samedi 24 septembre 2016

ITINÉRAIRE D’UN ENFANT GÂTÉ (IV) La Bourgogne profonde

Préalable : ce carnet de voyage est rempli d’erreurs assumées. Les corrections, grâce à l’Internet, ne viennent qu’après coup, en notes de bas de page. Merci.

Après le Café du Loup, une autoroute en direction du nord-est se remarque... Vers Dijon ou déjà vers la Lorraine (1) ? Toujours douter, principe aussi sage qu’universel. Réfléchir, quel qu’en soit le prétexte, par plaisir, pour contrebalancer les impressions trompeuses. 

Des grognements venus d’ailleurs se font entendre et comme quand elle lui a fait baisser le son de son jeu, la mère arrive à faire taire son second en répétant fermement « Non ! Non ! Non ! » tout en le pointant du doigt.
Qu’il faut être courageux pour élever un enfant trisomique ! Et pour en désirer un troisième ensuite ! Sinon, ce courage là ne s’appelle-t-il pas simplement et seulement "amour" ? L’acception d’un mot si banal s’oppose aux significations diverses qu’il revêt, complexes, déclinées comme autant d’exceptions sur-mesure. 


Sur un coteau, un village et ses pivots jumeaux, le château et l’église (2). Jusque là, les localités (le doit-on à ces vallons multiples et reclus de Bourgogne avec en bas les veaux au pré et les bois sur les croupes ?) vouées, on dirait depuis toujours, à l’élevage des charolais à viande, ne sont pas enlaidies par ces lotissements si communs partout, certes fonctionnels, adaptés au présent, mais se fondant difficilement avec l’architecture et l’histoire du pays. Quelque part à droite, Henri Vincenot (3) a enlevé les ronces pour rebâtir un hameau perdu... Quelque part dans la forêt, j’imagine le chêne vénérable qu’il étreignait de ses deux bras pour fortifier tant le corps que l’esprit... 


Sur ce rebord où naissent tant de cours d‘eau partis sillonner le Bassin Parisien, la maison typique présente des dimensions modestes : un parallélépipède plus haut que large coiffé d’un simple toit à double pente où l’ardoise a remplacé la tuile des bords de Saône. Qui a connu, au dos des boîtes de cacao (mais je peux me tromper), ces petites maisons des pays de France à découper puis à monter ? La magie d'un volume qui prend forme grâce à d'insignifiants onglets ! Qu’est-ce que j’ai pu aimer la cave du vigneron, l’étable attenante, la treille sur l’entrée bien exposée, le pigeonnier, ces noms de provinces, toute une géographie historique faisant autrement rêver que le blouguiboulga imbuvable des régions aujourd’hui empilées, jumelées, conglomérées, triturées par nos politicards dévoyés ! 


Petite rivière qui t’attarde sur le sable de tes contours concaves, qui es-tu ? Ce sont encore les vacances et je crois voir des gamins qui font tourner des moulins, d’autres qui cherchent des écrevisses sous les racines tandis que, plus sérieux, un grand surveille son bouchon. C’est seulement un des effets de l’anachronie passéiste qui m’affecte : la petite rivière (4) serpente, solitaire, sans même la vache regardant passer le train... 

(1) le Café du Loup (Saint-Martin d’Auxy / Saône & Loire). Sur le site http://www.cafeduloup.com/indexPC.htm, une photo de l’établissement avant 1903 ! De nombreux voyageurs l’ont découvert et le scrutent depuis le TGV : de nombreux messages en témoignent.  Pour les menus, il faut attendre le 26 septembre, date de la réouverture. Et si quelqu’un peut nous dire si les loups y étaient jadis plus nombreux qu’ailleurs...
L’autoroute, elle, se trouve plus loin : il s’agit de l’A6, à hauteur d’Avallon.
(2) Quel village ? Sur la carte, un nom se présente : Sully... Sauf que, si la mention du nom d’un vieil ami perdu m’a aussitôt frappé (je lui ai écrit aussitôt), le château, lui, est plus "Moyen-Age" que "Renaissance". Voyons, après l’autoroute... bon sang mais c’est bien sûr ! Ce ne peut être qu’Époisses ! Cela valait bien la peine d’en faire un fromage !  
(3) « L’alezane encensait au mitan de la sommière » Ma préférée ! Dire que son professeur de lettres, oublieux de l’histoire des mots, osa prétendre que ce n’était pas du français ! Tout un symbole !
Et en remontant sa trace, je tombe visiblement sur "La Billebaude" offerte (magie du Net) et que je vais illico relire plutôt que de débiter mes sornettes !
(4) Un ru juste après Époisses ou le Cléon ?.. de quoi en entretenir le charme... 

photos autorisées commons wikimedia
1. Château d’Époisses / auteur Cjulien21. 
2. Le pays d'Henri Vincenot / auteur Samrong01. 
3. Ce style de maison, pas le château et ses vignes author Havang(nl).

vendredi 23 septembre 2016

TOUR DE L’ÉTANG DE VENDRES (IV) / Mont de l’AQUAEDUCTUS, mamelon de VÉNUS...


Le soleil cogne. L’heure d’été le devance de deux tours : il est quatorze heures avec la chaleur de midi ! Et ce piémont du plateau en amplifie la portée ! La sécheresse a sévi cette année et les grains de raisins sont secs comme chevrotines. Heureusement que le bord de l’étang est arboré, contrairement à l’aval, vers le grau où la salinité domine. Une maison à gauche, sous les peupliers et les frênes ; un panneau indique « La Foulquière », un nom évocateur pour un rendez-vous de chasseurs. Depuis un moment, nous allons à rebours du chemin vicinal menant à Sainte-Germaine ; il est mal foutu, mal entretenu : tant mieux pour la tranquillité qu’on y gagne. Sur le versant, encore un panneau qui, cette fois, montre où voir ce qui fut un aquaeductus, un aqueduc des Romains. A des lieues du pont du Gard, ces vieilles pierres comptent, néanmoins : elles confortent dans l’idée que le coin, et à plus grande échelle le Languedoc, a toujours été favorable à l’installation humaine. Du temps des Romains, le site devait beaucoup ressembler à ce qu’il est aujourd’hui avec peut-être le grau ouvert sur la mer et un étang de Vendres en lagune saline... Nous suivons le sentier, aussi motivés que ceux qui cueillaient des mûres tout à l’heure. Un figuier dans la montée. Là-haut une pinède et la première maison sur sa parcelle lotie. Entre les deux, les pierres de Rome, un tronçon de canalisation, une forme de réservoir aussi peut-être (1). 


Un terrain de pierre terreuse ou de terre pierreuse, jaunâtre, qui rappelle l’oppidum d’Ensérune. Dans mes partis pris simplistes, j’associe la présence grecque au calcaire blanc : Leucate ( de leukós, λευκός  en grec ancien) (2), et plus loin le site archéologique d’Empuriès. Ne me demandez pas pour Agde au basalte noir (Αγαθή Τύχη (Agathé Tyché) (2)... je vous l’ai dit : la subjectivité dans tout ce qu’elle a de contradictoire...
Cette eau venait-elle du plateau du Crès ? L’aqueduc l’amenait-il au temple ? On le voit ce mamelon qui s’avance dans les roseaux, juste sous le soleil de l’après-midi. L’étang s’ouvre à droite comme un éventail piqueté de paillettes d’argent. Quelques oiseaux fouillent les vases. Quelques cris montent jusqu’à nous. Les cigognes doivent vaquer plus loin. 



Le voici, ce fameux temple mais les indications évoquent plutôt des thermes, le repos du marin, le vin du Crès et plutôt des vénus de carrefour que des offrandes pour une traversée réussie (3).
Personne sinon nous et un troupeau de chèvres en ce jour plutôt frais pour la plage. Dans un canalet qui en automne évacue les déluges venus des collines, nous dérangeons un héron pourpré (4), « oiseau entièrement protégé » disait une indication des ornithologues, plus loin, vers le Chichoulet et « qui ne doit pas être dérangé intentionnellement », précise la loi.   

(1)  trouvé sur http://jc34.eklablog.com/vendres-son-temple-de-venus-et-son-aqueduc-antique-a123506760
«... L'aqueduc a été vraisemblablement édifié à l'époque gallo-romaine. Il conduisait les eaux de la source du Théron située sur le flanc Est du Crès à la ville antique. Au titre de la corvée qui existait en 1725 les habitants de Vendres, sous la conduite de l'ingénieur Monsieur de Clapiès, réaménagèrent le conduit souterrain et jusqu'en 1864, les eaux alimentèrent les fontaines du village...»
(2) wikipedia  
(3) «... Deux fours chauffaient l'air qui arrivait dans trois grandes pièces par les interstices du plancher. Ainsi les valeureux romains pouvaient apprécier les différentes températures des pièces selon qu'ils s'éloignaient de la chambre de chauffe. L'étuve (caldarium) assurait une température élevée, puis la pièce tiède (tépidarium) une douceur plus acceptable puis enfin la pièce froide (frigidarium) permettait d'apprécier le bienfait des bains froids... » 
Pour plus de précisions http://jc34.eklablog.com/vendres-son-temple-de-venus-et-son-aqueduc-antique-a123506760
Merci encore jc34 !
(4) je crois qu’en languedocien de chez nous, nous disons « crac » pour ces grands hérons qui volent le cou rentré (confirmé par le dico cantalausa)
http://www.ieo12.org/d7/recerca-diccionari-cantalausa


photos autorisées wikimedia commons : 
1. Vendres étang auteur Fagairolles 34 (au fond, au sud, le massif de la Clape). 
2. Vendres aqueduc auteur Emeraude. 
3. Vendres étang avec vue sur le temple de Vénus auteur Mairie Vendres (au fond au-delà de l'Aude, le village de Fleury). 
4. Vendres temple de Vénus auteur Mairie Vendres. 
5. Héron pourpré photo Pierre Dalous.

mercredi 21 septembre 2016

LOUIS LA TOCANTE (III) / La roue tourne, l'heure aussi / Fleury d'Aude en Languedoc.

Il est le dernier à avoir mené un cheval à Fleury. Je me suis décidé, à force, à laisser mon golfe clair hypnotique, pour la garrigue, les vignes annonçant le village, à l’intérieur des terres. Sur une des avenues où, près d’un siècle et demi en arrière, les gagnants du grand boum de la vigne ont aligné en si peu de temps les maisons dites de maîtres, avec au moins deux fenêtres de chaque côté de l’entrée qui en impose, Louis l’ouvrier agricole a racheté un lambeau de celle qui fut peut-être la plus prospère de ces propriétés mais qui a fini vendue en morceaux.
« I a un tèms que trempo, un que destrempo » aimait dire Jeanil, le grand-père Dedieu, signifiant qu’après les jours fastes viennent les mauvais. Sagesse populaire à petite, à grande échelle, à moyen ou à long terme, que ce soit pour un individu, une famille, une communauté... La roue tourne.
Ses parents venus d’Espagne avaient, avant lui, réussi à devenir propriétaires d’une maison au village voisin.

Nous devions parler des chevaux mais Louis parle de son héritage. Il raconte :
«... Je rentre dans la maison de Salles je vois comme si c’était du son, je m’appuie à la poutre et boum une bonne partie est tombée ! Les termites ! C’était que nous n’étions pas d’accord avec mes frères. Moi j’étais ami avec les deux mais eux étaient fâchés. On s’est quand même mis d’accord pour la traiter. Un devis était à trois millions, l’autre à quatre... à l’époque c’était en francs. Quand il a eu fini de racler, de traiter, il a dit qu’il y en avait encore là-haut et que si on ne payait pas la rallonge d’un million il ne nous signerait pas le certificat de conformité. Quand on a voulu la vendre, les plafonds arrachés, une ruine, c’était une catastrophe. Ceux qui visitaient ressortaient de suite.
On aurait pu en tirer une quarantaine de millions, c'est à peine si on en a eu vingt et au bout de trois, quatre ans. Partagés en trois, après les frais qu’elle nous a coûtés, ça faisait plus grand chose pour chacun... »

Il en parle posément, sans que cela ne l’affecte outre mesure mais non sans regretter. Visiblement, il ne met pas en regard son bien présent. C’est vrai que le jardin compte beaucoup pour lui et qu’il en oublie peut-être la grande écurie à l’entrée, la maison pour les vendangeurs et derrière celle où logea monsieur Vidal, le mécanicien attitré du temps de Gibert-Crassous, accolée qui plus est à une remise aussi vaste que haute... La roue tourne... 
Ce qui n’était qu’une cour est devenu, par ses soins, un jardin luxuriant, son moyen d’expression mais aussi le biais pour éclairer sa trajectoire, évoquer sa famille. Un fauteuil sous le datura le repose quand les prothèses des deux genoux le fatiguent à la longue. Il ouvre toujours des parenthèses qui font revivre ses parents, la condition des ouvriers espagnols dans ce qui fut le culte de la vigne. Inutile de le couper, illustrerait-il une vérité profonde que Jules Michelet louant tous ses semblables, a eu le mérite d’exprimer :
« Chaque homme est une humanité, une histoire universelle » (1) Je le laisse aller, l’interrompant juste parce qu’il manipule imprudemment un rasséguet à souquets (2).
Je ne vais pas le perturber, pourtant, sans le vouloir, en prenant garde aussi de ne pas hacher son propos, je pousse un peu à la roue, plus par intérêt que par curiosité... Les chevaux, nous en reparlerons après.
Sauf que Louis, l’a-t-il entendue sonner au clocher ou à sa tocante sans que j’y fasse attention, part dans la remise tourner sa voiture. Il est onze heures, il n’a plus une minute à perdre, il doit y aller !  
Le portail reste grand ouvert sur une nature vivante du douanier Rousseau. Un panneau joliment décoré prévient « SI VOUS AIMEZ LES FLEURS, ENTREZ ICI ! » ou quelque chose comme ça... Vous n’y entendrez pas que le langage des fleurs, sauf qu’après onze heures, attention, le jardinier reprend sa peau d'homme ordinaire !   
  
(1) Histoire de France, tome II, livre VIII, 1. Václav Havel a aussi pensé ainsi, le concernant, quelques semaines après la chute du mur de Berlin :
« Chacun de nous peut changer le monde. Même s’il n’a aucun pouvoir, même s’il n’a pas la moindre importance, chacun de nous peut changer le monde ». 
(2) la rassègue est une scie ; c’est ce qu’on rappelle aussi à ceux qui reprennent à tout bout de champ la même rengaine... le rasséguet est la petite scie portative que le poudaïre (celui qui taille la vigne) fait suivre pour conduire et anticiper la croissance harmonieuse du cep. 

Pour voir Louis (photos sous licences) : 
page 5 http://www.communefleury.fr/files/ot-fleury/files/brochures/pdf/vignoble_septembre_2015_internet_2.pdf

http://saintpierrelamer.blogs.lindependant.com/archive/2012/09/24/le-jardin-du-louis.html

https://www.google.com/search?q=Louis+sabater+fleury&client=firefox-b&tbm=isch&tbo=u&source=univ&sa=X&ved=0ahUKEwi4tp6AgaDPAhXpJ8AKHQwXCcQQsAQIHw&biw=1366&bih=659


mardi 20 septembre 2016

INFOS « CHAUD, CHAUD DEVANT ! » France, Mayotte en Danger

Kwezi FM mardi 20 sept 2016 / Mayotte 1ère / lundi 19 sept. 2016... et prolongements...

Les parents d’élèves de Boueni (sud de l'île) contre les rythmes scolaires ferment l’école à l’heure de la reprise de l’après-midi. La mairie revient enfin à ses devoirs envers la population ! Des devoirs assurément prioritaires par rapport au respect hiérarchisé de la loi venue et tombée d’en haut (détournement de la représentativité politique).
Ce n’est pas vivable pour les enfants clament les parents : climat tropical, pas de cantine, PETs étiques, accompagnement et garde des enfants fragilisant la minorité active...

La préfecture prend acte... Le secrétaire général du vice-rectorat insistait pourtant il y a peu pour la réforme des rythmes : « l’avenir nous donnera raison ».

La logique de l’apparatchik de service est bien de maintenir un pouvoir monolithique... La télé, pourtant d’État, doit avec « Pièces à conviction » traiter des 20 % des fonctionnaires directement nommés par les politiques dont une bonne part par le monarque républicain !
François Ier le Florentin n’a-t-il pas personnellement nommé une soixantaine de préfets amis ? L’émission rappelle quand même que 123 préfets sans affectation sont payés "à ne rien foutre", que d’autres planqués pantouflent au Conseil d’État ou à l’Inspection générale de l’Éducation Nationale...

« ... François Hollande s’était élevé contre ces privilèges en 1989. A l’époque, il était jeune député et haut fonctionnaire à la Cour des comptes : "Si je n’étais plus député, je redeviendrai conseiller à la Cour des comptes. Si je ne faisais absolument rien à la Cour des comptes, je continuerais à gagner 15 000 francs par mois. Je pourrais doser mon travail, rester chez moi quand je suis fatigué, aller à la Cour des comptes pour passer des coups de téléphone. Je serais totalement libre et je serais un vrai privilégié comme je l’étais avant d’être député."
Vingt-sept ans plus tard, François Hollande est président de la République et rien n’a changé.

"Les jobs en or de la République", une enquête de Stéphane Girard diffusée dans "Pièces à conviction" le 21 septembre 2016. »

Qu’en est-il du respect que nous devons aux Institutions quand François II le Piteux, le Pâteux, le Péteux (c’est plus hard avec le «U») a, qui plus est, le culot de vouloir rester sur la piste ?

Pourquoi tu tousses, Lacouture secrétaire général du vice-rectorat ? Parce qu’il ne faudrait quand même pas couper la branche sur laquelle un grand nombre des vôtres est assis ? 

http://www.francetvinfo.fr/replay-magazine/france-3/pieces-a-conviction/pieces-a-conviction-du-mercredi-21-septembre-2016_1825373.html  

dimanche 18 septembre 2016

LES CORBIÈRES X / Le Verdouble, première cataracte.


Nous avions laissé le Verdouble et les questions sinon les mystères de ses sources, dans un premier bassin, avec les villages de Cubières-sur-Cinoble, Soulatgé et Rouffiac des Corbières (LES CORBIÈRES IX / Les mondes doubles du Verdouble). Une terre âpre où les hommes se sont accrochés jusqu’à ce que la prospérité des villes de la plaine ne les appelle, dès le second dix-neuvième siècle. Le long du haut Verdouble, si l’irrigation a enfin permis aux habitants de manger à leur faim (Soulatgé) malgré les craintes de ceux qui vivaient en aval (Rouffiac), l’exode rural a néanmoins fait le vide. Les vignes n’ont plus été cultivées...

«... Les vignes, elles courent dans la forêt,
Le vin ne sera plus tiré, c’était une horrible piquette,
Mais il faisait des centenaires
A ne plus que savoir en faire
S’il ne vous montait pas à la tête... »
 
La Montagne / 1964 / Jean Ferrat (1).

Quant au Verdouble, il voit sa course vers l’est barrée par des massifs. Comment pourrait-il en être autrement dans les Corbières où les nombreux reliefs s’épaulent ou jouent des coudes ? Ici, depuis des millions d’années, il creuse l’obstacle, formant deux séries de gorges encaissées toutes deux (respectivement 1,3 km et 2 km). 


En aval de Rouffiac-des-Corbières, les premières ne sont ni mentionnées ni photographiées. La rivière inscrit une boucle au pied d’un cirque (550 m.), osons le mot, qui la domine de sa masse, 240 mètres plus haut. Derrière, rive droite, presque aussi impressionnant, c’est le Sigle de la Rabazole (487 m.). 

Tout semble terminé lorsque le Verdouble coupe un vallon où figurent deux bergeries, celle du Grès vers l’ouest, celle de la Brézole à l’opposé mais ce sont surtout les ruines des Birats, des Bergeries de la Rivière, Balbonne et plus loin et plus haut encore de la bergerie de la Caune qui témoignent des nombreux petits troupeaux de jadis, de la vie des bergers avec la fête de la tonte par exemple, des traditions pastorales comme pour la Saint Roch, le 16 août... Mais revenons à notre rivière : sur deux kilomètres, entre les cascatelles, les marmites de géants, les vasques, et finalement la retenue d’eau qui fait le bonheur des baigneurs de l’été, le Verdouble décline les verts multiples de ses eaux limpides. Au sortir des gorges, il débouche encore contre une échine montagneuse de pechs et de rocs (2), obligé qu’il est, à nouveau, de partir vers le levant, après son travail tenace dans les strates de l’Anayrac.

Si j’ai parlé de cataracte alors que la géographie ne l’autorise pas (3), c’est que ces gorges marquent aussi des différences notables pour la vie et l’identité des pays du Verdouble. L’altitude même modeste, l’enclavement, matérialisent déjà des contraintes.
En haut, vers Soulatgé, une polyculture presque de montagne avec une pluviométrie historiquement (4) deux fois plus abondante que celle de la basse vallée (Tautavel, Estagel) et surtout en hiver et au printemps.
Entre les deux, de Duilhac à Padern, une zone de polyculture méditerranéenne, zone de l’olivier, marquée par un fort ensoleillement.
En bas (Tuchan, Paziols,  puis le confluent avec l’Agly), deux fois moins de précipitations, malgré les aigats d'automne, et la monoculture de la vigne qui s’est même étendue au détriment des oliveraies.
Il ne faut pas s’étonner si au fil de l’eau, les villages ont été moins marqués par l’exode rural. Un autre trait de l’économie est venu accentuer les différences avec les moins bien lotis de l’amont : le tourisme. C’est particulièrement vrai pour ce « moyen Verdouble » avec notamment les localités de Duilhac et de Cucugnan.

(1) Même si elle remet en cause la modernité et mésestime les progrès de la médecine avec, aujourd’hui, des centenaires plus nombreux que jamais, parce qu’elle plaide pour une vie proche de la nature, cette chanson reste, à mon avis, une des plus belles jamais écrites.
(2) derrière, sur la soulane, Cucugnan s’acagnarde au soleil.
(3) la rivière descend de 78 mètres sur un parcours de 4 kilomètres.
(4) avant l’incidence actuelle due au réchauffement climatique qui devrait apporter un climat comparable à celui de la Grèce aujourd’hui.  


Photos autorisées commons wikimedia
1. Duilhac auteur Henri Moreau / vue vers le sud / La Quille 964 m. 
2. Depuis le château de Peyrepertuse / auteur Valeriejeanbiographe / Sur la deuxième montagne en partant de la droite le château de Quéribus, aussi " fils de Carcassonne". Au centre, "l'île singulière" derrière laquelle se cache Cucugnan. 
3. Depuis le château de Peyrepertuse auteur Jardillierjulien / au fond le grau de Padern qui ferme le bassin du moyen Verdouble.

jeudi 15 septembre 2016

CHEMINS D’ÉCOLES... / Mayotte, France en danger !

"Ecolo-reportage" sur le chemin de l'école du mercredi 14 septembre 2016. 

NB : le Comité du tourisme de Mayotte est autorisé à reproduire ces images pour ses campagnes de promotion. 







 

CHEMINS D’ÉCOLES, CHEMINS D’HONNEUR... / Mayotte, France en Danger


Une des émissions d’Arte. J’y vois les enfants du monde exposés à bien des dangers : les tempêtes de neige, les ours et les loups en Mongolie, des sentiers vertigineux sur 1950 mètres de grimpette au Mexique, «... crocodiles, rongeurs géants et serpents aux aguets... » en Papouasie, soleil de plomb et tempêtes de sable, sans ombre ni eau dans le désert du Danakil, « moult dangers » dont une pirogue qui prend l’eau dans la forêt vierge du Nicaragua !
Il en a de la chance, mon gamin à Mayotte !

De la chance, son sac rempli de cahiers et de matériel qui n’a pas encore servi... heureusement pour ses vertèbres que le collège ne distribue pas de livres ! (peut-être en raison du niveau qui a tant monté ! dixit Lacouture, bras droit de la vice-recteur).

De la chance, son nouvel emploi du temps avec seulement 30 minutes de plus que les 6 heures quotidiennes prévues par la loi... Son cousin doit avoir trois jours de dépassements, lui !

De la chance avec une heure seulement de « pause méridienne », contrairement à ces enfants et makoko (les mamis de garde) sur les genoux à cause de la réforme des rythmes du primaire (ils n’avaient qu’à entrer en résistance comme notre commune de Sada!). Et puis, une heure, c’est largement suffisant pour prendre la collation sur le pouce... ou plutôt sous le préau... comme nous le souffla à l’époque le député mabawa qui picole !

De la chance avec la journée du sport même si les parents n’ont pas été avertis que l’enfant, du coup, en sandales et sans casquette, allait rester en plein soleil un temps certain et qui plus est, qu‘il serait "rendu à la vie civile" avec un quart d’heure de retard ! (25 minutes pour la dernière classe !)

De la chance alors que le prof menace parce que le grand format ce n’est pas du 21 x 29,7... encore un qui ne sait pas que Mayotte a bénéficié en 2014 de l'opération caritative « Un cahier, un crayon », au même titre que... le Mali, le Sénégal ou la Guinée...
http://dedieujeanfrancois.blogspot.com/2014/10/mayotte-en-danger-quand-la-solidarite.html

Mais tout va mieux, à les entendre, quand ils ne disent pas qu’il faut laisser le temps aux élus ou carrément le temps au temps alors que les médias annoncent qu’un élève mahorais ne coûte que la moitié de ce qui est versé pour lui en métropole (4000 et non 8000 euros)... et pourquoi pas 1200 € puisque 70 %  représentent la rançon qui nous est extorquée au profit des étrangers ? Honte à eux !

De la chance, à en péter de fierté aussi de savoir que Constance Cynique, la vice-recteur est partie se faire épingler la légion d’honneur à Paris.  «... Et à ce titre Denis Lacouture secrétaire général d vice-rectorat, indique "elle est à Paris pour se battre pour Mayotte, pour les enfants de ce territoire. " » http://www.linfokwezi.fr/elle-recoit-la-legion-dhonneur/
Sa meilleure, à ce beau parleur, à propos de la réforme des rythmes (peut-être pas à la lettre car notes prises sur le vif) :
« Moi j’étais pas là quand c’est démarré. C’était déjà en place. La journée est restructurée. Les résultats nous donneront raison... »
Lacouture, tes litanies sont cousues de fil blanc. Chante donc, « grand blanc » (de passage à la radio, il n’était pas en tenue "petit blanc"), épinglé également par le passé, parce qu’ils se l’accrochent entre eux, le hochet, et réciproquement... je te tiens, tu me tiens... (« ... c’est avec des hochets que l’on mène les hommes » Napoléon / fin avril début mai 1802) !

Ils ne parlent que de la loi qui s’impose alors qu’ils la détournent quand ils n’en tiennent pas compte ! Et il serait excessif de les traiter d’ennemis du peuple, de les accuser de non-assistance à population en danger alors qu’ils sont coupables de violences volontaires aggravant la situation de Mayotte ! Quant à savoir si c'est ou non volontaire, l'avenir le dira sûrement... et Lacouture, doublement promu (carrière et légion d’horreur) préférera ne pas avoir à exprimer qu’il n’était plus là et que c’était déjà en place...
Mayotte reste un cul-de-sac, ses chemins d’écoles mènent à l’impasse parce que les "organes" de l’État trahissent les principes républicains ici comme en métropole... « les résultats nous donneront raison » monsieur le haut fonctionnaire ! 


photo flickr.com / légion d'honneur / auteur Christopher Dombres.   

mardi 13 septembre 2016

LE PRINTEMPS DE MAYOTTE ? / Mayotte, France en Danger


D’autant plus flétrie par une surpopulation imputable aux errements ineptes des humains, à commencer par des dirigeants loin de donner l’exemple, l’île, malgré tout, veut survivre. Pas rancunière, ouvrant les bras, Mayotte semble dire qu’il ne lui faudrait pas grand chose pour poursuivre et s’épanouir. Martyrisée par les hommes mais pas abandonnée des dieux !
 
Début septembre encore, la saison sèche semblait resserrer son emprise : sécheresse, poussière et moins de vingt degrés la nuit. Et voilà que tout paraît changé à peine une semaine plus tard. Il a suffi de quelques gouttes sur quelques jours. La verdure aussitôt s’est faite tendre. Les fromagers ont osé sortir leurs premières folioles. On dirait même que les bouquets de bambous ont grandi. Restons lucides sans quoi c’est prendre ses désirs pour des réalités ! Sauf si ce sont des témoins autorisés qui le disent.
 

Les petits hiboux au petit matin, ce doit être leur saison. Mais ces vocalises assumées qui rappellent nos rossignols, autres verdiers ou chardonnerets, ne marquent-elles pas le printemps des Tropiques ? Quel oiseau ose ainsi... Incroyable, c’est le petit souimanga (1), le colibri de quelques grammes ! Quel bel organe ! A peine un peu plus grand, le zostérops a mis ses lunettes pour mieux piquer les insectes minuscules sur les rameaux de tsuzi ou d’ambatri ou ambrevades, les pois d’Angole si vous préférez... Les bulbuls, plus discrets se montrent en couple cependant. Un corbeau-pie plane en tournant et, plus rare, un courol mâle bat des ailes et se laisse porter tour à tour. Hier, dans les hauts, c’est l’épervier plutôt familier d’habitude qui faisait mine de se cacher derrière une branche. 


Qu’ils soient loués tous nos oiseaux qui essaient de répéter les cycles propres à chaque espèce ! Qu’elle soient louées ces pluies, même plus symboliques que vraies ! Cette année, la salade verte, les tomates trouvent à s’acheter, ces dernières au prix incroyable d’un euro le kilo et, en bas d’Ongojou, elles ont du goût, en plus ! Et comment croire qu’il puisse déjà y avoir des avocats, pas des cailloux, de bons fruits, qui mûrissent sans pourrir ! Les manguiers aussi portent autant de fleurs que de promesses, les régimes de bananes se multiplient et les arbres à pain de loin nous font signe...
Même si tous les dangers qui minent Mayotte restent latents, une tranquillité relative vient mettre au second plan l’inquiétude habituelle, le stress dû aux mauvaises nouvelles, un quotidien auquel on ne peut s’habituer...   
Ce n’était pas une bonne idée d’écouter les infos ce matin, mais est-ce plus futé de faire l’autruche ou de faire comme si. Le port, bradé au privé, est menacé de blocage. Aïe le lait de coco de Thaïlande et le cordon ombilical qui engraisse le business ! Les grèves se multiplient ! Le préfet en personne est revenu arpenter les stands du tourisme, en jean, avec sa compagne, pour signifier que l’île est aussi sûre que tranquille ! « Gouverner, c’est faire croire ! » Machiavel... Un missi dominici vient annoncer que sa patronne du vice-rectorat reçoit une légion d’honneur gagnée « en se battant pour les enfants de ce territoire », sic. Hic, je m’en étouffe pour l’élève de Mayotte qui ne reçoit que la moitié de ce qui est dépensé pour le petit métro (4000 euros) ! Mais la nouvelle ministre de l’Outre-mer arrive à la fin du mois, avec des « biscuits » nous dit la radio... Chante toujours, j’en ai déjà le miel dans la gorge !
Plus mon petit souimanga que le gros coucou qui vient depuis Paris pondre son œuf dans son nid...

(1) Faute de cliché disponible, en photo, le souimanga royal de l’Afrique des Grands Lacs. A première vue, il semblerait que seul le plastron rouge soit moins marqué chez le nôtre.    

Photos autorisées commons wikimedia :
1. zostérops, oiseau-lunettes, auteur Cécile Pheulpin. 
2. souimanga royal en.wikipedia. 
3. épervier de Francès jfdedieu.

jeudi 8 septembre 2016

ITINÉRAIRE D’UN ENFANT GÂTÉ (III) / Lyon - Le Café du Loup

 
« Pour passer le Rhône, il faut être deux,
Pour mieux le passer, il faut savoir danser...».

https://www.youtube.com/watch?v=ANLfYXluB0A
ou
https://www.youtube.com/watch?v=ubxk27pIwTM (3 premières minutes)

Vous la connaissez la comptine ? Pour dire vrai, ce n’est que maintenant qu’elle me vient à l’esprit. Par contre, la vue du Ventoux m’a rappelé papa avec sa Dauphine : le moteur Renault portait ce nom.



Après la gare excentrée de Valence et ses marches qui semblent vouloir monter jusqu’au soleil, Lyon s’annonce vite. La mami et ses gamins sont descendus. Florian remarque le crayon planté dans la Part-Dieu et nous nous efforçons de passer en revue les serres monumentales et presque tous les arbres du Parc de la Tête d’Or tant la ville a su nous séduire. Derrière, le plateau de la Croix-Rousse où j’ai étudié, avance, entre Rhône et Doubs, sur la Presqu’île.


Oui, oui, le Doubs : cette fois ce sont les hommes qui sont coupables d’avoir fait de la Saône (1) une usurpatrice !
A la place de la mami, une maman courage pleure. Avec deux de ses garçons, ils sont longtemps restés collés à la vitre à envoyer des baisers. Ils n’ont pas obligé le second, passant en boucle des histoires pour enfants, à en faire autant. Je comprends qu’il est de ces petits qui ont un chromosome en trop, qu’ils étaient en vacances dans les Hautes-Alpes, chez les grands-parents. Un accompagnant de la SNCF les a précédés pour poser le bagage en commentant : « un panier repas !». C’est vrai qu’on dirait que c’est pour un pique-nique. La ligne monte dans les Dombes mais je m’interdis de suivre du regard les premiers monts du Jura vers la trouée de Belfort et l’Alsace qui nous ouvre la route vers l’est... mon grand-père est là-bas... Je patiente seulement de revoir la Saône : son passage marque bien une direction presque opposée, vers Paris et le nord-ouest. La voilà la Saône, douce, alanguie, des péniches de mon enfance, des guinguettes au bord de l’eau avec de la friture au menu...


«... on nommait la Saône en présence d’un Parisien qui étalait la simplicité savante de son maintien sur le quai de Mâcon.
« A Paris nous appelons cela la Seine », dit-il en souriant... »
Stendhal, Mémoires d’un Touriste, 1838.

Aujourd’hui, je suis aussi rancunier que la Mule du Pape d’Alphonse (Daudet, Lettres de mon Moulin) or ce 22 août, expédié vers d’autres cieux, je subis seulement le cours des choses, laissant mon port par force mais faisant en sorte de retrouver celui qui a su m’adopter.  Nous voyageons, dos au sens de la marche et pour des curieux du paysage, ce n’est pas l’idéal. Flo me fait remarquer que dans le Shinkansen, ils retournent tous les sièges... Sauf qu’à la Senequefeu, si le conducteur n’a pas de gants blancs, le contrôleur dispose d’une jolie musique qui se répète lorsqu’il valide ! Sinon nous avons le Hara Kiri en commun, aussi bête et méchant pour les deux d’autant que là-bas, les retards ne dépassent pas six secondes ! Le train file peut-être déjà vers Saulieu, là où Bernard Loiseau, le cuistot célèbre, préféra se brûler le ailes, d’ailleurs, peut-être pour une étoile de moins au Michelin.
La petite famille goûte. La maman tient son bébé et montre des laitages au second : « Tu veux ça ? ». L’aîné plein de prévenance s’excuse d’abaisser son dossier. Souriant, dévoué, il s’occupe du tout petit ou prend son cadet sur les genoux même lorsqu’il joue sagement sur son téléphone. Thomas (2), il s’appelle.
Blackboulé vers le lointain, arraché aux racines, au Languedoc, j’accroche néanmoins les branches à portée des pays qui font la France. Ces vallons, ces sombres forêts, ce doit être le Morvan, la bordure plus marquée du Massif-Central s’avançant vers le nord... Vivarais, Lyonnais, Beaujolais, Maconnais, Charolais, Morvan... Tiens, un établissement, branché en quelque sorte, à l’enseigne du « Café du Loup ». J’embête Flo qui tient son stylo qui n’est pas trop d’accord pour noter le nom de ce café : cette mention, serait-ce dans une marge, perturbe l’ordonnancement d’un « Cahier de notes de vacances » bien rempli. De toute façon, j’allais sortir de quoi écrire. Comme si, de savoir où nous sommes, marque, plus que symboliquement, la volonté de maîtriser autant sa trajectoire que son devenir, d’influer, pour la part qui nous incombe, sur le destin... tant que l’exigence prétentieuse de nous démarquer, en tant qu’hommes, nous tient...  
     
(1) Au confluent, à Verdun-sur-le-Doubs, 175 m3 de débit pour le Doubs contre 160 pour la Saône... Ce sont les hommes qui font la géographie. 
(2) les noms ont été changés.


Photos autorisées Commons wikimedia :
1. Le_Rhône_au_défilé_de_Donzère auteur Babsy.
3. Lyon Parc Tête d'Or grandes serres auteur Myrabella. 
4. Saône à Mâcon auteur Chabe01.
5. Haut_Folin Vue depuis le théâtre gallo-romain des_Bardiaux (Arleuf) auteur LeMorvandiau

2. diapo François Dedieu août 1962.

mardi 6 septembre 2016

RETOUR SUR INFOS / LES APPARATCHIKS DU TOURISME A MAYOTTE


Des irresponsables oublieux de l’état d’urgence et incitant des personnes à se mettre en danger osent mettre en avant un salon du tourisme et des loisirs servant avant tout leurs intérêts. Ils se gargarisent, soit dit entre nous, du succès de l’opération alors que le tourisme n’alimente sur l’île qu’une nomenklatura de planqués politiques, leurs familles et leurs affidés !

Pour ceux qui n‘ont pas oublié ce que l‘agression de ce croisiériste senior allemand (février 2013 / col du fémur fracturé) avait de choquant, j’avais déjà souligné combien il était indécent de faire la promo de Mayotte en Allemagne.
http://www.quotidiendutourisme.com/site/destination-un-touriste-allemand-agresse-a-mayotte-70947.html

Pour ceux qui souhaitent la paix entre les hommes et la sérénité indispensable à la découverte d’une île et de ses habitants, j’avais déjà souligné le mépris de ces organes opportunistes qui ne veulent pas voir la saleté chronique de Mayotte !

Que ne se salissent-ils pas les mains à ramasser les déchets avant d’inviter les touristes à venir ?  « La charrue avant le zébu », ils connaissent ?

Que ne tempèrent-ils pas leurs incitations coupables, à l’exemple du préfet ? 
« Le préfet Frédéric Veau déclinait ainsi brièvement les premières avancées du Plan Sécurité, et se posait en conseiller touristique : "Pratiquez les randonnées en groupe, ne portez pas d’objets de valeur, d’originaux de titres officiels et en cas de mauvaise rencontre, ne résistez-pas."» (1)

Ou en écoutant un haut fonctionnaire de l’Éducation :
« Stéphane Planchand, Directeur de cabinet du Vice-rectorat : "Vous serez aussi confrontés aux barrages ou aux blocages de route". Stéphane Planchand concluait ce tableau peu engageant, mais réaliste, par des recommandations anti agression : "Ne laissez pas votre porte ouverte et ne téléphonez pas dans la rue."» (1)

En proie aux extrémismes, notre pays doit se défendre aussi contre ces prêcheurs de bonnes paroles pourtant responsables sinon appointés par la République, à commencer par le premier ministre prétextant qu’il faut s’habituer et ceux qui veulent taire absolument la gravité de la situation. Comment peut-on d’un côté prolonger l’état d’urgence et de l’autre faire comme si, soi-disant pour ne pas alimenter la psychose ?

(1) http://mayotte.orange.fr/actu/mayotte/seminaire-d-accueil-des-nouveaux.html

lundi 5 septembre 2016

TOUR DE L’ÉTANG DE VENDRES (III) / STURNUS assidus, CICONIA. Et VÉNUS ? / Fleury en Languedoc.

  
Enième pause pour voir les étourneaux (1), par centaines, loin sur des fils électriques, à la limite du plateau. Aux temps rustiques, mais en hiver, des chasseurs, sinon des braconniers, les canardaient la nuit pour les récupérer à l’épuisette (ou des filets étaient-ils utilisés ?). Les oiseaux trempés se revendaient aussitôt dans les villages alentour : Séraphie et Odette en vendaient au tabac. Un trafic en quelque sorte...
« Tu sais, Florian, les chasseurs les tiraient volontiers, du temps où le gibier apportait un plus. La nourriture était chère. Certains y passaient tout le budget. Et il n’y avait pas le choix d’aujourd’hui.


 Et l’étourneau, revenu dans le sud se gave dans les vignes alors que plus au nord, il va sur le crottin et les bouses... je le tiens de Loulou, un copain d’enfance qui avait sa famille dans le Nord, plus précisément dans le Pas-de-Calais. Enfin, les amateurs disaient bien que les raisins donnaient bon goût, comme pour les grives. Ce qui est sûr est qu’entre la saison des nids et l’automne puis l’hivernage, tout change. Quand on en parlait, en Tchéco, chez tes arrière-grands-parents, ils en étaient choqués. En Bohême, l’étourneau est un oiseau du printemps qui nourrit ses petits d’insectes. Les agriculteurs l’apprécient. Tout le monde l’aime. A présent il a envahi les villes où il salit beaucoup, du moins sous les dortoirs. Sinon, l'étourneau chante bien et si tu voyais les nuages mouvants des vols, quand ils sont peut-être des centaines de milliers, ça ressemble aux bancs de poissons qui espèrent dérouter les prédateurs. » 


Deux promeneurs approchent : ils parlent des mûres à propos des trois qui s’égratignent les jambes sur le coteau.
Et c’est alors que dans le ciel, planant depuis le plateau, un oiseau aux grandes ailes se dirige vers l’étang. « Une cigogne ! » Puis deux puis trois, puis cinq, et autant de photos qui se déclenchent. « Ne t’occupe pas du résultat ! regarde plutôt le vol qui arrive ! » 


Elles sont dix, davantage. on ne compte plus.
« Quand passent les cigognes (2) »... aussitôt le titre du film vient à l’esprit. La ronde des saisons marquée par les oiseaux migrateurs s’affranchit des complications néfastes que l’homme se crée. Le film revient sur la vie, la trahison, la mort entre un soldat contre les nazis et sa fiancée à l’arrière qui ne l’attendra pas, une histoire d’amour, de vie qui continue de concert avec la société toujours en mouvement, entre guerre et paix, entre oppression et révolution. Pourtant, à l’échelle cosmique, comme on se sent petit et insignifiant quand les oiseaux nous rappellent l’inéluctable marche du temps. A la fois pour ne pas se laisser étourdir par ce qui nous dépasse et aussi pour essayer de durer dans des cycles naturels que nous avons mis à mal, enchantons nos vies de ce que la nature a de merveilleux plutôt que de toujours croire que l’homme est le nombril du monde. D’où viennent ces oiseaux magnifiques ? Où vont-ils ? Pourquoi partent-ils si la migration est si risquée ?  


« Mon fils, quels pays ont-elles survolé ? Depuis l’Alsace et peut-être plus au nord, en Allemagne, elles ont passé la trouée de Belfort, longé le Jura. Arrêt buffet en Bresse ou dans les Dombes aux nombreux étangs, aux prairies humides où son long bec attrape des grenouilles et bien d’autres animaux dont des nuisibles. Tu comprends pourquoi les hommes les apprécient ! Ensuite, c’est la vallée du Rhône pour quelques unes, celles qui passent par ici parce qu’un grand nombre coupe à travers le Massif Central  vers l’Aquitaine. Toutes se retrouvent en Andalousie et si certaines restent, d’autres suivent la vieille route migratoire si dangereuse tout du long. Gibraltar, le détroit, une vraie barrière. C’est que les cigognes doivent monter, c’est pour ça que tu les vois tourner : elles cherchent des ascendances. Elles montent avec l’air chaud, s’élèvent avec lui avant de partir droit en planant. Et ces ascendances, on ne les trouve pas au-dessus de la mer. Elles n’ont qu’à battre des ailes, tu me diras, sauf que c’est plus facile à dire qu’à faire. Essoufflées, elles volent, le bec ouvert, perdant de l’altitude et si les pulsations cardiaques dépassent la zone rouge, telles un sportif planté, elles tombent et se noient... Quand tu auras mon âge, on dit qu'avec le réchauffement, les oiseaux ne migreront plus. Quand on sait que sept sur dix ne reviennent pas, ce n'est pas plus mal !
Allons ! Bois un coup, mange un morceau qu'il faut lever le camp si nous voulons le voir aujourd'hui, ce temple de Vénus ! » 

(1) l’étourneau sansonnet, Sturnus vulgaris, est un oiseau social (jusqu’à 1 million d’individus), présent partout sauf en Antarctique, capable de migrer sur 1500 kilomètres. Son régime alimentaire est insectivore et frugivore. l’étourneau siffle, gazouille et a des dons d’imitation.
Source et pour plus de précisions :
 https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89tourneau_sansonnet
(2) Летят журавли = elles volent les grues ? film soviétique de Mikhaïl Kalatozov, palme d’or à Cannes en 1958. Pourquoi les traducteurs d’alors ont-ils craint qu’on ricane à l’idée de femmes faciles ou de prostituées faisant le trottoir ? Les grues sont devenues des cigognes. Les dirigeants tant politiques qu’intellectuels ont toujours affecté de grands airs paternalistes et condescendants à l’égard du peuple... Sous d’autres formes, cette propension reste d’actualité...  

photos autorisées commons wikimedia 
1. étourneaux auteur lamiot. 
2. étourneau sansonnet auteur Tusco.
3. nuée d'étourneaux auteur Oronbb.  
4. Cigogne_blanche_ichkeul© aut Elgollimoh. 
5. Cigogne auteur Mucki   

vendredi 2 septembre 2016

ITINÉRAIRE D’UN ENFANT GÂTÉ (II) / Béziers-Donzère

Les hommes se sèment, se plantent, se déterrent, se transplantent, continuent ou non pour, de toute façon, mourir. Arrachés aux leurs, emportés au loin, certains ne veulent rien voir des paysages qui défilent pas plus que des semblables qu’ils croisent. Pourtant, la grégarité n’est pas forcément moutonnière et l’enfermement sur soi est aussi potentiellement destructeur que régénérateur. L’acceptation des autres, l’ouverture, l’empathie, seraient-elles dues à la promiscuité, ont, il me semble, la capacité de déverrouiller le cadenas d’une mélancolie potentiellement, virtuellement nocive.
Certains proches se demandent pourquoi un départ programmé peut se faire avec autant de stress, en laissant derrière soi tant de choses oubliées, en catastrophe presque. Que répondre sinon que pour les bonheurs et les malheurs, si on peut comprendre, on ne peut se mettre à la place de. Et chacun a ses faiblesses suivant les circonstances.
A la gare de Béziers, visiblement, ce 22 août, la sécurité n’est plus celle affichée le 14. Le ciel est magnifique, un vrai temps de mer et pourtant, ils sont nombreux, à tirer leurs bagages sur le quai. Certains n’hésitent pas à quitter l’ombre de la marquise pour braver le cagnard vers les repères d’embarquement U, V, W. Deux amoureux restent collés, indifférents au soleil. Menus, de petite taille, ils se sont bien trouvés ces deux là. On dirait encore des enfants. Le train est en retard de dix minutes : les hobbits ne s’en plaindront pas. Sauf que ça ne va pas s’arranger : avant Vias il se traîne. Je cherche le vieux village mais il y a tant de nouveaux lotissements que j'ai du mal à imaginer mon professeur, Maurice Puel, écrivant « Farinette jadis » (1) (un Belge a dit à Naguy qu’un bungalow à Farinette-Plage ferait son bonheur, s’il gagnait au jeu). Dans les gares, le tortillard met un temps fou à repartir et l’annonce de la fermeture des portes tombe toujours à plat sans que rien ne bouge : il s’est mué en omnibus, ce coursier des grands espaces ! L’Étang de Thau, la mer depuis le lido entre Agde et Sète : comment ne pas être touché par les derniers éclats de la Grande Bleue ?
Montpellier. 20 minutes de retard. La gare a le don de m’irriter... Je lui fais payer pour le ballonnement excessif de la ville au fil des décennies, moi qui, dans les années 70, traversais à peu près commodément en passant, en plein centre, devant le bar "La Babote" ! Je lui fais payer, c’est lié, pour Frêche, qui, dans sa mégalomanie populiste et séditieuse, a réussi, auprès des Montpelliérains, à favoriser le culte de sa personnalité (1) ! 


Je lui fais payer pour ses parkings longtemps interdits. Je lui fais payer pour l’ambiance glauque et longtemps obscure au niveau des voies, contrastant complètement avec la luminosité du premier étage !


Je lui aurais bien fait payer d’autres tracas dont le manque d’infos concernant la correspondance et parce qu’une cheminote pourtant chapeautée aux couleurs de la compagnie, nous a fait comprendre qu’elle ne faisait que passer. Heureusement, l’agent avec qui elle bavardait a su nous dire, lui, après consultation de son "phone", que le 5029 de 14h 57 partirait de la voie A. Rien non plus contre l’ascenseur qui a bien fonctionné. Rien encore contre le contrôleur qui nous a aiguillés presto vers la voiture 11 pourtant bien devant la numéro 1 (combien de rames ce TGV ?). Presque rien, aussi, cette fois, contre la clim qui ne nous a causés qu’une frayeur sur tout le trajet ! Et un bon point néanmoins : les 13 euros seulement de supplément en 1ère classe ! Je suis râleur, je sais, mais à hauteur des 361 euros (avec un enfant) de l’aller-retour entre Roissy et Béziers !
Dans le Gard, les caisses empilées au bord des vergers ne disent pas que la saison fut mauvaise pour les fruits et légumes. Au débouché du sillon rhôdanien, on croit passer le Petit Rhône mais c’est déjà le lit unique, au-dessus de Châteauneuf-du-Pape, bien en amont d’Arles, où le delta se matérialise. Une mami toujours jeune change de côté, le temps de montrer le crâne pelé du Ventoux aux petits enfants qu’elle vient de récupérer. Sur mon erreur, je crois passer le Grand Rhône alors qu’on le repasse avant de le trépasser. Au moins avec les berges rectilignes du Canal de Donzère, le risque de se tromper est moindre. 


(1) http://dedieujeanfrancois.blogspot.com/search?updated-max=2016-07-18T08:35:00-07:00&max-results=7&start=7&by-date=false
(2) le Président du Languedoc Roussillon voulait changer le nom de la région en « Septimanie » mais sa septicémie n’a heureusement pas pu contaminer le "reste" de la région ! Et que penser, en sus, de la place des Grands Hommes avec les statues des dix qui ont marqué le XXème siècle et où il ne manque que celle du onzième, Frêche lui-même ! 

Photos autorisées commons wikimedia 
1. Montpellier rappelant Bucarest auteur NatFolk34.
2. Montpellier gare auteur TouN. 
3. Le Rhône à Vallabrègues avec le Ventoux au fond (Vallabrègues / archives communales)

mercredi 31 août 2016

NA HOUBY / Kronika / srpen 2016 / TCHÉCOSLOVAQUIE, Holoubkov ma forêt perdue.


10 / 08 / 2016 V. : « Chtěla bych se zeptat jak to vypadá z houbami na Volduchách předem děkuji. »
10 / 08 / 2016 A. : « proV.: Volduchy včera půl košiku hnědáků za 3 hodiny - více než polovina červivých. Jinak pár klouzků.»
17 : 08 / 2016 T. : « Zbirožsko a Holoubkov. Plné koše praváků - poměrně i málo červivé - jen někdy nohy. Ostatní vč. kovářů - červivé. Také jsme našli i pěkné křemenáče. Je to nádhera. Konečně jsme se dočkali. »
17 / 08 / 2016 J. : « včera Zbirožsko - malinké a zdravé hřiby hnědé, krásné malé babky. Nádherné mladé hřiby nachovýtrusé. Nebylo to v Mýtě ani v Holoubkově. V tomhle lese rostou houby "dýl", a proto teprve začínaí. Ale mělo by zapršet. »
19 / 08 / 2016 M. « Pěkný den všem - nepohybujete se někdo v okolí Zbiroha a nebo Radnic a nevíte náhodou jak je to tam s houbama? Děkuji ."»
19 / 08 / 2016 H. : « pro M. dnes ráno ve Skomelně,no ve dvou 2 košíky,ale už víme,že lepší je to ve Sklené Huti,oboje blízko Radnic. Praváky nádhera,klouzky,ale borováky-hnědé hříbky k pláči. Flíček 2x2 m. 7 hříbků a jen 2 nečervavé a tak se dá říct,že z 80 % všechny eé,u bílých 95% zdravé. Začíná být sucho,tak pospěšte! My tam byli dnes s mužem ,jeli jsme z Kladna! »
21 / 08 / 2016 M. : «Sobota neděle - okolí Strašic. Pohádka: křemenáče, praváci, kozáci, klouzci, kováři - mraky masáků a poddubáků, ty jsou ale většinou červavé. Proti loňsku nebe a dudy.»
21 / 08 / 2016 A. :    « Dnes Holoubkov a okoli překvapivě je dost, i hub hodné, ale hřibů hnědých dostatek (přebytek), dále 50-60 praváků, klouzci, jeden strakoš(a to jen za 3 hodiny tři plnych košika!!!). Z nehřibovitých masáci, holubinky a ryzce. »



23 / 08 / 2016 h. : « Dnes ve Strašicích nádhera, po deštíku roste všechno, i červivost je nižší »
25 / 08 / 2016 m. : « Lesu a houbám -zdrar,kde rostou teď na Rokycansku?díky za zprávu, »
29 / 08 / 2016  K. :    « Pro m. : Na Rokycansku už neporoste ani Prašivka o to se postarám,leda hovno najdeš. »
30 / 08 / 2016 p. : « Právě jsem se vrátil ze svých místeček a dva plné koše hřibů, převážně smrkové, část dobových a pár kovářů. Ale chtělo by to vodu, je dost sucho. Zdravím všechny houbaře. »
31 / 08 / 2016 S. « Pro m. : hodně jsme našli u Radnic, ale je to již týden... ».

počasí v srpnu 2016 :
le 8, grisaille et pluie
le 9, pluie baisse des températures de 28° à 17°
le 10, t° fraîches 18°
le 11, t° fraîches 18° pluie et grisaille
le 13, nuages présents et menaçants dans le sud averses voire orages 26°
le 14, orages en Šumava et Bohême Sud 28° 



LES CONDITIONS FAVORABLES AUX CHAMPIGNONS :
Pokud se chystáte na houby, jděte tam, kde poslední dva týdny opakovaně pršelo
Díky lepším podmínkám vláhy rostou houby více v podhorských lesích s výškou kolem 500 m a výše. Pak i tam, kde se opakovaně v posledních dvou týdnech přehnaly deště.

Source http://tn.nova.cz/clanek/houby-rostou-hlavne-hriby-tvrdi-mykolog-vime-kam-na-ne.html

Ivan K. a mis les photos 1, 2, 3, 4 les 16 et 22 août. 
François Dedieu a pris la photo 5 en 1964 et la 6 en 1970. 

lundi 29 août 2016

ITINÉRAIRE D’UN ENFANT GÂTÉ / le collier de jasmin

Déchirement. À nouveau reprendre la route, partir. Partir... c’est mourir un peu ou réaliser qu’on est vivant ? Cette fois, plus que d’habitude peut-être, pour apprivoiser la tristesse, mieux vaut se projeter en avant, vers la gare, au devant du nez profilé du TGV, jusqu’au bon terminal et le seuil de la porte d’embarquement. Une fois parti, il faut bien aboutir quelque part, arriver si possible puis reposer, laisser retomber sa soupe originelle pour que son consommé redevienne clair, que l’impression de shaker cesse. Alors je me dis que plutôt que de me laisser aller aux états d‘âme, j’aurais dû faire plus attention au gamin qui a voyagé en savates et oublié sa veste. Puis le compte à rebours retrouve ses jours, le jour ses heures, son soleil et sa nuit. La vie continue. Le présent se remet en place et tâche de cautionner son devenir. Mais tout reste fragile : il vaut mieux pour l’instant laisser en sommeil les mots départ, séparation, absence... Et voilà qu’il arrive lui, migrant dans l’autre sens, pour que l’arrachement, le déracinement remontent à fleur de peau pour la terre et les cœurs laissés derrière. Tôt ce matin, il a chargé les valises puis la femme et les gosses. Il n’a pas vu mes au-revoir. Peu importe, il sait. Nous sommes frères. 


Pourquoi le bleu de la baie est-il troublé par ce ton terreux, comme en saison des pluies ? Est-ce déjà la forte houle du Grand Sud annoncée ? Est-ce l’alizé qui pousse ses bataillons de nuages ? Est-ce moi qui m’éteins sans les reflets dansants de ma Méditerranée ? Le soleil joue à cache-cache, aimable de ne pas imposer sa lumière crue : il me ménage en attendant que j’aille mieux, que j’encaisse, que j’accepte, entre autres, qu’il est aussi celui qui fait chanter mon Golfe clair, unique, du Lion, exclusif comme lui. 



Et elle, qui, après le collier de jasmin (1), a privilégié l'ail rose de Lautrec, les salades de tomates, et les a même préparées farcies ? Mon Languedoc, mon village, ma plage de Saint-Pierre sont-ils loin ou à fleur ? 



C’est à peine si j’ose avouer, écrivant cela, que j’écoute "Až Budeš Mojí", un tango... tchèque, murmurant amoureusement et en duo "Quand tu seras mienne...". Sans approfondir ces sentiments à vif, quel pastis entre le Midi, la France d’Europe, celle de Mayotte et maintenant la Tchécoslovaquie d’avant la partition et même de la République (« za Rakouska », de l’époque de l’Autriche, je crois, qu’ils disaient), qui vient me tirer la manche !  
Mon frère de misère, sa femme et ses gosses doivent être à l’aéroport, troisième ou quatrième « ouf » après le réveil, la circulation forcément chargée, la barge surchargée, le trajet jusqu’à l’aéroport... si semblables aux nôtres, à Fleury, à Béziers, à Montpellier, à Roissy enfin.
Une misère toute relative néanmoins même si je me demande si c’est préférable d’être de quelque part ou de porter plus d’un terroir à sa semelle. Nous ne sommes que des migrants, un havre nous attend, dans un sens ou dans l'autre, contrairement aux errants et aux émigrés qui ne reviendront plus (3).
En le voyant lever le camp, et parce que les chansons arrivent à dire si bien les choses que la pudeur nous tend à taire, je cherchais celle de « Partir Revenir » avant de me souvenir que c’est « Itinéraire d’un Enfant Gâté », toujours de Lelouch avec Belmondo. « Qui me dira...», l’air principal. Sublime même si l’amour y est plus décliné comme à recevoir qu’à donner :

«... Qui me dira, les mots d'amour qui font si bien, du mal ?
Qui me tiendra, quand tu iras décrocher toutes les étoiles ?
Qui me voudra, avec le nez rouge et le cœur, en larmes?
Qui m'aimera, quand je n'serai plus que la moitié d'un. ..... ?
La, la, la la... »

https://www.youtube.com/watch?v=mlMAnQn4uHM

Il y en a un, aussi, qui a toujours su rester modeste quant au pouvoir de ses chansons. Il l’a si bien chanté, l’exil, dans son itinéraire d’enfant gâté même s’il n’a pas eu la chance, son chemin s’arrêtant à 42 ans, d’enrichir ce thème des variations que peuvent apporter les années. Derrière le Portugais émigré ou le pauvre que la terre natale n’a pas voulu nourrir, il y a aussi Joe Dassin et son « Village du bout du Monde » est celui de tous les déracinés.

« Le vent s’engouffre dans ma valise et sur ma route il y a des trous.
J’ai vu tant de rues, j’ai vu tant d’églises mais les plus belles étaient chez nous.
Mon village est loin, à l’autre bout du monde et ma maison n’est plus qu’une chanson... /...
... Des Caraïbes aux Philippines, j’ai traîné ma carcasse un peu partout
Mais les chemins qui mènent à nos collines avaient des pierres douces à mes pieds nus... /...
... Pas de discours et plus de larmes, venez mes frères, me dire adieu. »

(1969)
https://www.youtube.com/watch?v=_JYhq_wMkOg  

(1) les colliers de fleurs en bienvenue se font rares à Mayotte. C’est beaucoup de travail... Nous concernant, cela relève exclusivement de l’amour... Et la Pénélope d’Ulysse ?
(2) de Václav Vačkář (1881-1954), compositeur et chef d’orchestre dont mon grand-père Jan aimait tant la musique... 
(3) une scène me revient souvent, me laissant foudroyé à jamais. Dans un Liban dévasté, le petit va partir, le grand-père reste. Ils ne se reverront plus. Ils le savent : 
" ... Je te quitte, dit l'enfant retenant ses larmes. 
- Tu m'emportes, dit le vieux... "  
L'enfant multiple, Andrée Chedid, Flammarion, 1989.