samedi 25 janvier 2020

LE FLEUVE et LE RUISSEAU / Lettre à un ami / Fleury-d'Aude en Languedoc.

"L’entendez-vous, l’entendez-vous
Le menu flot sur les cailloux ?
Il passe et court et glisse
Et doucement dédie aux branches,
Qui sur son cours se penchent,
Sa chanson lisse..."

Rebonjour l'ami. 
Ah ! tu ne veux pas que je te dise pourquoi je t'ai dédié le début de ce si beau poème ? Tu es pris par tes recherches en généalogie... A chacun ses marottes... A moi les miennes. Alors je te le dis tout de go parce que ça m'est venu comme ça... C'est sûr... je ne suis pas seul dans ma tête... 

D'abord le prénom de l'auteur, Émile, est-ce un hasard m'adressant à toi ? 
Ensuite, en bas de chez toi, parce que tu appartiens à la Pagèze, tu es de ce refuge de paysans, la racine du nom en atteste, et que tu l'as payé de ton sang, encore une fois cette année, les flots grossis et limoneux de l'Aude, petit frère du Rhône et de l'Ebre, excusez du peu, mais rivière de nos cœurs avant tout, tu sais que mon pseudo est "carabène", l'Aude donc, me fait penser à toi, serait-ce a contrario.
Bien sûr que son flux mugissant porteur de bois et de troncs flottés ce n'est pas toi. Et tu es complètement étranger à la violence de ces radeaux poussés qui ondoient de plus en plus fort jusqu'à se briser dans les vagues furieuses de la mer. Même la télé d’État plus que publique l'a montrée hier soir aux infos ! Laisse-moi imaginer que la rivière te souhaite un anniversaire à sa façon : ça gronde ça meugle, ça gueule, ça dégueule, en prime, une masse de déchets sur la plage ! Ce ne peut être toi ! 

            





Alors quoi, pourquoi cette inspiration ? Même s'il faut la prendre de la part d'un cabourd, d'un inoucent ne contrôlant pas ce qui pétille, crépite ou explose même dins lou cap, ça dépend du moment, tu n'es pas de ces braillards qui veulent à tout prix s'imposer à la cantonade. Non, tu es un menu flot glissant sur les herbes et les branches. Aujourd'hui parce que tu fais tes ans, tu es "Le Chant de l'Eau" d’Émile Verhaeren. Tu es ta petite voix qui comme toutes les vies nous dit la vie qui défile. La tienne se décline depuis ton belvédère sur la plaine et les marais, sur la rivière qui part se mêler à la mer. Tu es un pays à moi. Et ta chanson lisse est si précieuse pour un pays qui passe, qui s'efface, trop peu loquace... Chut, que je l'entende sans plus faire un bruit, comme pour un froufrou de mésange, un babil d'hirondelle. Légère, sobre mais si pleine de sève à côté de ce rien mortifère dont le vide galactique porterait l'écho. On dit que l'internet rapproche, que le réseau serait social mais est-ce cela le partage, au mieux juste un dixième de seconde pour un clic, un "j'aime" sec, trop vite dit pour être entier ? Personne, pas un, pas une pour demander la fin du dernier affluent, tu sais, le ruisseau du Bouquet qui rejoint l'Aude en bas du promontoire ultime de la Clape, ce balcon que tu connais trop bien. C'est comme pour la traduction du poudaïré... Vivre à cent à l'heure ce doit être synonyme de "s'en foutre". Et puis est-ce vital de ne pas laisser le passé se mourir ? Maï que tabes m'en fouti puisque j'écris pour me faire du bien et que c'est nécessaire à ma vie. Je n'irai pas plus loin sur ces voies d'un plaisir solitaire que je voudrais solidaire... 


Oui, tu n'es pas l'une, tu es l'autre. Jamais tari, tu es comme le ruisseau du Bouquet. Ne m'oppose pas qu'il n'a plus d'eau parfois si la sécade de l'été se prolonge. On le croirait mais je me suis souvent arrêté sur le dos d'âne du dernier petit pont, en juillet et en août justement, ravi d'un filet d'eau toujours en vie, ne manquant jamais de tirer une petite photo. Comme toi il réapparaît par endroits grâce à quelque résurgence... Parce que l'eau de nos collines ne manque pas, parce qu'il cache un secret qui aurait même plu à Pagnol, notre dernier affluent. Un secret, que dis-je, des secrets, mais finalement je sais garder ma langue aussi, alors je me le garde aussi le dernier épisode... Des secrets comme dans le poème d’Émile Verhaeren riche d'une suite trop longue... ce qui arrangeait nos maîtres. A l'époque, la présence de Mélusine était trop belle pour être expliquée. Mais l'évocation nourrit l'imaginaire et cela n'a rien de frustrant de n'avoir rien su, alors, du mystère. Il faut un temps pour tout.
En attendant je sais que ton petit filet de voix vient de temps à autre embellir et mes écrits et mes pensées, renforçant le lien bienveillant et amical, un fil vrai d'une toile géante mais peu consistante, qui se dérobe, fuyante,  ... 
Ne m'en veux pas si je me trouve en te cherchant... ou si je me cherche en te trouvant... 
Bon anniversaire l'ami ! Bon anniversaire Émilien !    


mercredi 22 janvier 2020

LO PODAIRE, sermon de l'abbé Josep Salvat, 1927 / La taille de la vigne.

 
https://rivelpatrimoine.fr/liens/hebergement/


Abbat Josep SALVAT, felibre majoural

"LO PODAIRE

... Estropat, botonat, jol vent de Cèrs que fa blincar las pibolas e los sauzes de las randuras, lo vinhairon s’enva cap à sa vinha ont, i a dòs o tres mezes s’auzisiàn las cansons e los bascalals dels vendemiaires. Las vizes, acatadas, d’unis còps agafadas à la tèrra, pòrtan  encara, d’aqui entre aqui, qualquas fèlhas mièjas secas que ‘al mendre fregadis, tomban e van rejunhe las autras dejà gaireben poiridas. Lo vinhairon agaita son plantièr, pèi emponha los cisèus podaires, e, soca aprèp soca, fa tombar sens piétat aquelas vizes qu’èran, i a pas gaire, cargadas de bèlis razims. Qu’es trista a veze, la vinha, quand, pel sòl, sus la tèrra freda s’espandis un lèit d’iserments, e que las pauras socas, escapitadas, laisan veze lor pèd nozut e torsit. Lor demòra plus res de lor anciana vestidura. Lo podaire, sens se trebolar, sens se retirar, seguis la tièra.
Mèmes, se la soca se metià à li parlar, se trairià pas de son trabalh. A pas debrembat lo reproverbi que dis :
Se podas long
Beuràs un an
Se podas cort
Beuràs totjorn.
E el poda cort, poda ras. Lèu vendran las isermentairas que, amasant e torsisent las vizes copadas, ne faran de gabèls..."

La suite, le pendant de la parabole imagée du poudaïre tiennent d'une vision presque mortifère de la religion. Le croyant doit souffrir, la souffrance rapproche de Dieu ! Une vision qui nous ramène peut-être au temps de l'arc roman, de la nef obscure et de la foi soumise, menacée par les flammes de l'enfer pour l'être déjà coupable d'être né.
Pourtant l'abbé Salvat est notre contemporain, du moins de ceux de mon âge. Prêtre audois né à Rivel, le pays des comportes et des sonnailles, en 1889, il est décédé à Surba, presque dans le même coin (Ariège), en 1972. Il est surtout connu en tant que poète et défenseur de la langue occitane. Ce sermon de 1927 n'est pas, je l'espère, du même ton que les deux-cents autres dont il s'est fait une spécialité... Pardon de n'en rien savoir. Quoiqu'il en soit plutôt les grands vitraux gothiques ouverts sur la lumière de la Joie qui demeure qu'un ascétisme que même les Cathares n'encouragèrent pas. Quant au stoïcisme... 

Moines abbaye de Fontfroide Wikimedia Commons Auteur JPS68 via photoshop

Prolongements :

1. Ma proposition de traduction est disponible sauf que, ne voulant pas prêcher dans le désert, j'attendrai d'avoir un minimum de 20 lectures pour la livrer.

2. Sans que cela ne permît de spéculer sur mes croyances, ma perméabilité mystique, je me dois d'accepter l'enracinement des Européens dans un fond non seulement judéo-chrétien mais aussi antérieurement animiste. C'est dans ce cadre que le sermon du poudaïré est digne d'intérêt. L'effort de réflexion et de mémoire m'amène à le rapprocher avec d'autres sermons évoqués sur ce site :

Corbières Mystères (V) / le sermon d'un curé célèbre (8 mai 2014)... à savoir celui de Cucugnan. 
"Le sermon difficile" du curé de Melotte par Louis Pergaud (Les rustiques) (30 mai 2014). 
Encore un sermon qui vaut le déplacement, par le curé de Sorgeat sous le col du Chioula (Ariège) (12 mai 2014). 




jeudi 16 janvier 2020

AURIO CAUSIT UN POUDAÏRE. J'aurais choisi un tailleur (fin) / un océan de vignes..

Diplotaxis fausse rouquette commons wikimedia auteur Jean Tosti Thuir 2005
"Rien n'est plus vivant qu'un souvenir." (Federico Garcia Lorca). 
La scène demeure gravée : RN 113, après Montagnac, un routier, les grands pins d'un domaine puis deux vallonnements en ligne droite. Le vent fait courir des petits nuages qui estompent par moments les rayons blafards de janvier, déjà obliques en ce début d'après-midi. A droite une allée de mûriers dépouillés mais qui toujours rappellent le nourrissage des vers à soie que nous nous amusions, enfants, à élever. Mais comment voir tout ça alors à 90 à l'heure (1), et qu'il y a un véhicule à doubler malgré les montagnes russes. 


A gauche, des vignes, un tapis d'erbo blanco entre les rangs et au bout d'un fouillis de sarments nus et entremélés, entre l'embroussaillement et la géométrie épurée des ceps alignés, jalon entre le travail fait et celui à faire, mon poudaïré. Vers quatre heures il va rentrer au village avec des souquets (2) pour le feu, avec des poireaux sauvages pour la vinaigrette. Sur la plaque de la cheminée la cafetière l'attend. Sa cuisine est rustique mais pour moi qui vais par force vers l'appartement au chauffage central, le café à la chaussette, même la fumée douceâtre des souches me coûtent trop... Du Bellay regrettait "... Quand reverrai-je hélas, de mon petit village, fumer la cheminée..." et ma gorge nouée ne laisse plus rien passer

Alors plutôt que le côté accompli des vendanges, celui des fleurs en juin comme autant de promesses, celui des matins calmes et sans vent  pour saupoudrer les pampres de jaune ou les atomiser de bleu (3), j'aime beaucoup le temps de la taille, "le geste auguste" (4) du poudaïré qui, dans l'art de former en gobelet, projette et son être et chacune de ses souches, huit, neuf mois plus loin. Après avoir attendu qu'en échange des tons chauds de l'automne, les feuilles aient rendu sucre et protéines aux racines, pour déjà anticiper le renouveau à venir, il s'échine, pied après pied, dès que la palette colorée se fond dans les bruns du vieux bois et de la terre. 

"... On sent à quel point il doit croire
A la fuite utile des jours..." (4) 

Si digne dans la persévérance, le respect de la nature, humble comme les paysans d'un tableau de Millet, à la merci des éléments, bien que tenace, il se sait si petit et insignifiant dans l'Univers en marche. Comment ne pas sentir que cette sublimation en appelle à un Créateur protecteur ? 

Calendula arvensis. Le souci des champs ou sauvage est, entre autres bienfaits, réputé antibactérien, anti-inflammatoire (fleurs), antitumoral. Les feuilles sont diaphorétiques (stimulent la transpiration), On la consomme depuis longtemps en salade. Ses fleurs, très mellifères, résistent au gel ; séchées elles servaient à colorer le beurre ou le fromage.

Et puis, malgré les gris et les bruns, l’hiver en Languedoc, c’est déjà, dans le ciel, la lumière revenue du solstice. Le soleil a fait fleurir l'erbo blanco et le petit souci jaune ou orangé. Et qui sinon le poudaïré, pour annoncer par tout le village le premier amandier en fleur, le printemps qui ne saurait tarder (5) !
"Printemps tu peux venir !" Théophile Gautier
Si Jean Camp, homme de lettres, sallois de naissance, s'appropriait, pour fêter Noël, Jésus en vendangeur :         

"Bèl Nadal, me fas rebastraire
Se lo Bon Dieu m'avia causit
Auriai volgut faire, pecaire,
Davant lo monde estabosit,
De nostre Sénher, un vendemiaire
Se lo Bon Dieu m'avia causit."(6)

... Moi j'aurais mis un santon de plus dans la crèche. En plus du vigneron et de la vendangeuse, j'aurais choisi un poudaïré, encore un peu penché sur sa souche nue et tordue !  
Et quand nous invoquons Ferrat, Lorca, du Bellay, Hugo, Gautier, tant de poètes, c'est seulement que le poudaïré a ajouté son couplet au chant du Monde. 
 
(1) la limitation date de 1974 je crois...
(2) le bois mort ou éliminé pour favoriser la charpente de la souche. Le rasséguet, une petite scie portative que le poudaïré porte à la ceinture, est utilisé à cet effet. 
(3) soufre et sulfate de cuivre.
(4) Le semeur, Victor Hugo.
(5) premier amandier signalé sur Narbonne le 5 janvier (du mimosa aussi).
(6) Déjà traduit dans un article antérieur

AURIO CAUSIT UN POUDAÏRE (J'aurais choisi un tailleur ) / un océan de vignes...

"J'aurais choisi un tailleur." Oh que ce terme trop générique me rebute, entre le tailleur des dames, Coco Cha... non pas Chacha (1) qui en a poudé lui, tant et tant de pieds (et qu'on salue avec tous nos vœux en ce début 2020), celui des costumes, celui des diamants, celui des pierres, du temps des cathédrales et aujourd'hui des cheminées peut-être encore... 

"Tailleur", un produit typique de la langue d’oïl, issu du latin "taliare" signifiant couper. 
La branche des langues romanes, par contre, a gardé une autre origine latine, à savoir "putare" tailler. On la retrouve, d'est en ouest, dans l'italien "potare", le francoprovençal et dauphinois "pouar", l'occitan "poudar", le catalan "poda" (la vinya), le castellan "podar" (las cepas, les ceps, les souches), le portugais "podar"(a videira, la vigne)

Livre sur le canton de Coursan / Opération vilatges al pais / dirigé et mis en œuvre par Francis Poudou (2005).

"Poudar" c'est donc tailler la vigne ou d'autres arbres. La racine "pouda" a servi pour désigner les outils nécessaires à ce travail avant l'usage généralisé des ciseaux à tailler. Il s'agissait avant tout de serpes dont la "poudo"ou "poudadouiro" à double usage, à lame courbe d'un côté et à talon tranchant (comme une hachette) de l'autre (2).

 On ajoute un préfixe "es-" au moins privatif sinon qui rabaisse ainsi qu'un suffixe "-asse", une insulte à lui tout seul : cela donne "espoudassar" signifiant dans le meilleur des cas "élaguer" et négativement "débarrasser expéditivement, bâcler la taille". 
Cet "espoudassage", cette prétaille a néanmoins pu se faire pour faciliter au préalable le passage de l'homme de l'art confronté à un impératif de temps, le nombre de ceps à tailler à forfait s'avérant difficile à tenir avant que la végétation ne redémarre (avril en général mais parfois au début du mois sinon fin mars !).   

Taille de la vigne Author Véronique PAGNIER (on dirait presque la route entre Coursan et Cuxac...)

E lou qué poudo es lou poudaïré ! Je traduis : celui qui poude c'est le poudaïré. Sûr que ce travail, certainement des plus prenants après les vendanges, de fin novembre à fin mars en général, méritait un vocabulaire exclusif. 

Exclusif, le mot est lâché ! Pour avoir ressenti un rapport charnel avec la vigne, un ancrage qui me trouble encore aujourd'hui quand il ne m'exalte pas si je reconnais le vert des feuillages n'appartenant qu'aux vignes, même hors de notre balcon méditerranéen, qu'est-ce que j'ai pu l'envier le poudaïré lorsqu'à la fin des vacances de Noël je devais reprendre la route de Lyon !

"...  Ils quittent un à un le pays
Pour s'en aller gagner leur vie
Loin de la terre où ils sont nés..."  
 


Pourtant je n'en rêvais pas "de la ville et de ses secrets", le formica on l'avait pas loin, à Quillan et le cinéma Balayé, derrière le tabac de madame Zan, à Fleury même. Alors monter à Paris répondait à des motifs plus vitaux. L'exode a été plus brutal pour ceux du plateau ardéchois et "La Montagne" (1964), si belle chanson de Ferrat, marque de son sceau nos années 60. 
Sinon, c'est vrai, la vie en HLM, le poulet aux hormones, mais par force, souvent pour des fins de mois difficiles quand on débute, sûrement pas de gaieté de cœur et à des lieues "... d'attendre sans s'en faire que l'heure de la retraite sonne...". Ce serait être vieux avant l'âge, à 20-25 ans, que de penser déjà à la retraite ! 

Il n'empêche, plutôt que de relever le positif de la situation, moi, égoïste, j'en avais gros sur la patate. Le long de la nationale, au moins jusque dans le Gard, la vue du poudaïré penché sur une souche pas encore en âge de pleurer, me mettait mentalement au bord des larmes. Pourtant, malgré le col relevé de la canadienne et le bonnet, ce sont ses yeux à lui que le vent du nord (3) embrouillait.(à suivre)


(1) qui pour relever lous escaïssès, les surnoms, comme le fit Henri le mécanicien à l'époque ?  
(2) le "poudet" est la serpette à vendanger, un couteau à lame courbe encore utilisé dans les années 60.
(3) après Béziers, ce vent peut s'appeler "tramontane". 

mardi 14 janvier 2020

LE VOLCAN sous-marin au large / MAYOTTE EN DANGER


https://fr.wikipedia.org/…/Volcan_sous-marin_au_large_de_Ma…

"...L'IGN a aussi noté que l'île se déplaçait vers l’est à la vitesse de 14 mm/mois, tout en s'affaissant légèrement (environ 7 mm/mois, mais déjà 13 cm en un an), ce qui évoque un phénomène sismo-volcanique..."

"...En mai 2019, la campagne scientifique « MAYOBS » révèle l'existence d'un volcan de 800 m de hauteur situé à 50 km à l'est de Mayotte, à 3 500 m de profondeur, formé en moins d'un an à partir d'une base de 4 à 5 km de diamètre..."

"... Le lundi 25 juin 2019, à l'occasion d'une conférence de presse, on annonce qu'une coulée de lave a été localisée au sud du volcan sous-marin de Mayotte lors d’une nouvelle mission scientifique9. Cette coulée de lave s'étendant sur 8,71 km2 et représentant un volume de 0,2 km3 est, selon Marc Chaussidon, directeur de l’Institut de physique du globe de Paris, « l'une des deux plus importantes éruptions de type basaltique de ces 500 dernières années »..."

"... En octobre 2019, l'enfoncement constaté de l'île de Mayotte en raison du phénomène de vidange magmatique est de 15 centimètres, ce qui provoque un début de submersion des résidences les plus proches du rivage et entrave l'évacuation des eaux usées et un début de réflexion sur l'opportunité de relocaliser plus en altitude certains quartiers... "

Comoros_location_map_Topographic Wikimedia Commons Auteur Dr Brains

mercredi 8 janvier 2020

LOTO D'ANTAN, LE VRAI (4) ! / Fleury est mort ! Vive Fleury !

– … "Soixante-neuf", le tête à queue (disait-il ça à une époque toute en non-dits et encore prude?)… "vingté-un"… "quatre-vingt-huit", les deux carbasses… "quatre-vingt-dix", lou papéto !
– Là ! le "quatre-vingt-dix" arrête ! Mais un deuxième cri, comme en écho a aussi arrêté, dans une autre salle. Des joueurs résignés ont déjà démarqué mais en la circonstance les cartons sont bien bons. Les gagnants devront partager le lot par tirage au sort

Loto pixabay photo gratuite

Même sans l'ordinateur, les innombrables possibilités mathématiques font qu'il ne doit y avoir qu'un seul gagnant mais à condition que tous les cartons soient en jeu... Et nous combien sommes-nous ? Un beau loto se déroule dans les deux cafés : Billès et Mestre (Tailhan jusqu'en 1960). Et l'apogée avec en plus la salle des fêtes, grâce à le fée électricité et son servant Marcel ! Alors combien de personnes ? Combien de cartons ? 1000 ? 1500 ?
Et qu'est-ce qu'on n'entend pas chez les autres si le même établissement compte plusieurs gagnants de suite où si le sentiment qu'on a plus gagné ailleurs domine ! 

  
loto pixabay photo gratuite auteur Angelawilde
S'ensuit, dans une atmosphère de plus en plus enfumée, un joyeux brouhaha de cartons qu'on débarrasse ou dont on se débarrasse parce qu'ils « porteraient la masque » (la poisse).
Le loto du Fleury-Olympique se poursuit avec les heureux, les « claoufits », félicités par les déconfits. A l'heure de se quitter, lors de la consolante dotée d'une bombe glacée, tout le monde aura passé une bonne soirée, avec jusqu'au bout l'espoir « dé gagna quicon », de gagner quelque chose. Les plus friands seront au fait des dernières nouvelles, du plus frais potin. Certains auront reconnu un visage depuis longtemps parti pour ailleurs, souvent pour Paris mais revenu pour un congé.
Finalement, le nommeur, la voix, le récitant, l'annonceur, l'appariteur irremplaçable fait la réclame pour le samedi à venir. Les gens rendossent le manteau et sortent ; sur les tables dérangées, un couple économe récupère le maïs pour les poules. Dehors, la troupe se disperse, les gagnants soulèvent volontiers leur lot avec un plaisir non dissimulé :
«   Diaétou ! i polit aquèl cambajou ! Peso quicon ! (bon Dieu, il est beau ce jambon ! Il pèse quelque chose !) »
Il fait froid vers minuit et miège. Chacun se hâte vers sa maison d'autant plus pressé qu'il rapporte quelque chose. « Quaucun » veille peut-être encore près du feu sommeillant et puis il fait encore bon avec les braises qui couvent sous les cendres et qui reprendront dans quelques heures avec la dinde des fêtes à la broche, illuminée des flamèches de lard tombant goutte à goutte du flambadou ! 

Saint-André-de-Sangonis La tour de l'horloge - Archives départementales Hérault Autor Froment photographe

Dans Caboujolette, mon père précise. Il a même retenu ce qui se disait à Saint-André-de-Sangonis où il fut précepteur au château du jeune comte Maxence Worms de Romilly, alors âgé de quatorze-quinze ans (j'ai joint quelques expressions de Sigean, d'Olonzac) : 

"... Je te mets quelques tournures accompagnant les numéros tirés au loto des cafés, soit en occitan, soit en français :
1. lou prumièr de milo (le premier de mille),
2. « dous » coumo de mèl (doux comme du miel) ;
3. la cargo y és (du temps où 3 enfants, sans allocations familiales, représentaient une lourde charge pour le ménage. A Sigean " la guerro i ès ". A Olonzac " bal pas rès ") ;
4. le bigorneau (allusion à la petite enclume à 2 « cornes » des orfèvres) SADS (= St-André-de-Sangonis). A Sigean "vaï t'en té battré ". A Olonzac " se cal battré "
5. Toute la main ; à Sigean "as tapins", à Olonzac "l'Alzino". 
6. la queue en l’air, « le vigoureux » SADS (Saint-André-de-Sangonis) ; à Olonzac "d'aïci ?"
7. la pigasso (la hache) ; à Sigean "la pigasso sus eun sause", à Olonzac "sus un sauzé" sous-entendant "la pigasso". 
8. la carbasso (allusion à la calebasse, qui a bien cette forme vue de profil) ; à Sigean "la carbasseto", à Olonzac "la gourdo" (qu'es pas déma). 
9. la queue en bas, « le Honteux » (avec H bien « aspiré » !) SADS ; à Sigean "loubiou var", "cueuro l'iou", à Olonzac "tout noù". 
10. dis..putez-vous, à Lespignan « De qué dis ? », à Olonzac "la crouts". 
11. zonzon (est-ce une femme molle et insouciante ou une sorte d’onomatopée ?), à Olonzac "las cambos de Calhol". 
13. ma sœur (Thérèse) ; quel âge a-t-elle ? (Le tirage suivant donne la prétendue réponse). Une remarque sur le n° suivant : « Es jovenoto ! » « Macani, qu’es vielho ! » selon le cas.
14. Je crois qu’à SADS ils disaient « la clique de Gignac », mais c’est très local. A Sigean "l'homme fort", à Olonzac "l'omé fort". 
15 ?
16 (toujours bien répété pour ne pas confondre avec 13) ;
17. dozosèt (dix-sept. Un dans le public, qui a sans doute le 18 ou le 19 : « Dozo totjorn !! » (dix… encore !!). A Olonzac "lou boun legun (la gato cagabo y ténios lo lum et sentissios lou parfum)". 
20. Sans eau ! A Sigean "sans aïgo". 
22. les flics ; à Sigean "las dos poulétos", à Olonzac "lous auquetos". 
23.- 24 – 25 – 26 – 27 – 28 ;
29. A Sigean "San Miquel"
30. le Gard (entendu à Fleury) ; à Sigean "(trempo) la soupo".
31. Toulouse (id.) 
33. A Sigean "la musiquo de Sigea", à Olonzac "lous dous boussuts".  
34. nos voisins (id.)…
36. A Olonzac "las très doutsènos". 
44. A Olonzac "las dos quadièiros". 
50. A Sigean "lou quintal". 
55. A Olonzac "las dos Alzénos", "bitor de fil", "ame soun païré"
66. Perpignan (id.), à Olonzac "las dos coquilhos". – 67 – 68 ;
69 tête-bêche? A Sigean "cap et tioul", à Olonzac "coussi qué lou biré". 
70. A Olonzac, "se tampo"
71. A Olonzac "l'annado de la guerro".  – 72 – 73 – 74 ;
75. Boum-boum – 76 ;
77. las dos pigassos – 78 – 79 ; 
80. A Sigean "(quatre bious) qué pourtaboun un mort, amaï y escapet", à Olonzac "quatre biùsporteroun un mort et maï lou toumberoun". 
83. A Olonzac "quatre ventrés, n'eï prou d'un". 
88. las dos carbassos (les deux citrouilles) ; à Sigean "las dos carbassetos", à Olonzac "las dos gourdos". 
89. la maméto ; à Olonzac "la revouluciù". 
90. lou  papéto. A Sigean "lou biel papet", à Olonzac "lou bielh papa".  

" Tu vois : je n’avais pas grand-chose à ce sujet. " 
— Mais si papa, d'autant plus que je viens de trouver (déc 2022) sur la revue Folklore, un article de 1939 " ... voici les rimatoires du jeu de loto, à Sigean et à Olonzac, d'après nos délégués, MM Vals et Laurent Mathieu... / ...M. Vals fait suivre sa communication sur Sigean de la remarque suivante : « ­Ces expressions patoises ne sont, presque toutes, que la traduction d'expressions autrefois employées dans la marine où le loto était fort en honneur » 
En remarque de fond, dans le cadre d'une telle communication, l'utilisation de la graphie normalisée serait des plus utile et efficace puisque, en transcrivant, il est difficile de ne pas écrire dans sa version locale, ce qui oblige, par respect de nos locuteurs, à une grande concentration sur pratiquement du mot à mot.    

Il n'empêche, c'est loin d'être du "pas grand-chose" avec même un petit détail sur Lespignan ... Les variantes devaient être aussi diverses et nombreuses que les localités où s'organisaient les lotos... Et pas besoin d'aller plus loin que le village à côté...




 


jeudi 2 janvier 2020

"SOUKOUSS" à Mayotte / le volcan

A 19 h belle secousse sismique à Mayotte, certainement bébé volcan qui se réveille et grandit d'un coup sur le plancher océanique !


source RéNaSS

LOTO D'ANTAN ! LE VRAI (3) ! / petite chronique des fêtes d'alors !

– On a crié. Ne démarquez pas ! commence alors la vérification méticuleuse des numéros sortis. La quine (1) est bien bonne ! La gagnante est Marthe Coural, n'oubliez pas le camionnage (2) ! Vous pouvez démarquer. La partie continue avec une dinde, toujours à quine.
S'ensuit un joyeux brouhaha de conversations et de cartons qu'on débarrasse. 
L'appariteur remise ses boules au fond du sac. Il mélange longuement en prenant soin de bien secouer devant le micro. Le tirage reprend. Quelques « Allons ! », quelques « chut » appuyés incitent à la concentration :
– "Eun", lou premier de milo… "quarante", a coustat de Creuzy (3), "vingte-neuf"… "quatorze"…, "cinquante-quatre", "cinquante", "quatre-vingt-neuf"…
– Là ! coupe un cri sec et décidé : c'est la mameto, le 89, qui a arrêté le jeu…
– On a crié, ne démarquez pas. Et après vérification : la quine est bien bonne, le gagnant est monsieur Trastet, n'oubliez pas le camionnage. 

Pavo desplumado por Francisco Goya (entre 1808 and 1812) wikimedia commons Domaine public. Il manque juste le plumet autour du cou sinon c'est comme ça, avec la tête, que les volailles étaient proposées... 
– Macarel ! aro que l'ei croumpado, la pioto… Trastet se plaindrait d'avoir déjà acheté la dinde (4)…
– Aco rai, as qu'à la bailla ! (Ce n'est pas un problème, tu n'as qu'à la donner !) la réplique est partie du tac au tac !
Au fur et à mesure que la soirée se poursuit, les lots deviennent plus importants avec un jambon, deux pintades et trois kilos de langoustes à carton plein accueillis par un grand "Ah !" admiratif.
– "Sept" la pigasso… "trente-deux"… "dix-sept, diso-sept"… "soixante-six", les P.O… "soixante-huit"…"vingt", sans eau… "trente-trois", docteur… "vingte-deux", les cognes (5) (les flics, c'est plus tard, les keufs c'est pas chez nous !)… "cinquante"… "trois" dans l'Aube…
– Remeno ! Un joueur ne marquant pas assez à son gré demande expressément au nommeur de remuer le sac. Ce dernier s'exécute sans façon (6).

(1) " quine ", ligne de cinq numéros dans le Midi ; du genre masculin mais toujours tourné au féminin. 
(2) La tradition veut que le gagnant donne la pièce au coursier qui emporte le carton et rapporte le lot gagné. 
(3)  Quarante « à côté de Cruzy », un village voisin de Cruzy et ses vieux platanes (mais qu'ils sont beaux nos villages... suffit de vouloir voir !
(4)  L'avantage du partage, d'être au moins deux : mon père reprend plus précisément ce souvenir « Quelle peste ! La femme en a acheté une ce matin ! » 
« Là ! Qu’uno pèsto ! La fémno n’a croumpat uno aqueste mati ! » Réflexion de Coural, le beau-père de Marthe,
C’est Pistole qui lui avait répondu « Quand él gagnèt, et qu’i diguèroun de baillar la pioto, respoundèt souloment "Ta gran(d) !" réplique trouvée aussi en espagnol : ¡Cuéntaselo a tu abuela ! (qu’on peut traduire par « à d’autres ! »).(Pistole répondit « Quand il gagna et qu’ils lui dirent de donner la dinde, il se contenta de répondre “Ta grand” »… « Apporte-ça à ta grand-mère ! », en français ou en espagnol).
(5) en tant qu'hirondelles, la pèlerine et la bicyclette, ils étaient plus appréciés...
(6)  Titato fut « nommeur » en occitan, sauf en quelques occasions, quand il nomma en français, « rapport aux étrangers » (des Parisiens !) Lou Ménot fut longtemps attitré à ce poste.
« Remeno !
– Pot pas, és trop gros ! »
(Jeu sur les sens du verbe remuer : remuer quelque chose et se remuer. Un joueur mécontent crie au nommeur de remuer les boules dans le sac. Un plaisantin répond qu’il est trop gros pour se remuer !)

Dinde de Noël en Aveyron Wikimedia Commons Auteur c.hug / Ho ! elle pèse plus de 15 kilos celle-là !

mercredi 1 janvier 2020

BOUNO ANNADO 2020 !

Juste le zoom et un contraste plus marqué sinon le Canigou si altier aime autant rester discret et à peine visible à l'horizon, dans les limbes. Photo prise en février 2017 depuis les terres de Saint-Louis, non loin de la plage, aux Cabanes. 

Languedociennement parlant, j'ai la foutue manie de dire "sioguessen", sûrement pour la sonorité de l'imparfait du subjonctif, or, sauf erreur, c'est le présent qui devrait être utilisé, question de sens et non de logique grammaticale... 
... "pla granado", avec de bonnes récoltes de grains alors qu'avec la monoculture de la vigne la granado, les grains de raisins à terre et perdus, était à éviter. 
"... pla acumpanhado" bien accompagnée avant tout de santé !

Pas tant de pletis, pas tant de plaît-il ! Si on n'y va pas, au loto, on ne gagnera pas plus la langouste que la pioto, que le cambajou et le filet garni ! (la dinde, le jambon e lou fialat garnit)