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samedi 10 août 2019

LE VENT SUR LA DUNE A LE CŒUR ÉMU... / St-Pierre-la-Mer


"Là-bas, le vent sur la dune a le cœur ému..."  

Oui je sais, ce n'est pas la première fois que Serge Lama a voix au chapitre ici (Souvenirs, attention, danger). Mais après l'info sur des eaux brunes venues polluer cinq-cents mètres de plage à Saint-Pierre (1) et le tout récent partage sur la prise de conscience aussi locale que concrète sur la terrible pollution au plastique qui empoisonne la planète, alors que des déchets dus à des individus "tubes digestifs sans neurones dans la tripe"(2) ourlent la route des marais, de l'étang et des sansouires, un constat plus souriant sur le paysage à l'âge de l'Anthropocène...

Oui, hier après-midi, malgré ce drôle de temps que souvent les natifs et locaux ne reconnaissent plus (3), le gentil Marin n'engorgeant pas le ciel de ses nuées qui plus est, le vent sur la dune avait le cœur ému. Et pas que lui.

Étonnante en effet cette dune pleine de vie et comme vierge, à portée des zones densément fréquentées par les estivants, à peine au-delà des coins où les maîtres comme il faut amènent toutou au petit coin. Comme à l'envers notre dune avec le flanc plus raide côté mer. Sur le côté en pente douce, exposé au vent dominant, de terre, nommé Cers depuis les Romains (4), là où l'air salin se montre plus indulgent, les plantes du sable se rappellent au souvenir de l'estivant. Mais tout le monde n'est pas Linné, Mendel ou, plus proche à nous faire aimer la botanique, Jean-Marie Pelt, si chaleureux à la radio. Un regret que de ne savoir les nommer quand ces plantes sont familières depuis toujours...

Oui, des cagaraulettes en grappes qui se faisaient rares, à l'instar des hirondelles qui semblent désormais trouver de quoi manger (jusqu'à 3000 insectes/jour !). Jolies, ces fleurs jaunes mais ne se sont-elles pas échappées des jardins ?     


On dirait un chardon, presque bleu, mais ce n'en serait pas un... j'ai écrit ça quelque part, faudra en retrouver la trace... 


Oh ! on se connait avec celle-là ! Et je suis aussi gêné que si je rencontrais un copain dont j'ai oublié le nom !

Pourtant un parfum inoubliable, à retrouver les yeux fermés, après l'orage !

(1) "Qu'on  se rassure" insiste le Midi Libre du 4 août, sans que soit précisée la nature de cette pollution qui ne proviendrait pas d'hydrocarbures venus du large... Ben voyons, bronzez, pataugez braves gens, gentils estivants qui apportent leurs euros à certains et leurs déchets et déjections à la communauté, en la circonstance au brave peuple élu de l'embouchure... Ne me faites pas dire maintenant que si Macron est dans la merde, ce n'est pas à cause du fumier déversé par des fnseaculteurs, pas en odeur de sainteté entre nous soit dit.   

(2) 37 % des véhiculés jettent par la fenêtre de l'auto, soit presque 4 personnes sur 10 !

(3) à tort ou à raison, dans les confins audois du Golfe du Lion, si on parle de l'orage du 14 juillet comme du coup de mer humide du 15 août, trois jours de Marin sans que le Cers ne vire accompagné au moins d'une averse sinon d'un orage ne faisait pas partie des normes...

(4) la page météo de toutes les chaînes de télé persistent à dire "Tramontane" alors que le Cers se forme en s'engouffrant dans le couloir audois, plus modeste en tous points que le Mistral lié au Rhône. Ces vents sont générés par les basses pressions de la Méditerranée.  

lundi 28 janvier 2019

LO PODAIRE / Abbat Josep Salvat, felibre majoural.


Petite fleur jaune orangé s'ouvrant avec le soleil et qui marque l'impatience de la terre à accueillir le printemps, le souci des vignes (on dit aussi des souci sauvage ou des champs) ferme ses capitules la nuit. Sa floraison accompagne le vigneron dans son travail de taille. 
Diplotaxis fausse roquette, espèce invasive depuis 1900.




LO PODAIRE. 

Estropat, botonat, jol vent de Cèrs que fa blincar las pibolas e los sauzes de las randuras, lo vinhairon s’enva cap à sa vinha ont, i a ds o tres mezes s’auzisiàn las cansons e los bascalals dels vendemiaires. Las vizes, acatadas, d’unis cps agafada à la tèrra, prtan encara, d’aqui entre aqui, qualquas fèlhas mièjas secas que ‘al mendre fregadis, tomban e van rejunhe las autras dejà gaireben poiridas. 



Lo vinhairon agaita son plantièr pèi emponha los cisèus podaires, e, soca aprèp soca, fa tombarsens piétataquelas vizes qu’éran, i a pas gaire, cargadas de bèlis razims. Qu’es trista à veze, la vinha, quand, pèl sl, sus la tèrra freda s’espandis un lèit d’iserments, e que las pauros socas, escapitadas, laisan veze lor pèd nozut e torsit. Lor demra plus res de lor anciana vestidura. Lo podaire, sens se trebolat, sens se retirar, seguis la tièra.
Mèmes, se la soca se metià à li parlar, se trairià pas de son trabalh. A pas demembrat lo reproverbi que dis…
(à suivre)

mercredi 16 janvier 2019

DE CEUX QUI HONORENT LEURS PROMESSES, IL VA VENIR, C’EST SÛR ! / Fleury d'Aude en Languedoc.


Mon premier, de 2017, entre le moulin et  le coteau de Fontlaurier.

Ne jouons pas les Nostradamus ! Plus facile d’énoncer une lapalissade, d’annoncer que le printemps viendra après l’hiver, pardi ! Il n’empêche, une petite voix me dit que les amandiers vont fleurir… C’est que les quelques jours frisquets de ce début janvier devraient avoir causé ce choc thermique indispensable à la floraison de l’amandier… Alors gageons, même si je Nostram’amuse, que l’amandier ne me fera pas attendre plus de quinze jours ! C’est entre lui et moi, en seriez-vous témoins… . 
 


Il va venir fleurir le coteau, le marge des vignes, houppe blanche de l’amande douce, toupet rose de l’amère. Pastels de serments partagés ou trahis[1], d’alliances fécondes, le message passe avec l’allant des jours plus longs, toujours plus engageants. 





Préludant à la montée des sèves, il accompagne le poudaïre, le vigneron qui taille les sarments, souche après souche, (d’ailleurs, les amandiers cultivés sont eux aussi, traditionnellement taillés en gobelet, pour diriger la pousse des branches vers l’extérieur). Si le vigneron qui « poude[2] » est pressé par le printemps qui déjà s’impatiente, l’amandier, lui, est plus fougueux encore. Rebelle, bravache, il n’a de cesse que de contester l’hiver alors qu’imperturbable, la saison mauvaise et sans pitié, sûre de sa légitimité et du tribut qu’elle peut exiger d’une nature écervelée, lui fait souvent payer un optimisme aussi cabochard qu’incontrôlable à coup de gelées qui brûlent et font avorter des fruits au duvet naissant. 

 
Est-ce le même arbre ? 




Je suis du Sud et, n’en déplaise aux Jacobins centripètes,  l’amandier participe de cet esprit plus méditerranéen que français, avec la mer qui soumet à elle le Mistral et le Cers… Oui le Cers, un vent auquel les Romains avaient même élevé un temple ! Fan cagua les bobeaux esprits qui n’ont que la tramontane à la bouche ! Oui le Cers, frère du Mistral, de ces grands vents qui donnent à l’air du Golfe du Lion une lumière à part.



Par une matinée claire et vivifiante, il n’y a rien de plus beau que les boules fleuries des amandiers sur les laisses d’un coteau avec, en fond, par un ciel pur et calme, le cône enneigé du Canigou… de quoi rendre jaloux le Fuji-Yama qui doit attendre longtemps l’éclosion des cerisiers ! 





Dans certaines contrées abritées du Midi, il lui arrive de fleurir parfois pour Noël… C’est arrivé à Fleury… en 1916, 1921, 1975… En attendant, faudrait-il attendre jusqu’en février, tout le village se retient, impatient de s’ouvrir au chapitre qui vient. Ils le pressentent tous : le messager fidèle ne tardera pas ! Tous l’espèrent ! Un instinct du fond des âges fait guetter, au bord des vignes, des champs, dans la garrigue même, le long des laisses et des murettes abandonnées ! Chacun croit le voir, à s’en frotter les yeux tant il cèle en lui l’espoir de jours meilleurs.

Quand le porteur de lumière vient, de sa touche pastel, éclaircir la grisaille de l’hiver, c’est une renaissance, et celui qui en est témoin court vite vers les siens, coupe la parole pour la bonne cause, l’annonce de la bonne nouvelle... J’en parlais ainsi, en 2014… et j’en frissonne rien que de penser aux abeilles, aux bourdons, à tout ce petit peuple de pollinisateurs qui profite et donne à la fois pour que vive notre vieille Terre…    




[1] Revenant de Troie, Démophon, fils de Thésée, roi légendaire d’Athènes, un des guerriers enfermés dans le cheval de bois, fut jeté sur la côte de Thrace. Phyllis, princesse du lieu, tomba amoureuse du bel étranger. Ils se marièrent. Démophon, cependant, repartit pour Athènes et ne revint pas, malgré sa promesse. Abandonnée, Phyllis se pendit à un amandier. Si je retiens cette version d’une légende déclinée en maintes variantes, c’est que l’arbre ne daigna fleurir que le jour où Démophon revint enfin…       

[2] La "poudo" était l’outil employé pour tailler la vigne, serpette d’un côté, hachette de l’autre, connu dès l’époque romaine, sera utilisé jusqu’à la fin du XIXème siècle. (source photo « Canton de Coursan / Opération Vilatges al Pais – Ciném’Aude 2000  / Francis Poudou et les habitants du canton / 2005)

dimanche 2 avril 2017

ODE AU-DELÀ DU DELTA... (1) / Rhône, Ebre, Aude, Llobregat

« ... Mais l’amour infini me montera dans l’âme,
Et j’irai loin, bien loin, comme un bohémien,
Par la Nature, ~ heureux comme avec une femme. »

Le Rhône embrasse ses îles et pousse les terres de Camargue vers le sud. A quatre-cents kilomètres, chez nos frères de Catalogne, c’est l’Ebre qui avance ses bras dans cette même Méditerranée Occidentale. Entre les deux, le Llobregat comme épongé par Barcelona (1) mais réservant encore des espaces naturels intéressants. Et, pardon de le mettre en avant « parce que c’était lui, parce que c’était moi », si présent dans ce qu’il a de sanguin, de sudiste, d’occitan, le fleuve qui continue d’échapper aux hommes venus le dompter, l’Aude qui rendit l’île de la Clape au continent, la "rivière", redoutée mais familière des Pérignanais de toujours, l’Atax d’un delta aussi caché que mystérieux... 

(1) si quelqu’un peut préciser pour le Riu Fluvia (Golfe de Roses) ainsi que le Riu Tèr de la trilogie catalane Têt, Tech, Tèr... Sinon on parle du Mistral, du Cers du Rhône à l'Aude, de Mestral, des Cerç ou encore Çerç, de Tarragona à l'Ebre. 






crédit photos : 
1. Rhone delta photoby Aldipower. 
2. Delta_de_l'Ebre-L'Encanyissada Author Lohen11-Josep Renalias
3.Espais naturals del riu Llobregat Platja del Prat des del Mirador de la_Bunyola Author Jordiferrer  
4. l'Aude passe au nord de la Clape. 

vendredi 10 mars 2017

LE CERS QUI PASSE SUR LA GARRIGUE ME RENDRA FOU ! / le nom de vent le plus vieux de France !

Et bé oui, cette atmosphère qui nous laisse tant aimer notre pays, souffrez que je la fredonne, en restant à ma place. C’est que Brassens vient aussitôt chanter Gastibelza sur la « Guitare » de  Victor Hugo. 


On ne trouve que ce qu’on veut bien chercher aurait dit Monsieur de La Palice. Mais parfois on trouve alors qu’on folâtrait ailleurs.
Ainsi, en feuilletant (c’est aussi une manière d’aborder un ouvrage) l’Anthologio Escoulario de Lengadoc (Roudès 1931 / Ediciu de la Mantenencio de Lengadoc), donc avec une bonne part de hasard, j’eus l’heur et le bonheur de trouver et ce que je cherchais et ce que je n’aurais pas cherché tant un contresens et un non-sens pourtant flagrant m’agréait... Mais, comme en amour où il est si difficile d’accorder la préséance au sentiment ou au désir, ma recherche qui se voulait structurée n’avait pas anticipé que « le vent qui vient à travers la montagne » me rendrait fou !  

Allons, cherchons... « Je cherche après Titine », mais non même si Charlot dans les temps Modernes, en donne une version exceptionnelle ! Non, ce doit être un plaidoyer, méthodique, construit, pour rétablir dans son honneur, le Cers des Romains. Le Cers, porterait-il le plus vieux nom de vent de France ! pourtant si ignoré, méprisé par l’ignorance ethnocentrée des people de la météo, de ces médias propagandistes qui se doivent de rester souriants, optimistes voire doucereux suivant les circonstances... Au moins que le bon peuple des "veautants" dorme sur ses deux oreilles, tondu et cocu ! 


Mais revenons à notre propos et là, dans cette anthologio, à la partie « Béziès-Sant-Pouns », parce que Pierre Alias, le regretté camarade de lycée de papa, avait parlé de Clardeluno (1), nous avons au moins deux raisons de chercher la poétesse de Cazedarnes ou d’un hameau proche. Et là, quelle n’est pas ma surprise de retrouver notre Cers, toujours avec la majuscule, plus haut que prévu, balayant même les collines du Minervois et peut-être, de ses rafales fulgurantes, au-delà des rives de l’Orb, toute la mer de vignes du Biterrois.

Dans Lisou (roman), « Mars dins lou Bas Lengadoc / ... las vignos que dejà laguejaboun.../... lour cabelladuro d’argent desplegado e rebufelado sens fin per lou vent de Cers.../... pei las alenados del Cers escoubilhaboun tourregans e rantèlos... »
Au mois de mars en effet, il n’est pas rare que la vigne « laguejo », rendant visibles les alignements de ceps, les rangées (de souches) dit-on notamment lors des vendanges, grâce aux bourgeons ouverts laissant sortir la pointe des premières feuilles vert tendre toujours dépliées et ébouriffées sans fin par le Cers. 


Puis, les exhalaisons, les bouffées du Cers balayaient (à rapprocher des équevilles de Lyon, du latin scopa [balai] puis scova puis escova et escovilla...) les gros nuages (le tourregan particulier au couloir audois, poussé par le Cers, défile rapidement depuis l’horizon ouest). Les rantèlos sont de légers nuages blancs souvent en formation... le bon maître Mistral cite J. Laurès : 

« A fusat len d'aici coumo fuso l'estelo
 En daissant darrès el uno fousco rantelo. » 

(1) pseudonyme de Jeanne Barthès (Cazedarnes 1898 - Cessenon 1972). Avec d’autres femmes auteurs membres du Félibrige, dont Philadelphe de Gerde (Claude Duclos-Requier), Calelhon (Julienne Fraysse-Séguret) et Farfantello (Henriette Dibon). Membres du Félibrige, elle a écrit en occitan alors que notre langue était de plus en plus étouffée par la morgue hégémonique du jacobinisme parisien... ce qui, serait-ce de façon insidieuse, perdure...  

Crédit photo : 
n° 2 extrait de carte IGN 65 Top 100 Montpellier-Béziers (2000). 
n° 3. après le débourrement auteur Véronique PAGNIER (je ne sais pas si on ne dit pas chez nous, et probablement par erreur, "débourrage" ?).

vendredi 24 février 2017

NOTRE MAÎTRE VENT, LE CERS / L’itinéraire en Terre d’Aude / Jean GIROU 1936.


Je ne sais plus qui a évoqué le Cers en tant que plus vieux nom de vent en France. Je sais que nos commentateurs météo et leurs consœurs très charmeuses nous gargarisent trop de ces tramontanes venues de tous les horizons... Nous ne voulons pas les exclure mais seulement rendre une juste place à celui qui reste lié à l’Aude comme le Rhône l’est au Mistral... 

A propos de notre maître vent le Cers, tiré de L’Itinéraire en Terre d’Aude, extraits : 


(page 240) « ...Pour aller à Quéribus, il faut, de Cucugnan, monter vers le Grau de maury ; avant d’arriver au col, un sentier muletier part à gauche dans la pierraille de la garrigue, une demi-heure de marche et l’on arrive aux premières défenses du château. la montée en serait facile, si, d’ordinaire, un vent terrible ne vous fouettait, un cers violent, qui, après avoir parcouru à grandes foulées les terres hautes des Corbières, va se lancer dans la plaine d’Estagel, d’un bond de plus de 500 mètres.
Arrivés aux blocs de pierre de la première enceinte, il faut gravir un couloir d’accès; le vent, en rafale, vous plaque contre la muraille, vous abat vers la terre, avec une telle force et un tel acharnement que marcher devient une lutte; enfin une murette, on respire, un peu de repos et il faut repartir. le Cers vous reprend comme une proie, vous déshabille et vous soulève... /... Mais cette bataille avec le vent est récompensée par les beautés architectoniques de ce château et par son panorama exceptionnel... » 

Page 286, en parlant de la montagne d’Alaric : «... Les habitants de Montlaur, de Camplong et de Ribaute, bannières en main, montaient en chantant à San Miquel. L’ascension en plein Cers, sous le soleil de septembre, devait être déjà un sacrifice;.. » 


Page 301, dans la partie Narbonne : «... D’autres temples s’élevaient en ville, consacrés à Minerve... à Hercule, à Apollon, à Bacchus, à Cybèle, à la Concorde, à Saturne et à Circius le vent impétueux du Cers dont Caton disait : « Il se déchaîne avec violence; quand on parle, il vous remplit la bouche; il renverse un homme armé et une voiture chargée » ; de nos jours, le Cers a gardé la même fureur, certains jours de tempête, il enlève les toits, renverse en gare de La Nouvelle les wagons et, combien de fois n’a-t-il pas lancé contre un platane les automobilistes pris dans son tourbillon... » 


Page 323, pour l’étang de Bages et de Sigean : « ... Nous voici en bateau, l’on part par bon Cers du ponton de la Nautique;.. »

Dans son livre sur l’Aude, Jean Girou, nous le constatons, n’a pas manqué de mentionner le Cers... Plus de 300 mots pour du vent ! Et toujours, sauf une fois, avec la majuscule... Je ne me doutais pas que ma fantaisie n’avait rien d’original... En parlant de majuscule, remarquons les deux de "La Nouvelle" et la seule de "la Nautique". 

Crédit photos : 1. Château de Quéribus ; derrière le Grau de Maury ; au-delà le fossé du Fenouillèdes. Auteur Nidira.
2. Montagne d'Alaric, dernier pli des Corbières vers le nord. auteur Eric Andréoli.
3. Cathédrale St-Just-St-Pasteur Narbonne. Author Dennis Jarvis.
4. Port La Nouvelle. Auteur Joyce 11.  

samedi 10 décembre 2016

JEAN GIROU (Montpellier 1889 - Marseille 1972) / L’Itinéraire en Terre d’Aude.


Docteur en médecine, Jean Girou s'établit à Carcassonne en 1921. Président de l'Ordre des médecins et... du Syndicat d'Initiative de Carcassonne pendant 25 ans, il est fasciné par les paysages, les monuments et l'histoire de son département d'adoption. 



Son 1er ouvrage s'intitule "Carcassonne, sa Cité, sa Couronne" (1928),  suivi par presque 50 volumes dont le plus célèbre est "L'Itinéraire en Terre d'Aude" (1936), un guide tous publics, réédité en 1987.
La géographie et l’Histoire y concourent, sans que le fond soit professoral pour autant. Et si l’évocation lapidaire du catharisme alterne les extrêmes (l’auteur parle en même temps « d’anarchistes dangereux » et d’une civilisation splendide), rappelons seulement que ce courant religieux était non violent par essence (1), à l'opposé donc, de tous les intégrismes dont l'intégrisme exclusif catholique de l'époque... Ce qui bien sûr n’apparaît pas dans l’Histoire, des mensonges toujours écrits et imposés par les vainqueurs, à savoir, en la circonstance, les envahissants « barons du Nord », cupides et spoliateurs.    




« L’Aude, disait Girou, concrétise sur son sol tous les aspects de la France ; c’est le Pays de la cigale provençale et de l’alouette Lauragaise, le pays de l’olivier et du cyprès, du pin et du mélèze, des roseaux et du laurier ; pays de vignes, pays de vent aux souffles alternés du cers (2) vif et froid, du « marin » humide et chaud ». L’Itinéraire en terre d’Aude. (3)

Et, sur Rennes-le-Château qui a nourri tant de chasses au trésor fantasmées :  


«... sur l’arête du plateau se découpe un décor singulier : des maisons en ruine, un château féodal délabré surplombent et se confondent avec la falaise calcaire, puis des villas, des tours à vérandas, neuves et modernes contrastent étrangement avec ces ruines : c’est la maison d’un curé qui aurait bâti cette demeure somptueuse avec l’argent d’un trésor trouvé, disent les paysans ! » L’Itinéraire en terre d’Aude. 





(1) ce sont les chevaliers, principalement les vassaux de Raimond-Roger Trencavel, vicomte d'Albi, Carcassonne et Béziers, menacés de bannissement et d'expropriation pour avoir toléré ou protégé des religieux cathares, qui ont tenté de se battre contre les Croisés d'Arnaud Amaury (cet amori !) et Simon de Montfort. L'expression "chevaliers cathares", si bien chantée, par ailleurs, par Francis Cabrel, prête donc à confusion 
(2) Le cers, vent de N-NE est bien désigné alors que les guillemets font du marin un vent générique, Girou regroupant sous ce terme, tous les souffles venant de la mer ( de NE à Sud). 
(3) Prédécesseur, François-Paul Alibert (1873 - 1953), carcassonnais (encore un) à la personnalité aussi "raide" qu’attachante, auteur de recueils poétiques malheureusement oubliés, bien que remarqués par Valéry, a écrit un « Terre d’Aude » (1906). Un essai, aux airs de journal de voyage, sur l’emprise des paysages, tant naturels qu’humains, sur tous les représentants de notre espèce. Les intellectuels, les artistes y seraient-ils, par essence, plus sensibles ? Et, à l’instar des médiums, réagiraient-ils plus concrètement à ces "radiations" ?  
http://www.ladepeche.fr/article/2009/02/22/562745-francois-paul-alibert-ce-poete-meconnu.html   

http://www.garae.fr/spip.php?article61

photographies autorisées 
1 auteur Harry / Carcassonne et les vignes en hiver. 
2 auteur Jean-Pol Grandmont / Carcassonne, enceinte extérieure ouest de la Cité (vue vers le château comtal et le nord. 
3 "Les chevaliers cathares" aire de repos de Pech Loubat (Narbonne), chantés par Cabrel, non sans une pointe de scepticisme... (dessin faute de photo autorisée)
4 François Ier Mitterand en campagne (mars 1981), face au diable de bénitier de Rennes-le-Château, voulu par l'étrange abbé Saunière... Auteur André Galaup, écrivain de Limoux dont nous reparlerons sous peu... 

jeudi 10 novembre 2016

QUI TROUVE LE CERS PERD LA TRAMONTANE... (I)


« Ci-gît au fond de mon cœur une histoire ancienne,
Un fantôme, un souvenir d'une que j'aimais...
Le temps, à grand coups de faux, peut faire des siennes,
Mon bel amour dure encore, et c'est à jamais...
J'ai perdu la tramontane
En trouvant Margot,
Princesse vêtue de laine,
Déesse en sabots... »
Brassens. Je suis un voyou.

Avec son côté troubadour, l’ami Georges confirme qu’en amour on peut « perdre la tramontane » quand la passion aveugle au point de ne plus savoir où on en est et que "l’entiché(e)" ne maîtrise plus son destin. Plus vulgairement, on peut la perdre aussi, quand, à force de faire tourner le monde autour de son nombril, on regarde les autres de haut. Le pouvoir central, dans ce qu’il a de jacobin (1), exsude hélas ce mépris ordinaire.

Cette fois, rien de raciste, comme pour l’accent du Sud, rien de calomnieux, comme pour la paresse prétendument méditerranéenne, seulement le dénigrement habituel, le dédain insidieux. Dans ce registre, épinglons Météo France. L’organisme d’État, en effet, décida un jour que, de la Camargue au cap Béar, seule la tramontane avait le droit de souffler. Et la télé d’en rajouter, après les quelques degrés de plus à la température de baignade, même si, avec la "tramontane", il ne faudrait pas rebuter le vacancier, doigts de pied en éventail, qui doit absolument oublier la corruption tant morale que matérielle des élites, la démocratie confisquée, la baisse du pouvoir d’achat, les hausses d’impôts. Quant au Sudiste (2) qui a le malheur de demander si le Cers, c’est du vent, il fait sourire tant il exagère même s’il n’y va pas de son patois !

Qu’on ne se méprenne pas : la tramontane n’y est pour rien. Le terme nous vient d’abord de l’italien "transmontana" indiquant le Nord, l’étoile polaire, tout ce qui est au-delà des Alpes, au-delà des monts ("trans montes") avant de désigner le vent. Depuis le début du XIVème siècle (3), cette "émigrée" au nom pour le moins générique, peut et a le droit de souffler... le Languedoc reste une terre d'accueil ! En Arles, sur la table d’orientation de la place de la Major, le mistral et les tramontanes couvrent 68° (du NW au NNE). A partir d’une ligne Montpellier, Sète, admettons une tramontane "vraie" venue des Cévennes, voisine du mistral et qui occuperait un angle dont le sommet serait Agde avec le second côté ouvrant jusqu’à Saint-Pons... même s’il m’en coûte parce qu’à Colombières, non loin du confluent de l’Orb et du Jaur, Jean-Claude Carrière ne cite pas la tramontane : "Le pays est... froid l’hiver à cause du vent du Nord qui descend en sifflant du massif... " (4).
A Fleury aussi, nous nous sommes laissés aller à dire "vent du Nord" pour tout souffle venant de l’intérieur des terres. Et cette paresse de l’esprit a relégué le pauvre Cers avec ces masses d’air attirées par une dépression en mer, déniant ainsi l'identité et la nature profonde du maître vent.
Pour aller plus loin, je dirai même que Narbonne est à blâmer en premier ! A-t-elle défendu, en effet, le statut à part, sinon supérieur, de "son vent", le Cers ? Qu’on me dise si Narbo Martius en a appelé aux Romains qui, héritiers des Grecs, ont nommé "cercius" (5) (6) deux souffles majeurs du Golfe du Lion ? Qu’on me dise si l’Histoire situe bien un mont Saint-Cyr (7), entre Ouveillan et Sallèles, où fut édifié, en 14, au nom de l'empereur Auguste, le temple dédié au dieu Cercius ?
(à suivre).

(1) Il serait intéressant d’analyser la manière, la mutation psychologique qui transforme les provinciaux promus aux affaires nationales en jacobins purs et durs... peut-être une conséquence du scrutin majoritaire...
(2) Paris parle de « Sudiste » pour les États-Unis et la guerre de Sécession. Concernant le pré-carré hexagonal, si le Sud-Est pour « La Côte », « Le Midi », et le Sud-Ouest sont cités, le Sud n’existe pas. Ne parlons pas du Cers !
(3) Le Robert 1, à l’entrée "tramontane" (début XIVème) : vent du nord sur la côte méditerranéenne ou vent qui vient d’au-delà des montagnes (Alpes, Pyrénées).
(4) Le vin bourru (2000). Très beau livre !
(5) D’après l’excellent site etymologie occitane.fr, l’occitan ancien "cers" remonterait au grec « kirkios » tandis que l’espagnol "cierzo" vient directement du latin "cersius" « avec un "e" bref attesté chez Caton ».
(6) D’après Pline le Jeune « C'est le vent le plus célèbre de la Narbonnaise ; il ne cède à aucun autre en violence ».
(7) Geoportail y situe un ancien phare d'aviation (Aéropostale, années 20).

Photo : Pins de Barral en automne. 1963. François Dedieu.