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mardi 16 janvier 2024

PARIS, LA PIEUVRE...


Certes un très beau reportage mais qui me laisse un goût amer. L'air de rien, tout en hypocrisies, Paris qui se veut à elle seule la voix de la France, lamine insidieusement la personnalité des provinces, un travail de fond aussi récurrent que séculaire. Très beau reportage bonifié par des images de drone (on ne nous dit pas s'il est iranien, turc ou nord-coréen puisque la France, pays pionnier de l'aviation, des Mirage, du Rafale... est particulièrement absente sur ce marché à moins que ce ne soit par des productions délocalisées, comme ils disent pudiquement pour entériner que le fric qui passe avant toute autre considération n'a pas de frontière et qu'il faut être particulièrement ringard pour prononcer "Nation" en pensant que ce n'est pas une vacuité, d'ailleurs, dans cette logique, ne sont-ils pas ceux qui veulent toujours plus de main-d'œuvre immigrée ? )...  

Gally,_Causse_Méjan,_Frankreich 2018 Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International Author GerritR


Qu'est-ce qu'il a dit, le promeneur-commentateur-concepteur ? "Caussards" ? Comment ? Il les traite de fainéants ? Rembobinage : c'est bien "Causs'nards" qu'il dit ! Traitez-moi de grincheux, de jamais-content, de mal sapious, pourtant je n'ai rien contre les personnes, seulement contre cette vague de fond qué fa parla pounchut dans ce reportage (qui fait parler pointu... parenthèse dans la parenthèse, sur 15 ministres récemment nommés dix sont franciliens... comme quoi le pays est équitablement représenté...). Paris n'a pas assez de ses huit tentacules pour phagocyter le pays qu'elle assujettit, ou engloutir les talents régionaux pour les régurgiter sous ses propres couleurs. Cette coercition de longue haleine consiste aussi à gommer l'identitaire, les différences, faire de nous un troupeau (1) docile, obéissant, sans aspérité, sans plus d'amour-propre, pire, des collabos en puissance, lobotomisés, bientôt zombies. Petit à petit cette pression en est arrivée à s'immiscer dans le caractère intime régional ; ainsi, depuis Toulouse ou Montpellier, on parle francilien pointu aux infos régionales où, pour prévenir une possible bronca, ils font l'effort d'en garder un, à l'accent du Sud, pour le rugby notamment, en contre-exemple, manière de faire semblant de protéger un indigène, un représentant du peuple premier (et dire que Chirac collectionnait leurs productions du bout du monde sans réaliser qu'il pouvait se satisfaire chez lui !). Un fait qui même semble anodin au maire de Fleury faisant commenter en "parler parisien" la bande annonce de Côte Indigo... Dans ce même ordre d'idée pas plus tard qu'hier, sur Arte, la charmante présentatrice m'a mis un voyage... quand elle a dit "d'vinett", une seconde j'ai en effet entendu "dînette" (ma pauvre Cécile, j'ai 73 ans...) avant de me dire que c'est moi qui étais bien l'attardé et que la dame présentait seulement sa devinette quotidienne... Encore une conséquence de ma mollesse d'esprit, de mon QI déficient lorsqu'un commentateur politique a émis que nos gouvernants étaient pour le "PADVAG", oui, je l'écris comme je l'ai compris, à savoir un nouvel acronyme tout comme on dit "SMIG", "SMIC", "PAF"... Faut être retardé, ringard pour ne pas connaître le PADVAG ! Toute honte bue, j'ai essayé de réfléchir au PADVAG... Ah ! "Pas de vague" ! manière de se sentir un peu moins con... Pardon encore une fois d'être long à la détente ! 
Les meilleurs zélateurs sont ces transfuges, souvent à l'insu de leur plein gré, consensuels d'une réalpolitique large au point de tout accepter en échange de retombées économiques (le fait de "monter à Paris" représentant un mal nécessaire pour gagner sa vie, compensé parfois par le regroupement suivant l'origine comme ce fut le cas pour les Bougnats, les "Bécassine" bretonnes, ou alors le signe d'une ambition personnelle, par les hautes Écoles, la réussite artistique, culturelle, sinon, dans une moindre mesure car dans une société encore du XIXe, aux classes bien hermétiques, de l'arrivisme si bien traité par Balzac avec les personnages de Rastignac, Rubempré, ou Stendahl avec Julien Sorel)... Si l'estime de soi des sudistes en est là, assujettie comme elle doit l'être encore, au point d'accepter de dire qu'elle parle "patois" à propos de sa langue maïrale, c'est que les descendants des barons du Nord peuvent continuer à coloniser tranquilles... Même le grincheux jamais content mal sapious que je suis est bien obligé de reconnaître que le reportage est magnifique ! sauf que j'émets des réserves, quitte à mettre les pieds dans le plat ! à savoir qu'il n'est pas acceptable que tout ce que la province a de bon et de beau soit systématiquement mis en avant par l'Île-de-France et Paris qui s'en arrogent toujours le mérite : « Avez-vous vu comme ils sont beaux ces Causses qui nous appartiennent ? »  

France_Lozère_Causse_Méjan_Chevaux_de_Przewalski  2007 Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported, 2.5 Generic, 2.0 Generic and 1.0 Generic Author Ancalagon


Moi je ne vais pas montrer et commenter un reportage en Normandie, dans les Ardennes, en Alsace ou chez les Bretons, comme si j'y étais pour quelque chose, comme si les Sudistes imposant leur parler, avaient colonisé ! Un travers que nous n'acceptons que de la part du marquis de Carabas ! et encore, si on aime les chats et les contes pour enfants...    

(1) et si vous avez à commenter un post sur fb, ne dites surtout pas que les Français sont des "toumons", c'est classé "insulte" : ils vous interdisent de commentaire pendant un certain temps, bon, même pas 24 h... mais c'est qu'il faut dire ovins, bêtes à laine... on doit être puni aussi pour le mot "gipon" je suppose... vous avez saisi j'espère sinon c'est que je ne suis pas le plus bête du cheptel (j'ai si peur de dire "prouteau" !) ! 

PS : la branche catalane de notre famille sudiste devrait enfin s'engager pour changer le nom du département... Aux six départements qui n'ont plus voulu les indications "Basses", "Inférieure", "Nord", pour une raison autrement identitaire, Les PO, Pyrénées Orientales, deviendraient possiblement, qui sait, "Pays catalan-Fenouillèdes"...  

PS2 : merci Bob pour le partage de ce reportage

mercredi 28 juin 2023

SÈTE 11, Paul Valéry 2ème partie.

Je vais vous dire, Paris des riches, parce que la ville a chassé de son paysage tout ce qu’elle avait de populaire, n’est qu’une SAL... TRAÎNÉE (1), à faire la fête, des réceptions du « beau monde » et pourquoi en serait-il autrement quand 1914-1918 rapporte tant aux faiseurs de guerres, ceux-là même qui de plus se frottent les mains à l’idée de reconstruire ensuite... Bien sûr qu’ils n’en ont rien à faire de ceux qui se font trouer la peau, de ceux  dont l’obus n’a laissé qu’une jambe pendue à un arbre (parce qu’il n’y a pas que les morts, figurent aussi les disparus de la guerre !) de ces gueules cassées dont la plastique amochée leur fera détourner le regard ! Et à présent, cette indécence extrême à défendre l’immigration pour le sous-prolétariat qu’ils exploitent..., cette image lamentable à l’esthétisme pompeux qui va aléatoirement glorifier un tel plutôt que tel autre également monté à Paris... bien sûr que les célébrités sont complices, dans leur prétention à percer, à réussir. L’essentiel de la société suit, ce troupeau dans ce qu’il cache mal d’envieux, d’égoïste, de lâche, de conformiste, de people, pour être dans l’air du temps, comme s’il fallait « faire nation », quel qu’en soit le prix, ainsi que le martèlent les politiques aux ordres de ces privilégiés indécents, pour une paix sociale dont ils sont les premiers exploiteurs et qu’ils veulent à leur main. Eux n’ont aucun scrupule, nulle honte à démontrer un penchant naturel loin de tout humanisme, encore en évidence avec cette majorité d’intellectuels complices depuis celle qui va se mouiller sous Vichy et celle politico-compatible d’aujourd’hui nous obligeant à nous accommoder avec des présidents médiocres, une gestion hypocrite, faussement présentée dans le but de toujours privilégier les puissances d’argent apatrides d’un système planétaire d’exploitation ! En cela, et sans pour autant me complaire à mener une chasse aux sorcières, je pointe du doigt des gens publics, dépendant du public et se démarquant d’une neutralité comprise comme ce Berléand, trop accommodant, dénigrant ceux qui l’ont fait célèbre, le font vivre parce qu'ils abuseraient en protestant et manifestant... ou encore l’autre Wilson, fils de, blanc de colère et d’un crétinisme certain à propos des paroles de la Marseillaise. Je préfère les mots directs et la franchise de Houellebecq ! Mon venin n'a-t-il pas l'inconvenance de côtoyer la respectabilité de Valéry, serait-il, comme tant d’autres, monté à Paris, de même que Brassens, pour ne citer que lui à Sète ? Disons que loin de vouloir attenter à tout ce que ce grand esprit apporte notamment dans les 30.000 pages de ses cahiers, je me sens suffisant au point de laisser libre cours à mes médisances en référence aux chicanes et railleries du duo Valéry-Cocteau sur leurs contemporains et aussi par rapport à cet anarchisme que Paul Valéry a revendiqué. 

Cocteau 1937 Domaine Public Auteur Studio Harcourt


Paul_Valéry 1938 Domaine Public Auteur Studio_Harcourt

Les honneurs rendus aux grands hommes sont foncièrement équivoques, souvent à double-tranchant. La deux centaine de Cahiers sur lesquels Valéry écrivait ses idées et pensées du matin, l’ossature langagière décortiquée, la poésie démantibulant la syntaxe, les suites de mots déconstruites, de la part de quelqu’un à part, je veux bien dire, citer son nom, m’y référer parce qu’il a du génie. Quant à sa poésie, il faut s’en honorer, sans se prendre la tête car, faute de message, elle demande au lecteur l’effort extrême d’en reconstituer les images, de se détacher du poète puisqu’il est nécessaire de construire sa propre interprétation. Plus on crie fort et soudainement au génie, plus on est enclin à le brûler à un moment donné. Les années après-guerre ont vite rangé Valéry dans les cintres... Pourtant son cours de poétique au Collège de France était remarquable...Tout passe, tout lasse... Heureusement tout peut revenir, l'Histoire ne repasserait-elle jamais les mêmes plats...  

(1) À l’opposé, j’aime le Paris populo, des faubourgs révolutionnaires, des Titis, des Gavroches, de la Commune, des Grisettes, le Paris de Zola. Comme acteur, réalisateur, Gérard Jugnot a su faire passer l’émotion que la capitale suscitait de ce point de vue... Belle ambiance des films tels que « Monsieur Batignoles », « Faubourg 36 ». 

Gérard_Jugnot_-_Avant_première_Rose_et_Noir_-_Montpellier 2010 the GNU Free Documentation License, Version 1.2 or any later version published by the Free Software Foundation Auteur Esby (talk)


jeudi 30 mars 2023

ES SO QUE VEI DE SOUN OUSTAL

 Un vers des douze strophes du « Doublidaire » de Jean Camp, écrivain et poète sallois, tant en français qu’en occitan. A côté de celui qui est monté à Paris en se disant qu’il reviendrait à la retraite, d’un autre qui compense en rejoignant une communauté (Auvergnats, Corses, Bretons, Alsaciens, Savoyards, Franc-comtois, Basques, Ariégeois, Languedociens... ) en important ses traditions (fêtes, accent, langue, cuisine), le doublidaire, celui qui oublie, a rejoint la capitale en homme neuf voulant repartir de zéro. Un seul but : réussir. Dans son poème, plutôt que de le culpabiliser en vain, Jean Camp dresse un constat. Pour lui, le migrant lambda a d’abord cette caractéristique de fuir la difficulté « trapo la terro trop basso », il trouve la terre trop basse et se tourne vers Paris. Là il se fait passer pour l’homme qu’il faut être : superficiel, parlant pointu, portant des gants, prenant pour femme une mince qui se maquille, à l’opposé d’une de la campagne. 

" Il pensait à la soeur d'Éliacin, aussi forte qu'une jument, et capable de donner des enfants puissants.../... ne te laisse pas escagasser par une jolie figure. Ce qu'il nous faut, c'est des hanches larges, des jambes longues, et de beaux gros tétés... " Le Papet / Manon des Sources, Marcel Pagnol, 1963. 

 S’ils ont un enfant, il ne sera que de la ville, complètement étranger à une vie de village au rythme des saisons, fondée sur ce que la terre produit, proche de la nature ; plus rien ne le rattache ; les nœuds sont coupés ; les paysages, la culture occultés : la Clape, l’Alaric, il ne peut savoir de quoi il s’agit ; il vit en parisien : le métro, le théâtre, il connaît ; les noms de Mir, de Mistral lui restent inconnus mais Montmartre « es so que vei de soun oustal », c’est ce qu’il voit de sa maison. « L’oustal », un seul mot de la part de Camp dont les parents font partie de ceux qui ont quitté le pays en emportant ou non, la terre du pays à la semelle des souliers. 



mardi 22 juin 2021

Un vieil Indien dans la ville, version covid (mai 2021) (4)

Pour ne pas s'empêcher de dire, qui tient la plume doit se désolidariser de l'autobiographe en romançant... la bonne combine pour faire dire à son double tout ce qu'on préfèrerait garder pour soi. Je parle de lui en écrivant "il" puisqu'il est le voyageur que je suis et que je suis le voyageur qu'il est...  

La Crète s'éloigne dans le sillage, Cythère et le Péloponnèse ouvrent un nouveau tableau avant la mer Ionienne et d'autres îles, manière de penser à Ulysse. La botte italienne n'est pas loin : depuis nos 13.000 mètres d'altitude, c'est plus vrai encore. 

 Retour au calme. Réveil alors que l'appareil aborde Nice. La carte montre qu'il s'est écarté jusqu'à survoler la Corse. Et à présent les Alpes, la neige ne pouvant plus nourrir les glaciers. Puis la campagne, les champs, des éoliennes mais pas de centrale nucléaire à l'horizon du Bassin Parisien. 

 Atterrissage... 20 bonnes minutes de retard... avec 15 minutes de roulage en prime puisqu'il faut faire le tour complet de Roissy pour se garer... et dire qu'avec le covid et un trafic réduit il n'était pas illogique de penser plutôt à gagner du temps... Que nenni ! Pire encore quand la sortie de l'aérogare désertée s'apparente à un parcours du combattant. Pour commencer un énième contrôle du test négatif avec une dame poussant le zèle à éplucher l'intégralité du document ! 

En suivant, une quête labyrinthique de la valise : des couloirs qui n'en finissent pas, des tapis roulants non fonctionnels, amorphes ou entravés par un groupe, valises aux pieds, piaillant l'ourdou ou le tamoul, une porte tourniquet avec la hantise aussi immédiate que non-fondée qu'elle ne tourniquettera pas dans l'autre sens, encore un escalator mais toujours le logo et l'inscription "bagages". Horreur ! en bas des marches mécaniques, un cul-de-sac "Navette" ! Pourquoi le jeu de pistes "Bagages" s'arrête-t-il soudain ? Où peut bien mener ce petit train ? Comment ? faut-il dire adieu à la valise, la seule à tenir le coup après tant de vols (achetée sur un marché de Besançon) ? Remonter puisque c'est possible. Ouf tournicoter à nouveau. Miracle, une hôtesse : 

" Mais si monsieur, avec la navette, à cinq minutes à peine la remise des bagages..." Paroles réconfortantes avec en prime la voix chantante du Sichouan, de Wuhan ou Canton... Comment savoir, le stress plus que l'universalisme fossile vermoulu, rongé de jacobinite boboiste pourtant imposé par une prétendue élite (heureusement rejetée de nos jours) ne laisse pas le loisir de demander au sourire bridé d'où il vient ? 

La valise se promène sur le serpentin de desserte : avec ses petites fleurs bleues et son air de toile cirée, il ne peut pas la manquer ! 

Maintenant la gare, les flèches à suivre et la confirmation de la direction sur le panneau suivant. 

Basilique du Sacré-Coeur, wikimedia commons, author Superchilum.
 

Les distributeurs de billets. Que disait le site "SeNeQeFe" (pourquoi un "u" après le "q" ?) sur internet : "Prenez un titre de transport "Ile-de-France" sauf que la machine ne propose pas cette dénomination de billet ! Machine qui rame... Ouf la seconde délivre bien de quoi rejoindre Bercy (19 h 47) via la gare du Nord et les Halles-Châtelet, en théorie du moins. Le RER attend l'heure de départ. Malheureusement il est huit heures et l'arrivée à temps pour le bus est compromise. Envers et contre tout, ne pas baisser les bras... Point très positif, contrairement à ce qu'il supputait, ce train est sans arrêt jusqu'à la gare du Nord : vingt bonnes minutes de gagnées... Vue sur le Sacré-Cœur, c'est tout ce qu'il lui sera donné à voir, fugitivement, et de loin, du  Paris des touristes. Les Halles : de là c'est la ligne 14 du métro qu'il faut rejoindre. 

Fourmilière ? Termitière ? Une fréquentation jeune, de petits groupes, souvent par deux... Et au milieu, valise bleue à fleurs, chemise rouge, directement téléporté depuis les tropiques, un vieil Indien dans la ville, le seul en manches courtes, trop voyant dans ces flots croisés de blousons en gris, de vestes noires, d'ensembles sombres. Le seul vieux à aller dans le flot rapide des jeunes. Le crâne se sait mal du courant d'air de crypte ou de catacombe courant les galeries d'une haleine caverneuse... Mais s'il sort le béret, en plus des fleurs de la valise, du rouge de la chemise, des manches courtes, de son air retraité obligé de turbiner, ils vont croire que c'est pour gratter quelques pièces ! A combien de mètres sous terre ces tunnels pour myrmidons filmés et géolocalisés ? Malheur ! un contrôle robotisé ! Toute une rangée de sas électroniques qui ne laissent passer que sur présentation du titre de transport. Inutile de jouer au chevreuil au-dessus du tripode qui aurait plutôt trois bras, les couperets escamotables de plexiglas forment une deuxième ligne ! Il voit bien faire les usagers. Il suffit de les imiter ! Sauf que son billet n'ouvre rien, il a beau préparer la valise, présenter l'ordi sur le ventre, frotter mon bout de carton vif ou léger, direct ou en rondeur, rien n'y fait ! 

Oh ! cette brune qui réussit son saut de chevrette mais plus pour amuser sa copine que pour frauder : elles en rient synchro ! Ce n'est pas que l'idée ne l'effleure pas un éclair de seconde mais il n'a plus l'âge de s'afficher derrière une chevrette ! C'est alors qu'une âme charitable de la harde, jeune et jolie qui plus est, le prend presque par le bras, covid oblige, pour le mener, tel un aveugle, au bout de l'escadron de machines ou, effectivement, deux d'entre elles veulent bien engloutir un laisser-passer de papier. Un petit vieux, provincial et perdu piétinant d'impuissance : quelle pitié ! Devant lui, au sol la valise, sous son menton la banane et la sacoche de l'ordi sur le ventre... heureusement que le sac-à-dos suit, lui, sans autre complication. Pousser du pied, récupérer le billet régurgité, passer les cerbères escamotables quitte à les obliger un peu ! Et alors ! "Merci mademoiselle !" (pourquoi dire madame à une dame jeune ? pourquoi y voir un rapport avec ses expériences intimes ?). Ligne 14, direction Olympiades ! surtout ne pas partir dans l'autre sens ! Il y est presque : deux stations seulement. Debout près de la sortie. Elle, assise, tonkinoise ou petite bourgeoise ; elle le regarde. Elle doit dire, en face d'elle, à celui qui est de dos "Si tu voyais ce vieux vieille France sorti d'on ne sait où..." La répétition le dit bien... Face à elle, pas discret, lui se retourne comme pour découvrir un martien ; pour notre voyageur, ça passe au-dessus des cheveux blancs pas encore tombés. (à suivre)


vendredi 5 mars 2021

ET QUAND J'ARRIVERAI, JE LIRAI SUR TA TOMBE, Lou Doublidaïre de Jean CAMP...

 Malheur, je croyais l'avoir dans le classeur qui me suit partout... J'ai dû le laisser là où un de mes pieds s'accroche à sa terre, à Fleury, au village, entre les vignes, le fleuve, la garrigue et la mer... Mais j'en ai plusieurs versions dont une à la main, appliquée... mais où ? Sinon une photocopie de sa découverte originelle, mêlant chapiteaux corinthiens et guirlandes spiralées dans les lettres, mais laquelle parmi les 175 reçues ? 

Et puis, pourquoi ne pas oser en retrouver les vers de mémoire ? Dans un cahier, à l'ancienne, au crayon car il faudra corriger... Sur deux colonnes... 

Bilan, une fois la copie retrouvée dans la 70ème lettre : la quatrième stance oubliée, la sept et la neuf mélangées, la huit revenue à la fin... ne plus oublier que ce sont douze strophes avec un envoi de deux vers en fin de ballade... Quelques hémistiches perdus mais qui par chance reviennent... Tout le monde n'est pas Alain Peyrefitte déclamant tous les jours ses classiques, pendant la toilette. 


LOU DOUBLIDAÏRE

Es él, tu, ieu,... un dal pais                 Tout lou passat qu'es entarrat
Que trapo la terro trop basso,             Joust lou ciprissié que négréjo, 
E viren l'espallo à la jasso,                 Toutis lous seus qu'an demourat
Partis, un jour, capo Paris.                  Al pais, lou cor sans envejo,  

Aqui, fa de genre, s'installo,              Se se levaboun dal tombeu
Porto de gants, causits sous mots      Et se vesion sa descendenso, 
E pren uno fenneto pallo                   De que dirion al que, tan leu, 
Que se met de rouge sus pots.           Daisso soun pais de naissenço ? 

S'an un drolle, paure mainage,              De que dirion al rénégat
Que, malgrat soun noum, saura pas      Lous de la vinho e de l'alaire, 
So qu'es uno bise, un bartas               S'as doublidat toun bèl terraire, 
E qu'a jamai vist' un village.             Ses pas mai das nostris, goujat ! 

Toutis lous nouses soun coupats      Parlo pounchut, seguis la modo, 
Que l'estacaboun al terraire                 Frégo-te amé lous Milords, 
Lou paire èro pas qu'un lauraire       Nous autris gardaren la blodo
E lou filh... semblo'n deputat !             E lou capèl a larjes bords, 

Couneis lou Metro, lou teatre,         L'oustal, tout so que te derrengo, 
Mes couneis pas Mir ni Mistral...       Las tradicius, fèstos ou dols, 
La Clapo e l'Aric ? Nou Mountmartre   Gardaren subre tout la lengo
Es so que vei de soun oustal !           Que nous an après lous aujols. 

E la raço de sous papetos                      Es él lou paraulis sans taco 
Qu'aro soun bressats per la mort,        Que sentis bou lou fé, lou mèl, 
Lous brassiès que fouchaboun l'ort        La garrigo, lou vi nouvèl
E que grefaboun las pourretos.               E l'orgo caudo de la raco

Es lou fial d'or que nous estaco
A nostro terro, a nostre cè! ! 

JEAN CAMP.
 
L'Aude à Salles-d'Aude wikimedia commons Author Patrick Nouhailler's

Et quand j'arriverai, je lirai sur ta tombe...


samedi 30 mai 2020

PARTIR (2) / Le train, le train-paquebot.

"Le lundi 1er juin 1953.
Bien chers Parents,
Notre voyage à Paris s'est bien effectué. Dès notre arrivée nous avons mis toutes nos valises dans un taxi (5 dessus, 2 dedans) qui, pour 400 francs nous a emmenés à Saint-Lazare où je les ai mises en consigne... " 


Le coupable revenant sur les lieux de son crime, 67 ans plus tard, bien sûr que je veux mieux comprendre et combler, essayer du moins, tant de flou et d'opaque entre quelques jalons plus sûrs...
Ce devait être le mercredi 27 mai, alors pas de changement d'horaire pour le paquebot comme indiqué sur le télégramme. Sommes-nous arrivés gare de Lyon ou à Austerlitz ? Gare de Lyon, c'est le Béziers-Neussargues-Clermont-Paris mais Narbonne a dû être le point de départ... Donc après Toulouse et Limoges une arrivée à Austerlitz ?
400 Francs le taxi soit 9 € actuels (convertisseur pouvoir d'achat Insee), ce qui pour deux adultes, les bagages et un bouchon de 2 ans et quelques mois, semble raisonnable. Mais toutes ces valises (ma mère dit qu'elle a eu la mauvaise idée d'emporter... un édredon ! Il fallait le faire à destination d'un pays tropical) ! 



"... je suis allé au ministère où l'on m'a remis nos billets et où j'ai rempli une fiche pour être remboursé des 10.806 francs de voyage et des 3.463 francs pour la caisse. Les billets pour Cherbourg étaient pour samedi 9h00, en seconde classe (2.938 f pour chacun)..." 

Les détails y sont... 122,50 euros Narbonne Paris, 79 euros pour la caisse. On ne peut pas dire que la SNCF pourtant nationalisée, pratiquait des prix plébéiens ! 34 euros seulement pourtant pour les 350 kilomètres ensuite pour Cherbourg... 

Film de promotion RATP pour le métro à pneus.

"... Vendredi matin je suis allé à la gare de Paris-Austerlitz pour retirer ma caisse et la faire transporter dans un taxi (il a fallu en trouver un avec une large porte arrière) à Paris-Saint-Lazare (350 f, 80 francs de porteur); j'étais ainsi libéré. Il ne manquait plus qu'à voir Monsieur Blancpain secrétaire général de l'Alliance Française... /... samedi réveil à 7 heures, départ au métro à 8h moins le quart. 8h 20 Saint-Lazare. Nos places étaient louées : voiture 7, places 22 et 24. Il s'agissait du train-paquebot de 9 heures. L'affiche indiquait "ALCANTARA". Je suis allé au wagon-restaurant avec le petit. Menu à 900 fr 80 francs pour une bière, soit 1000 francs. C'est vraiment trop cher bien que le repas soit bon : hors-d’œuvre - poisson aux câpres, filet aux champignons - Pommes de terre nouvelles frites -Glace vanille et chocolat avec gâteau feuilleté-Café..." 

Et maman ? 



"... Après Lisieux, Bayeux, Caen, Mortagne, Valognes, ce fut Cherbourg vers 2 heures et demie. Nous n'avions plus à nous occuper des bagages. La douane ne m'a rien ouvert, ce n'a été qu'une formalité. Le commissariat spécial de police a visé nos passeports..."