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mercredi 18 novembre 2020

LA SAINT MARTIN 1994 / Fleury-d'Aude en Languedoc

1990. ils y étaient les "grands avions". Il me semble reconnaître quelqu'un mais je préfère l'expertise d'un œil sûr...

 «La fête du village a battu son plein durant quelques heures, mais les «avions» n’étaient pas au rendez-vous, remplacés qu’ils sont par de petites voitures  qui ont eu très peu de succès semble-t-il. Pierre-François a profité sans exagération : il tient toujours beaucoup à «la pêche aux canards» et aux voitures «mini skooter». Il y avait également le «chahut’car», les tirs, la voiture avec les jeux vidéo, les crêpes, beignets et gaufres, le manège des plus petits. «L’estivet de San Marti» n’a pas failli au rendez-vous et se poursuit chaque jour (aujourd’hui 20° C dans la rue et un magnifique soleil, il faisait même trop chaud).../... 

 

Mais c'est qu'il la fait monter dans les tours, ce petit !

Les manèges sont encore là jusqu’à dimanche prochain 20 novembre puis ils mettront sans doute le cap sur Murviel...»  François Dedieu / correspondance des 15-16 novembre 1994.

Les petits avions y étaient aussi en 1990 !


Diapositives François Dedieu 1990. 

samedi 11 avril 2020

C'ÉTAIT UN MONDE MERVEILLEUX... / Un printemps d'avant.

Tu vois ces vieux pins au milieu des vignes, avant-garde de la garrigue pas loin, au-dessus du coteau ? Des squelettes pour quelques uns mais ceux qui restent gardent de la noblesse, une prestance je veux dire... Tu trouves pas ? Ils me font penser à une compagnie de mousquetaires se découvrant ensemble pour saluer. Que veux-tu, les films de cape et d'épée, on aimait, au cinéma Balayé ! Regarde comme le Cers, le maître vent, a tourné la plume des chapeaux vers la Clape et la mer !

A ce propos, je veux te parler d'un jour précis parce que cette fois là, ce que j'appris sur moi et le monde m'a marqué les années aidant.
Le film vient de casser, l'image reste fixe. "Arrêt sur image" on dirait aujourd'hui. Immobiles les panaches d'aiguilles. Pas un pet d'air, pas un souffle, juste un beau soleil, un ciel sans nuages. Et les cloches, nos trois cloches, déjà de Pâques, s'en donnent à cœur joie. Ce dimanche là, Saint Martin, tu sais, celui qui donne la moitié de son manteau à un pauvre, me libère pour une messe buissonnière. L'idée ne m'en serait pas venue tout seul. C'est que depuis le vitrail, celui de gauche, plus qu'auréolé, rayonnant dans une mandorle fulgurante du feu de l'astre, de me tirer vers la lumière, à force de dimanches, il me fait passer le rempart de verre. Une fois, une fois seulement. Si je suis un passe vitrail, il est ma circonstance atténuante et je ne suis pas perfide au point de dire que c'est de sa faute. 

Alors, au lieu de m'arrêter à l'église, je trottine par le quartier haut, si tranquille et innocent que personne ne s'étonne de mon trajet à rebours. Et je me retrouve là, dans les pins au bord d'un chemin blanc de poussière, pas ailleurs. 

Les cloches m'appellent, me rappellent et je ne culpabilise même pas. Au contraire, je souris, pas moqueur du tout, malicieux plutôt du bon tour joué, avec la complicité de Martin, même si je n'en ai qu'une vague idée, aux adultes, aux traditions, à l'ordre social. Rien d'une révolte ! 

Le village depuis le coteau de Caboujolette. Photo François Dedieu, début des années 60. Il y a bien le château d'eau mais quand a-t-il été construit ? 

Depuis le coteau bordant la garrigue, les toits autour du clocher épaulé par la tour Balayard nous gardent toujours des incursions barbaresques. C'est émouvant un village. La parabole du berger , presque, qui rassemble son troupeau aidé par son chien. Et la suite de l'histoire avec la brebis égarée, l'agneau perdu ou prodigue, échappé. Non, pas moi. Je viens de lire les Lettres de mon Moulin ; j'ai vu le film aussi, de Marcel Pagnol, avec deux ou trois histoires et Paul Préboist en moine ivrogne qui nous fit bien rigoler, même en noir et blanc. 

Et là, dans cette oasis cernée de vignes (1), je suis comme la chèvre de monsieur Seguin, libre. Depuis mon île plantée de pins, je regarde, au loin, le village. Mon cœur balance entre tendresse et recul ; touchantes en effet, les maisons qui comme les êtres se serrent mais ne faut-il pas parfois distendre un lien qui, sous prétexte de réchauffer, étouffe, empêche de penser par soi-même ? Muselés, ligotés, fragilisés, lobotomisés, trop nombreux sont ceux qui en arrivent à ne vouloir que leur prison pour horizon et n'avoir de cesse que de l'imposer aux autres. Nous concernant, pourtant, quiconque le souhaite et n'a que faire des ragots, peut aller jusqu'à la rejeter, la religion... Laissons ces raisonnements qui corrompent la magie du moment.   

 
Papilio machaon Wikimedia Commons Auteur LG Nyqvist

Un matin magique éclabousse notre cadre familier de ses brillants de printemps. Les fleurs, la petite, blanche au cœur d'or, du ciste de Montpellier, la grande, mauve, fripée, du ciste cotonneux, les toupets de la bourrache dans les bleus. De l'une à l'autre, d'autres fleurs, mais mouvantes : les papillons. Non, je ne rêve pas, les feuilles collantes ou duveteuses des cistes, les piquantes de la garouille, la hampe du romarin, ce sont bien mes mains qui les reconnaissent. Les poursuites des piérides, la farandole du paon du jour, la voltige de l'apollon, les ailes qui respirent d'un machaon posé m'en mettent plein les yeux. Et à côté, la vieille vigne de l'oncle Noé, plus que centenaire, où parrain a dit qu'il connait un lièvre...


Mon temps suspend son vol mais l'heure est trop vite passée, pourtant seulement à me retourner sur les fleurs et à suivre l'envolée des papillons dans la magie d'un matin étincelant. Les cloches carillonnent à nouveau l'espérance. Elles me disent aussi qu'elles ont bien reçu toute cette beauté montée au ciel et qu'en retour elles me renvoient une paix angélique. Et aussi que je peux garder mon secret trop beau, personne ne demandera, je n'aurai pas à mentir, à en rougir. 

(1) un mystère ce bosquet au milieu des vignes... peut-être la volonté du propriétaire d'alors...  

Fleury-d'Aude, Pins de Barral années 60. Diapositive François Dedieu. Oui, je sais nous sommes au printemps et je vous donne à voir l'automne mais pour en avoir passé des milliers je n'en ai pas d'autre en magasin...
 

dimanche 1 avril 2018

SANS ELLES, LE CIEL EST MOINS BLEU, çA CLOCHE... / Fleury d'Aude en Languedoc

"... Cela commence par une lettre de papa en date du 14 janvier 2003, il suffit d'une lettre pour aborder une question primordiale, un sujet sérieux, sinon grave, concernant notre village : 


« Ce matin, j’ai envoyé le chèque pour l’eau à la CGE et, en allant à la Poste et ensuite à la banque pour un extrait de compte (il y a la machine et c’est rapide : pas besoin d’attendre) j’ai vu, en traversant la place, une énorme grue pointée vers le clocher et qui enlevait, une à une, nos trois cloches, ainsi que les cadrans de l’horloge. Il faut dire que c’est dans le cadre des travaux concernant le clocher et l’église. D’après ce qui est dit officieusement, sinon officiellement, nous ne verrons plus lesdites cloches, qui doivent être placées désormais à l’intérieur du clocher. Je me doute que des ouvertures y seront donc pratiquées, comme ce fut vraisemblablement le cas autrefois – on distingue en effet ces fenêtres longiformes murées depuis, sur les parois –. De toute façon, l’aspect sera changé et la silhouette de notre église défigurée. Espérons que ce ne sera pas de la mauvaise ouvrage…» 


Diapositive François Dedieu 1979

Enfin, il faut le dire vite car je suis vraiment sonné de ce que vous m’apprenez... A force de nous annoncer leur départ chaque année, cette fois, je crains fort qu’elles ne soient pas là pour Pâques, nos cloches.


Elles s’en donnaient à tue-tête, ce dimanche là, les trois cloches, et dans mes yeux fermés, je voyais un Saint-Martin lumineux, partageant du haut de sa selle son manteau grenat. Et le pauvre dans les sabots du cheval, même en me forçant, je n’étais jamais arrivé à le plaindre, impressionné que j'étais par le geste altier du centurion. Une fois pourtant, pour une messe de minuit, quelques flocons virevoltaient autour des lampadaires : il avait fallu ce concours de circonstances et cette envie de neige que seuls connaissent les gosses du Sud, pour réaliser enfin, au-delà de la noble attitude du Romain, les pieds nus de l’indigent sur les pierres froides d'un porche... Le catéchisme, c’était plutôt des oliviers en Galilée et le soleil de Palestine. Ce soleil de Méditerranée, ces éclats trop généreux... le centurion en avait volé l'éclat et la chaleur au figurant en haillons..." 


Premier matin du monde / Le Carignan / pages de vie à Fleury d'Aude I / 2008