Affichage des articles dont le libellé est Fleury-d'Aude. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Fleury-d'Aude. Afficher tous les articles

mardi 1 avril 2025

Sa COCOTTE ! enfin sa CHATTE !

Pas possible ! on le dit que sur le tard les passions peuvent être tumultueuses ! 

Hier à Fleury, accompagné par une fanfare aussi joyeuse qu'entraînante, après un cortège dans le vieux village, le carnaval des écoles a déboulé sur le plateau derrière la piscine. 

C'est certainement ce qui leur en a donné l'idée... Enfin, à son âge et tout le monde qui le connaît à Fleury ! Figurez-vous qu'il en a profité pour un rendez-vous malin finalement discret dans une belle affluence, au milieu de la foule ! Et qui ? incognito ? assise à côté de lui ? sa cocotte ! enfin, sa chatte ! 

L'air de rien, de ne rien voir, de déambuler, je suis passé devant, pour voir sa réaction ! 

Mais c'est qu'il m'a arrêté ! Quel culot ! Incroyable ! 

C'est que sa cocotte, enfin, sa chatte, c'était sa femme ! 

Pour un poisson d'avril, même un 31 mars !   


Personne pour un poisson d'avril ce jour ! Celui-ci n'est pas terrible mais il n'y avait rien d'autre en magasin...    

jeudi 27 mars 2025

Plus compliqué que SAUCISSE et JAMBON (5 et fin).

 Et mon père alors, qui me porte, moi qui suis dans sa maison ? 

Papa, tu es beau ! 


* François Dedieu (1922-2017), professeur de français, de russe, passionné de langues, de mots... (debout, bras tendus, les classeurs empilés de notre correspondance remontent du milieu des cuisses jusqu'au menton). Des lettres et courriels, dans l'acceptation de l'absence physique, plus apaisés que le geste si fort au moment de la séparation pour des mois, à des milliers de kilomètres, qui nous voyait serrés dans les bras l'un de l'autre, dans un « Au revoir papa ! » disant « Je t'aime ! » sans le prononcer. Et merci de m'aimer moi, l'enfant difficile, l'adolescent à problèmes que je fus, si souvent sur la corde raide. Ce qui est sûr est qu'après avoir longtemps imputé mes refus et rejets aux autres, en premier à mon père, j'ai mis très longtemps à reconnaître mes torts. J'ai été un sale gosse... voilà ce qui doit être dit en premier plutôt que de mettre en avant des circonstances “ minimisantes ”... Certains bons côtés auraient-ils quelque peu compensé, à la longue ? Redevant à mon père l'amour des langues, des livres, des mots, par un stratagème qu'il a feint d'ignorer, par le biais de souvenirs que l'âge se permet d'ouvrir, ne serait-ce que pour nos descendants, j'ai osé entreprendre la publication de nos vies pour ce qui les lient au village. Papa a si bien répondu et prolongé que force était de reconnaître qu'un deuxième tome s'écrivait en miroir, un diptyque donc avec « CABOUJOLETTE, Pages de Vie à Fleury-d'Aude II » le concernant, lui, pour un vécu plus loin dans le temps. Resté admiratif et peu critique de la matrice parisienne, avec les années, il n'en est pas moins revenu à reconnaître en lui l'attache vitale au languedocien, variante de l'occitan exclusivement pratiquée entre ses parents bien que bilingues appliqués, exigeants en orthographe, grammaire, conjugaison, bien français et pourtant binationaux qui s'ignorent. 

Tout passe, tout s'efface sauf si on s'efforce à repenser, à recréer, à revivre, à rechercher. Au delà de cette « Festa dal porc » que je retrouve bien qu'oubliée de moi, papa précise « seguida » (1), de la présentation du « Vin Bourru » qu'il me fit, je ressens fort la dette fructueuse que doit chaque fils au père qui continue de le porter (2) (penser l'inverse est une erreur, une vanité n'ayant pas lieu d'être).   

Plus légèrement, en conclusion, à propos de cochon, une des rares choses sympa chez les Parigots, Gabin et Bourvil fourguant du porc au noir dans « La Traversée de Paris », un film d'Autant-Lara, (1956) et encore... d'après une nouvelle de Marcel Aymé (1902-1967), il est vrai “ agent double ” dans la capitale malgré son attachement d'origine à la Franche-Comté...  

(1) terme peut-être local, non trouvé ailleurs, Mistral dans Lou Tresor dau Felibrige notant seulement « tua lou porc », tuer le porc. 

Côté terre, l'étang de la chasse aux canards, entre nous, une petite Camargue magnifique offerte par l'Aude, le fleuve, modeste au point de ne pas se prévaloir de son delta, le fleuve qu'on dit rivière tant il nous est familier... 
 

(2) Guy, professeur d'occitan, portant à bout de bras, chaque mois, une quarantaine d'élèves plus chenus que vermeils, apporte qui il est en plus du cours de langue. La fois dernière, il raconte la double trace de pas laissée dans le sable, au retour bien chargé d'une nuit jadis au canard (les appelants, le matériel avant tout...) ; s'ouvrant à son père, compagnon de chasse, d'un rêve en période triste, étrange et marquant, d'une seule trace de pas derrière eux, il reçut cette réponse aussi spontanée qu'éclairante « Ès ieu que te portavi... », « C'est moi qui te portais... ». 

mardi 25 mars 2025

La « TUE-COCHON » à Fleury et à Colombières (3)

 (suite du travail de charcutailles à Fleury-d'Aude).  

Hachoir_à_viande_pour_saucisses_-_Purullena 2015 under the Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International license. Auteur Dfbdfbg6543654

... puis, avant de recevoir la « machine » commandée à la Manufacture Française d’Armes et Cycles de Saint-Etienne (on ne disait pas encore « Manufrance » ou a fortiori « la Manu ») et destinée à faire la saucisse de façon plus commode et plus rapide, c’étaient les doigts de l’imposante Léonie qui poussaient la viande hachée jugée à point, à l’aide d’un entonnoir spécial sur l’embout duquel se pressait le rouleau d’un boyau humide bien propre, et nous voyions émerveillés la belle saucisse se former au bout et occuper plus tard une place de choix sur la table de nos cochonnailles annuelles.

Que dire encore ? Cette grande affaire durait évidemment plusieurs jours ; Léonie était naturellement des nôtres à la table familiale où nous savourions les premiers fritons et quelques belles côtes de porc sauvées de la tourmente et qu’appréciaient seulement les adultes. Les caisses destinées au salage des jambons avaient été préparées et pourvues d’une quantité de sel impressionnante pour nous, puis placées dans un coin d’une chambre du premier étage, vide et réservée en particulier à cet usage. Les beaux jambons y étaient déposés avec tout le soin requis, disparaissaient sous le sel, pour fournir des mois plus tard ces délicieuses tranches qui agrémentaient nos repas. J’appris beaucoup plus tard que cette préparation du jambon était bien originaire de notre pays, et que déjà les Gaulois, grands amateurs de cochon, savaient bien les élever et avaient acquis une grande renommée dans l’art de saler et aussi de fumer et préparer les diverses pièces du porc. Nous étions donc de dignes descendants.

Entre nous soit dit, la place réservée aux « caisses des jambons » n’était sans doute pas idéale : la saumure résultant du salage avait fini par traverser le bois des caisses et d’abîmer un peu notre plafond de la cuisine, située justement sous la chambre en question… »

CABOUJOLETTE, Pages de Vie à Fleury à Fleury-d’Aude II, 2008, François Dedieu.

Chez Jean-Claude Carrière, les femmes vont laver les tripes à un ruisseau qui, à l’époque de l’écriture du livre, ne coulait plus. Les enfants tournent la manivelle du hachoir à viande. L’auteur ne donne pas ensuite le détail de la confection des cochonnailles ajoutant seulement que viandes et graisses sont mises à cuire. 

Pris par le petit bout de la lorgnette, pourtant si important, suivant les circonstances, dans l'économie ménagère des familles, l'engraissement du cochon. Suite à une modeste recherche, nous avons retrouvé ce “ plus petit commun diviseur ” avec : 

* Arnaud Daguin (1935-2019) chef étoilé du Sud-Ouest et du Pays Basque s'indignant de l'élevage industriel. 

* Madame Tricoire, institutrice à Lavelanet, par son témoignage repris dans la revue Folklore (décembre 1941). 

* Mon oncle Stanislav (Tchécoslovaquie puis Tchéquie) dans son système D de débrouille autarcique face aux ratés, insuffisances et défaillances de la gouvernance communiste. 

* Robert Reverdy (1908-1999), de Pouzols-Minervois et son cousinage en marge des Hautes Corbières, à Laval (route du col frontière historique de Saint-Louis), vers Quillan de la haute vallée de l'Aude, lui valant un poème des plus réussis. 

* Les montagnards de Sorgeat au-dessus d'Ax-les-Thermes. 

* En Périgord, l'Albine, le personnage porteur de savoirs et de toute une culture rurale, de Fernand Dupuy (1917-1999) marquant de sa présence en compagnie d'Henri Vincenot (1912-1985), « APOSTROPHES », l'émission culte de Bernard Pivot (1935-2024). 



* Jean-Claude Carrière (1931-2021) d'un cosmopolitisme brillant au cinéma, au théâtre, en littérature, jusqu'à sa vie privée, ce qui n'a pas empêché son attachement viscéral à Colombières-sur-Orb, le village de naissance. Resté fidèle à son Sud, ne lésinant pas sur le temps donné aux autres notamment lors de la Mirondela dels Arts (peut-être aussi Les Estivales de l'Illustre Théâtre), il a gardé le bon accent de chez lui. Cette fidélité il en témoigne par son bilinguisme occitan-français et le soin apporté à son ouvrage  « LE VIN BOURRU » dont le riche chapitre sur les mots occitans francisés. De sa part, quatre ans après qu'il est parti, je reste toujours aussi ému de cette reconnaissance à l'égard des racines languedociennes qui nous unissent, de ce qu'il a été et qu'il représente. Carrière aussi a écrit un long paragraphe sur « Le sacrifice du cochon ». 

Pour ceux qui restent curieux de mes hommages, états d'âme et bavardages :  

Partager le Voyage: « ... ENFANT, J’ETAIS BILINGUE, OCCITAN-FRANCAIS… » / En bas des châtaigniers, la vallée des cerisiers.

Partager le Voyage: J'AIME ce qu'ils ont dit des VENDANGES / 2. Jean-Claude Carrière.

Partager le Voyage: JEAN-CLAUDE CARRIERE... il nous a tant aimés...

Partager le Voyage: JEAN-CLAUDE, il faut que je te dise... / A J-C Carrière, 1ère partie 

(à suivre)


 


lundi 24 mars 2025

La « TUE-COCHON » chez CARRIÈRE et DEDIEU (2)

Colombières-sur-Orb_St-Pierre 2007 under the Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International license Auteur Fagairolles 34

Et à Colombières, au pied des Cévennes, dans Le VIN BOURRU, 2000, Plon, Jean-Claude Carrière raconte que la veille le cochon sait qu’il va mourir. Entend-il les préparatifs ? Après une mauvaise nuit à grogner, à crier parfois, il recule et hurle dans son réduit, avant qu’on ne le touche. Armand Cazals, le grand-oncle de Tarassac « ...fort, jovial, un peu rouge… » doué pour découper, est sollicité par son entourage pour l’abattage. Après un verre de vin blanc, en tablier, son matériel à portée, il demande que la bête lui soit amenée. Les hommes la tirent par ses pattes attachées. On le tient fermement tandis que l’oncle cherche le bon endroit où planter son couteau. Une femme récupère le sang qui jaillit et empêche qu’il ne coagule. Les hurlements de l’animal faiblissent, les sursauts se calment ; instant de calme dans l’assistance, sans regret mais comme pour respecter cette fin de vie, ce sacrifice. Ensuite il faut verser l’eau très chaude pour ébouillanter et racler les soies avant que l’oncle Armand ne joue de ses couteaux «… comme les ogres dans les contes de fées… ». Allongée sur le ventre, la carcasse « qui fait la prière » (1) se voit découpée dans la longueur du dos. Un repas « le plus gros de l’année » avec le sanquet et la tindello (2) précède une longue après-midi de travail jusqu’à la nuit tombée. (synthèse tirée du livre Le Vin Bourru, 2000, Plon, Jean-Claude Carrière). 

Jean-Claude_Carrière_2016 under the Creative Commons Attribution-Share Alike 2.0 Generic license Author Fryta 73

(1) Luis Buñuel, le cinéaste avec qui il a souvent collaboré, lui confirma qu’ils faisaient et disaient de même dans la province de Teruel.

(2) Sanquet, sanqueto : “ omelette ” du sang du cochon. La tindello : tranche de lard ou de viande. 

Fleury avant Noël. 

Et à Fleury-d’Aude, le témoignage encore de François, père de François fils, notre pêcheur de tenilles (à l'image d'Olivier, l'alter ego, témoin, commutateur commode pour une narration autobiographique évitant le “ JE ”, non haïssable en soi mais incommodant justement) : 

«… Je me souviens que Léonie nous préparait aussi « la saumo (3) », sorte de gros galabart dit parfois « boudin du Sud-Ouest », et qui permettait d’utiliser à bon escient un gros boyau. Le boudin était alors cuit longuement dans un gros chaudron placé sur son fort trépied dans l’antique et pour nous immense cheminée où flambait un feu nourri. Les deux tables de la maison avaient été mises côte à côte pour la circonstance, les nappes blanches étaient de rigueur et disparaissaient presque entièrement sous cette quantité impressionnante de victuailles. Nous nous faisions rappeler à l’ordre de temps à autre, pour gêner un peu le travail des grandes personnes si important pour la famille, et nous dévorions des yeux toute cette « fête du cochon » qui était pour nous un divertissement prisé.

Je vois encore sur le gril, près du chaudron aux boudins, les échantillons de viande hachée, salée et poivrée, placés sur une petite plaque de métal « pour goûter » afin de juger l’assaisonnement [...] (à suivre)

(3) étrange cette dénomination, la saumo désignant l'ânesse en occitan. 

Papa. 


samedi 22 mars 2025

La “ TUE-COCHON”, Jean-Claude CARRIÈRE et François DEDIEU (1)

La relecture et correction d'un projet « Un Languedoc Fleur d'Amandier » m'amènent à compléter dans la rubrique « Pauro bestio », pauvre bête à propos du cochon tué pour apporter aux humains. Jean-Claude Carrière puis mon père sont mis à contribution pour apporter un complément au sujet. 

Jean-Claude_Carrière_à_la_BNF 2008 under the Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported2.5 Generic2.0 Generic and 1.0 Generic license.Auteur Roman Bonnefoy

À Colombières, au pied du Caroux dont on voit la dent de chez nous, Jean-Claude Carrière indique que l’élevage du cochon se pratiquait avant 1940 et qu’avec la guerre, à cause des restrictions, cela fut nécessaire, les apports en viande, charcuterie et matières grasses ne pouvant mieux tomber. Les familles s’équipèrent d’une porcherie afin d’engraisser un cochon, parfois deux. Devant la maison, dans un gros chaudron de cuivre se cuisait la ration du pensionnaire : farines, châtaignes, herbes… Le cochon reste familier, reconnaissant d’être nourri, caressant même lors de ses petites sorties dans le jardin. On le soigne avec sérieux ! C’est à qui aurait la plus belle bête de plus de deux cents kilos ! 

Même en Moravie (Rép. Tchèque) Creative Commons Attribution 2.0 Générique Auteur kitmasterbloke.

À propos d'embonpoint, une lettre (janvier 1949) de la grand-tante de François fils, Céline (1903-1988) :

« […] Chez Paule on a tué hier le deuxième porc, le premier pesait 180 K et celui d’hier 225 K. Quant à nous qui en avons un mais plus jeune, il se fait joli et doit peser dans les 150 K nous le saignerons le mois prochain d’ici là il fera quelques kilos de plus… » 

« La fèsta dal porc (seguida).

Tout jeunes, nous n’étions pas autorisés à voir saigner par le boucher, appelé pour la circonstance, la magnifique bête qui allait fournir à toute la famille tant de vivres pour de longs mois. Plus tard, j’ai imaginé le cochon pendu par ses pattes de derrière à une poutre de notre cave, solidement maîtrisé par les puissantes mains de mon père et de son oncle, notre « oncle Pierre », [...] proprement saigné par le spécialiste malgré ses cris de désespoir ; le sang recueilli jusqu’à la dernière goutte dans une bassine des plus propres. Alors, le boucher-charcutier le coupait en deux dans sa longueur, et repartait, son travail terminé.

Ce n’est que quelques années plus tard que j’ai pu voir tous les détails : le cochon tué au pistolet automatique spécial qui enfonçait le crâne de l’animal et avait déjà remplacé l’antique merlin d’étourdissement de nos abattoirs de village ; l’eau très chaude versée dans l’auge impressionnante contenant le cochon devenu porc par sa mort ; la chaîne introduite sous le corps et servant à débarrasser ce dernier de ses soies ; et, une fois l’épilation terminée, le porc suspendu devant le charcutier, celui-ci coupait en deux la carcasse et pratiquait l’éviscération. Les boyaux étaient ensuite soigneusement lavés et conservés pour la fabrication de la saucisse, des saucissons et du boudin… »

CABOUJOLETTE, Pages de Vie à Fleury à Fleury-d’Aude II, 2008, François Dedieu. 

Papa




lundi 17 mars 2025

FLEURY, balade en CHANSONS... (2)

 « ... Et sur ma route il y a des trous... », oui, des trous de mémoire, sûrement ou des trous d'air puisque ma vie a continué sous les tropiques de l'Océan Indien. 

Je n'ai pas vu «...tant de rues » et « tant d'églises », sauf peut-être à La Réunion... 



« ...Mais les plus belles étaient chez nous... », non, “ la plus belle ” c'est celle de Saint-Martin à Fleury, chez nous, plus chaleureuse qu'une cathédrale même si jadis, les logis accolés, la pissotière, l'abri pour les vagabonds, celui pour les feux d'artifice, lui donnaient l'air d'une grande... 

« Mon village est loin, à l'autre bout du Monde... », non, il est toujours resté là vu que les pensées, plus encore les mots échangés, le gardent à portée, lui, sa famille et les gens qu'on aime... 

Divergences ensuite, avec les paroles de Delanoé malgré « ... Les chemins qui mènent à nos collines Avaient des pierres douces à nos pieds... » 

Vite il faut le bâcler ce topo nombriliste, se mettre en cuisine, que le tripat, même en trichant à la cocotte, ça prend du temps. Et puis ce ne sont pas mes camarades qui m'ont oublié... ces choses-là ne se disent pas... la larme à l'œil, seulement seul, en secret... Que tous ceux qui font mon ciment me soient sauvegardés, trésors vivants qu'ils sont, puisque persistent en moi les copains trop tôt partis... proches sinon plus ou moins côtoyés : André, Éric, Georges, Gérard, Guy,  Jacky, Joseph, José, Louis, Marc, Patrick, Paul-Serge, Philippe, Pierre, René, Richard, Roger, Serge... les filles aussi  Annie, Jackie, Joëlle, Marie-Agnès, Marie-France, Marie-Josée, Marie-Thérèse, Martine, Maryline, Maryse, Mauricette, Michèle, Sylvie... pardon pour les prénoms oubliés mais que la rue, la maison, ponctuellement ne manquent pas de rappeler... une litanie telle celle de Marie Laforêt (1939-2019) « Anton, Ivan, Boris et moi Rebecca, Pola, Yohanna et moi... » : 

«... Sur le chemin de bruyères
Tout le long de la rivière 
On cueillait la mirabelle 
Sous le nez des tourterelles... » 
Paroles Marnay Eddy (1920-2003), compositeur Stern Émile (1913-1997). 



Mince, il faut rentrer, c'était juste pour le romarin et le thym du tripat, surtout que j'ai pris le temps d'une botte d'asperges. Au-dessus du talus où le vélo est caché, une vigne mais toute sèche, qui, lambrusque, n'ira pas courir dans la Montagne de Jean Ferrat (1930-2010), que le printemps ne viendra pas attendrir  : 

« ... Les vignes, elles courent dans la forêt
Le vin ne sera plus tiré... »

Enfance, jeunesse, boulot aussi avec cette chanson idéale pour expliquer l'exode rural en classe de 4ème... Nostalgie multiple donc... Un chien costaud du museau passe sur la piste tracée désormais sur les friches, sans maître. Qu'il ne me sente pas malgré le Cers léger ; le coteau est devenu parcours pour les coureurs, les promeneurs, les baladeurs de toutous mais ce jour, heureusement, pas de moto tous terrains venue chambouler cette paix survivante (1)...  Et tant que nous sommes là, sous quinze degrés, malgré un ciel que le soleil n'a pas encore le courage de bousculer, ne suivons pas, finalement, les mots prémonitoires du parolier à l'intention de l'interprète :  

« ...Pas de discours et plus de larmes, 
Venez mes frères me dire adieu. » dans la bouche de Joe Dassin, devant mourir dans sa quarante deuxième année, si loin, à Papeete... 

(1) un jour j'en ai croisé un très prudent certes, attendant son petit garçon également sur un mini engin... je n'en pense pas moins que pour ces motos de mer au potin invivable... 

Ps : à propos des photos, commentez vous-mêmes que je suis enquiquiné : après 45 minutes, elles manquent de cuisson les tripes et j'ai dû les remettre sur le feu... 

Et les chansons, à la demande, vous saurez les trouver non ? 

FLEURY, balade en CHANSONS... (1)

Un petit plateau, rien du tout à vrai dire, à peine cinquante quatre mètres de haut... Et pourtant, mes huit ans, ce coteau n'étant qu'à deux pas du quartier avenue de Salles, de la maison, sont loin de l'inaccessible ; les vignes étagées, le lierre au vert d'hiver bon pour le moral, les talus aux amandiers, surtout quand ils fleurissent, les poireaux de quand les poisons n'étouffaient pas la terre, les asperges sauvages, au moins il reste ça... 


« D'où viens-tu gitan ? » chanson des Compagnons... 

L'appariteur en publiait quelques mesures pour l'arrivée sur la place du marchand de moules et de fruits de mer... Ils y avaient un cabanon ; un coin à éviter lorsque la différence est entretenue bêtement, à cause des rumeurs sur les voleurs de poules, voleurs tout court que la voyante ne prédira pas, et attention aux petits enfants, en prime, ils catafalquaient à l'argile les hérissons à rôtir... Vite, à la maison, au crépuscule, à l'heure qui les voit...  

« ...assis près de la flamme claire Qui jette à la clairière Leurs ombres de géants... » 

Tel Pascalet j'étais, l'enfant à la rivière d'Henri Bosco, parfois épiant de loin, caché, sans me douter qu'un jeune de ces Caraques, par compassion, m'aiderait à couper les raisins, à rattraper mes trois souches en arrière de la « colle » de vendangeurs. En demeure l'embarras, la gratitude, le regret de n'avoir pas dit bonjour, un jour aux gitans autour du feu... 

Voilà ce qui m'habite depuis, une fois adulte, la découverte de ce petit plateau, à présent que la dalle du toit a écrasé les murs du cabanon déserté ; au calcaire compact du Puech de Labade, notre sommet haut de 170 mètres (n'en souriez pas, de là haut on voit la mer !), au calcaire marneux de Tuffarel sinon aux grès verts de l'Oustalet (autant de lieux-dits, pas seulement de cailloux, avec des ruines ou toujours occupés sur le piémont oriental recherché pour la vigne) répond ce relief de galets (de lauzes en bordure) couvert de thym, de romarin, objets de ma balade en prévision d'un tripat. 


Encore à courir les marges, nos talus occitans, me défendrais-je de cette nostalgie aigre-douce, à la belle vue tous azimuts de mon village en bas, de ses collines aux moulins de part et d'autre (l'autre est aux voisins sallois), au pied de la Clape derrière, avec au fond la plaine de l'Aude, Vendres et son étang, Valras sa tour et encore la mer, me reviennent les paroles de « Mon Village du Bout du Monde », paroles de Pierre Delanoé (1918-2006), Joe Dassin (1938-1980) interprète.    

« Le vent s'engouffre dans ma valise... », oui, quand il a fallu quitter le pays, ce coteau... Ce n'était pas si loin, Lyon et puis des gens aimables disant en souriant que notre accent leur portait le soleil, mais... mais pour les vacances de Pâques par exemple, sur l'ensemble du parcours, nous passions seulement du velours des platanes au départ, au vert tendre des premières feuilles à l'arrivée, trois semaines de décalage. Et puis, un départ obligé pèse plus qu'un départ choisi... Tout n'est pas vécu en tant qu'exil... (à suivre)


samedi 15 mars 2025

FLEURY-d'AUDE, ramonétage, château et « tchi tchi » (fin)

Pas plus la “ Catarineta bella tchitchi ” de Tino Rossi que la blague terrible, dépassant le carnavalesque, du “ tchichi ” éculé ne faisant rire bêtement que la première fois, notre « tchi tchi tchi » parfois « tchi tchi » seulement, vient du ciel et s'ajoute pour la même raison, aux invitations sonores des passereaux. Tous, sédentaires et migrateurs, lancent au ciel l'espoir des jours meilleurs... Aux Pérignanais de cœur sinon de souche (minoritaires et de moins en moins nombreux) de constater que le retour de l'hirondelle ne viendra qu'après celui du faucon crécerellette, l'oiseau réintroduit dans la Clape autour des bergeries ruinées et qui se plaît dans le village, s'il reste des trous dans les murs ou des bords de toits de tuile canal ouverts, à partager avec le muralhèr (le moineau) et le faucilh, le martinet qui n'arrivera que plus tard. 

Madame se demande si monsieur se sent concerné... 

Désolé, je n'ai pas le matos, seulement les yeux, encore, à peu près... 


Ainsi, dans ma rue, pas encore à voler en Saint-Esprit mais presque, un de ces petits faucons reconnaissable à son « tchi tchi », du genre femelle, d'un habit camouflage plus sobre que celui du mâle, bleu-gris, un brin zinzolin (c'est exagéré mais les deux « Z » me plaisent trop) rappelant certain pigeon, a tenu à me faire savoir qu'ils étaient revenus. 

La fonction créant l'organe bien que plus lourde de 20 grammes que le mâle, la femelle n'en pèse que 160. 

Pour la France, l'oiseau rare est seulement présent en Occitanie au sens large, longtemps dans la Crau mais aussi davantage dans l'Hérault et un peu dans l'Aude, depuis la Clape, dans la plaine et ses villages environnants. Réintroduite entre 1982 et 1992, l'espèce en diminution compte 81 couples chez nous. 

Début mars (au tout début du mois nous précise A.-M., témoin privilégié pour habiter avec eux au château !) le mâle crécerellette qui trouve une cavité ou s'approprie un nichoir, surveille et vole vers la femelle qui passe, espérant que le logis lui plaira et que la suite, ponte, couvaison de 28 jours tour à tour, élevage de la descendance, ne leur sera pas défavorable. 

Preda_Falco_Grillaio en Basilicate (Italie du Sud) 2022 under the Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International license. Author Roberto Strafella

Gentils ? du moins aimables sinon dans la norme, sur une Terre régie par la formule “ manger ou être mangé ”. Au menu du petit faucon, surtout des insectes, un tout petit pourcentage peut-être aussi de colombrines (ne francise-t-on pas ainsi le nom du lézard de muraille ?). De l'installation à la ponte, étonnante pour qu'elle puisse paraître vu que nous la connaissons en tant que nuisible souterrain du potager, la chasse aux courtilières prédomine, suivie par celles des coléoptères et des scolopendres. La saison avançant, lors de l'élevage des petits, l'apport en criquets et sauterelles prédominera.  

Si la LPO (Ligue de Protection des Oiseaux) nous en parle en détail, c'est dommage que la révision du site les ai conduits à supprimer l'observation quotidienne si intéressante, notamment, lors des migrations ou pour prendre conscience de la pression négative sur le monde auquel pourtant nous appartenons...   

Et M., homme de la nature et du jardin, grand chasseur devant l'éternel, de me conter ses traques à la courtilière : d'abord celle au pied du pin surprise au ras de son trou... un coup de fourche pour retourner la terre suivi d'une course poursuite tranchante... enfin, celle du potager, là où sont les tomates, l'inonder faute de pouvoir chambouler le terrier puis lui abréger la vie après qu'elle soit sortie... Mais il y a longtemps que la taupe-grillon ne l'a plus embêtée... Pour la photo : under the Creative Commons Attribution-Share Alike 2.0 Germany license.

       

jeudi 13 mars 2025

FLEURY-d'AUDE, ramonétage, château et « tchi tchi » (1)

Les photos viendront après, sans quoi ce ne serait plus une surprise, de celles, agréables, sereines, qui embellissent la vie...  

« printemps », « prima », « primavera », les trois peuvent se dire en occitan.  

Si l'ambiance de carnaval s'avère évanescente, Mars avec la majuscule que l'orthographe lui dénie mais que le dieu en question devrait approuver, sourit déjà par la clarté qui gagne en fin d'après-midi, Mars console des jours qui passent, du temps qui jamais ne suspend son vol, vérité pour tous de la part du  poète. Après la fleur de l'amandier, la pluie enfin réparatrice (1), les asperges sauvages abondantes cette année, la tendre et première verdure des buissons et des arbres (2), les passereaux gais et fringants qui ne s'y trompent pas, c'est le ciel qui étonne : un « tchi tchi tchi » fait tourner la tête et lever les yeux. 

C'est plus discret que le vol en “ V ”des grues qui vont en France (3). Il faut avoir la chance d'être témoin d'un tel spectacle mais c'en est aussi une d'entendre ce même « tchi tchi tchi », n'aurait-il traversé que le ciel de ma rue ce dimanche 9 mars vers 16h, fidèle à la belle saison passée, prometteur de celle à venir. Le 10, ils revenaient en duo de Derrière l'Horte, du moulin (abords sud du village) vers les ruines de notre vieux château, leur résidence saisonnière. 




Hier, c'était au-dessus du ramonétage sauf que seul un « tchi tchi » se laissait entendre. Puis l'espace dégagé, heureusement sans voitures volantes contrairement au parking, en bas, complètement congestionné (4), l'a vue aller et venir, en boucles, insistant de ses « tchi tchi » sonores. Quelques pas plus loin sur cette place, manière d'avoir la vue sur nos toits familiers... Et là sur un râteau télé, “ Tchi tchi tchi ” l'être aussi muet que tranquille, ramassé sur lui-même, comme voulant dire « chante toujours » à “ Tchi tchi ” à toujours revenir le relancer... (à suivre).      

(1) Dans les Pyrénées Orientales les lacs de retenue se sont enfin remplis d'une eau attendue depuis deux ans, une eau qui dans l'Aude aussi, a fait grand bien ! 

(2) disen “ printemps ” coumo en francès, mais ce printemps se dit aussi “ prima ” voire “ primavera ” en Occitanie, comme en Espagne, au Portugal, en Italie, pays de langues romanes sur la Méditerranée sinon, tel le Portugal, empreint de latinité suite au séjour des Romains. 

(3) «... qu'enteni las gruas que s'en van ta França, que cau jita lou blat a l'esperança... » ... qu'il faut jeter le blé à l'espérance... Le Jour Marie / Joan de Nadau https://www.youtube.com/watch?v=_vb5rj5tDuc
Évocation du Semeur du temps des semailles de Victor Hugo «... Ce reste de jour dont s'éclaire La dernière heure du travail... ». Digressions ? Que voulez-vous ? Bonne ou médiocre, l'inspiration puise en vous ce que vous êtes... d'où ces textes à tiroirs multiples, semainiers presque, avec les grues qui sont passées le dimanche 23 février à 18h 45 à Saint-Pierre-la-Mer... l'observateur ne pouvait être plus précis ! 

(4) je le dis vu que je contribue aussi à le congestionner, ce stationnement... 

lundi 10 mars 2025

Le CARNAVAL (6) années 60 à Fleury (fin)

 Chacun à son tour, alors, enlève le masque un instant, et, objet de toute l'attention, dit son nom. Souvent c'est la fille, de la génération des mères qui complète, situe l'enfant dans sa famille : la mamé, plus à même de comprendre se laisse aller à tapoter gentiment une joue, laissant alors entendre sa satisfaction avec un « Ah c'est bien ! » ou une réaction du même ordre. Me concernant, en rapport avec le positif de la cohésion sociale du village, se prononce invariablement « C'est le fils de François ». Je me souviens précisément de cette scène avec Marinette, chez sa mère qui habitait une petite rue derrière la pharmacie et le cinéma. 

Masque à Fleury 1969 diapositive © François Dedieu... simplement à mentionner en cas d'emprunt. 

«... Les enfants rient sous cape de ces aïeules d'autant plus curieuses qu'elles sont âgées. Ils ne savent pas. Comment se douteraient-ils qu'à l'automne de leur vie, les mamés ne se lassent pas des joues fraîches, des fossettes, des sourires neufs des petites, des petits ? Elles tiennent surtout à meubler leurs mémoires du visage de la vie qui continue et saura les perpétuer, une espérance secrète, pudique, indicible... ». 
Le Carignan, Pages de vie à Fleury-d'Aude I, 2008, JFDedieu. 

« Les grands-mères, c'est comme le mimosa, c'est doux et c'est frais mais c'est fragile. »
Marcel Pagnol, Naïs, 1945. 

Non les enfants ne sont pas en âge de comprendre cette sollicitude exclusive qui anticipe qu'ils vont grandir trop vite, quitter le nid, s'émanciper d'une promiscuité d'amour devenant tutelle. Encore enfants, pour carnaval, ils comptent leurs sous. Chez Antoinette, pour un goûter de fête changeant de la tartine de margarine saupoudrée de sucre, ils vont acheter des petits beurres, des barres de chocolats pralinés Malakoff dans des papiers cuivrés, des nougats et pâtes de fruits Dumas de Pézenas, des bananes moins communes que de nos jours. 

Maskenball Bal masqué en Allemagne, agglo de Mayence, février  2008 under the Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Germany license Author Gonseheimer Carneval-Verein 1892 e V
Faute de photo disponible pour la salle des fêtes de Fleury, celle-ci, avec une orientation de la salle similaire et une taille comparable donne au moins une idée du lieu où tous nos bals se déroulaient.  

« ...La jeunesse, elle, attend avec impatience le bal de carnaval. Elle n'a pas dansé depuis la Saint-Martin sauf pour ceux qui sont partis à pied à la fête de Salles-d'Aude, le premier dimanche de janvier. La voiture donnera, certes, la liberté de vadrouiller, le samedi venu, dans les villages alentours, mais chère et précieuse, elle reste, entre 1960 et 1965, du domaine du rêve pour une grande majorité de jeunes dont quelques uns seulement apprécient d'avoir troqué la bicyclette pour la mobylette. 
les masques, les vrais et les faux couples, les célibataires, les jeunes ménages, les festéjaïres se retrouvent à la salle des fêtes pour une soirée exceptionnelle, où les déguisements les plus réussis recevront un prix sur la scène. ce bal de carnaval, organisé par la mairie, correspond plutôt à la date de Mi-Carême... » 
Le Carignan, Pages de vie à Fleury-d'Aude I, 2008, JFDedieu. 

dimanche 9 mars 2025

CARNAVAL (5) années 50 et 60 à Fleury

Alors, à Fleury, village du bout de l'Aude, d'un bout du monde, le carnaval ? Vague souvenir, peut-être seulement apporté par les dires d'un aîné, de Carnaval sur le charreton des jeux du 14 juillet, jugé depuis l'estrade et voué au bûcher déjà en place sur la place du marché. Sinon, la cavalcade, plus éloignée dans sa portée bien que s'agissant de fêter l'installation de la belle saison (suite à la fin de la guerre, carnaval et cavalcade se sont confondus, le précédent article en témoigne). Plus communément, toute la mise en scène du cortège puis du jugement n'était-elle qu'une survivance ponctuelle puisque cette fête restait avant tout l'affaire de chacun et plus particulièrement des enfants impatients d'être quelqu'un d'autre derrière un masque et un déguisement. 

Deux cas de figure se présentent, soit c'est une cavalcade programmée de longue date, soit et c'est l'expression à laquelle nous nous sommes attachés, il s'agit simplement de petits groupes masqués visitant les habitants. 

Masques 1961


Les parents ont donné de quoi acheter un masque chez Odette ou madame Zan, les buralistes, sans quoi, entre cousins, on échange si ceux des années passées ont été gardés. De même pour le déguisement, de vieux habits jusqu'aux fripes et oripeaux feront l'affaire. À l'exception du rouge à lèvres et du noir de fumée, rien d'autre pour le maquillage. Armés d'uno padeno, d'une poêle (en fer de l'époque rappelant, qui sait, un temps où des nourritures roboratives étaient prisées ?), de petits groupes arpentent le village. À croiser les autres bandes, ils restent froids, silencieux : c'est que la concurrence est rude quand il s'agit d'éprouver la largesse limitée des concitoyens. Heurtoirs, cloches, en toquant, il faut sonner chez les gens, saluer, présenter la poêle en disant « Vingt sous dins la padeno ! », vingt sous dans la poêle (mon père relevait « Un sou a la padeno »... avant l'inflation sûrement... ). Cinq, dix, parfois vingt centimes (à titre de comparaison, vers 1960, la place de cinéma coûtait 70 centimes). Certaines, parce que ce sont souvent les femmes qui ouvrent, la plupart du temps la mère et la fille ; la mamé, tenant la pièce du bout des doigts, demande « Qui es-tu toi ? ». 
 
masques 1961

Masques 1961

Mes fils à Fleury 1980

samedi 8 mars 2025

CARNAVAL (4), la paille et la poutre...

«  Et chez toi, à Fleury ? c'est pas le tout de critiquer les voisins ! » 

Bien envoyé ! Et que répondre sinon que notre village a, comme les autres, subi l'usure du temps. La vie moderne en a peu à peu distendu le lien avec l'ancrage terrien. Petit à petit, le couple humain-nature a dérivé vers la séparation de corps ; tels ces racines pathétiques qui pendouillent dans un liquide nutritif, s'ils restent sensibles, aux conditions météo, égoïsme et confort personnel obligent, à force de se vouloir hors-sol, leur ressenti se limite à pouvoir sortir, à dépenser moins pour se chauffer, à se sentir mieux. 
S'ils ne dénient pas le besoin de soleil, qu'est devenu le sens profond de la saisonnalité ? l'angoisse de décembre aux nuits toujours plus prenantes ? le réconfort ensuite, aux jours toujours plus pugnaces ? Qu'en est-il, dans un Sud pionnier et favorisé, de la liesse quand l'amandier fleurit ? Et, pour carnaval, qu'en est-il de la symbolique des signes du printemps chassant l'hiver ? Mathumones de Sardaigne, sorcières d'Alsace, fous, hommes sauvages d'Allemagne, gnomes de Bâle, ours des P.O. et Pyrénées, pas plus de compassion que de pitié pour tous ces pleureurs de la méchante saison défunte ! 

Alors à Fleury ? Au moins ne pas fanfaronner, ne pas voir la paille chez les voisins. La symbolique de carnaval en a pris un coup aussi, comme chez les copains, Néanmoins, en toute modestie, avec l'âge qui l'autorise, pourquoi ne pas rappeler ce que représentait carnaval par un passé plus ou moins éloigné ? 

Extraits de Caboujolette, Pages de vie à Fleury II, 2008, auteur François Dedieu. 

Oreillettes de Titi de Fleury qui, après les crêpes de la Chandeleur, aime suivre cette tradition de carnaval... 


De la part d'une correspondante amie qui, bien qu'émigrée, tient à la tradition...  

OREILLETTES : «... À « l’hôtel » rue de la Poste, chez « Marie de l’hôtel » la mère de Georges Bonnet chez lequel tu as vendangé une année, celle à qui des jeunes réussirent une fois, il y a bien longtemps, à chiper une grande corbeille d’oreillettes (1)... ».   

ENFANTS MASQUÉS : «... Un de ceux qui tenaient à voir le visage du quêteur masqué, avant de lui glisser une pièce, c’était, racontait papé Jean qui l’avait vu faire « chez Pierre Marty » le bourrelier, Cazanave. 
« Cal sès, tu ? Te baillarei quicon se m’enlevés lou masqué et se me ba disés ». (« Qui es-tu, toi ? Je te donnerai quelque chose si tu m’enlèves le masque et si tu me le dis. »)... ». 

BALS de CARNAVAL : «... Vendredi 6 février 1948 / A Fleury, nous préparons une cavalcade pour le 7 mars, tu seras peut-être ici si tu viens au début du mois ; Louis Robert est toujours président, il y a déjà 7 ou 8 chars inscrits, à la J.A.C.F (Jeunesse Agricole Catholique auprès des Filles) Nous en ferons un, nous voulions faire les Saintes-Maries-de-la-Mer, mais Les Cabanes le font. Peyrel en ont commencé un mais on ne sait pas ce que c’est. Dimanche 8 février c’est la cavalcade de Narbonne et le 23 celle de Coursan. Tous les dimanches nous dansons chez Robert (Prola, qui, avec Gaby, avait pris en gérance le café Billès FD) ; la samba « Maria de Baïha » fait fureur, il y a beaucoup de masques tous les dimanches, il y en a davantage qui sont des gens mariés, que des jeunes gens et jeunes filles... »  

PRÉPARATIFS : «... lors des préparatifs pour carnaval, Toumassou prend place dans un cercueil (allez savoir pour quelle mascarade encore ?). Nous sommes au premier étage et ses camarades qui viennent de fermer le couvercle plaisantent et parlent de le jeter par la fenêtre :
« Eh ! fasetz pas lous couillouns ! » « Ne faites pas les couillons » se défend une voix étouffée… ». 

(à suivre)

(1) la coutume était d'en faire des kilos en une seule fois. La cuisinière en remplissait une grande corbeille à linge en osier. Certains de ces brigands ont dû la faire parler pendant qu'un ou deux autres subtilisaient la corbeille laissée « à côte », à savoir dans la salle à manger qu'on ne chauffait pas.