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jeudi 7 novembre 2024

« Un LANGUEDOC dans une FLEUR d'AMANDIER », présentation suite.

Présentation de « Un Languedoc dans une fleur d'amandier », « SUD, C'EST ÇA ! I » modulée dans le cadre  d'un concours... le lundi 4 novembre, le mot imposé était « rouille ». 

Tout serait dit ou presque sur cette exploration dans le temps, ce menu humainement géographique, sociétal, ce ressenti subjectif des jours qui nous poussent vers la sortie, cette trajectoire humaine de la poussière au forgé, du forgé à la rouille, de la rouille à la poussière, s'il n'y avait ce coin de Terre qui nous a fait sien. Qu'on y soit né, qu'on y ait ses racines, qu'il soit adopté quelles qu'en puissent être les raisons, qu'il ne soit pas unique, il y a un endroit qui nous touche plus profondément, dont nous faisons partie et qui est en nous. Pas plus tard qu'hier, un post s'est proposé sur la Meuse, les Ardennes, marquant cet attachement compréhensible et hors norme à la fois ; le critère est là, ce lieu doit être l'endroit où on se fixe. pas question alors de mettre en rivalité, de se croire au-dessus, d'en vouloir mépriser, rabaisser les autres : ce lien unique tel celui à la mère, au père, il ne se discute pas, il se suffit à lui-même...

Mardi 5 novembre, mot imposé « chaudron »

Si le mien est si SUD, c'est comme ça, par hasard, par accident, heureux si possible, parce que tombé dans ce chaudron. Cet attachement fort n'est pas ressenti pour être plus que les autres, il est, parce que d'un village, parce que les liens restent forts, formant un maillage comparable à celui attachant le paysan (que nous sommes tous, à l'origine et que nous devrions viscéralement rester) à sa terre. Il est parce qu'il est le paysage familier, l'atmosphère qui conforte, réconforte, arrime à la vie...
Alors, mon village, bien sûr qu'il tient à exprimer le « parce que c'était là, parce que c'était lui », quitte à parodier Montaigne à propos de la Boétie ; ce qu'on ne peut expliquer, de l'ordre de l'amitié, de l'amour, avec nos adultes, nos vieux, nos aïeux, ceux de nos âges, trésors qui doivent durer tant que possible car ceux partis trop tôt nous laissent remords et regrets, d'un goût amer, d'inachevé... de quoi évaluer aussi l'incidence sur la qualité de l'amour porté à nos enfants et descendants... 



PHOTO : pas de marmite, de chaudron, de pairol pendu à une crémaillère... j'en ai bien un ou deux mais sans trépied, sans flamme en dessous... alors autant la cheminée vivante de mamé Ernestine, en 1968, avec, annonçant la fête du village, la Saint-Martin, la volaille reine de nos fêtes, la dinde à la broche (como se dis dins nostre lenga ? « broca » ? « ast » ? « pal » ?

vendredi 29 mai 2020

PARTIR / NÉ QUELQUE PART, ÉMIGRANT, ERRANT...

"... Je suis né quelque part
Je suis né quelque part, laissez-moi ce repère
Ou je perds la mémoire..." Maxime Le Forestier

"Rien ne trace son chemin" (J.J. Goldman). Il est donc condamné à choisir par lui-même, condamné à être libre de choisir !  Rester ? Partir ? Vivre !

Des traces ?
"... Mais notre affaire est de passer
De passer en traçant
Des chemins
Des chemins sur la mer..."
(Antonio Machado).

Cela explique-t-il que certains s'accrochent bec et ongles aux racines ? Au point de se couper de leurs prolongements de branches, de fleurs et de fruits ?
"... La race des chauvins, des porteurs de cocardes,
Les imbéciles heureux qui sont nés quelque part..."
(Georges Brassens). 

D'autres partent comme des graines au loin, de gré ou par force. Se coupent-ils pour autant de leurs racines ? Arrivent-ils à germer ? Ou attendent-ils le temps de revenir, le temps qu'il faut pour vaincre le "mal du retour", au sens premier de la nostalgie ?..  


1953. Fin mai. Jouant de malchance, tirant le diable par la queue, François emporte "sa femme" (c'était sans guillemets alors), son gosse, quelques valises, une grosse malle de livres et d'espérance. 

François part au Brésil.

La malchance, trois, quatre peut-être sept jours avant d'obtenir sa "carte orange de diplomate", il est expulsé de Tchécoslovaquie (mars 1950). Aucune indemnité en tant que victime d'une mesure de rétorsion, aucun droit à un nouveau poste ! 

Praha_1,_Karlův_most Wikipedia Author Tilman2007
La guigne encore pour un poste de traducteur d'allemand à Toulouse (ONIA). Deuxième sur vingt-quatre... Ils n'en prenaient qu'un et peut-être que le piston...
Ingratitude encore de la République qui ne l'a pas pris comme remplaçant aux Cabanes-de-Fleury, le titulaire étant en longue maladie. L'Inspection Académique a préféré une école sans maître !
Et Michelin qui l'embauchait pour s'occuper d'une succursale à l'étranger sauf que c'était à Prague. Impossible pour la "persona non grata" qu'il restait !
Et cette école libre de Rodez mais pour 13.000 francs mensuels seulement "...le directeur s'excusait lui-même pour ce salaire de misère..." ! 325 euros de 2019 !
Et encore le ministère "Vous êtes victime d'une homonymie" ! 
Survivre. Gagner Narbonne à vélo pour donner une leçon...  

Une petite chance, bien que modeste et tardive, ce poste de précepteur chez la Comtesse Anne de Romilly, au château de Saint-André-de-Sangonis.
Et enfin un coin de ciel qui s'ouvre, un poste au Brésil. Mais le jeune comte s'est attaché à celui qui enseigne et le mène, il reste manger surtout s'il y a du chou farci. Au point que sa mère voudrait même qu'il parte aussi au Brésil (13 mai 1953). 
Déchirure encore quand il faut quitter les siens pour des années (26 mai)...
   
 "... Y a des oiseaux de basse cour et des oiseaux de passage..." (M. Le Forestier). Il y a les migrateurs non, toujours à rejoindre un port, un havre ? Et ceux qui passent pour ne jamais repasser ? 


André est le frère de son grand copain, encore un François. Ils habitent dans ce même quartier haut, l'un la maison de Jean, l'autre celle d'Elise, dans ce faubourg au-delà des remparts de jadis, entre le cœur du village et les premiers coteaux de garrigue. Or André lui, va partir au Canada. A Montréal. Une transplantation  réussie, une greffe vigoureuse car voulue, jusqu'à assimiler la façon de vivre et même l'accent, ce que quelques imbéciles aussi heureux que méchants, comme dépossédés, en arriveront à lui reprocher... Une trajectoire plus qu'attachante qu'il faudra partager un jour... 

lundi 24 décembre 2018

LORSQUE L'ENFANT PARAÎT (Victor Hugo) / variation sur Noël.

Noël, Nadal, Natal, Navidad, naissance, natalité... ça reste dans le registre familial...
 
Et en famille, qu'y-a-t-il de plus beau, de plus magique qu'un bébé qui vient au monde et qui rejoint ces enfants grandis trop vite, transformés par l'âge mais que nos mémoires s'efforcent de fixer tout petits ? 

Baby by Pixabay
  

Avec cette variation sur Noël me viennent les paroles approximatives d'une chanson (années 60 ou 70 ?) qui ne m'a laissé que sa belle empreinte méditerranéenne :

"... Il est né parmi les abeilles, 
Un bel enfant de miel et d'orgeat
Chante l'oiseau dessous la treille
Allons boire le vin muscat..."  

Quand l'enfant vient, être père c'est, grâce au nouveau-né, revoir ses aînés. Et si la vie qui va trop vite n'en laisse pas le temps, à l'automne de son âge, quand vient le besoin de se retourner sur le chemin parcouru, si un malheur n'est pas venu faucher une destinée, il faut garder de nos enfants le merveilleux, depuis la naissance, de leur apprentissage à la vie. Ensuite, quand le destin nous offre petits-enfants et petits-neveux et nièces, il faut dire leurs prénoms avec affection, beaucoup d'égards et d'émotion. Avec le progrès, on ne réalise pas combien une petite vie est précieuse et fragile... 

Victor Hugo vers 1853 - 51 ans - Wikipedia - Auteur peut-être Charles Hugo.


Un qui les a aimés les enfants et qui, pour cette seule raison, mérite l'honneur d'être un grand homme : Victor Hugo !  
De son poème "Lorsque l'enfant paraît", je pensais seulement citer :

"... De jamais voir, Seigneur ! l’été sans fleurs vermeilles,
La cage sans oiseaux, la ruche sans abeilles,
La maison sans enfants !.." 
 
En rester là serait aussi aussi boiteux qu'irrespectueux... dans "Les feuilles d'automne", le voici en entier : 

"Lorsque l’enfant paraît, le cercle de famille
Applaudit à grands cris ; son doux regard qui brille
Fait briller tous les yeux,
Et les plus tristes fronts, les plus souillés peut-être,
Se dérident soudain à voir l’enfant paraître,
Innocent et joyeux.

Soit que juin ait verdi mon seuil, ou que novembre
Fasse autour d’un grand feu vacillant dans la chambre
Les chaises se toucher,
Quand l’enfant vient, la joie arrive et nous éclaire.
On rit, on se récrie, on l’appelle, et sa mère
Tremble à le voir marcher.

Quelquefois nous parlons, en remuant la flamme,
De patrie et de Dieu, des poètes, de l’âme
Qui s’élève en priant ;
L’enfant paraît, adieu le ciel et la patrie
Et les poètes saints ! la grave causerie
S’arrête en souriant.

La nuit, quand l’homme dort, quand l’esprit rêve, à l’heure
Où l’on entend gémir, comme une voix qui pleure,
L’onde entre les roseaux,
Si l’aube tout à coup là-bas luit comme un phare,
Sa clarté dans les champs éveille une fanfare
De cloches et d’oiseaux !

Enfant, vous êtes l’aube et mon âme est la plaine
Qui des plus douces fleurs embaume son haleine
Quand vous la respirez ;
Mon âme est la forêt dont les sombres ramures
S’emplissent pour vous seul de suaves murmures
Et de rayons dorés !

Car vos beaux yeux sont pleins de douceurs infinies,
Car vos petites mains, joyeuses et bénies
N’ont point mal fait encore ;
Jamais vos jeunes pas n’ont touché notre fange ;
Tête sacrée ! enfant aux cheveux blonds ! bel ange
À l’auréole d’or !

Vous êtes parmi nous la colombe de l’arche.
Vos pieds tendres et purs n’ont point l’âge où l’on marche ;
Vos ailes sont d’azur.
Sans le comprendre encor, vous regardez le monde.
Double virginité ! corps où rien n’est immonde,
Âme où rien n’est impur !

Il est si beau, l’enfant, avec son doux sourire,
Sa douce bonne foi, sa voix qui veut tout dire,
Ses pleurs vite apaisés,
Laissant errer sa vue étonnée et ravie,
Offrant de toutes parts sa jeune âme à la vie
Et sa bouche aux baisers !

Seigneur ! préservez-moi, préservez ceux que j’aime,
Frères, parents, amis, et mes ennemis même
Dans le mal triomphants,
De jamais voir, Seigneur ! l’été sans fleurs vermeilles,
La cage sans oiseaux, la ruche sans abeilles,
La maison sans enfants !.." 

Victor Hugo 73 ans vers 1875 Author Comte Stanislaw Julian Ostrorog dit WALERY (1830-1890)
 

Victor_Hugo vers ses 82 ans (1884) Auteur Nadar
A Stanislas, Olivier, Lætitia, Pierre-François, Florian, Léa, Camille, Alexandre et à celui qui est en chemin...  

 Photos autorisées : 1. Pixabay. 2 & 4. Wikipedia. 3. Wikimedia Commons. 

Vous avez remarqué comme les mains apportent un supplément d'âme au portrait ? C'est le cas aussi pour ceux de Paul Valéry... J'ai une photo de classe où ma main apporte de la vie à une vue figée... mais chut, la satisfaction que j'en ressens pourrait me rendre prétentieux !