Aude, Languedoc, Tchécoslovaquie, Ariège, Pyrénées, Océan Indien, Lyon, Brésil, ports familiers mais unique maison des humains. Apprendre du passé, refuser la gouvernance cupide suicidaire. Se ressourcer dans l'enfance pour résister, ne pas subir. Passer ? Dire qu'on passe ? Sillage ? Aïeux, culture, accueil, ouverture aux autres, tolérance, respect, héritage à léguer (amour, écoute, cœur, mémoire, histoire, arts...) des mots forts, autant de petites pierres bout à bout qui font humanité.
mercredi 30 avril 2025
lundi 28 avril 2025
Pitons de LA FOURNAISE, des NEIGES et RÉUNIONNAIS (fin)
Piton_de_la_Fournaise_&_piton_Rouge 2012 under the Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported license. Author B.navez |
La Fournaise, la fille-volcan fougueuse, révèle les Réunionnais, une mosaïque d'Afrique, de Swahili, de Madagascar, d'Inde, de Chine, d'Arabie, de Métis, d'Europe pour ce qu'elle a porté de chaînes... Et tout “ ça ” fait peuple... Un peuple si attachant dans ses pudeurs, sa réserve... un peuple volcan dans l'océan, un peuple discret, sans prétention sur le Monde qu'il agrandit à l'insu de son plein gré, donc sans s'en vanter, par la capacité de ses différences à coexister, à tolérer l'autre dans ses nuances. Certes, si la frustration peut culminer en colère, ce qui souvent caractérise les communautés trop quiètes en apparence, ce peuple irradie avant tout comme il brille en éclats d'olivine sur ces plages nouvelles qu'un océan peu rancunier crible incessamment, là où la mer bouillonna un jour sous un mur de lave.
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Piton_des_neiges_Reunion 2005 under the Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported license. Author Mzelle Laure |
Le Piton des Neiges, l'aïeul, le vieux, raconte les “ Rénionais ”. Mort pensez-vous ? Que nenni ! À plus de 3000 mètres de hauteur, il domine sa création, dernière-née (1) des entrailles terrestres, l'île jadis vierge puis par vagues investie. À la longue histoire géologique opiniâtre se greffe celle des Hommes, courte et bornée. Le père-volcan en témoigne. L'érosion et de possibles effondrements cataclysmiques ont formé quatre cirques. Si recouvert par une ultime coulée, celui des Marsouins, le quatrième, n'a pas offert de conditions favorables, trois d'entre eux, Salazie, Cilaos, Mafate, fermés par des abrupts et Remparts, restent marqués par le sursaut salutaire de ceux qui osèrent fuir l'asservissement, le travail forcé, les sévices, le traitement inhumain, le terrible racisme esclavagiste.
Voilà comment depuis Toulouse, Montauban, les révoltés contre la dictature franquiste, Étienne Roda-Gil, le Cœur Volcan de Julien Clerc, nous sommes passés aux volcans de l'île de La Réunion, aux révoltés premiers de la liberté et à ceux, de nos jours, qui n'exigent que d'exister...
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Mafate_Marla_from the Taibit pass 2012 under the Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported license. Author Fabimaru |
Émotion à voir et entendre à Marla, un des îlets de mémoire perchée, l'accueil aimant des marmay (les enfants) pour Marie-Paule (2), la maîtresse d'école avec l'accent du Midi, une émotion d'autant plus prenante pour avoir aussi connu là-bas, à La Réunion, à Mayotte comme ici en métropole, la confiance sans couleur, sans accent et sans âge que vous donnent tous ces enfants du Monde qu'on ne peut que soutenir et aimer... Remonte aussi le sentiment fort éprouvé à la vue du Piton Anchaing, du nom de cet esclave de légende mais si réel, accroché avec Heva son aimée sur ce pic inhospitalier où ils eurent des enfants... où ils eurent à subir la chasse à l'homme... Remonte encore ce bouquet de rameaux lourds de litchis laissé à notre intention en haut du mur par le voisin, toujours entendu malgré la discrétion de nos vies familiales mais jamais vu : un geste fort et marquant. Ne traînons pas sur ces frissons qui n'en finiraient pas de remonter des tréfonds de nos êtres tels les trémors d'avant éruption...
(2) la maîtresse de classe unique a pris sa retraite en 2022, après 12 ans à Marla, l'îlet le plus haut du Cirque de Mafate, seulement accessible après une longue marche de descentes et montées depuis le littoral. Le documentaire d'Arte ne précise pas de quelle ville de la côte elle part, tous les lundis matin.
dimanche 27 avril 2025
De FIL en AIGUILLE jusqu'aux VOLCANS de LA RÉUNION (1)
Se raccrocher à des hasards, des coïncidences... ce doit être pour demander que vous excusiez l'inspiration au nom de chacun de nos semblables, depuis qu'un mot de Jules Michelet éclaire soudainement de sa justesse, convainquant, en substance, que, par son contexte unique, chaque être est une humanité, une histoire universelle.
Nous étions avec Nougaro et un ami réagit aux articles : il ajoute que l'artiste avait besoin d'un remontant avant de monter sur scène, tant le trac l'éprouvait. N'était-ce pas pour excuser son inspiration, parce que ce souffle créateur exhalé dit trop de la part d'intimité, de toute une impudeur, finalement, livrée au public ? Un artiste ne se met-il pas à nu devant la frilosité relative de rangs d'oignons à plusieurs peaux ?
Le_Pont-Neuf_de_Toulouse 2014 under the Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International license. Auteur Didier Descouens.
Nous étions avec Nougaro en concert. L'album live qui a suivi joue avec les mots « hombre et lumière » sauf que c'est bien « hombre » qui est écrit. Tant pour la musique que dans les paroles, l'inspiration de Nougaro bat souvent au diapason de Toulouse, Toulouse refuge de survie de la République espagnole après 1939. Ce concert se déroulait Port Viguerie, non loin du quai devant être dédié, en 2009, aux Républicains espagnols exilés.
On se raccroche aux hasards, aux coïncidences qu'on peut ou alors, c'est que ces dernières sont des boules de bardane que le sort et les autres accrochent à nos basques. Chansons, Toulouse, Espagne, guerre civile, exil, Garonne, presque un champ lexical où s'ajouterait Montauban, pas loin de Toulouse...
Montauban, nous y sommes avec Estèva Roda-Gil (1941-2004), né de parents catalans réfugiés à Montauban, encore la brûlure à vif de la guerre civile espagnole qui remonte. Et aussi qu'il faut vivre tant que la mort nous épargne... Étienne Roda-Gil est parti à 62 ans, comme son père Antonio Roda Valles (1908-1966). À Paris, ils eurent à affronter la xénophobie... Xénophobie ? un mal à ajouter à notre champ lexical ?
Étienne Roda-Gil était un des paroliers attitrés de Julien Clerc ; en 1971, on lui doit la poésie du « Cœur Volcan », de quoi m'obliger à joindre “ destin ” aux hasards et coïncidences. C'est que la destinée m'a amené à passer des années à La Réunion, l'île volcan, dont trois juste au pied de la Fournaise, à Piton-Sainte-Rose... un chapitre qui, tel le magma 3000 km sous nos pieds, n'arrête pas de couver. Rien dans ce blog jusque là ; à croire encore que le temps reste devant soi alors que la camarde fauche sans discernement. Hier encore, avec un film et l'évocation de Marcello Mastroianni (1924-1996) elle a rappelé que pour tous, célèbres ou anonymes, le temps du rêve est compté et que si j'avais connu le sort de Marcello il y a longtemps que je ne serais plus.
Piton_de_la_Fournaise éruption de 1981 under the Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported, 2.5 Generic, 2.0 Generic and 1.0 Generic license. Auteur Jean-Claude Hanon
Alors cela devient fâcheux de toujours se hâter lentement, de patienter l'irruption éruptive sempiternellement latente, de se croire Piton de la Fournaise, rouge, pas à blanc, surtout pas en chandelles et bombes volcaniques de ces tueurs que sont les volcans gris. Qui plus est, de ne pas parler des larmes de la Terre (1) s'épanchant en fontaines, même en gerbes jaillissantes, découlerait d'une ingratitude alors qu'à la nuit tombée, depuis l'Enclos, jardin du géant, la vue peut donner loin sur les fontaines de sang et tout près sur la coulée qui barre la route, coagule mais ouvert de ses crevasses sur un flot rougeoyant. Et un regard sur l'assistance où badauds nous faisons corps, ouvre sur tout un peuple uni au spectacle.
(1) on doit cette jolie image du volcan qui pleure au dessin d'un marmay (enfant) de là-bas...
mercredi 23 avril 2025
DÉTOURS dans les CORBIÈRES pour NOUGARO (fin)
1962, une petite fille en pleurs, 1963, je sors du collège historique de Pézenas (1597) : mystère en dehors des remparts mais, dépassant le repli moyenâgeux du château à l'abri de ses murs, la résidence du domaine de la Grange des Prés, carrément en rase campagne, lui est antérieure. (Comme le prisme des violences actuelles et l'Histoire forcément condensée nous portent à croire que le passé n'était que sang et batailles).
DÉTOURS pour NOUGARO dans les CORBIÈRES (1).
Merci encore, tu es dans le vrai, les chansons font songer jusqu'à divaguer, partir ailleurs ou revenir sur le film de sa vie, du chemin qu'elle aurait pu prendre ; il s'en trouve toujours une qui soit vous oblige à fredonner, ou qui, sans rien de la musique, ne livre que les quelques pieds de mots triés par la mémoire ; rengaine en boucle mais cachotière si elle ne donne que son air, souvent en résonnance avec une affinité esthétique sinon une période de sa vie, un cap à passer ou indépassable ; taquine quand elle revient pour s'éclipser, en tac-au-tac à la flemmardise à noter, afin qu'on la mérite, augmentant la difficulté, sans laisser la moindre petite piste de trois notes, complice souvent d'un sentiment fort, d'émotion, de tristesse, d'amour ou parce qu'on s'imagine, manière de pimenter le train-train.
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Rue_Condeau,_vue_sur_le_clocher_des_Minimes_-_carré_(Toulouse) 2024 Auteur Abdoucondorcet |
mardi 15 avril 2025
BALADE à AUDE (5) jardins et gabions.
Et les oiseaux ? À part les groupes joyeux de passereaux (je suis bien embêté pour en déterminer l'espèce !), à la vue de leurs becs recourbés, un vol de quatre ou cinq ibis à la plume sombre, remontant la rivière et plus loin, une bande caquetante de canards ou sarcelles, à l'oreille sans le moindre doute bien qu'invisibles malgré une incursion au bord de l'eau.
(1) la floraison, la maturation des fruits suivent le rythme saisonnier alors que la fête de Pentecôte tombe, suivant les années, entre le 10 mai et le 13 juin. Les deux calendriers pourraient concorder cette année sinon en 2030 ou 2038, qui sait ?
(2) Faut avouer qu'avec Jo (1949-2024), dans une camaraderie synonyme d'amitié, de chasse, de course à pied, de belote, de pêche à Aude, de soirs de bals à St-Pierre-la-Mer, l'élevage de loisir des graines de vers à soie nous a fait prélever des rameaux de mûrier. On n'avait pas idée alors qu'on volait sûrement... Faute avouée...
(3a)ainsi nommé non par chauvinisme mais parce qu'on devait ce passage historique aux dominicains de Notre-Dame-de Liesse autorisés à exploiter une barque pour les pèlerins venant de l'Hérault. À la Révolution, la vente de la chapelle à la famille Vaillant de Lespignan la préserva des déprédations. Elle ne fut donnée à l'Association diocésaine de Fleury que récemment, entre 1935 et 1949, durant la charge paroissiale de l'abbé François Gleizes... Moralité : le pont de Fleury est aussi le pont de Lespignan... (Sources : Canton de Coursan, Vilatges al pais, 2005, Francis Poudou / De Pérignan à Fleury, 2009, Les Chroniques Pérignanaises.)
(3b) Une fois, en relevant les palangres, Robert le pêcheur m'a montré la tige d'un guignier de 3 ou 4 bons centimètres, cassée net certainement par un gros loup parti avec l'hameçon. On sait ce que valent les témoignages et souvenirs des pêcheurs ou chasseurs (« Cassaire, pescaire, toutis de blagaires »). Quoique, pour reprendre en gros le mot de Marie Mauron, ce n'est qu'un pêché véniel d'exagérer un peu par amour des gens, du pays... Maintenant certains y pêchent le silure au toc, et ça je l'ai de mes yeux vu...
Gabion en état au pont du ruisseau du Bouquet. |
samedi 12 avril 2025
BALADE à AUDE (4), non-dits et fausses pudeurs...
Continuons avec la bordure nord de la Clape, notre montagnette que le fleuve a de toujours su contourner...
Les prés, bordure nord de la Clape - Image d'archive. |
Petit pont sur le ruisseau du Bouquet. |
La longue ligne droite coupe dans les prés du Pastural et de Négo Saumo (une ânesse s'y serait noyée), longeant les Caudiès, étranges exsurgences d'eaux tièdes, du moins ne gelant jamais ; tout au bout, là où finit en beauté ce long de la rivière, avec un élargissement valant un plan d'eau, la confluence du Bouquet et son vieux pont en dos d'âne ; sur l'autre rive, de la campagne de la Bâtisse, la rangée sublime de pins, le toit éventré, d'un pigeonnier peut-être, complétant une vision des plus bucoliques.
...Comme à la Barque Vieille avec toujours cette nostalgie d'antan qui s'autorise à refaire surface : une vigne à vendanger non loin d'une berge entre roseaux et peupliers ; les grands défendaient qu'on s'en approchât, de quoi au contraire éperonner l'imaginaire... La barque ? de Charon peut-être, le passeur étudié dans nos humanités ? Non, un bac, sûrement, pour l'autre rive... Un vieux pêcheur alors ? Jusqu'à braver l'interdit un jour, jusqu'à piétiner le sable et prendre des ablettes à la mouche de cuisine suite au plaisir des lignes dans « La Boîte à Pêche » de Maurice Genevoix manière de répondre à Robert faisant croire aux autres qu'avec les ablettes ou le silure je ne raconte que des histoires... Et un jour on apprend que notre rivière est une barrière empêchant une migration des espèces vers le nord, une frontière linguistique à propos de la prononciation de l'occitan, du vocabulaire aussi, en deçà et au delà du fleuve (à suivre).
mercredi 9 avril 2025
BALADE à AUDE (3) Interdit aux moins de 70 ans !
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Indigo-zinzolin ? |
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Oui, malingre, chétif mais je ne peux le renier, mon premier de l'année, fin mars. En huit jours, c'est une véritable explosion de coquelicots, d'iris et la bourrache presque en tapis... |
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Des vraies ? |
Comme pour contredire le « Printemps inquiet » d'Alfred de Musset, les fleurs sauvages ou ensauvagées semblent se rire des bourrasques du Cers, ce jour-là, fortes et pressantes pourtant de plus d'une centaine de kilomètres par heure : l'iris rit de devoir rabattre ses jupons indigo- zinzolins, ceux du petit coquelicot ne s'envolent pas non plus. Sinon, pour résister, faudrait-il être en plastique ? du bout des doigts se confirme que non : ces fleurs n'ont pu qu'échapper à un jardin.
Descendre le chemin vicinal de la plaine, le long, d'abord, de la Cave de la Communauté... un champ, jadis de melons, m'oblige au souvenir de mon pauvre cousin Jacky (1952-2007). Le fossé change vite de nom, prenant celui du dernier affluent du fleuve, au cours si original depuis la cuvette de l'Étang, en principe fermée et que les hommes ont pourtant réussi à assécher en lui faisant passer les collines.
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Merci l'IGN ! |
Un peu en amont de ce Ruisseau du Bouquet, à Aigos Claros, le grand-père de Jacky, mon grand-oncle Noé (1901-1978) entretenait un jardin fertile grâce à une posaranca, un balancier pour puiser et remonter l'eau de l'arrosage (« chadouf » en “ français ” !). Jacky, Noé et entre les deux, encore d'un commerce des plus plaisants, le père, Norbert (1924-1989), mon parrain.
Détournez-vous, vous dans la fleur de la jeunesse, d'un propos qui devrait être interdit, disons, aux moins de 70 ans car après, pour ceux qui vieillissent petit à petit, l'idée de la mort se domestique, bien que couplée à celle de la vie en fleur, à l'image d'un printemps enthousiaste, présomptueux... Pour preuve, au grand soleil, le vélo qui file, vent arrière, bien huilé, sans bruit parasite, même avec l'air, la voix de Brassens (1921-1981) en tête, sur une partie du poème de Lamartine (1790-1869) « Pensée(s) des Morts » (le mot se retrouve aussi au pluriel). Brrr, désolé, décrochez aussi, âmes sensibles de plus de 70 ans ! Pour ma défense, Lamartine a alors 40 ans ; dans sa famille c'est une véritable hécatombe, la tuberculose, le choléra ont frappé. Néanmoins, lui même a commenté :
dimanche 6 avril 2025
BALADE à AUDE, vandales et infects (2)
Laissons le cabanon abandonné, livré à quelque chemineau des temps modernes, de ces asociaux ou pas gâtés par la vie jusqu'à ces marginaux qui ont pu s'y abriter mais qui laissent des traces trop visibles de leur passage, de leur squat. Si n'étaient que les cendres d'un feu pour se réchauffer, pour cuire, souvent c'est souillé par des ordures, des inscriptions donnant plus l'idée d'une rancœur contre la société, d'une intolérance agressive plutôt que d'une empathie solidaire ; pour preuve, alors qu'on voudrait voir si un râtelier, une mangeoire, parlent des chevaux compagnons de travail, tant la souillure racle la gorge, le mouchoir sur la bouche, on craint même de passer le seuil d'un tel havre déserté... En outre, à propos d'autres, catégorie de ces nouveaux occupants, propriétaires, héritiers ou illégaux, leurs chiens, garderaient-ils des cambrioleurs, restent souvent libres de s'attaquer aux promeneurs, manière d'interdire le passage légal devant ces métairies. Aujourd'hui dans le rejet d'autrui, ces mas, ces granges d'une vie d'avant, restaient alors interdépendants du village, de toute une communauté connexe.
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L'Horte d'Andréa sous un angle du souvenir... |
L'Horte d'Andréa, justement, aujourd'hui fermée au regard par force tôles et panneaux de bois dépareillés, jadis avenante avec sa treille des beaux jours. Andréa venait régulièrement vendre sa production potagère au fond d'une maison donnant sur l'ancienne place du marché à Fleury (1).
En revenant vers Notre-Dame-de-Liesse, pour ne pas dire vers l'autoroute qu'il faut longer, la grange encore mentionnée sur la carte IGN Béziers 7-8 (2) n'est plus. En reste le jardinet à l'étroit sur la rive, du temps de Cadène, et son rosier grimpant promettant des fleurs blanches, mais son terrain cultivé avec au moins un cerisier puis des melons d'été n'existe plus que dans le flou des mémoires.
Avec José, mon pauvre ami parti le 26 février 2024, nous occupions régulièrement un coin de pêche au muge, bien caché sous des guigniers encore généreux en arrière-saison. Là encore, la rivière me laisse le choix ou non d'en garder le souvenir. Plus pitoyable, ce qui demeure du coin affouillé par les eaux mué en dépotoir... aux vandales de passage se joint l'inconscient ordurier ordinaire...
Toujours sur ce retour, il me semble croiser Néné, ancien voisin de l'avenue de Salles, qui, avec les jeunes de sa suite, vient voir où en est l'immersion (3) destinée à contrer les remontées de sel dans les vignes de la plaine. (à suivre)
Maison de l'ancienne place du marché à Fleury. Photo : Josette Saborit-Dolques.
(1) de ces maisons détruites pour mettre l'église en valeur et faire une grande place ouverte agrémentée de poires d'or (symbole du village Pérignan) sur des jeux d'eau certes raisonnables mais à sec depuis que les sécheresses affectent notre bordure méditerranéenne. Je dois à Josette les précisions sur Andréa et cette maison de village où son arrière-grand-père fut jardinier ; elle continue de cultiver et de partager ses précieuses connaissances sur la vie passée du village, présente aussi puisque ceux de son âge (classe 47) auront le plaisir de retrouvailles annuelles autour d'un repas bien partagé.
Josette fut invitée un jour à entrer dans la demeure d'Andréa, bien arrangée. Mon ami Jean-Pierre, grand marcheur alors, m'a eu dit avoir parlé avec la femme du lieu (ce devait être Juliette, une des filles).
(2) de 1972, correspondant alors à ce que nous appelions “ carte d'état-major ”.
(3) Avant que le fleuve travailleur n'apporte petit à petit à son delta, ici était la mer autour de l'île de la Clape.
samedi 5 avril 2025
BALADE à AUDE, fin mars...
Ciel bleu. L'enveloppe a beau paraître belle, sans oiseaux elle n'est plus qu'un vide, une vacuité donnant le vertige ; la rareté des oiseaux dévoile leur triste situation de survivants en sursis. Et si c'était moins pathétique au bord de la rivière, là où une présence humaine, en apparence plus légère, donnerait moins ce ressenti de nature violentée ?
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Maribole : tout comme les endroits naturels ou cultivés, chaque portion de la rive porte un nom. Un nom qui presque toujours fait le lien avec un passé plus ou moins lointain. |
Hugues Aufray - Dès que le printemps revient - YouTube
Elle est de 1964 cette chanson... je n'ai pas 14 ans mais déjà la nostalgie de ce que peut-être ils appellent “ nos actes manqués ”... Allons, allons, même ce vélo ne peut évoquer une sortie avec Paulette puisque contrairement à Yves Montand et ses camarades, nous ne descendions à Aude, à bicyclette, qu'entre garçons, que pour une partie de pêche...
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Un cabanon comme tant d'autres, pour plus de commodités, outils, pause-repas, abri contre la pluie, lorsque les vignes sont plus éloignées du village. |
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Maribole, difficile d'imaginer nos lavandières... À Coursan, il reste au moins une sinon des cartes postales... |
Ici ce qu'on voit diffère de ce qu'on regarde quand on peut se plonger dans un passé, les fleurs d'abord, pas si banales suite à des sécheresses prolongées. Ensuite, à voir la rivière, c'est plus difficile quand on sait qu'ici venaient les lavandières. Par leur travail incessant, les eaux modèlent les rives comme si elles voulaient se défendre de l'emprise des hommes, comme si elles tenaient à effacer les traces, à gommer un passé des mémoires. Maribole, les femmes y descendaient pour la bugada (même papa a employé la graphie normalisée), la buée (1) , la lessive ; ce détail si lapidaire se suffirait-il ? Ces bugadieras particulières avaient normalement procédé à la cendre, au lessiu, à la maison, quelques fois l'an. Professionnelles, à laver pour les gens, descendaient-elles à la rivière régulièrement ? N'était-ce que pour des “ petites ” lessives, façon de parler, au savon ? Sinon par besoin de beaucoup d'eau, pour rincer ? (à suivre)
(1) du gallo romain “ bucata ”. Pour “ buée ”, le Larousse du XXème siècle (1928) dit que la signification “ lessive ” a précédé celle de vapeur.
vendredi 4 avril 2025
André... erratum
mercredi 2 avril 2025
ANDRÉ : perruches et oiseaux de Montréal... (3)
« Les paroles s'envolent, les écrits restent ». À ce jour jamais je n'avais entrevu la possibilité d'interpréter positivement ce vieux proverbe antique « Verba volant, scripta manent » ; ce n'est pas qu'il soit négatif en soi puisqu'il préconise la prudence, l'écrit, contrairement aux paroles, restant incontestable... Certes, la parole... « donner sa parole », « tenir sa parole », des expressions d'un monde virtuel de dignité, d'honneur, de confiance, qui n'a plus cours, seulement bon chez les idéalistes... « Parle toujours » ! C'est bon pour les candides, les naïfs... à d'autres !
Trêve de barguignage, au fait ! Des écrits capables de faire éclore une amitié en germe, à partir d'une vieille camaraderie de quartier, de village... Ils seraient plus que centenaires, nos deux amis, il n'empêche, cette amitié se transmet par héritage des pères, forgée qu'elle est dans des écrits, tant que les fils la portent... Chronique d'une vie, à grands traits, tout le monde n'est pas Proust...
Alors, accouche ! arrête de tortiller du séant pour exprimer que de dire cette amitié vivante, plus forte que la mort, ne relève pas du négatif.
André Pédrola, le fils d'Élise du “ quartier haut ”, a émigré au Canada en 1954, sauf erreur. On a eu dit de lui, non sans un brin de condescendance, qu'il avait vite pris l'accent de la Belle Province, un parti-pris pour le moins lapidaire lorsqu'on apprend qu'André tient fort à ses origines, que pour son entourage familial, en 2001, à 77 ans, il s'est lancé dans sa chronique, son passage de témoin ; ses proches, eux, le savent ; ils envoient ce qui a trait à son pays natal ; Lulu de Fleury qui a émigré à Coursan, soit dit en passant, leur a envoyé « De Pérignan à Fleury » des Chroniques Pérignanaises (2009) de même que « Caboujolette » et « Le Carignan », « Pages de vie à Fleury » notre diptyque à portée limitée de 2008. En interférant, la surprise inattendue que nous fait André tient du miracle ; il nous associe à son clan de confiance, à son passage de témoin, au partage de nos trajectoires, mettant dans le pot commun ce que nous avons chacun, de particulier, de privé, d'intime...
Simone et André. |
« Chaque homme est une humanité, une histoire universelle » (1861) Jules Michelet (1798-1874).
Oui je sais, je suis long mais un jour il faudra bien une introduction au legs d'André. Qu'on me pardonne, c'était au sujet des oiseaux, passons lui la parole, enfin... écrite... nous nous comprenons :
« Longueuil ce 22 mars 2010.
Ce matin, c'est la bonne odeur du café qui m'a éveillé en chatouillant mes narines. Simone, ma merveilleuse épouse, vient d'enlever la couverture de la cage des perruches et leur a ouvert la porte. Aussitôt elles sont sorties pour se dégourdir les ailes. De mon lit je les entends jaboter comme de petites commères. [...]
J'ai jeté un coup d'œil pour voir si mes voisines, qui logent dans le grand sapin étaient là.
Les trois couples de tourterelles avaient quitté leur nid, pour profiter du soleil sur le bout des branches, côté levant. En arrière ce sont les magnifiques, mais peu hospitaliers, geais bleus qui ont élu domicile dans le grand cèdre jouxtant le patio. Ils ne tolèrent pas les autres oiseaux dans les parages. Après un bref séjour dans la salle de bain, je suis entré dans la cuisine [...]
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Melopsittacus_undulatus_-Temuka_Aviary-8a 2009 under the Creative Commons Attribution 2.0 Generic license. Author Gabriel Pollard |
Entrée triomphale acclamé par mes petits oiseaux grimpeurs l'un bleu, l'autre jaune et vert. Tandis que je m'installais à table ("taple" à Fleury) ils, ce sont des mâles, sont entrés dans leur cage pour manger quelques graines. Puis ça été la comédie habituelle de chaque repas, ils veulent du pain.
Alors le bleu qui, bien que plus jeune que son compagnon, semble tout régenter, sort de la cage et fonce vers moi, frôlant mes cheveux et retourne chez lui attendant le petit morceau de pain rôti. Il est encore plus virulent au repas du midi, car ils adorent les petits pains mollets que je boulange une fois par semaine. [...] Tandis que je fais les mots croisés, cachés et autres, je vois arriver, sur les câbles qui leur servent d'autoroute nos petits amis à la fourrure grise et à la queue touffue, les écureuils. Pas farouches, ils viennent manger dans la main et se laissent caresser. Les autorités conseillent de ne pas les nourrir pour ne pas augmenter leur population, mais Simone est incapable de résister. Il se tiennent debout sur les pattes arrière celles de devant, bien plus courtes, croisées sur la poitrine, en remuant la tête, comme pour implorer, devant la porte du patio. Il y a un qui tape sur la vitre avec son museau, comment veux-tu refuser ! Simone leur jette quelques noix ou pinottes et c'est la corrida. Ça court de partout les écureuils après les geais qui veulent leur part du festin, et aussi entre eux, chacun voulant en prendre le plus possible dans la gueule pour aller les cacher. Ils en enterrent partout et souvent ne se rappellent plus où... ».
André Pédrola.
Voir aussi Partager le Voyage: AMITIÉ, AMOUR, TOUJOURS ET A JAMAIS ! / Fleury d'Aude en Languedoc.