vendredi 31 mars 2017

UN AMI DIT " QU'EST-CE QU'ON ATTEND POUR POMPER TOUTE CETTE EAU DE PLUIE QUI PART A LA MER ?"/ Mayotte en sous-France


MON AMI, qu'est-ce que tu es naïf et niais ! 

Écoute les intelligents qui nous gouvernent : ils n'arrêtent pas de trompeter "j'ai donné", "vous aurez", "je promets" ! 

Écoute la ministre si gentille de venir t'aider alors qu'elle ne te doit rien ! Les tuyaux, le tanker, la solidarité généreuse de la Réunion, c'est elle !

Regarde ce préfet muselé qui sauve au moins le Nord !

Écoute ces élus et sénateurs qui se décarcassent pour toi ! 

MAIS MON AMI, T'ES BÊTE même... qu'est-ce que tu vas pomper dans les rivières avec des camions-citernes, que tu trouves où d'abord ? 

Écoute donc les intelligents qui ne lâchent toujours pas l'argent "donné" depuis toujours et jamais arrivé ! 

Écoute la ministre si gentille de sa politique pro de l'esbroufe, fière de politiquer depuis 30 ans ! Elle va t'aider alors qu'elle n'y est pour rien ! Fraternité socio-traître, ça change de l'altruisme capitalo-vendu ! Elle a promis pour mai, des tuyaux et un beau bateau plein d'eau sauf que le marchand de tuyaux encaissera pour de l'eau qui n'arrivera jamais car le robinet, populisme aidant, restera fermé par la main flatteuse d'une Réunion ethnocentrée ou seulement avide de coloniser... 

Regarde ce préfet bien persuadé que les Français sont des veaux, assez malin pour laisser l'eau à volonté pour les nordistes même si leur retenue est à moins de 40 % tout en coupant au sud ! Pire, depuis ce jour, puisque la retenue du sud à 80 % va alimenter le Nord ! Diviser pour que ceux qui le sont moins ne soient pas solidaires de ceux qui y sont jusqu'au cou ! 

Écoute le silence assourdissant des élus, il faut dire que les magouilles et crocs-en-jambe entre eux pour continuer à parasiter, à se payer sur la bête passent avant la vie chère, la coopération régionale, le développement digne... Exception faite pour les ailes de poulet qui nous ont valu un député-mabawa que des poulets "expatriés" ont osé faire souffler, d'ailleurs, dans le ballon ! Même apparatchik tu n'es français qu'à 25 %, ici ! 

MAIS MON AMI, SOIS PAS CON ! Ton idée les fait rigoler... Dans une démocratie dévoyée, seuls les coups de schlague peuvent tomber mais rien ne doit remonter ! T'es un Mahorais de base et déjà qu'en métropole la base n'a droit qu'à un bulletin dans l'urne, et encore à condition qu'il soit conforme... 

Alors prie pour que l'ingénieur-expert sorte une belle étude pour 2020 ou la saint-Torchetoi mais ton idée d'aller pomper ce que les rivières envoient à la mer !
Et puis ne pars pas rejoindre ces Assoiffés du Sud qui vont semer le souk ! Paye ta facture surtout pour de l'eau à gastro-entérite ! Pauvre France qui a déjà tant à faire avec la Guyane ! 

PS1 : après la morgue et l'arrogance du fort en gueule Le Roux éphémère sinistre de Hollande, la perfidie de Bareigts, que ne les voit-on pas faire amende honorable à Cayenne ! 

PS2 : les ASSOIFFES du SUD ne veulent pas se faire prendre les quelques euros qui leur restent (84 % de la pop sous le seuil de pauvreté) pour de l'eau non potable facturée par une société privée disant qu'il faut remonter au syndicat lui-même institué par le préfet qui, suivant les ordres de Paris, doit seulement insinuer que les élus locaux seraient responsables. 

PS3 : depuis plus de trois mois, c'est la première fois que nous avons l'eau 2 jours de suite ! Faut se réveiller et faire comme en Guyane ! Dans un pays autoritaire seule l'épreuve de force est susceptible d'apporter des résultats !

mercredi 29 mars 2017

LE MONDE NE DEVRAIT ÊTRE QUE CHANSON ET MUSIQUE... (6) / ratés existentiels


Il s’est levé, tanguant, swinguant un peu, tranquille au fond de son avion, comme pour favoriser la circulation, ce qui d’ailleurs est plutôt conseillé lors de longs vols. Le porteur de rêves taille sa route, toujours dans l’assourdissement des cuivres à ses oreilles... Ils rappellent, vers ces latitudes justement, des orages dantesques, bien que silencieux, allumant des cumulo-nimbus colossaux de part et d’autre de la trajectoire, à l’échelle de l’Afrique. La route atteint le Grand Rift, les marges du lac Turkana au bout du fleuve Omo, de ces exceptions très africaines qui jamais n’atteignent la mer.

 Tonnerre intérieur cette fois, qui ébranle. Foudre qui abat... Saudada, añoranza, mélancolie de qui laisse des cœurs. Éclair qui exalte... Allégresse, euphorie, surexcitation de qui va vers d’autres cœurs. Ventre tambour vibrant, résonnant de force fragile.        
 

Mistral, Cers, ciel pur, étangs ridés, pins torturés, oliviers de Bohême, tamaris, saladelles, Mirèio, Magali, Maiité le retiennent. Même Hugues Aufray a choisi la Camargue pour le Scopitone « Dès que le printemps revient... ». Le troupeau de chevaux qui trottinent, les camarguais des gardians au galop, les vaches noires qui foncent et se jettent dans le marais, les filles brunes aux arènes, le chanteur en santiagues et la complainte des trompettes apportant un peu plus de cette inflexion exotique espagnole... 

Du temps qui passe restent le vent pugnace, sa houle dans les roseaux, les grands espaces... et ce romantisme enfui avec les illusions de jeunesse :
«... Après bien des hivers / Pourtant mon cœur se souvient / Comme si c'était hier / Dès que le printemps revient... »

C’est qu’il a su les chanter les filles de la campagne, Hugues Aufray !..

https://www.youtube.com/watch?v=vbYKwjsyDcg Hugues Aufray « Des jonquilles aux derniers lilas ».

« Siffler sur la colline » de Joe Dassin reprenait aussi cette même veine, avec une bergère.  Cette fraîcheur champêtre enchantait le public. Peut-être l’arrivée du printemps réjouissait-elle davantage les cœurs à l’époque ? Alors que la ville ne semble plus vouloir se nourrir de la campagne... Ne nous sommes nous pas, petit à petit, éloignés de la nature jusqu’à nous en couper ? Cela ne présage rien de bon pour l’avenir...

https://www.youtube.com/watch?v=_IY1fNs0Tps Joe Dassin « Siffler sur la colline »

Mais au ton léger de Joe et à la truculence paysanne « Des jonquilles aux derniers lilas », le côté ombrageux de ses dix-sept ans préférait le cinéma de bon ton pour son âge pour une « fille du Nord » jamais rencontrée. Un demi-siècle après, il en détourne les paroles :

« ... A-t-elle ces noirs cheveux si longs qui dansaient jusqu’au creux de ses reins ?..
C’est ainsi qu’il l’aimait bien
Si tu passes là-bas vers le Sud où le vent vient de l’autre bord de la mer, oublie, jamais ne donne mon bonjour à la fille qui fut mon amour... »

https://www.youtube.com/watch?v=3ziN1DCgNOo Hugues Aufray « La fille du Nord »

Et là, parce qu’un de ses articles a été "liké"... que le « j’aime » en regard, le visage, le modelé de ce nez, le regard, le sourire, l’ont soudainement paralysé, bloqué, le laissant vivre seulement de l’accélération crescendo de son  pouls... Élan spontané ? Bouffée irrésistible ? Posture ? Scénario mental... Il ne sait plus... Il se demande ...

La fille... une autre fille lui repasse l’éclair croisé des regards et les petites secondes qui ressortent comme si c’était d’hier. Ainsi, sans lui demander le moindre avis, son souffle vital avait oublié d’oublier. La vision de cette fille brune aux yeux amande respirait en phase avec lui depuis près de cinquante ans ! Sans qu’il le sache ! Dur à admettre ! Interloqué de "s’étonner lui même" ! Mais pas de voir l’holographie de cette vendangeuse brune se plaquer instantanément sur la fille de la véranda de Julien Clerc :

«... Et si jamais je vous disais,
Ce qui fait tous mes regrets
Mes regrets
Le désespoir de mes nuits
Et le vide de ma vie
De ma vie...
De ma pauvre vie...

La fille de la véranda...
Que je n’ai vue qu’une fois... »

https://www.youtube.com/watch?v=12qBw9ou5cQ Julien Clerc « La fille de la véranda »

Vrai que la fille des vendanges, il ne l’a vue qu’une fois, un aveuglement, oui, mais aussi bref qu’un éclair dans le ciel... le reste, ses regrets, le désespoir de ses nuits, le vide de sa vie, c’est pour amuser la galerie... Sinon, il n’en serait pas à réfléchir à un dédoublement de sa personnalité !

Suite au réveil en douceur dans une lumière arc-en-ciel, les passagers ont pris le petit-déjeuner puis assez vite, le commandant de bord a annoncé la descente vers Nairobi.   


Un visage en écusson, un prénom, un nom bien d’Espagne, l’émotion ensuite, enfouie depuis si longtemps. Il n’a pas longtemps hésité à baragouiner un message sans le point d’interrogation inversé :
« Estabas en mi pueblo por las vendimias ? » 
Elle a dit oui, précisant même le nom du patron qui l’employait. Il a donné quelques précisions. Elle a répondu, d’abord dans le vague, éteignant un feu incertain, mais d'un coup revigoré quand elle a détaillé «... le Français aux cheveux longs qui venait le soir ?..» 



Crédit photos 
1. Kenya Turkana lake. Author Hansueli Krapf.
2 & 3. Étangs et paysages du delta de l'Aude. 
4.  Giraffe Skyline - Nairobi - Park. Author Mkimemia.

samedi 25 mars 2017

UNE PLEINE CORBEILLE À LINGE ! COMME AVANT ! / les oreillettes

Merveilles, bunyètes, oreillettes. Si la coutume n’est plus respectée à la lettre : il en va ainsi des traditions dont certaines doivent bon gré mal gré s’adapter à la modernité, je pense à celle de pays d’accueil que les politicards douteux nous bassinent à tout-va, la bassine à frire, elle, peut encore et heureusement marquer le carnaval (merci Laeti !), la fin du carême ou le printemps serait-ce avec une vigilance orange (merci Camillou, merci Titi !). 

C’est seulement que nous avons hérité et que nous devons transmettre une force de vie liée à des rites aussi païens que paysans... (faute de goûter cette préparation du 24 mars, faut bien que je me console avec ma gourmandise de mots !) 

Oreillettes parce qu’elles ressemblent, une fois cuites, à des oreillasses (Jean Ferry en avait, de belles oreilles !) ? Oreillettes parce qu’on mettait la pâte à lever sous l’oreiller (l’eau dans le verre gelait sur la table de nuit !) ?

L'oreillette c'est le soleil, disent d’autres, le renouveau et l’espoir en de belles récoltes ! Toutes ses variantes en bien de régions et pays élèvent vers l'infini la même espérance.

Quand une infime minorité malfaisante de meneurs dénaturés impose sa vision "pépètière" du monde, craquons, croquons des oreillettes pour leur signifier que leurs pépètes sont à vomir, elles !

Photo empruntée à ma nebeude Laeti ! Gros poutous ! Tontonton !)

vendredi 24 mars 2017

VEAUX ET PETITS OISEAUX DES INFOS DU MATIN ! (un coup de gueule... pas envie de relire !)




5h 30 L’astre solaire étend ses doigts de lumière trop haut encore dans le ciel pour atteindre le djinn de nuages en fuite vers le ponant. L’air semble comprimé de cocoricos concurrents. Les roussettes se la donnent encore avant le jour. Deux petits hiboux se lancent des SMS. Dommage cette rumeur de moteurs en bruit de fond avec un solo plus pétaradant en côte.
5h 45 le djinn de nuages se démantibule tant il a eu peur que le soleil ne le rattrape. Presque tous les coqs respectent une trêve. Un cardinal, rossignol des tropiques, lance son ouverture. Les trilles des souimangas, si clairs et puissants pour des oiseaux-mouches de quelques grammes, défendent les fleurs de papayers. un bulbul rouspète quelque part, plus loin... 

6h Faites que ce matin continue à sourire avec les infos...

* Le nombre de mineurs isolés submerge les associations déléguées par l’État « ... Des enfants sont envoyés des Comores pour bénéficier de la protection de l’enfance qui s’occupe déjà, à 90%, d’enfants issus de l’immigration clandestine et si on veut stopper cette masse qui vient toquer à la porte des services sociaux, il faut absolument développer la coopération avec les Comores... sous peine de blocage... » témoigne anonymement un employé de cette association.  

* les restrictions d’eau provoquent des foyers d’infection, c’est une vraie catastrophe sanitaire, prévient un comité de veille. Comité, commission, étude, réunion, congrès, symposium, assises, séminaire, session, cellule, «haute» autorité ? Ahurissant cet arsenal habilitant les parlotes et la langue de bois comme si la politique n’était qu’un bande-mou d’impuissants par ailleurs si prompts à se raidir sur leurs privilèges !   
« Hallucinant », c’est le mot de la rédaction de Kwézi, pour constater que l’autorité trouve normal que l’eau soit coupée un jour sur deux jusqu’en 2020, que le dessalement de l’eau de mer pour le sud soit acté mais à une date indéterminée (comité, commission, étude et blablabla et caetera !)

* En parlant de date, retenez la volubilité démagogique de Bareigts, la phagocyteuse, dont l’action la plus probante doit être d’avoir été la mieux en cour, damant ainsi le pion à des coteries style Penchard des vieilles Antilles ! Elle a été bien impudente en avançant le mois de mai pour le ravitaillement par tanker depuis la Réunion "voudra voudra pas" qui plus est... Plus solidaire que la grande famille française, tu meurs !

* « Le tanker d’eau on s’en fout, qu’elle vienne d’Afrique du Sud et pas de la Réunion !» lance l'éditorialiste de l'info du matin ! « Ce serait bien que les agents de la préfecture arrêtent de nettoyer les bâtiments à grande eau et d’entretenir les pelouses...» répond le rédacteur !
Ils font état d'une colère sourde qui monte vu qu’il n’y a aucune volonté de réaction rapide ! La réunion d’hier a encore accouché d’une souris... Pardon, autant pour moi, faut reconnaître qu’ils anticipent quand même avec encore une étude, un ingénieur qui travaille pour des moyens de récupération d’eau pluviale, de production électrique autonome. c’est formidable d’envisager, alors que le premier couillon venu en est convaincu depuis vingt ans au moins, que les études mènent loin à condition d’en sortir !

* Mais ils font !.. Ne généralisons pas avec le "tous pourris" si injuste pour l’idéaliste de service ! 200.000 euros, ce n’est pas rien, pour étudier les possibilités de captages qui ne seront pas productifs avant 2020, vu que les 50 premières pages de l’étude traiteront de la nature géologique de l’île depuis que les volcans lui ont donné naissance et que le pavé de bonnes intentions vaudra pour aboutissement, que même la presse sera conviée au lancement de ladite plaquette !

* Les foyers d’infection vous disiez ? Et la tuberculose avec 25 / 1000 concernant le taux de déclaration de la maladie (record de France) avec un bidonville record de France encore, un taux de pauvreté déjà chiffré à 84 % en 2014 !.. Mayotte compte et pas seulement en tant que plus grande pouponnière d’Europe !

* En conséquence, entre la tuberculose et le manque d’eau pourquoi l’autorité de la phagocytose aurait à se préoccuper, pour ces Mahorais, français à 25 % seulement, de la retraite complémentaire ??? Ahah ! ils seront morts avant, ma bonne dame ! 

* Objection votre Honneur ! C’est qu’ils bossent, nos parlementaires ! Après l’épouse, les enfants mineurs, ils ne vont pas tarder à rémunérer le chiot destiné à sécuriser leur mission de représentant du peuple ! Ils ont pondu une ordonnance, un code de la voirie qui vient enfin remplacer celui de Madagascar colonie & dépendances ! Encore faut-il qu’elle passe l’étape de la signature, cette ordonnance... rien ne presse !

Mais sont-ils fiers et beaux, surtout les forts en gueule, n’est-ce pas Le Roux des "sociaux-traîtres" associés du maroquin. A constater votre arrogance, on ne peut plus douter que notre système patine à se regarder pédaler dans la semoule, persuadé que tant que la populace, le troupeau de veaux si choyés en période électorale, croit aux petits oiseaux, tout continuera d’aller bien pour eux ! 

mercredi 22 mars 2017

LE MONDE NE DEVRAIT ÊTRE QUE CHANSON ET MUSIQUE... (5) / ratés existentiels

Un avion l’emporte vers « la fille qui l’accompagne » et leur fils, loin d’un passé qui le rattrapait et qui, parce que les circonstances sont très particulières, continue de lui coller aux basques. 

Les saladelles, symptômes ô combien lancinants de cette langueur méridionale, de cette nostalgie plus saudada portugaise, plutôt añoranza ibère, mâle, rauque, cambrée, arquée sur l’être qui manque, plus couteau dans la plaie que proche du mal à vivre des spleens nordiques. Ce mal insidieux, instillé par des rafales folles, qui déboussole, fait perdre la raison, ronge jusqu’à détruire à force de colères, de révoltes, ferments d’autant de folies, passagères des vents fougueux que le ventre chaud de la mer attire. Le caractère des Languedociens s’en ressent, c’est sûr.   
Sous les trains de nuages qui courent vers le Golfe, les saladelles, en faisceaux, en réseaux de tiges s’accommodent du Cers furieux passant à travers. L’été passé, il s’est interdit de penser, tant il se trouvait ridicule, en s’arrêtant, pour des photos, à ces mêmes tamaris qui le virent arriver jadis. Pourquoi revenir sur ces pages de vie si ancienne ? Il venait alors conter fleurette à la fille du régisseur d’un domaine qu’il avait connue en embouteillant  du gris de gris. Lydie, elle s’appelait. Elle avait le chic pour coller les étiquettes bien droit. Elle ne pouvait guère rester plus d’une demi-heure. Si quelques bribes de mémoire lui sont revenues en chargeant les photos, le déclic des vendangeuses revient en analepse sur le lycéen qu’il fut. Les tamaris sont témoins de baisers seulement : c’est vrai qu’elle ne lui laissa pas caresser ses seins, le jour où il essaya de les toucher, effleurant seulement, pour être moins bête, comme disaient les copains, et surtout pour contredire sa stratégie de chevalier servant ne valant pas tripette si rien ne transcendait la rencontre. Il aurait dû lui chanter :

«... Ma mignonne mignonnette, emmène-moi dans ton lit ! couche-moi dans ta couchette : il doit faire bon dans ton nid. J’ai tellement voyagé, j’ai tellement connu de dames. Je suis très très fatigué... Tu apaiseras mon âme  Chante chante rossignol trois couplets en espagnol, tout le reste en anglais... » 

https://www.youtube.com/watch?v=k0ii2LoVXQ4 « Le rossignol anglais » Hugues Aufray. 1965. 


Elle lui tapa la main d'une claque catégorique. Le platonique ne mène à rien. Les remords valent mieux que les regrets. Au fait, au cinquième soir, quand elle lui dit qu’elle ne viendrait plus, il en conclut que finalement, une sainte nitouche aux petits seins ne valait pas, après la journée de vendanges, dix-huit kilomètres à vélo, même en fredonnant pour elle, pédalage aidant « Les filles sont jolies quand le printemps revient... »

https://www.youtube.com/watch?v=-mR4h0-4H88 « Dès que le printemps revient » H. Aufray (Scopitone ! 1964)

Elle devait rejoindre sa pension. Ils échangèrent quelques lettres, amicales, sans plus, jusqu’à celle qui parlait du garçon rencontré à la fête du village. Vexé, défait de devoir encore endosser le rôle de confident transi, il ne répondit pas. Le fil était coupé. Cette quatrième ou cinquième et ultime lettre doit être rangée dans la boîte à biscuits.
Poursuivra-t-il pour autant cette introspection intime ? Rien n’est moins sûr.  
 

Une ligne droite dans le sable, la frontière du Soudan. Les premières lueurs vont bientôt fondre sur Harar, loin au levant, sur l’aventurier trafiquant qui ne veut plus savoir quel grand poète il fut. Sur l’Erta Alé aussi, naissance d’un nouveau monde. 

Une autre campagne, (est-ce un camping aujourd’hui ?) porte ce nom de « Domaine du Nouveau Monde », avec ses vignes des sables, au pays des roselières et des saladelles bleues. Pour dire que ce lido, le rattachement de l’île de la Clape sont dus au travail obstiné de l’Aude dans son delta originel. Fleuve bien né, de la race des grands, en toute modestie petit frère du Rhône au Nord, de l'Èbre plus au Sud. 


Les saladelles, appelées aussi et ce, sans aucun lien entre espèces de fleurs,  "lavandes de mer", "immortelles bleues", porteraient-elles aussi, dans les terres gagnées par l’Aude, le nom de « vendangeuses » ? Les siennes de « vendangeuses », il les associe aux filles du Sud. Miréio l’Arlésienne, partie aux Saintes-Maries-de -la-Mer prier qu’on lui laisse Vincens son amoureux. C’est dans la sansouire aux saladelles que l’insolation va la mener à la mort. Bien sûr, le delta de l’Aude n’est pas celui du Rhône ni celui du Pô, mais entre les villages et les grands domaines, tant d’histoires d’amour ont dû fleurir aussi ! Et avec un brin d’imagination, il s’approprie la Camargue de Magali.

https://www.youtube.com/watch?v=ScccxoEgF2U / Magali / Robert Nyel 1962.

«... Qu’est-ce qui t’a pris de t’en aller pour le pays de nulle part, parce qu’un gitan t’a regardée en faisant chanter sa guitare ? ».. Et le soleil, allié des souffles puissants, si dangereux «...E lou souleu de la Camargo mi fa tan mau au foun d'au cor... Sous le soleil de la Provence ma tête est prête à éclater... ».

Vous avez dit NOMENKLATURA ? Rien de bizarre, hélas ! / LA NOMENKLATURA FRANçAISE

"... La conviction de détenir la vérité, le complexe de supériorité.../... sont les piliers du système oligarchique français fondé sur l'opacité et le secret. A l'abri des regards indiscrets, on peut ainsi continuer à distribuer des prébendes financées par les contribuables, à "ajuster" les comptes publics jusqu'à les rendre présentables aux masses - réélection oblige - et à vivre la belle vie.
page 24 / et déjà en 1986 !



dimanche 19 mars 2017

LE MONDE NE DEVRAIT ÊTRE QUE CHANSON ET MUSIQUE... (4) / ratés existentiels




«...Et là, une image lui revient en boomerang, qu’il croyait effacée. Celle d’une petite vendangeuse espagnole, juste un échange du regard, un éclair...»

D’un coup tout est chamboulé, tout sens dessus-dessous ! Et l’informatique avec ses ratés aussi n’y changera rien ! Ses inspirations, ses effusions, ses notes, effacées deux fois qui plus est ! Qu’importe ! Parce que hier, il a recommencé, laissant patiemment remonter les secrets de cette chambre de magma frémissant, brûlantes sensations d’un coup rafraîchies. Son père l’a dit souvent, qu’il ne se sentait pas vieux, bien qu’à la veille de ses 90 printemps ! Retourner, contrebalancer le trop commun "âge de ses artères" ! Formidable d’optimisme, si positif ! À l’opposé de l’excuse toujours en trop pour ne rien faire, se laisser aller... le ventre flasque plutôt que résonnant serait-ce d’un tam-tam planétaire, étranger seulement en apparence aux farandoles et sardanes du Sud ! 
Dans cet avion qui l’emporte et qui aborde le grand désert sous la lune, il est pris par ces cuivres, à fond dans les basses, à fond dans sa tête, qui parient sur une Afrique digne, enfin émancipée. Dreamliner le bien nommé, dans sa trajectoire filée, jet-stream aidant ! Et lui, parce qu’il imagine Callisté « la très belle » avant l’éruption cataclysmique du Santorin, laissée à l’horizon bâbord, ne s’emporte-t-il pas tel un vieux volcan effusif oublieux de sa jeunesse explosive de volcan gris, persuasif encore, capable de submerger, de tendre le piège des cheveux et larmes de Pélé alors qu’une neige faussement innocente l’emporte désormais sur le gris de ses tempes et que, dans un accès lucide, il voudrait se persuader que sa lave se fige lentement sous sa croûte, qu’il est raisonnable de tenir et fou de courir ?.. 

Le cœur volcan, Julien Clerc, 1971. 
https://www.youtube.com/watch?v=6wVMI_aB3TQ

Il devait avoir vingt ans, encore à ses préfixes, le platonico exaspérant d’ Evelyne, l’érotico passif de Josiane trop offerte, trop facile et à présent, quelques secondes à peine pour tout foutre en l’air, corrigenda plus qu’addenda, un amour infini, galactique, voguant vers l’infini, noyant néanmoins corps et âme dans le concret d’une illusion d’avenir... une petite vendangeuse...

https://www.youtube.com/watch?v=bTUeD0KQc_c Et un jour une femme / Florent Pagny.

Il y a cette camarade de classe qui le retrouve et lui fait remonter l’autre fois. Il y a ces lettres, l’étrangeté de cette boîte à biscuits sans couvercle et pourtant sans poussière. Mais il y a plus troublant encore ! Ces lettres, il les reprend dans la chambre même où il les décachetait, où il répondait, quarante-sept ans sinon plus tôt !.. il y a une éternité... (Joe Dassin / L'été Indien). Mais c’est un même soleil qui écaille et décape le bleu séraphin des volets, qui pénètre de sa lumière même si au loin les pins ont submergé le vieux moulin. « Accepte ta petite vie, vis intensément la vibration qui t’est permise, lui susurre une petite voix ! La nature n’arrêtera pas sa marche cosmique et continuera toujours sans toi et sans tes semblables, "humanisants" dégénérés ! » 

Et puis, est-ce la magie des amandiers en fleur qu’il n’a pas vus depuis vingt ans et qui piquent en ce moment, de leur espérance rose et blanche, les branches dénudées de la mauvaise saison ? Ce renouveau l’inscrit à nouveau dans la respiration de son Languedoc, de son Sud natal, dans un cycle qui boucle l’été avec sa Méditerranée léchant le sable de petits coups de langue mousseux, pour reprendre fortississimo avec l’hyperbole zinzoline des raisins d’une corne d’abondance... 
Sans plus digresser même si ce baroque étrangement accolé à l’épure romane méridionale le définissent aussi, il sent son inspiration vers une expansion sans fin d’un coup stoppée. Un de ses articles a été "liké"... et ce « j’aime », ce visage, le modelé de ce nez, ce regard, ce sourire, l’ont soudainement paralysé, bloqué, vivant seulement de l’accélération crescendo de son  pouls...  Mais que n’a-t-elle caché, comme il le fit, ses indécences derrière un chat totémique ! 
Il n’est plus que le déversoir d’un trop-plein de sensations... Il ne parle pas, ne pense rien, seulement ouvert à l’amour infini montant dans son âme, parti si loin, nomade bohémien, dans un ciel éclairé d’étoiles, heureux comme avec une femme... Pardon, cette inspiration n’est pas de lui. C’est Rimbaud qui irradie aux marges du Soudan et de l’Éthiopie de même que le Erta Ale, le volcan qui doit ouvrir à un nouvel océan, la dépression de l’Afar...

Les vendanges, offrande divine, période magique qui voit nos propriétaires espérer en une météo favorable dont dépendra l’année à venir, et tous ces gens modestes qui se louent pour un plus permettant ensuite de dépenser comme jamais dans l’année, et ces Espagnols des pueblos déshérités venus pour une manne plus que bienvenue !
Retour des vignes, les garçons se lavent au seau, à l’eau du puits, dans les rires, les perles irisées de soleil couchant qu’ils se lancent et les moqueries en tangence des filles, déjà prêtes, après une toilette cachée. Taquines, les filles, toujours en orbite mais qui font exprès et crient de joie quand les étoiles d’eau les atteignent. Lui vient rejoindre José qui au milieu des comportes vides et du silence relatif du bord des vignes lui parle si bien des lumières trop vives de l’Andalousie, de l’ombre douce de sa maison creusée dans la montagne aussi, où l’attend l’abuela, sa grand-mère. 

C’est dans ces circonstances qu’elle lui apparut, comète fuyante. Leurs yeux se croisèrent si vite mais si fort qu’il en resta tout chamboulé tandis qu’elle s’effaçait aussitôt derrière le portail entrouvert de la remise. L’attirance était-elle réciproque ? Toilette du soir, avant que la jeunesse ne parte, en groupes, se lancer des regards, des piques comme autant de banderilles jusqu’au noir de la rue devenue route, au sortir du village...  Mars et Vénus dans un tourbillon terrien plus favorable au périgée que les hasards célestes.
Mais leurs planètes ne se croisèrent plus. Il revint, pourtant, tous les jours et s’il la revit, ce fut encore plus fugace. C’était flagrant, elle le fuyait, lui et son regard. Il s’en trouva plus ravagé que flatté. Il ne lui resta que la vision d’une longue enjambée dévoilant sous la jupe, une jambe, un mollet musclé et, tressautant dans l’ondoiement de longs cheveux noirs, la pointe d’un sein, arrogant presque, pic couronné d’une sierra enneigée loin à l’horizon d’une froide et morne meseta.
Puis les rangs s’éclaircirent. Il ne restait plus que quelques vignes à vendanger. Le ballet des tracteurs et des derniers chevaux se fit plus espacé. Les épiciers ne commandèrent plus de caisses d’arencades, ces grosses sardines au sel... Nos Espagnols qui avaient si bien participé au réveil des vendanges emportèrent leur accent rauque, l’exotisme de leur langue, leurs filles vivifiantes et farouches. Dans la nuit encore chaude d’octobre, l’odeur des moûts avait remplacé la brillantine, le patchouli... le bruit lointain des clavettes des pressoirs, les éclats joyeux des batifolages des vendangeurs. 

Josiane revint de ses récoltes à elle, dans un village voisin, escortée par un Parisien qui ne devait pas que la promener dans sa DS. Lui, redevint le confident hypocrite d’Evelyne, déjà plus sa dulcinée du Toboso sans qu’il le réalisât encore. Et la petite espagnole dont il ne savait le prénom, et qui l’avait tant troublé, s’évanouit à jamais de son esprit. Quand mûrit en lui l’idée de prendre un métier, son image lumineuse s'effaça mieux que celle de ces visiteurs d’Ibérie qui devaient venir encore jusqu’au milieu des années 80. Ces autres vendangeuses, par contre, peut-être les saladelles qui fleurissent les sagnes de leurs tons bleus jusqu’à la fin de l’été, se rappellent, chaque année, à son souvenir.  

mercredi 15 mars 2017

LE CERS QUI PASSE SUR LA GARRIGUE M’A RENDU FOU ! (fin)




Il se peut qu'on dise « tramontane » comme on dit « foehn », ou encore « catabatique », pour ce vent polaire terrible ! il s'agit d'une circulation d’air entre des reliefs et une zone plus basse, souvent caractérisée par un assèchement de l’atmosphère... Soit, mais j’espère qu’en de nombreux pays et terroirs, ces vents ont la chance de porter un nom bien à eux. Bora ? Meltem ? et chez nous, le Cers, fils du Languedoc à l’instar du Mistral plutôt fils de Provence ! Les écrits en attestent : nous avons vu ce qu’en disait l’auteurE en langue occitane, Jeanne Barthès de Cazedarnes, de son nom de plume Clardeluno. Revenons sur la portée de ses mots.  

Loin du parler languedocien populaire, les paroles de Clardeluno, bien que d’un abord précieux, élitiste, défendent une langue occitane historiquement rabaissée au rang de patois vulgaire par un colonialisme assimilateur. Hier, encore une parenthèse, j’écoutais une ancienne ministre, toute de culture et d’amour de la langue et qui ne s’est jamais laissée démontée par de vociférants députés, sexistes, vulgaires et , affirmant que son niveau de langue restait toujours le même quel que soit son public... Chapeau bas pour une forme de respect loin des rapports dominant-dominé...  

Suite à un énième plaidoyer pour le Cers presque sur deux millénaires,  passons aux contresens et autres non-sens qui rappellent à toute une brochette de condisciples le cher professeur Sansonetti, Etienne de son prénom, à Victor Hugo, LE collège (lycée) de garçons de Narbonne. Ses mauvaises notes qui nous ont tant fait souffrir ne tendaient néanmoins qu’à nous élever, fût-ce par rapport à une barre bien haute... sauf que nous n’avions pas l’âge d’en accepter la finalité. Sinon, c’est la page 166 de l'Antoulougio Escoulario de Lengadoc qui me renvoie à une grande perplexité existentielle concernant la Baptistine, vous savez cette belle que les rugbymen voudraient légère, quand ils la chantent dans le bus, sur l’air de « Viens Titine »... Toujours l’histoire de la fille sur un perron et censée se promener :

« La Baptistino al perroun amé soun amourous
se passéjaboun toutis dous, se fasion de poutous... »  

Ce "perroun", justement, pour mieux nous embrouiller, nous en retrouvons une version chez Achille Mir (Lou Lutrin de Ladèr) : «... countent coumo ‘n perrou...» sauf que ce perrou là, une note le précise, n’est qu’un "Homme plaisant". De là à voir une redondance dans l’amoureux de la Baptistine "... avec son plaisant homme, son amoureux...". Un couplet plus loin, le doute n’est plus possible sur la tournure paillarde de la chanson évoquant des cambajous, des jambons qui ne sont pas ceux de la troisième mais de la quatrième mi-temps... Opportunité pour relancer un appel à quiconque aurait les paroles de cet air à chanter le vin et la femme...

Je doute que la tête puisse vagabonder ainsi lorsque, à vélo, on entreprend la côte (1) qui, depuis la vallée du Vernazobre et par Pierrerue, mène aux garrigues de Cazedarnes, même si le vent, soufflant dans le bon sens, aide à monter. Forcer sur les pédales et le guidon sans réaliser que le Cers qui n’oublie rien règne ici et qu’à sa cour, Clardeluno et Pierre Alias, le pauvre camarade de papa dont la famille avait des vignes à Fontcaude, ont leur place. Il y faut des dizaines d’années pour enfin entendre ce qu’il m’a soufflé à l’oreille, que tout ce qui reste en mémoire n’est pas mort. 

En languedocien : 
"... Qu'un pople toumbe esclau
Se ten sa lengo, ten la clau
Que di cadeno lou deliuro (2)." Mistral. 

« ...Le vent qui vient à travers la montagne m’a rendu fou... »  (Hugo - Brassens)

(1) une centaine de mètres de dénivelé... une de mes sorties de l'époque, soif de tailler la route pour alimenter des envies d'ailleurs et avant tout des "rêveries de pédaleur solitaire"... 
(2) "Qu'un peuple tombe esclave 
S'il tient sa langue, il tient la clé
Qui des chaînes le délivre" Mistral.

Note : cette modeste chronique est le troisième volet, avec le souvenir de Pierre Alias, le copain regretté de papa (extrait de Caboujolette / parution 2008), sur le Cers de la moyenne et basse vallée de l'Aude, depuis les Corbières jusqu'aux collines de l'Orb.


Crédits photos commons wikimedia : 
1. Pierrerue auteur Christian Ferrer.
2. Vernazobre à Babeau-Bouldoux Author Fagairolles 34
3.  Puisserguier gourg de frichoux auteur Charliebube

mardi 14 mars 2017

AUX COPAINS RESTÉS EN ROUTE / chronique à quatre mains.


Question de génération, question de vécu : lorsque nous prenons conscience que plus on remonte dans le passé, plus les conditions de vie étaient dures, sans compter les guerres par-dessus, nous nous devons de ne pas donner dans l’anachronisme, une bourde des plus communes.
Ainsi la retenue souvent affichée pour que la sensibilité ne s’épanche point l’est seulement d’apparence d’autant plus, qu’à l’extrême, la sensiblerie décrédibilise tout sentiment. Ainsi, si c’est toujours avec pudeur que l’émotion est contenue, elle n’en est pas moins présente...
Notre parler, d’ailleurs, en témoigne lorsque parlant de quelqu’un qui n’est plus, il fait ajouter devant le prénom, « le pauvre » en occultant que les pauvres sont aussi ceux qui restent. C’est aussi le cas de la mémoire qui revient et entretient à chaque occasion le souvenir d’un disparu, du moins dans les familles où les plus âgés, en principe, tiennent à faire passer de ce qu’il savent sur les leurs et un cercle plus ou moins large autour.
Restons en là de cette réflexion, sachant que nous avons tous, parmi nos chers disparus, des copains restés en route avec peut-être encore cette idée que reste vivant celui dont on parle encore et surtout, en tête, ce vers du grand Hugo, sur ce même thème, « Les morts, ce sont les cœurs qui t’aimaient autrefois » (poème "A quoi songeaient les deux cavaliers")...  


Parmi les copains qui reviennent plus volontiers, mon père est intarissable sur son ami Yves de Trausse Minervois, son complice des années lycée à Carcassonne. Il saurait évoquer Léon de Montréal, à vélo entre Bram dans la plaine et ce dernier pli du Razès face à la Montagne Noire, voire la cave paternelle où ils dégustaient à tous les goulots, rajoutant de l’eau sans vergogne pour que leur forfait passât inaperçu ! Et puis il y a Pierre si vite parti ailleurs. 


Dans Caboujolette, par le biais de quelques lettres, il en trace un portrait poignant, tout de modestie, de non-dits empreints de cette décence muette propre à ceux qui, parce qu’ils ont vécu, ont côtoyé trop de malheurs dont ceux, en forte proportion, hélas imputables aux hommes.

La première lettre apparaît dans son journal de 1939, sous le titre « Grandes Vacances ». Pierre l’envoie de Carcassonne le 24 juillet ; le cachet indique 17h 25 ; François la reçoit à Paris le lendemain après 10 h (1), un second cachet en faisant foi.
Pierre écrit en languedocien et parle même de "patois" (2) tant les attaques contre les langues minoritaires ont fait du français, porté aux nues en tant que langue de la liberté, un vecteur d’oppression...
Il cite toujours le début de la Respelido, la renaissance de la langue du Midi, initiée par Frédéric Mistral (3) et commence toujours par « Moun brave amic » : 

« Nautre, en plen jour
Voulèn parla toujour
La lengo dóu Miejour,
Vaqui lou Felibrige ! »

Il doit envier un peu son copain François qui a eu la chance d’être invité à Paris mais, faisant presque référence à Joachim du Bellay, il met en avant l’attachement au village natal : «... debes langui un pauquet de tourna à Fleuris...».
Pierre voit aussi quelques uns de ses professeurs arpenter la Rue de la Gare où se promène le tout Carcassonne. Il a même vu passer le Tour de France. Si la ville a des airs de gros bourg où tout le monde se connait, il n’en regrette pas moins d’être plutôt à Fontcaude où les vignes auraient moins souffert du mildiou. Mais il doit réviser (peut-être un rattrapage en septembre ?). 


On sent le souci de structurer, d'encadrer son propos du classique schéma si commode pour la rédaction : Introduction, développement, conclusion. Ainsi, il prend congé en signant de son surnom « Buto-Garo » et en rappelant l'amitié qui les lie : « Toun amic » ou « Toun amic que te saro la ma, Pierre Alias ».

Une autre lettre (est-ce la seconde de cet été 1939 ? ), date du 9 août. Mon père prend soin de préciser :
« ... Grandes vacances sous menaces de guerre.
Le samedi 2 août est le premier jour de la mobilisation générale.
Dimanche 3 août 1939. la Grande-Bretagne et la France déclarent la guerre à l’Allemagne. »

Pierre est si content d’avoir reçu quelques mots dans notre langue maternelle, son ami François étant plus « assimilé », dirons-nous, plus convaincu que la référence à « La deffence et Illustration de la langue Francoyse (1549) », que le rayonnement "universel" du français, doivent faire taire l’étouffement de l‘occitan, langue minoritaire pourtant bien plus ancienne (4).
Pierre regrette de ne pouvoir aller à Fontcaude que pour les vendanges. Il aimerait passer à Fleury aussi, pour le plaisir de discuter autour d’un verre, sans oublier de parler d’une météo avare de chaleur au point que les raisins ont du mal à mûrir.

Dix-neuf ans, un bel âge pour nos garçons si le destin n’en décide pas autrement... mais n’interférons pas davantage, laissons la parole à François (Caboujolette 2008, page 253) :

«... Et malgré moi me reviennent les vers d’« Oceano nox », appris par coeur dès la sixième à Carcassonne. C’est une vieille habitude. Le 24 juin 1941, j’étais allé à Carcassonne, après avoir reçu de la famille Alias un télégramme des plus inquiétants : Accident très grave arrivé à Pierre...etc... suivi sans doute par celui qui fixait le jour des obsèques. Avant de repartir pour Fleury, j’avais voulu acheter un livre d’allemand : FAUST, de Goethe, dans la collection bilingue des classiques étrangers. 40 francs : c’était assez cher... Je devais inscrire sur la feuille de garde : Acheté à Carcassonne le 24 juin 1941 en souvenir de mon ami regretté : Pierre noyé le dimanche 22 juin 1941 dans l’Aude. F. Dedieu.
« Ô flots, que vous savez de lugubres histoires ! » (Victor Hugo, Oceano Nox).

Après l’enterrement, monsieur Alias, son malheureux père, m’avait dit : « Ne l’oubliez pas trop vite. » Soixante-six ans après, je n’ai toujours pas oublié. »

Victor Hugo juxtapose la noirceur, la furie des flots tempétueux et ces marins disparus sombrant avec le temps dans les mémoires. A voir les rives si bucoliques du Païcherou, avec la guinguette des dimanches au bord de l’eau, on se défend de penser aussi à ces accidents si communs. Après le barrage le flot encore clair d’une Aude venue des montagnes, murmure le prénom Pierre sur les cailloux avant de le rouler plus profond dans sa plénitude de fleuve jusqu’à la mer mais c’est la dernière des raisons... soixante-seize-ans maintenant que papa n’oublie pas l’ami qui lui serrait si joyeusement la main... 


(1) la Poste fait-elle mieux aujourd’hui ? 
(2) les révolutionnaires disaient aussi « idiomes féodaux » !
(3) Mistral, par ailleurs très conservateur sinon réactionnaire, parle de « résurrection ».
(4) avec le temps et un certain recul, sans pour autant que cela exprimât une revendication identitaire, le penchant naturel pour la langue des aïeux s’est affirmé : ses parents ne parlaient-ils pas que languedocien entre eux ? Et son oncle Noé bien aimé, aurait-il eu tant d’effet sur lui sans cette langue indissociable du tempérament méridional ? «... lou fial d’or que nous estaco a nostre terro, a nostre cèl !..», ce fil d’or qui nous attache  à notre terre, à notre ciel, si bien chanté par notre poète sallois Jean Camp, en partage des vals alpins d’Italie aux vallées des Pyrénées et jusqu’aux plaines du Bourbonnais. Et que nos Jacobins franchouillards ne viennent surtout pas ramener leur arrogance coutumière si mal venue, ces internationalistes si enclins à émanciper au dehors et à coloniser au dedans : nos poilus de 14 parlaient occitan... s'il n'y avait eu que les Parisiens pour défendre la France ! Non, le Sud n’a pas de leçon à recevoir d’eux ! 

crédit photos : 1. Cazedarnes Autor Fagairolles 34 
2. Montréal Aude Auteur Profburp 
3. François Dedieu collection personnelle 
4. abbaye Fontcaude Author Fagairolles 34 
5. Carcassonne Aude & Cité Author Benh LIEU SONG

dimanche 12 mars 2017

LA LUNE ÉTAIT SEREINE... / Mayotte

Époque où le clair de lune prolongeait tard dans la nuit, les jeux des gosses, les palabres des grands, les histoires des vieux et les contes des temps passés...

 

samedi 11 mars 2017

MON DJINN À MOI... / Mayotte mon amour...

Mon djinn à moi me parle d’une magie qu’il ne faut surtout pas perdre. Oh Lato, mon copain perdu, toi qui m’a donné les clés d’une île mystérieusement magnifique, où es-tu ?
Tu écris quelque part, pour ne pas être seul. J’écris dans ce que je voudrais être mon tobé littéraire. Je t’écris aujourd’hui car tout est parti de là :
   
« Un homme qui écrit n’est jamais seul. » JOURNAL / Paul Valéry

Rien de plus vrai !
"Mariàmoi", tu la connais ! me dit
« Tu es avec ton djinn !.. comme quoi, écriture ou pas , c’est bon d’être accompagné aussi...
- Oh que c’est beau ! que je réponds... surtout que mon djinn est bon, tu sais !
- Mais c’est qu’il y des djinns gentils ! enchérit-elle aussitôt.
- C’est un complice formidable... il entre même dans mes pensées mais n’exige rien de moi. il ne me demande pas de "m’hallucinoger" pour le faire exister. Tu me rappelles ma "jeunesse" ici quand je courais les rumbus !.. Wouah ! la musique de Ragnao Djoby... attends je n’y tiens plus, il faut que je relise... dans la bibliothèque, cette boîte qui cache un tapuscrit, faudra bien le sortir un jour. Sans parler de ton manuscrit, tout de calligraphie, comme si ton écriture ronde concluait une réflexion en amont, toute en pointes, en tempêtes sous un crâne.
Je pense à toi en ouvrant ma boîte, précautionneusement : il peut s’en échapper tant de souvenirs, de sensations, de sentiments. De toute façon, je n’en sortirai pas indemne. Tout y est, la couverture, la quatrième, une carte maison, la table... LE RUMBU c’est page 317. 


 Tant pis, je risque un voyage intérieur qui va me secouer le cœur, me transporter exactement en août 1997. L’ambiance ?.. si mes amis silencieux, de l’autre côté du miroir, me submergent, promis, je la partagerai, m’en coûterait-il. Une cérémonie, la réception des esprits, pour les calmer, pour qu’ils protègent la communauté villageoise. Sous le ciel clair de la saison sèche, la clarté feutrée de la lune et des étoiles ajoute au mystère. Oh ! page 319, je n’ai oublié que "Saïndou", son prénom... 

«... Boucle d’oreille et casquette de loup de mer, Saïndou, avec ses airs de Corto Maltese, pianote avec conviction sur un petit clavier électronique, un jouet d’enfant, dérisoire concession à la modernité. Nos yeux se croisent (et je vous prie de croire que c’est d’une intensité amicale qui vous reste à vie !). je sais qu’il rêve d’un accordéon qu’il trouvera, peut-être, un jour, à côté, à mille quatre cents kilomètres de la nuit d’Handréma... » 

Mon cher Lato, mon cher Saïndou, vous n’êtes pas sans savoir qu’avec mon djinn c’est plutôt le trop-plein ! Ça picole, ça rit derrière moi, ça s’étreint, ça parle de la vie, de l’amour... sous la clarté feutrée et bienveillante de la lune, de fandzava sur sa fille... Mayotte... »
La boîte est refermée. 
Avec une muse qui l'inspire, un homme n'est jamais seul... Merci "Mariàmoi".  

« Un homme qui écrit n’est jamais seul. » JOURNAL / Paul Valéry. 
 

Photo : Le mont Choungui depuis M'tsanga Mtsanyouni (Tahiti Plage) Christine Dedieu... poutou frangine .

vendredi 10 mars 2017

LE CERS QUI PASSE SUR LA GARRIGUE ME RENDRA FOU ! / le nom de vent le plus vieux de France !

Et bé oui, cette atmosphère qui nous laisse tant aimer notre pays, souffrez que je la fredonne, en restant à ma place. C’est que Brassens vient aussitôt chanter Gastibelza sur la « Guitare » de  Victor Hugo. 


On ne trouve que ce qu’on veut bien chercher aurait dit Monsieur de La Palice. Mais parfois on trouve alors qu’on folâtrait ailleurs.
Ainsi, en feuilletant (c’est aussi une manière d’aborder un ouvrage) l’Anthologio Escoulario de Lengadoc (Roudès 1931 / Ediciu de la Mantenencio de Lengadoc), donc avec une bonne part de hasard, j’eus l’heur et le bonheur de trouver et ce que je cherchais et ce que je n’aurais pas cherché tant un contresens et un non-sens pourtant flagrant m’agréait... Mais, comme en amour où il est si difficile d’accorder la préséance au sentiment ou au désir, ma recherche qui se voulait structurée n’avait pas anticipé que « le vent qui vient à travers la montagne » me rendrait fou !  

Allons, cherchons... « Je cherche après Titine », mais non même si Charlot dans les temps Modernes, en donne une version exceptionnelle ! Non, ce doit être un plaidoyer, méthodique, construit, pour rétablir dans son honneur, le Cers des Romains. Le Cers, porterait-il le plus vieux nom de vent de France ! pourtant si ignoré, méprisé par l’ignorance ethnocentrée des people de la météo, de ces médias propagandistes qui se doivent de rester souriants, optimistes voire doucereux suivant les circonstances... Au moins que le bon peuple des "veautants" dorme sur ses deux oreilles, tondu et cocu ! 


Mais revenons à notre propos et là, dans cette anthologio, à la partie « Béziès-Sant-Pouns », parce que Pierre Alias, le regretté camarade de lycée de papa, avait parlé de Clardeluno (1), nous avons au moins deux raisons de chercher la poétesse de Cazedarnes ou d’un hameau proche. Et là, quelle n’est pas ma surprise de retrouver notre Cers, toujours avec la majuscule, plus haut que prévu, balayant même les collines du Minervois et peut-être, de ses rafales fulgurantes, au-delà des rives de l’Orb, toute la mer de vignes du Biterrois.

Dans Lisou (roman), « Mars dins lou Bas Lengadoc / ... las vignos que dejà laguejaboun.../... lour cabelladuro d’argent desplegado e rebufelado sens fin per lou vent de Cers.../... pei las alenados del Cers escoubilhaboun tourregans e rantèlos... »
Au mois de mars en effet, il n’est pas rare que la vigne « laguejo », rendant visibles les alignements de ceps, les rangées (de souches) dit-on notamment lors des vendanges, grâce aux bourgeons ouverts laissant sortir la pointe des premières feuilles vert tendre toujours dépliées et ébouriffées sans fin par le Cers. 


Puis, les exhalaisons, les bouffées du Cers balayaient (à rapprocher des équevilles de Lyon, du latin scopa [balai] puis scova puis escova et escovilla...) les gros nuages (le tourregan particulier au couloir audois, poussé par le Cers, défile rapidement depuis l’horizon ouest). Les rantèlos sont de légers nuages blancs souvent en formation... le bon maître Mistral cite J. Laurès : 

« A fusat len d'aici coumo fuso l'estelo
 En daissant darrès el uno fousco rantelo. » 

(1) pseudonyme de Jeanne Barthès (Cazedarnes 1898 - Cessenon 1972). Avec d’autres femmes auteurs membres du Félibrige, dont Philadelphe de Gerde (Claude Duclos-Requier), Calelhon (Julienne Fraysse-Séguret) et Farfantello (Henriette Dibon). Membres du Félibrige, elle a écrit en occitan alors que notre langue était de plus en plus étouffée par la morgue hégémonique du jacobinisme parisien... ce qui, serait-ce de façon insidieuse, perdure...  

Crédit photo : 
n° 2 extrait de carte IGN 65 Top 100 Montpellier-Béziers (2000). 
n° 3. après le débourrement auteur Véronique PAGNIER (je ne sais pas si on ne dit pas chez nous, et probablement par erreur, "débourrage" ?).

jeudi 9 mars 2017

LE MONDE NE DEVRAIT ÊTRE QUE CHANSON ET MUSIQUE... (3) / ratés existentiels

VOYAGE DES 1 & 2 mars 2017

Combien sont-ils dans cet avion, à trimballer des états d’âme ?
Laisser ainsi son pauvre papa avec qui il partage tant culturellement. « Cherche François Coppée » il a demandé dernièrement... des poèmes pris au hasard et d’une fraîcheur ! s’agissant d’un poète officiel plutôt catalogué académique. Et cette complicité, ces contrepèteries parfois salaces mais qui font rire surtout sorties en se défaussant, non sans malice, sur le fils qui l’en a instruit... « Une salade avec une belle escalope »... Ces musiques et chansons partagées, de l’opéra-opérette (1) au Pavarotti de la chanson napolitaine (2), occitanes ou bien françaises, sur Prague (4) et la campagne tchèque, du Brésil aussi, souvenir toujours vivant de  ce beau séjour de trois années, d’une époque où on prenait le paquebot, les lignes de l’Atlantique Sud ! 


Mais là, avec les intonations plus rauques de la "camisa negra", les accents moins dégrossis et enrobés que ceux du portugais "nordestin" (5), il s’en veut d’avoir en tête plus que le souci de son pauvre père. 


Cette Espagne qui le subjugue depuis toujours, depuis qu’il voit les Pyrénées de chez lui et autant son majestueux Mont Canigou enneigé que ses marges vaporeuses s’évanouissant dans la Méditerranée vers les caps Béar et même Creùs, cette Espagne cambrée d’une seguidilla (6) qui vous frôle et transporte rien qu’avec les yeux avant de provoquer et brouiller l’esprit de l’arrondi de son bras gracieux, arrêté, "bien parado", vers la grande fleur rouge du chignon flamenco, revient le perturber, presque le détraquer cette fois. 


Des flashs vieux de plusieurs dizaines d’années se sont rués en lui... Avec l’impression que les digues cent fois relevées, cent fois renforcées, les digues du Rhin et de ces Pays-Bas qu’il vient de quitter, ont cédé.
C’est qu’il a été perturbant ce séjour, oh non par rapport au père que cette paralysie a tant rapproché mais parce qu’il a redonné vie à un flot d’émotions jusque là refoulées dans le tiroir des souvenirs. Sédimentation apparemment morte et pourtant soudainement érigée telle la chaîne des Pyrénées qu’un documentaire expliquerait en accéléré !
Agréable d’abord avec cette ancienne camarade de classe qui le retrouve près d’un demi-siècle plus tard. Elle vit en Haute-Loire. Son mari est docteur. Avec les réseaux sociaux censés rapprocher les gens, les êtres, tels ces bulles dans un même verre de Blanquette de Limoux montent tous crever en surface, solitaires. La solitude en résultante du culte de l’individualisme exacerbé. Aussi, si quelqu’un quelque part, parce qu’il ne vous a pas oublié, prend la peine de taper votre nom, cela mérite d’être noté. Et puis, dans un placard de la remise il a mis la main sur une boîte en fer ouverte aussitôt reconnue, celle de son courrier avec des prénoms revenus faire défiler des amis et d’abord ceux des filles croisées alors. Souvent il fit semblant de ne pas la voir, cette boîte à biscuits et cette fois il l’a prise naturellement, sans l’appréhension de réveiller pour rien tout un passé. Malgré un temps de réflexion, tout revenait malgré le demi-siècle passé, frais, apaisé, sans nostalgie aucune. Chose étrange, sur cette boîte ouverte, pas une once de poussière ! Or rien de dérangé entre les signets regroupant un ou une même correspondante. des curieux dans ses familiers ? Ils n’ont jamais le temps de rien ! En commençant par le début, c’est la première lettre sortie d’une enveloppe ouverte, comme toutes les autres, au coupe-papier. Bien sûr, une foule de pensées liées aux souvenirs revient aussitôt à l’esprit.
Evelyne. Cette amie unique... Comment peut-on lier amitié avec une fille... c’est d’une chasteté aussi anormale qu’insupportable... Aussi il a longtemps cru l’aimer, seulement. Avec l’âge, il a compris. Avec son père propriétaire d’un domaine dans la plaine, Evelyne est en vacances du côté de Cullera, après Valencia. Ils ont fait un périple dans la montagne pour visiter leurs vendangeurs. Un chemin de terre, un pauvre village, une montagne déshéritée ; un accueil chaleureux mais des gens démunis. Un tel contraste avec l’opulente huerta dans la plaine en bas.
Et là, une image lui revient en boomerang, qu’il croyait effacée. Celle d’une petite vendangeuse espagnole, juste un échange du regard, un éclair...  

 

(1) Anna Netrebko « Meine Lippen sie küssen so heiß » de Franz Lehar https://www.youtube.com/watch?v=7tUq8Q_b8Lg
(2) Luciano Pavarotti « Turna a Sorriento »
https://www.youtube.com/watch?v=wbdM7yuNGYI
(3) Reda Caire « Si tu reviens »
https://www.youtube.com/watch?v=EfzFGQZtL08
(4) O. Kovář: Praha je krásná 
https://www.youtube.com/watch?v=CtiyNDo7AZA
(5) Ivon Curi - (Menino de Braçanã) Luis Vieira - Arnaldo Passos https://www.youtube.com/watch?v=OpPs8M6nYF0
(6) Comme l'Espagne et ses mythes s'offrent depuis toujours à l'Europe. Il suffit de regarder danser Anna Netrebko chanterait-elle en allemand !  

crédit photos : 1. Paquebot Alcantara juin 1953 Auteur François Dedieu
2. Pyrénées depuis Saint-Pierre-la-Mer perso
3. Danseuse de flamenco auteur Jpbazard 
4. Bacchus dans les vignes / tableau / Allan Österlind

lundi 6 mars 2017

LE MONDE NE DEVRAIT ÊTRE QUE CHANSON ET MUSIQUE... (2) / ratés existentiels

 VOYAGE DES 1 & 2 mars 2017


Impressionnante l’arrivée sur Amsterdam : des bateaux de haute mer à la queue-leu-leu pour remonter un de ces canaux aménagés qui, avec les bras innombrables de son delta font et défont, avant ses noces avec la Mer, la grandeur du Rhin. En face, de lourdes péniches. L’une d’elles vire vers le bord : le sillage le prouve. Faut dire qu’en face il fait son poids et ne semble pas disposé à ralentir. Où sont les troquets sur les berges, où les marins d’Amsterdam buvaient «... aux dames qui leur donnent leur joli corps...» (Brel) (1) ? On se laisserait aller avec le fleuve si le tunnel qui fait passer l’autoroute sous les gros bateaux ne rappelait l’énergie d’un peuple contre le harcèlement des eaux venues du sud butant contre la marée et les vagues de la Mer du Nord. 


Il a réussi un appel vidéo avec les siens. Après les banalités d’usage, il réalise qu’un certain voyage se matérialise par un changement de lieu : c’est ainsi que son père (2) s’est retrouvé sur las rajolos. Et dire qu’il a eu réclamé, et pas qu’une fois « Je veux aller par terre ! ». Et à voir sa mine réjouie, il est vraiment content d’avoir joué ce tour à ses proches et soignants ! « Y sios anat al décrochez-moi-ça !» (3) qu’il lui a dit, manière de rappeler un bon mot bien de son village. Tant pis si les pompiers ont foutu le rambal (du tapage) dans la rue avec la sirène (4) ! 
 Le voyage avant tout, c’est dans la tête.

Autre signe de bon augure, alors que l’avion, en plus des longues heures d’attente, des contrariétés habituelles dues aux retards et au cynisme commercial des compagnies, aux bagages perdus, cette fois c’est le 787 Dreamliner de Kenya et pas la grosse bétaillère de KLM... Vrai qu’elles ont toutes un air de fermières du temps de l'exode rural... les rombières bataves. Sa place est tout au fond. Personne à côté quand les portes se ferment. Sur le troisième siège un vieux monsieur maigre, fripé, petit, la personne à côté de laquelle on se se fait l’effet d’un Apollon. Sur son écran, il a mis les indications en français. Salutations. 

De nationalité belge revendiquée, pour se démarquer des Français. Il va à Nosy-Bé où il est marié. Il vient de passer quelques mois en Europe pour se faire soigner « Ça va mais il fallait bien... on verra pour la suite...» ajoute-t-il. Il poursuit « Je suis bien, pas loin de la plage et la belle-mère a les pieds dans l’eau... La vie est un peu plus chère dans l'île, rapport au nombre d'Européens mais nous sommes pas à plaindre... Je ne pourrais plus vivre avec une Blanche... Mais nous n’avons pas d’enfant... si tu en veux un que je lui ai dit, fais-le avec un Malgache parce qu’un métis ici est embêté tant tout le monde croit qu’il est riche... ». Mais quand il a dit son âge, 70 ans, ça l’a interpellé... a quatre ans près, il ne se voit pas aussi vieux. C’est qu’on lui donne facilement 85 ans ! 

Et pendant ce temps il tripote sa télécommande, l’écran tactile. Depuis quelque temps, il fait sans, les films, finalement... mais cette fois il a un besoin vital de musique, bien rythmée, n’engendrant pas la mélancolie, que les larmes lui viennent facilement aux yeux « C’est pas moi qui pleure, c’est mes yeux !» dit Galinette - Daniel Auteuil dans L’Eau des Collines de Pagnol. A l’aéroport il a trouvé « Tengo una camisa negra » (5), ce qu’il lui fallait, à passer et repasser en boucle manière de réviser un peu le castillan. Et en entrant dans l'avion, pas mal déjà, la musique d'ambiance... 

(1) https://www.youtube.com/watch?v=REKfgS1_A5I
(2) hémiplégique suite à un avc le 6 novembre dernier / « rajolo » au sens de brique dans l’Aude (Mistral, trésor du Félibrige), les tommettes de terre vernissée peut-être...
(3) attaque d’une mégère soupçonnant le mari d’être allé aux filles de joie et  venue l’interpeller au café devant tous les hommes présents. 
(4)  https://www.youtube.com/watch?v=SiIeI_iXu7o
(5) https://www.youtube.com/watch?v=kvEvATBiQ5U

samedi 4 mars 2017

LE MONDE NE DEVRAIT ÊTRE QUE CHANSON ET MUSIQUE... / ratés existentiels

VOYAGE DES 1 & 2 mars 2017

Entre ce qu’il peut ou ne pas dire, un moment fort avec en fond le sens de la vie, ce qui a été et qui ne peut plus être, une certaine permanence pour ses parents, ses enfants, la fragilité dans le temps pour la ou les femmes qu’il aime, celles qu’il a aimées, celles à côté desquelles il est passé, celles qui croisent encore sa route parce que son cœur reste jeune, serait-il tarabusté par la verdeur qui se fane... Merci, amis inconnus, de "l"’accompagner dans le voyage... c’est un essai... c’est plus facile d’écrire sur les autres et "il" hésite trop au point de ne vouloir l’écrire que pour lui... 


Tous ces amandiers fleuris qui marquent les talus ! Magnifique ! Entre le train en gare de Béziers à 11h 20, le billet de tram à prendre 1,60€, il arrive Place de l’Europe en même temps que la navette pour l’aéroport. A l’aller il avait apprécié l’amabilité du chauffeur. Cela se confirme alors qu’il se demande pourquoi à son volant il lui fait signe et stoppe la navette vingt bons mètres avant l’arrêt. « Je vous ai vu chargé, passez les valises par la double-porte au milieu ! » et avec le sourire en prime ! Hasard ou politique maison ? C’est appréciable en tous cas. Il  est passé devant tout le monde... c’est si idiot de faire ça sciemment... 
A l’aéroport, peu de monde à l’enregistrement, la petite vingtaine du bus. Pas besoin de sortir la carte d’embarquement téléchargée, le passeport joue les sésames. La conversation s’engage même avec l’hôtesse curieuse de savoir où il va :
« Que signifie le «DZA» de votre destination ? »
- Dzaoudzi à Mayotte...
- Je suis impardonnable, j’y ai été ! »
Ils vont même parler des problèmes de l’île : il n’y a personne derrière. Grâce à l’internet on peut choisir sa ou ses places. Pour le vol à travers l’Afrique il a pris la 36 D complètement au fond. Besoin de se mettre en retrait, tenter de faire le point, blackboulé entre un passé fermé, un futur étriqué, des amours mortes qui pourraient renaître, ou ressuscitées qui pourraient remourir, ou vivantes ou qui n’en ont que l’air, autant de constructions mentales peu, mal partagées, ou trop bien, ce qui n’est pas mieux. Plus abrupts mais plus mesurables, les sentiments filiaux ou paternels pour des parents qu’il faut quitter, un fils qu’il veut retrouver. L’analyse est dure et quand sa difficulté dissuade, sa « camisa negra (1) » chante ses amours dans sa tête, sentiments et attraits physiques mêlés, avant que les devoirs, naturels sinon sociétaux, ne reprennent le dessus.   
Dans le KLM, un Airbus il ne sait plus quel chiffre, la présence des passagers est contrôlée par tablette. Un jeune a perdu sa carte et le personnel de cabine tient à mettre chacun à sa place. Un que je connais trop bien dit sans détour que le fond de l’appareil est vide. La rombière en uniforme bleu barbeau (les bleuets de la Clape sont plus bleus !) répond qu’on verra après. Je suppose que c’est pour ne pas salir et ne pas impacter le service. 
Décollage vers les Cévennes. Vent peu établi, peut-être d'Espagne : au sud de l’Étang de l'Or, les flamants se tiennent contre les sénils. 


Petite crêpe salée fourrée, variante d’un sandwich venu d’ailleurs. Très bonne à son avis. Une Heineken, d’origine. 


A part le Ventoux et une ligne imprécise de la chaîne alpine enneigée, plus rien de visible avant la descente au-dessus de la Mer du Nord. Plages des Flandres avec des maisons juste derrière une ligne de dunes si fragiles vues d’en haut. « Ay Marieke, Marieke je t’aimais tant... (2)» chantait Brel avec qui j’imagine les blés, bleuets et coquelicots de son plat pays :
«... Zonder liefde warme liefde – / Weent de zee de grijze zee –
Sans amour la chaleur de l’amour / Se lasse la mer la grise mer...»

(1) https://www.youtube.com/watch?v=kvEvATBiQ5U
(2) https://www.youtube.com/watch?v=jalwU5D8Kag

crédit photos : 3. Flamants roses avec La Grande-Motte au fond. Auteur probable Fred.th
4. De Panne, la plage par un beau jour d'hiver, auteur MJJR.