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mardi 11 mars 2025

CARNAVAL, merci la revue FOLKLORE (2ème partie)

Aude ! à associer sans complexe à la Belle Aude ! Des stations de ski aux plages du Golfe du Lion, presque tout le long du fleuve donnant l'identité administrative, un cours d'eau des plus travailleurs, “ petit frère du Rhône ” pour son delta, pour le Cers, vent de couloir, catabatique, pouvant se comparer au Mistral et, entre parenthèses, des plus vieux noms de vent de France depuis les Romains (aux présentateurs météo verbeux qui voient partout des tramontanes d'en prendre de la graine !), un département plus que trait d'union entre Massif Central et Pyrénées, entre Espagne et Italie sinon le reste du pays et au-delà l'Europe, entre Méditerranée et Atlantique, un département qui n'est pas en reste dans le domaine civilisationnel (est-ce pour cette raison que la radio d'État, présente dans l'Hérault et les P.O. nous snobe ? Est-ce pour cette raison que les descendants des barons du nord ne savent pas qu'entre Sud-Est et Sud-Ouest existe un Sud ? [dernièrement lors d'un jeu télé, un viticulteur des Corbières a tenu à affirmer ce distinguo, ce qui ne fut pas sans me plaire !]). Originalité culturelle sinon rareté, sur un demi-siècle, grâce à de passionnés érudits cette publication de la revue Folklore qui, grâce à René Nelli, nous en apprend tant sur les fêtes carnavalesques chez nous ; ci-dessous, la suite des infos et éclairages sur carnaval après les neuf relevés du précédent article :   

*10. Des quêtes alimentaires par des jeunes gens ou des enfants qui recevaient du lard, des œufs, de la charcuterie. (Est-ce en lien avec la tradition des « Vingt sous dins la padeno » ? Poser la question c'est déjà y répondre, me semble-t-il). 

Carnaval_Strasbourg 2014 under the Creative Commons Attribution 3.0 Unported license. Photographe Sandra Gruneisen

*11. Les masques faisant peur aux enfants et aux filles peuvent aussi marquer la présence des morts parmi les vivants. Afin de mieux s'opposer au carnaval, l'Église, abondant dans le sens de la superstition des deux garçons masqués qui seraient trois, le troisième ne pouvant être qu'un mort ou le diable, s'est de tous temps évertuée à freiner le goût des mascarades (1).  

*12. En 1950 déjà, les coutumes et pratiques de carnaval sont en régression, le carnaval de Limoux représentant une exception à la règle : c'est l'époque où les meuniers allaient payer les impôts au monastère de Prouilles qui possédait tous les moulins, les charretiers assuraient, eux, le transport des grains et de la farine. 

Membre_de_la_banda__Les_Arcadiens__al_Carnaval_de_Limós_dins_Auda_(França) 2006 under the Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International license Autora Guilhelma
Occitan : 
Precedissent la musica, las bandas sortisson a l’ocasion de la jornada que lor es reservada, e van aital d’un cafè cap a l’autre (Aurora Guilhelma).

Limoux_Carnivale_2024 under the Creative Commons Attribution-Share Alike 2.0 Generic license. Author Rebecca W


*13. Au début du XIXème le carnaval restait marqué par l'écart entre classes sociales, à Limoux, les fils de bonnes familles en meuniers blancs sur des chevaux noirs offraient des dragées aux dames tandis que, plus peuple et à pied, d'autres masques, à l'aide de soufflets,  projetaient de la farine sur les visages. Les Fecos sont toujours les meuniers souvent en Pierrots, Arlequins, Colombines, les Goudils, vêtus de hardes ou de la blouse bleue des charretiers, représentent les plus humbles. 

*14. Exécuter Carnaval, c'est aussi refouler “ la Vieille ”, l'ultime attaque du froid fin mars début avril. 

*15. Carnaval porte parfois un nom lié à l'actualité par exemple Landru à Bassan (Hérault). 

*16. Entre 1780 et 1789 à Carcassonne, Carnaval se nomme “ Cravatat ”, il sera brûlé avec sa femme. Suivant les lieux, Carnaval peut être fusillé, pendu, noyé. 

*17. Si de nos jours il s'agit de confettis ou d'eau parfumée, le mercredi du nom, on jetait des cendres et de la farine sur les filles (à Pignan, Saint-Thibéry, Limoux).  

(1) parmi les fêtes liées à carnaval, celle de la procession du renard. Affublé de la mitre et du surplis d'évêque, le renard est promené en ecclésiastique à portée de poules que par instinct il trucidera avant la fin de la cérémonie... Sûr que cet anthropomorphisme pour critiquer le clergé ne devait pas plaire à l'autorité religieuse ! 

lundi 10 mars 2025

CARNAVAL, merci la revue FOLKLORE (1ère partie)

 Folklore-Aude est une revue trimestrielle parue de 1938 à 1988, soit 208 numéros par le « Groupe Audois d'Études Folkloriques ». Loin de la connotation moderne péjorative du mot « Folklore », la réflexion, le travail, le choix des thèmes ethnographiques (il s'agit souvent de fixer par écrit des traditions orales) sont menés par d'éminents passeurs de culture passionnés (quelques femmes aussi), impliqués, pour nombre d'entre eux, dans les mouvements de renaissance occitane (dont René Nelli [1906-1982], professeur, écrivain / Louis Alibert [1884-1959], pharmacien, grammairien de l'occitan). 

Revue Folklore par garae.fr

À partir de 1981, grâce à René Nelli (1), le Garae (Groupe Audois de Recherche et d'Animation Ethnographique) prend le relais pour la publication de la revue. Nous lui devons la numérisation de tous les numéros (taper Folklore Garae). 

René_Nelli_à Bouisse 1975 under the Creative Commons Attribution 4.0 International license. Source Mais enfin qu'est-ce que l'Occitanie ? Editions Privat 1978 Auteur Charles Camberoque

Dans le numéro 1 de la 13ème année, printemps 1950, l'article « Carnaval-Carême en Languedoc » de René Nelli, s'avère représenter une mine d'infos et éclaircissements m'amenant à retenir quelques notes au fil de l'article : 

* le jugement concernait Carnaval et également les filles qui “ avaient fauté ”, une tradition remontant aux environs de 1660. 

** la chemise de nuit de femme dans le déguisement récurrent de carnaval, plus longue que celle des hommes est à rapprocher de celle portée lors des révoltes telle celle des Camisards des Cévennes (1702-1710), celle de la Guerre des Demoiselles en Ariège (1829-1832 puis larvée jusqu'en 1872).  

***  vers 1830, le déguisement de l'homme sauvage est en vogue, il consiste à se rouler dans le miel puis dans du duvet ; une couronne de plumes de coq sur la tête le complète.

**** À Limoux la blouse blanche du meunier s'est peu à peu confondue avec le costume d'Arlequin, de Pierrot, de Colombine ; la blouse bleue du charretier dont le fouet s'est mué en carabène porteuse de rubans représente le petit peuple. 

***** En Ariège le déguisements en ours est commun plutôt pour la Chandeleur. (en est-il de même en Roussillon ?). 

*6. Le barbouillage des visages (lie de vin, suie, encre) autorisait les débordements grossiers.

*7. Connexe au défilé de carnaval, le plaisir de souiller les spectateurs : éclabousser en sautant dans la boue, enduire les masques de merde pour danser le branle des paillasses en se frottant aux spectateurs (Cournonterral / Hérault). 

*8. À Carcassonne vers 1900 des masques se baladaient avec une caisse dans le dos : une mince couche de confettis (pour les gens tentés d'en prendre une poignée) surmontait un fond d'excréments...  

*9 les masques jetaient avec violence de l'eau, de la farine, des haricots, des fruits, surtout sur les femmes. Plus de douceur et de gentillesse (bonbons, dragées) après 1939. 

Château_de_Bouisse_(Aude) 1900 under the Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International license. Auteur 2017 Sdo216

(1) Né et décédé à Carcassonne / Docteur ès lettres, professeur de lettres et de philosophie au lycée de Carcassonne puis d'ethnographie méridionale à la faculté des lettres de l'Université de Toulouse, poète essayiste, hermétiste, René Nelli est surtout connu pour ses travaux sur la culture occitane et sur le catharisme. Dans les années 50, il acheta le château de Bouisse, village des Corbières Occidentales au climat “ marges de montagne ”. Mon père, François Dedieu, l'a eu en Lettres, classe de Seconde au lycée de Carcassonne ; les élèves le surnommaient “ Cosaque ”. Nous lui devons  « Un résumé d'un très bon article " L'alimentation en Languedoc et dans le Comté de Foix de 1850 à nos jours " de la revue Folklore n° 61, hiver 1950, par René Nelli... ». 

Partager le Voyage: LA NOURRITURE, avant, dans nos contrées... (1)

Partager le Voyage: La NOURRITURE avant, pendant les gros travaux, les fêtes et le dimanche (2)

Partager le Voyage: La NOURRITURE avant (1850-1950) puis dans les années 60... (3) 

Sources Occitanica avec Daniel Fabre (1947-2016) « Un demi-siècle d'ethnologie occitane : autour de la revue Folklore » Carcassonne, mai-juin 1982.   

André Ducasse-La_Guerre_des_Camisards-Hachette Domaine public. Guerre menée à un contre dix par les protestants porteurs de camisas (chemises) contre les troupes de Louis XIV coupable d'avoir révoqué l'Édit de Nantes (1685). 


FrenchForest Code Code forestier Domaine public, numérisation 2010 Author Lamiot. 

Inspiré de celui de 1669, ce code est promulgué en 1827 : il restreint encore les droits d'usage des paysans sur les forêts. Il déclenche notamment la « Guerre des Demoiselles » en Ariège. 

« ...prive en effet un certain nombre d'habitants de bois mort pour le chauffage, de feuilles mortes utilisées pour les animaux dans les étables ou comme engrais, de bruyères et de genêts qui servent de fourrage, du pacage pour le bétail et de la cueillette des baies et fruits sauvages et de champignons ». Naître et mourir dans l'Outre Forêt, Daniel Peter, directeur de thèse (1835-2020). (L'Outre Forêt se situe à l'extrême nord de l'Alsace).