mercredi 23 avril 2025

DÉTOURS dans les CORBIÈRES pour NOUGARO (fin)

1962, une petite fille en pleurs, 1963, je sors du collège historique de Pézenas (1597) : mystère en dehors des remparts mais, dépassant le repli moyenâgeux du château à l'abri de ses murs, la résidence du domaine de la Grange des Prés, carrément en rase campagne, lui est antérieure. (Comme le prisme des violences actuelles et l'Histoire forcément condensée nous portent à croire que le passé n'était que sang et batailles). 

Pézenas Façade du vieux collège Henri IV, avec, au dessus de mon petit bouchon, la plaque honorant Paul Vidal de la Blache


De petites rues étroites donc, avec des petits balcons de faubourg espagnol, dont un échangeant presque avec celui en face... Par une fenêtre ouverte s'échappe « Cécile ma fille ». Nougaro a poussé à jamais ma porte. C'est sous ce balcon que je crois entendre aussi « Je suis sous », mystère encore puisqu'en 1964, à la sortie de la chanson, je ne suis plus à Pézenas. Mais quelle prétention à faire venir ainsi à soi un artiste majeur ! plus encore, si on me pousse, à bien vouloir le partager en dehors de l'Occitanie ! Vanités des vanités et omnia vanitas, quelle stupéfaction d'apprendre que Nougaro s'est trouvé un refuge dans les Corbières, lui qui dit « ... moi qui suis plutôt un nougarat des villes qu'un Nougaro des champs... » et moi, pauvre ver de terre en amour pour les étoiles, qui ose partager ce sentiment pour nos Corbières au motif que plus d'une vingtaine de mes articles cernent ce massif... Toujours cette prétention à se faire valoir par un meilleur que tous, que soi. Pour ce qu'ils valent, ces articles d'une vanité impuissante à me transformer un jour en ne papillon... 

Magne-Nougaro-Mones1980 under the Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International license. Auteur LDME15 autre version File Michel Magne 1980
Michel Magne (1930-1984, ruiné, a mis fin à ses jours) a composé nombre de musiques de films célèbres (Wikipédia). À droite Bruno de Monès (1952-), photographe, a réalisé des affiches pour les concerts de Nougaro en 1981 ainsi que deux pochettes de disques dont « Chansons nettes » l'album de 1981. 

Nougaro (1929-2004), Claude de son prénom (avec “ Aude ” dedans, pas moyen de se guérir de l'impudence), a aussi su faire rimer rivière et Corbières, ces “ hautes ” terres souffrant avant tout du manque d'eau, d'un trop peu de pluies. Sacré Nougaro, “ Clode ”, qui, des Rimes au Verdouble, en passant par Cécile et Marie-Christine, me fait passer par tous mes états. Bien sûr il y a l'hymne « Ô moun pais, ô Toulouse », la Garonne à qui il a offert sa rivière du massif audois. 
« Rivière », un bien grand mot pour un ruisseau souvent à sec (2). Enfin, la poésie ne se discute pas... adhérer sinon passer son chemin... faut choisir, pas de juste milieu ! 
C'était un live, rive gauche, un concert port de la Viguerie, le 21 juillet 1998. Il a introduit sa chanson en évoquant les Corbières ; bien que prématuré, un Cers nocturne soulève les longs cheveux de son musicien aux claviers (3) alors que le poète poursuit avec « Beaucoup de vent » : un réconfort pour l'humain saturé de ville et qui peut enfin s'attarder sur la lune, les étoiles, la garrigue, le rocher, la vigne, les clochers avec, tant pis, la comparaison aux églises mexicaines, bien que surréaliste.        
Nougaro a eu la prudence de ne pas citer nommément Paziols (4), se contentant de faire rimer avec des bestioles : l'œil d'or des grenouilles, les poissons, les cigales et même l'hirondelle. 

Et hier, au-dessus du temps passé sur l'écritoire, de celui du néflier qui depuis décembre nourrit les fruits de ses fleurs, dans le bleu d'un ciel vierge, tout en haut, pour la première fois, une dizaine d'hirondelles, tout en bas les martinets fauchant l'air, criant si bien la vie, et entre les deux, le vol faussement nonchalant des crécerellettes. 

Faut vraiment grossir pour voir quelques oiseaux... finalement ce n'est pas plus mal... 

« Le ciel est, par-dessus le toit, si bleu, si calme... » Paul Verlaine. 
Le concert en plein air, Port de la Viguerie, a donné un album live « Hombre et Lumière », rime douloureuse, rappelant aussi la Retirada sous un ciel gris de neige, lui. « Hombre », homme d'Espagne, qui plus est pour Nougaro chantant sur ce « Quai de l'Exil Républicain Espagnol »... 

(1) Même l'Agly, fleuve côtier, ne coulait plus suite à plus de deux années de sécheresse avant qu'il ne reprenne, par le miracle d'un printemps 2025 plus arrosé. 
(2) membres de l'orchestre ne se cantonnant pas à accompagner, souvent impliqués pour la musique des morceaux : Nougaro ne manque pas, dans son tour de chant, de les citer
(3) entre curieux et autres paparazzi, de mentionner le village de Paziols aurait pu nuire gravement à sa tranquillité. Pas mariol du tout, il pouvait aller librement au café, échanger et y manger des sardines.   

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