriez-vous témoins… . 
 


Il va venir fleurir le coteau, le marge des vignes, houppe blanche de l’amande douce, toupet rose de l’amère. Pastels de serments partagés ou trahis[1], d’alliances fécondes, le message passe avec l’allant des jours plus longs, toujours plus engageants. 





Préludant à la montée des sèves, il accompagne le poudaïre, le vigneron qui taille les sarments, souche après souche, (d’ailleurs, les amandiers cultivés sont eux aussi, traditionnellement taillés en gobelet, pour diriger la pousse des branches vers l’extérieur). Si le vigneron qui « poude[2] » est pressé par le printemps qui déjà s’impatiente, l’amandier, lui, est plus fougueux encore. Rebelle, bravache, il n’a de cesse que de contester l’hiver alors qu’imperturbable, la saison mauvaise et sans pitié, sûre de sa légitimité et du tribut qu’elle peut exiger d’une nature écervelée, lui fait souvent payer un optimisme aussi cabochard qu’incontrôlable à coup de gelées qui brûlent et font avorter des fruits au duvet naissant. 

 
Est-ce le même arbre ? 




Je suis du Sud et, n’en déplaise aux Jacobins centripètes,  l’amandier participe de cet esprit plus méditerranéen que français, avec la mer qui soumet à elle le Mistral et le Cers… Oui le Cers, un vent auquel les Romains avaient même élevé un temple ! Fan cagua les bobeaux esprits qui n’ont que la tramontane à la bouche ! Oui le Cers, frère du Mistral, de ces grands vents qui donnent à l’air du Golfe du Lion une lumière à part.



Par une matinée claire et vivifiante, il n’y a rien de plus beau que les boules fleuries des amandiers sur les laisses d’un coteau avec, en fond, par un ciel pur et calme, le cône enneigé du Canigou… de quoi rendre jaloux le Fuji-Yama qui doit attendre longtemps l’éclosion des cerisiers ! 





Dans certaines contrées abritées du Midi, il lui arrive de fleurir parfois pour Noël… C’est arrivé à Fleury… en 1916, 1921, 1975… En attendant, faudrait-il attendre jusqu’en février, tout le village se retient, impatient de s’ouvrir au chapitre qui vient. Ils le pressentent tous : le messager fidèle ne tardera pas ! Tous l’espèrent ! Un instinct du fond des âges fait guetter, au bord des vignes, des champs, dans la garrigue même, le long des laisses et des murettes abandonnées ! Chacun croit le voir, à s’en frotter les yeux tant il cèle en lui l’espoir de jours meilleurs.

Quand le porteur de lumière vient, de sa touche pastel, éclaircir la grisaille de l’hiver, c’est une renaissance, et celui qui en est témoin court vite vers les siens, coupe la parole pour la bonne cause, l’annonce de la bonne nouvelle... J’en parlais ainsi, en 2014… et j’en frissonne rien que de penser aux abeilles, aux bourdons, à tout ce petit peuple de pollinisateurs qui profite et donne à la fois pour que vive notre vieille Terre…    




[1] Revenant de Troie, Démophon, fils de Thésée, roi légendaire d’Athènes, un des guerriers enfermés dans le cheval de bois, fut jeté sur la côte de Thrace. Phyllis, princesse du lieu, tomba amoureuse du bel étranger. Ils se marièrent. Démophon, cependant, repartit pour Athènes et ne revint pas, malgré sa promesse. Abandonnée, Phyllis se pendit à un amandier. Si je retiens cette version d’une légende déclinée en maintes variantes, c’est que l’arbre ne daigna fleurir que le jour où Démophon revint enfin…       

[2] La "poudo" était l’outil employé pour tailler la vigne, serpette d’un côté, hachette de l’autre, connu dès l’époque romaine, sera utilisé jusqu’à la fin du XIXème siècle. (source photo « Canton de Coursan / Opération Vilatges al Pais – Ciném’Aude 2000  / Francis Poudou et les habitants du canton / 2005)

mercredi 2 août 2017

SÈTE, UN 15 JUILLET / Mon Languedoc...

  

Qui, mieux que Paul Valéry, et avec quelle modestie, sut insister sur la grande influence des origines géographiques dans la convergence des forces qui comme par l’effet d’une chimie magique et inexplicable, arrive à précipiter le génie, l’art et l’esprit dans une enveloppe humaine ? (1)

Comment ne pas imaginer le poète, depuis le Mont-Saint-Clair, adressant sa soumission et sa révolte d’Homme à la Mer tant aimée, un jour de Grec et de marinade (vent de NE et embruns)... 
  

Ce ne sont pas les éclats de Stentor mais la voix est sûre, charpentée, bien que soumise aux forces d’une nature faisant si peu de cas de notre espèce, mais mue aussi par une énergie propre à arrêter la vague au moment où sa transcendance ne peut que déferler... Je veux croire que la tessiture n’est pas plus emphatique que datée... Ce n’est pas le ton affecté de la culture, travaillé pour se fondre dans un milieu de précieux, riches et oisifs, de conserve avec un monde définissant non sans prétention un who's who des arts et des lettres à son image. Ce n’est pas le débit haché, souvent coupé par la toux (il roulait ses cigarettes), de l’écrivain devant travailler pour vivre, mal à l’aise parmi les rentiers.
Sa voix est celle de la nature, de la naissance dans une famille modeste, méridionale avant tout. L’accent n’a pas encore trahi le Sud, ne dépareillant pas au berceau méditerranéen : le père est corse, la mère génoise, ils vivent à Sète... Et puis, quelle sincérité peut-on exprimer si on parle parisien à la Mer originelle, matrice de civilisations ? Aussi, c’est sûrement par rancœur que Paris continue de phagocyter et d’assimiler la province. A moins que ce ne soit l’amertume refoulée d’un esprit trop rebelle et indépendant qui me fait digresser à ce point... On se veut comme les autres mais différent, sociable mais solitaire... et on ne fait qu’imiter Valéry qui eut l’occasion de se définir ainsi... 


Il n‘empêche, l’autre jour à Sète, face au môle Saint-Louis, au pied du cimetière marin où il repose, c’est un pays, un Sétois, un Paul Valéry proche, loin de la pompe de la capitale que je retrouve. Au milieu du rond-point, les mots, le ton intime, à l’opposé d’autres, somptueux mais d’une froideur de pierre tombale, témoignent de l’amour insondable d’un enfant bien de « l’île singulière » pour notre mer glorieuse : 

« ... je remonte le long de la chaîne de ma vie, je la trouve attachée par son premier chaînon à quelqu'un de ces anneaux de fer qui sont scellés dans la pierre de nos quais. L'autre bout est dans mon cœur... »
   


Discours au collège de Sète à l’occasion de la distribution des prix / 13 juillet 1935 / Œuvres T. 1 p. 1438 / Paul Valéry. 

   

(1) Sont-ce les imbéciles heureux qui sont nés quelque part comme le chanta, de façon univoque, un autre Sétois célèbre, Brassens ? 

Note : cette interprétation n'engage que son auteur...  

photos autorisées commons wikimedia : 
1. Portrait Paul Valéry. 
2. Sète, le môle Saint-Louis auteur Christian Ferrer. 
3 & 4. Sète, Monument à Valéry, rond-point du môle. Author Fagairolles 34. 
 5. Sète / Lycée Paul Valéry / Author Fagairolles 34.