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jeudi 7 novembre 2024

« Un LANGUEDOC dans une FLEUR d'AMANDIER », présentation suite.

Présentation de « Un Languedoc dans une fleur d'amandier », « SUD, C'EST ÇA ! I » modulée dans le cadre  d'un concours... le lundi 4 novembre, le mot imposé était « rouille ». 

Tout serait dit ou presque sur cette exploration dans le temps, ce menu humainement géographique, sociétal, ce ressenti subjectif des jours qui nous poussent vers la sortie, cette trajectoire humaine de la poussière au forgé, du forgé à la rouille, de la rouille à la poussière, s'il n'y avait ce coin de Terre qui nous a fait sien. Qu'on y soit né, qu'on y ait ses racines, qu'il soit adopté quelles qu'en puissent être les raisons, qu'il ne soit pas unique, il y a un endroit qui nous touche plus profondément, dont nous faisons partie et qui est en nous. Pas plus tard qu'hier, un post s'est proposé sur la Meuse, les Ardennes, marquant cet attachement compréhensible et hors norme à la fois ; le critère est là, ce lieu doit être l'endroit où on se fixe. pas question alors de mettre en rivalité, de se croire au-dessus, d'en vouloir mépriser, rabaisser les autres : ce lien unique tel celui à la mère, au père, il ne se discute pas, il se suffit à lui-même...

Mardi 5 novembre, mot imposé « chaudron »

Si le mien est si SUD, c'est comme ça, par hasard, par accident, heureux si possible, parce que tombé dans ce chaudron. Cet attachement fort n'est pas ressenti pour être plus que les autres, il est, parce que d'un village, parce que les liens restent forts, formant un maillage comparable à celui attachant le paysan (que nous sommes tous, à l'origine et que nous devrions viscéralement rester) à sa terre. Il est parce qu'il est le paysage familier, l'atmosphère qui conforte, réconforte, arrime à la vie...
Alors, mon village, bien sûr qu'il tient à exprimer le « parce que c'était là, parce que c'était lui », quitte à parodier Montaigne à propos de la Boétie ; ce qu'on ne peut expliquer, de l'ordre de l'amitié, de l'amour, avec nos adultes, nos vieux, nos aïeux, ceux de nos âges, trésors qui doivent durer tant que possible car ceux partis trop tôt nous laissent remords et regrets, d'un goût amer, d'inachevé... de quoi évaluer aussi l'incidence sur la qualité de l'amour porté à nos enfants et descendants... 



PHOTO : pas de marmite, de chaudron, de pairol pendu à une crémaillère... j'en ai bien un ou deux mais sans trépied, sans flamme en dessous... alors autant la cheminée vivante de mamé Ernestine, en 1968, avec, annonçant la fête du village, la Saint-Martin, la volaille reine de nos fêtes, la dinde à la broche (como se dis dins nostre lenga ? « broca » ? « ast » ? « pal » ?

lundi 13 juin 2022

Le "EN MÊME TEMPS", à éviter !

Le "en même temps" est à éviter ! Libre à qui le souhaitera d'y noter un désaccord politique avec le monarque républicain qui fait perdurer la Constitution d'une Ve République pourtant en "mort cérébrale" : on ne peut être pour un jour et contre avec des promesses non tenues de révision, une politique génératrice de crises continuelles... Ne parlons pas davantage des députés godillots d'un président omnipotent et d'une opposition cristallisant les extrêmes, l'illustration du jour concerne le millefeuilles des règles et des lois et "en même temps", le grand écart entre la volonté déclarée et son application sur le terrain.  

Il y a les plus beaux mais jusqu'aux plus modestes sans trop de choses à montrer, tous les villages de France, porteurs de chapitres d'histoire, témoignent du vieux pays qui est le nôtre. 




Fleury-d'Aude, village sans prétention, et, en même temps, annexe sinon dépendance périphérique à Narbonne, dispose de deux monuments classés historiques : la tour Balayard et la chapelle des Pénitents...  Etrange ce classement (protection nationale) ou inscription (protection régionale), déjà qu'il illustre bien  l'embrouillamini compliqué et néanmoins ordinaire de nos administrations. Notons par exemple, à Coursan, que seul le clocher de Notre-Dame-de-la-Rominguière est classé. A Fleury, l'église Saint-Martin pourtant datée pour partie du XIe siècle, ne figure aucunement dans cette protection ; même remarque pour les restes imposants du château. 


En prime, les sites aimés par les habitants comme la dernière tour ronde restant des remparts, le porche, la rampe de la Terrasse (du château), la rue étroite dans un cœur de village aux petites maisons si serrées et imbriquées qu'on disait familièrement "la médina", l'escalier donnant, de suite à gauche sur la forge du maréchal-ferrant. Le tableau ne serait pas complet sans le Grand Café Billès, où les générations à différentes époques se souvenaient de la venue du ténor Affre, des parties de cartes, du billard, des bals, du cinéma, ou du judo ou du ping-pong, de la salle de banquets sinon du siège du rugby ; historiquement il ne devait rien représenter puisque sans aucun état d'âme, il devait disparaître pour des places de stationnement.  C'est aussi du "en même temps". 

"Le 13 mai 1996 cette magnifique construction fut démolie pour laisser place à un parking au centre du village" Les Chroniques Pérignanaises, de Pérignan à Fleury, 2009.  

Ainsi, les constructions, les démolitions doivent passer un contrôle supplémentaire, celui des Architectes des Bâtiments de France, de vrais cerbères au début, durs, stricts. Dans le périmètre de la chapelle, impossible de rabaisser le portail pourtant surdimensionné à l'époque des chariots de comportes ou de foin. 

Le problème est que, depuis l'abbé Pierre, le constat insatisfaisant concernant le parc de logements a amené le pouvoir à favoriser l'accession à la propriété en aplanissant les contraintes. Pour ne pas ajouter au mécontentement général, le contrôle si contrôle il y a, se fait lointain, les velux se multiplient, le plastique des volets roulants jure aux dépens des vantaux traditionnels en bois alors que l'esthétique de l'éclairage municipal et l'enfouissement des réseaux attestent de l'implication publique... 



A la réflexion bien que partielle des deux précédents paragraphes s'ajoute, toujours dans le périmètre immédiat de la chapelle, la réalisation, par la commune de 11 logements locatifs sociaux sur 600 m2 au sol, nécessitant la démolition de l'habitat ancien peut-être insalubre, peut-être en danger d'effondrement... 


Bien sûr, les Pérignanais de cœur, qui passaient, montaient ou allaient au pain, à "la douceur d'Aimé", chez le boulanger-pâtissier Monestier, avec, au comptoir, les sourires de sa dame et de sa fille qui reste dans nos souvenirs, dans ce "Centre ancien de la Placette" ainsi dénommé dans les transformations actuelles, ne peuvent qu'être troublés par ces démolitions. Espérons seulement que le résultat final ne jurera pas avec l'aspect ancien du "centre historique", la proximité de la chapelle des Pénitents, cela consolerait du temps qui nous pousse, d'une certaine dépossession et de l'émoi bien légitime pour qui tient à ses racines...     

jeudi 30 décembre 2021

DÉJÀ UNE PETITE CAMARGUE... et une agante* avec Brassens...

Je veux bien être l'imbécile heureux tant décrié par Brassens, bête et méchant, sûrement parce qu'il faisait partie lui-même de tous ces imbéciles prétentieux montés à Paris pour faire croire que leur possible réussite ne devait rien à leur lieu de naissance... 
 
"... habités par des gens qui regardent
Le reste avec mépris du haut de leurs remparts, 
La race des chauvins, des porteurs de cocardes, 
Des imbéciles heureux qui sont nés quelque part..."

 
"... Maudits soient ces enfants de leur mère-patrie
Empalés une fois pour tout's sur leur clocher..."

Non, non, Brassens, j'adore sauf qu'aimer quelqu'un c'est l'accepter dans son entier, sans dire amen à tout. Pas question en effet, au prétexte qu'on a un village, une église, une plage, de mépriser, comme il l'affirme, par chauvinisme, le reste du monde... Georges ajoute "cocardier", ce qui s'avère pour le moins, contradictoire. Et puis quand, outrancier, il se lâche en se référant à Moncuq, la localité, juste pour l'équivoque sur l'homonymie, c'est qu'il n'a pas d'argument à faire valoir... Ce n'est pas le tout de faire rimer mazette sur un hémistiche, cela ne vaut tripette... Enfin, c'est Brassens...   
 
"... Qui vous montrent leurs tours..."

Hola, en quel honneur cette entrée cavalière ? Si, si, je sais, il suffit de remonter dans mes chroniques : les petits oiseaux, le chemin d'école du grand-père, la garrigue, la fête de la Saint-Martin, les vendanges, Saint-Pierre-la-Mer, la plage, l'étang, la rivière... je ne suis que l'imbécile heureux né quelque part, et à y être, le demeuré, le ravi du Midi !

Brassens_TNP_1966 BNF wikimedia commons Author Roger Pic (1920-2001)

Mon pauvre Georges, en dépit de tout ce que tu as attaqué avec cette chanson, défendre ceux qui sont nés quelque part ce n'est pas plus pour les vanter que pour les montrer, juste pour ce qu'ils sont, ce qu'ils ont en commun... Malheureux ! sinon ils nous ont bien assez envahis comme ça, les gens nés nulle part, ils sont même plus nombreux que nous, nous, les indigènes en minorité... c'est comme ça, on n'a rien contre... ce sont des gens bien, en majorité... Maintenant cela doit-il nous interdire de dire qui nous sommes, d'un terroir, du cru comme tu le dis, avec un passé, une vie à partager, des fondements à rejoindre puisque eux viennent de partout... Ensuite, pour le futur, on verra bien ce que deviendra l'âme du pays, le présent n'a pas la main dessus et de toute façon, cela ne saurait en changer le passé... Au nom de tout ce qui précède, crois-tu que de ton endroit cosmopolite, il était aimable de tous nous traiter de jobards ? Aurait-ce à voir avec ceux qui te collaient aux basques, t'interdisant, célébrité oblige, de flâner à Sète, t'obligeant à chercher refuge dans les cabanes à Lolo, loin, à Balaruc ? 

Mais, imbécile que je suis, bien sûr que tu m'as fait marcher... Tu nous as signifié tant de choses, tu joues au provocateur alors que tu as souvent chanté le contraire... Ne nous dis pas : le petit cheval, les papillons, le chêne, l'amandier, la plage de Sète, Martin, Margot, Hélène, Bécassine, Gastibelza, de toi sinon des grands que tu honores, tout sent la province, l'humus, la campagne, le crottin qui te répugne... Si tu avais vu, d'une des maisons aujourd'hui rasée pour laisser, au nom d'un paraître comptant plus que la beauté intérieure, notre vieille église désormais orpheline des appentis entre contreforts, dont ceux pour abriter les chemineaux ou stocker les feux d'artifice du 14 juillet ! Notre église Saint-Martin, cathédrale à mes yeux d'enfant attendant l'entrée en scène d'Esmeralda, orpheline des maisons accolées laissant une touche moyen-âge... Pardon, j'ai laissé le crottin en chemin, celui des vieilles filles sorties aussitôt au cul du cheval, avec la balayette et la pelle ad hoc... si tu avais vu leurs géraniums ! 
Mais, suis-je bête, avec le bel accent que tu as gardé, bien sûr que tu es né quelque part et que c'est ce qui t'agace... Bien sûr que tu es resté celui de la Pointe Courte, du Rocher de Roquerols au milieu de Thau, des copains d'abord ; et si tu aimes chanter c'est que tu as de qui tenir, de cette colonie italienne venue de Campanie... Sur les quais de Sète, une fois, j'ai entendu un pêcheur qui ravaudait son filet... une voix magnifique, je suis resté un bon moment, j'en ai encore une larme à l’œil !  

Je savais que je devais t'aganter* un de ces quatre, sans savoir que je tomberais sur toi ce jour. Et dire que je voulais refaire la piste, depuis Saint-Pierre au pied de la garrigue, vers Les-Cabanes, par les sables vaseux de Pissevaches, les sansouires des Terres Salées, là où une pointe d'imagination suffit pour découvrir une vraie petite Camargue avec, vers midi, les découpures dansantes, les prismes colorés déjà cubistes de Cézanne, la silhouette de Mireille ou de Magali qu'un mirage disloque et floute à dessein : l'Arlésienne, toujours présente et jamais là, quatre petites pages d'Alphonse Daudet, pour celles qu'on a aimées, qu'on a cru ou aurait pu aimer, quatre petites pages à vous briser le cœur parce que le souvenir bouleverse, trop vivant, à cause de la pensée qui se refuse à l'amputation d'une parcelle de ce que nous fûmes, évaporée, devenue regret, remords, chagrin ou mélancolie... Tant pis, mon titre, je le garde. Demain, promis, le Cerç aura lavé et le ciel et mon âme. Nous irons, à la rage du soleil. 

* agante s.f. dérivé de l'occitan, querelle, chicane, bisbille, dispute, empoignade... 

En légende des photos, les paroles de la "Ballade des gens qui sont nés quelque part" G. Brassens. 

 

vendredi 5 mars 2021

ET QUAND J'ARRIVERAI, JE LIRAI SUR TA TOMBE, Lou Doublidaïre de Jean CAMP...

 Malheur, je croyais l'avoir dans le classeur qui me suit partout... J'ai dû le laisser là où un de mes pieds s'accroche à sa terre, à Fleury, au village, entre les vignes, le fleuve, la garrigue et la mer... Mais j'en ai plusieurs versions dont une à la main, appliquée... mais où ? Sinon une photocopie de sa découverte originelle, mêlant chapiteaux corinthiens et guirlandes spiralées dans les lettres, mais laquelle parmi les 175 reçues ? 

Et puis, pourquoi ne pas oser en retrouver les vers de mémoire ? Dans un cahier, à l'ancienne, au crayon car il faudra corriger... Sur deux colonnes... 

Bilan, une fois la copie retrouvée dans la 70ème lettre : la quatrième stance oubliée, la sept et la neuf mélangées, la huit revenue à la fin... ne plus oublier que ce sont douze strophes avec un envoi de deux vers en fin de ballade... Quelques hémistiches perdus mais qui par chance reviennent... Tout le monde n'est pas Alain Peyrefitte déclamant tous les jours ses classiques, pendant la toilette. 


LOU DOUBLIDAÏRE

Es él, tu, ieu,... un dal pais                 Tout lou passat qu'es entarrat
Que trapo la terro trop basso,             Joust lou ciprissié que négréjo, 
E viren l'espallo à la jasso,                 Toutis lous seus qu'an demourat
Partis, un jour, capo Paris.                  Al pais, lou cor sans envejo,  

Aqui, fa de genre, s'installo,              Se se levaboun dal tombeu
Porto de gants, causits sous mots      Et se vesion sa descendenso, 
E pren uno fenneto pallo                   De que dirion al que, tan leu, 
Que se met de rouge sus pots.           Daisso soun pais de naissenço ? 

S'an un drolle, paure mainage,              De que dirion al rénégat
Que, malgrat soun noum, saura pas      Lous de la vinho e de l'alaire, 
So qu'es uno bise, un bartas               S'as doublidat toun bèl terraire, 
E qu'a jamai vist' un village.             Ses pas mai das nostris, goujat ! 

Toutis lous nouses soun coupats      Parlo pounchut, seguis la modo, 
Que l'estacaboun al terraire                 Frégo-te amé lous Milords, 
Lou paire èro pas qu'un lauraire       Nous autris gardaren la blodo
E lou filh... semblo'n deputat !             E lou capèl a larjes bords, 

Couneis lou Metro, lou teatre,         L'oustal, tout so que te derrengo, 
Mes couneis pas Mir ni Mistral...       Las tradicius, fèstos ou dols, 
La Clapo e l'Aric ? Nou Mountmartre   Gardaren subre tout la lengo
Es so que vei de soun oustal !           Que nous an après lous aujols. 

E la raço de sous papetos                      Es él lou paraulis sans taco 
Qu'aro soun bressats per la mort,        Que sentis bou lou fé, lou mèl, 
Lous brassiès que fouchaboun l'ort        La garrigo, lou vi nouvèl
E que grefaboun las pourretos.               E l'orgo caudo de la raco

Es lou fial d'or que nous estaco
A nostro terro, a nostre cè! ! 

JEAN CAMP.
 
L'Aude à Salles-d'Aude wikimedia commons Author Patrick Nouhailler's

Et quand j'arriverai, je lirai sur ta tombe...


jeudi 19 novembre 2020

LA FÊTE DU VILLAGE / Fleury-d'Aude en Languedoc

FLEURY, le 22 novembre 1994.

«... Ici la vie continue comme d’habitude : les forains sont tous repartis hier après la fête du village, et la place est redevenue plus grande.../...

Quelqu’un qui fait du beau travail, c’est cet Anglais qui a acheté l’immense caserne de Pendriès (maison ayant appartenu à Pélissier). Après avoir rouvert portes et fenêtres consignées depuis pas mal de lustres, il vient de refaire à l’identique le grand portail tout rouillé, il a replacé les trois grands rectangles de fer du bas avec de solides plaques toutes neuves, et a conservé toutes les moulures ; repeint en gris le tout est du plus bel effet et il est réconfortant de voir ainsi ressusciter une maison morte depuis belle lurette. 

PHOTO 1 : et moi qui croyais en avoir du portail sinon de la maison depuis le chemin du Puits-Sûr qu'elle domine d'une vingtaine de mètres. Bref, pas de photo ! Toute contribution amicale sera la bienvenue... 

Vendredi 18 a eu lieu dans les grands ateliers municipaux faisant face au cimetière (ancienne fabrique de palettes), la 5ème fête du vin nouveau malheureusement sans les châtaignes qui auraient fermenté. 

PHOTO 2 :  le hangar en 1987, encore dédié aux palettes peut-être...
 

Nous avons eu droit au Collège de Septimanie et aux déguisements traditionnels, l’orchestre «Bar du Port» de quatre musiciens a été particulièrement agréable (chansons de Trénet, de Boby Lapointe - qui revient en force depuis un certain temps, lui qui nous a quittés depuis des années - et valses, tangos, javas, même du rock (dansé par... Henry Bourjade avec la jeune espagnole belle-fille de Verdun et femme d’un de ses employés à Saint-Pierre-la-Garrigue : il a étonné tout le monde par cette danse endiablée qui a fait dire à certains qu’il avait levé le coude d'autant plus qu'il a embrassé sa cavalière pour la remercier)..."

Correspondance. François Dedieu / novembre 1994. 

Et oui papa, au village il en faut peu pour que fusent sans les cancans, potins et autres commérages ! 

Vignes de Saint-Pierre-la-Garrigue.

   

jeudi 21 mai 2020

1987. FLEURY-D'AUDE LA SAUVAGEONNE...


Le maire à cheval mais pour dire que le centre équestre du domaine de l'Oustalet a été créé.







mardi 14 avril 2020

MARDI DE PÂQUES et CRÉCERELLETTES / Fleury-d'Aude en Languedoc.

" Mardi de Pâques ", je blague bien sûr. Peut-être ce joli jour qui s'annonce après un lundi de Pâques pourri ! Et dans les airs, magnifiques, des ailes plus libres que pour nos pieds confinés... 


Rien à voir avec la grisaille accumulée hier qui ne donne pas envie de se tourner vers le levant. Tout à voir au contraire avec ce matin clair au-dessus de la ligne à contre-jour de la garrigue (la Clape). Au-delà, autant dans nos pensées qu'en réalité, notre Méditerranée toujours recommencée. 


Les toits du faubourg ouest, axé sur l'avenue de Salles. A gauche le houppier d'un pin parasol, arbre remarquable dépassant des faîtes. Au fond la colline de Montredon, celle du moulin qu'on ne voit plus depuis que les pins, ces envahisseurs en rangs serrés, le cachent.


La grande bâtisse rappelle aux locaux les dépendances d'un gros propriétaire d'antan. Elle a logé aussi, à gauche, une étude de notaire. Autre arbre d'autant plus remarquable en dehors des pins centenaires, trop anonymes et qui devraient bénéficier d'une protection spécifique. Au fond, à droite, une autre garrigue a pris la place des vignes qui s'étageaient sur le coteau de Fontlaurier, cadre aussi, à deux pas de la maison, de mes escapades d'enfant. 
  

Le soleil dépasse les hauteurs arasées du château. Dans ma rue, quatre des six portails fermant jadis sur des caves, des remises. Signe des temps, l'étage parfois rehaussé est rendu habitable. 


Vue sur la "nouvelle" place du ramonétage, prise sur un espace important, 3500 m2 avec le jardin public derrière. L'ancienne place dépendant directement du château, en bas de la rampe de la Terrasse et que les autos tamponneuses viennent toujours occuper pour la fête du village, à la date du 11 novembre, ne mesure que 800 m2. Cette belle étendue avec une paire de bâtisses était  jadis appelée "la Batteuse". Ce devait être un bien commun puisque monsieur Robert, le directeur de l'école, nous y emmenait sauter en hauteur et en longueur dans un bac à sable aménagé. Un symbole du grain récolté, sauf que la machine qui tourne peut tuer ou broyer une main... Respect pour ce monde paysan qui encore aujourd'hui a prioritairement en tête le travail et moins la sécurité...  Autre signe des temps, le nombre de véhicules sur la place du moins tant que les volées d'oiseaux ne souillent pas les carrosseries de leurs fientes. Un vrai refuge ces platanes bien taillés en gobelet... Nous parlions de la bourre fauve des bourgeons que le vent confine par endroits et douze jours plus tard, sans trop se faire remarquer, le feuillage vient marquer une nouvelle étape du printemps. 


Autre signe du printemps, ces faucons crécerellettes revenus dans les années 2000 après quarante ans d'absence. Il y en a bien six ou sept alentour. L'étourneau, sur l'antenne de télévision ne manifeste aucune crainte, le crécerellette étant essentiellement insectivore. En 2013, 8 couples se sont reproduits dans le village même, 30 petits sont nés mais seulement 1/3 survit à la première migration (source Midi Libre 24 février 2014). 
 
 
Faucon crécerellette falco naumanni Crau 13 Rémi Rufer Flickr
http://rapaces.lpo.fr/faucon-crecerellette/suivi-des-populations

samedi 11 avril 2020

C'ÉTAIT UN MONDE MERVEILLEUX... / Un printemps d'avant.

Tu vois ces vieux pins au milieu des vignes, avant-garde de la garrigue pas loin, au-dessus du coteau ? Des squelettes pour quelques uns mais ceux qui restent gardent de la noblesse, une prestance je veux dire... Tu trouves pas ? Ils me font penser à une compagnie de mousquetaires se découvrant ensemble pour saluer. Que veux-tu, les films de cape et d'épée, on aimait, au cinéma Balayé ! Regarde comme le Cers, le maître vent, a tourné la plume des chapeaux vers la Clape et la mer !

A ce propos, je veux te parler d'un jour précis parce que cette fois là, ce que j'appris sur moi et le monde m'a marqué les années aidant.
Le film vient de casser, l'image reste fixe. "Arrêt sur image" on dirait aujourd'hui. Immobiles les panaches d'aiguilles. Pas un pet d'air, pas un souffle, juste un beau soleil, un ciel sans nuages. Et les cloches, nos trois cloches, déjà de Pâques, s'en donnent à cœur joie. Ce dimanche là, Saint Martin, tu sais, celui qui donne la moitié de son manteau à un pauvre, me libère pour une messe buissonnière. L'idée ne m'en serait pas venue tout seul. C'est que depuis le vitrail, celui de gauche, plus qu'auréolé, rayonnant dans une mandorle fulgurante du feu de l'astre, de me tirer vers la lumière, à force de dimanches, il me fait passer le rempart de verre. Une fois, une fois seulement. Si je suis un passe vitrail, il est ma circonstance atténuante et je ne suis pas perfide au point de dire que c'est de sa faute. 

Alors, au lieu de m'arrêter à l'église, je trottine par le quartier haut, si tranquille et innocent que personne ne s'étonne de mon trajet à rebours. Et je me retrouve là, dans les pins au bord d'un chemin blanc de poussière, pas ailleurs. 

Les cloches m'appellent, me rappellent et je ne culpabilise même pas. Au contraire, je souris, pas moqueur du tout, malicieux plutôt du bon tour joué, avec la complicité de Martin, même si je n'en ai qu'une vague idée, aux adultes, aux traditions, à l'ordre social. Rien d'une révolte ! 

Le village depuis le coteau de Caboujolette. Photo François Dedieu, début des années 60. Il y a bien le château d'eau mais quand a-t-il été construit ? 

Depuis le coteau bordant la garrigue, les toits autour du clocher épaulé par la tour Balayard nous gardent toujours des incursions barbaresques. C'est émouvant un village. La parabole du berger , presque, qui rassemble son troupeau aidé par son chien. Et la suite de l'histoire avec la brebis égarée, l'agneau perdu ou prodigue, échappé. Non, pas moi. Je viens de lire les Lettres de mon Moulin ; j'ai vu le film aussi, de Marcel Pagnol, avec deux ou trois histoires et Paul Préboist en moine ivrogne qui nous fit bien rigoler, même en noir et blanc. 

Et là, dans cette oasis cernée de vignes (1), je suis comme la chèvre de monsieur Seguin, libre. Depuis mon île plantée de pins, je regarde, au loin, le village. Mon cœur balance entre tendresse et recul ; touchantes en effet, les maisons qui comme les êtres se serrent mais ne faut-il pas parfois distendre un lien qui, sous prétexte de réchauffer, étouffe, empêche de penser par soi-même ? Muselés, ligotés, fragilisés, lobotomisés, trop nombreux sont ceux qui en arrivent à ne vouloir que leur prison pour horizon et n'avoir de cesse que de l'imposer aux autres. Nous concernant, pourtant, quiconque le souhaite et n'a que faire des ragots, peut aller jusqu'à la rejeter, la religion... Laissons ces raisonnements qui corrompent la magie du moment.   

 
Papilio machaon Wikimedia Commons Auteur LG Nyqvist

Un matin magique éclabousse notre cadre familier de ses brillants de printemps. Les fleurs, la petite, blanche au cœur d'or, du ciste de Montpellier, la grande, mauve, fripée, du ciste cotonneux, les toupets de la bourrache dans les bleus. De l'une à l'autre, d'autres fleurs, mais mouvantes : les papillons. Non, je ne rêve pas, les feuilles collantes ou duveteuses des cistes, les piquantes de la garouille, la hampe du romarin, ce sont bien mes mains qui les reconnaissent. Les poursuites des piérides, la farandole du paon du jour, la voltige de l'apollon, les ailes qui respirent d'un machaon posé m'en mettent plein les yeux. Et à côté, la vieille vigne de l'oncle Noé, plus que centenaire, où parrain a dit qu'il connait un lièvre...


Mon temps suspend son vol mais l'heure est trop vite passée, pourtant seulement à me retourner sur les fleurs et à suivre l'envolée des papillons dans la magie d'un matin étincelant. Les cloches carillonnent à nouveau l'espérance. Elles me disent aussi qu'elles ont bien reçu toute cette beauté montée au ciel et qu'en retour elles me renvoient une paix angélique. Et aussi que je peux garder mon secret trop beau, personne ne demandera, je n'aurai pas à mentir, à en rougir. 

(1) un mystère ce bosquet au milieu des vignes... peut-être la volonté du propriétaire d'alors...  

Fleury-d'Aude, Pins de Barral années 60. Diapositive François Dedieu. Oui, je sais nous sommes au printemps et je vous donne à voir l'automne mais pour en avoir passé des milliers je n'en ai pas d'autre en magasin...