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samedi 26 mai 2018

QUELLES LIMITES POUR LES CORBIÈRES ? (fin) / Aude, Languedoc, Occitanie.

(Une carte des Corbières est proposée en première partie). 
 
Passée Carcassonne, suivant sa pente, l’Aude décrit un coude à quatre-vingt-dix degrés vers la Méditerranée (à suivre : « Poussée des infidèles dans la gouttière audoise). Le fleuve peut enfin contourner l’ultime bastion, la montagne d’Alaric (603 m.), aurait-il encore à composer avec un rapprochement aux portes du Minervois (entre Lézignan et Escales, 200 m.), puis les collines de Montredon (168 m.), de Moussan (130 m.) et finalement la Montagne de la Clape (214 m.), excroissance projetée des Corbières, responsable de la formation de son ancien delta...   
Aude Fontfroide Author Henri Sivonen

A l’Est, depuis Narbonne, les reliefs moins marqués des Corbières (massif de Fontfroide 293 m.) dominent une plaine littorale basse occupée par les étangs : de Bages & de Sigean, de Lapalme. Les voies de communication attestent d’un passage de plus en plus étroit au niveau de l’Étang de Leucate ou de Salses[1], en direction de Perpignan. Ici, même le rail qui jusque là a pu gagner au plus court à travers les lagunes, pour desservir Port-la-Nouvelle, rejoint la nationale et l’autoroute avant que le verrou du Pas de Salses n’ouvre le Roussillon.   

Aude Fitou Author BlueBreezeWiki

Aude Gorges_de_Galamus_2005-08-05 Source taken by the user
Au Sud, la longue échine calcaire d'un synclinal, souvent proche des mille mètres d'altitude prolonge la Forêt des Fanges avant de rejoindre les Corbières Maritimes, après une course vers l'Est sur plus de vingt kilomètres.

Après avoir évoqué les limites de ce quadrilatère étonnant pour son originalité multiforme, unifié dans une grande diversité physique, climatique, botanique, historique, humaine et économique, et si déjà une retenue certaine a empêché de trop en dire, peut-être par décence, par respect, pour l’enchantement que nous avons la chance et le loisir de ressentir, il est temps de s’enquérir des éclats offerts ou des trésors que cachent ces contrées ouvrant sur des mythes, des légendes et avant tout sur un passé fondateur ! 

Les Corbières ? Un nom, pour commencer, qui ne peut que donner l’envie d’explorer parce que ces rencontres là tiennent de l’aventure et du merveilleux ! 

Photos autorisées Wikimedia commons.  



[1] Deux noms pour un même étang… bisbilles et chipotages de famille en souvenir d’une frontière historique. 

mercredi 26 avril 2017

DELTA DE L’AUDE (4) / Les îles de la Narbonnaise.

  

Un autorail rouge et crème s’en va dans le petit matin blême. Ambiance enfumée d’un temps où la clope tue en toute impunité. Presque tous ont un abonnement de travail (merci la SNCF), et des habitudes. L’encre pas encore sèche de l’Indépendant ou de la Marseillaise noircit les doigts. D’autres forment une table à quatre pour une belote bruyante. Moi je retrouve Alain qui enseigne, toujours dans les P.O. où il a "fait" l’École Normale. Malgré nos discussions, les instantanés des lagunes, des îles, viennent forcément meubler nos silences. En attendant d’en savoir davantage, un jour, sur cette langue de terre avec le canal et le rail entre des étangs qui, sans cela, ne feraient peut-être qu’un, nous sommes si habitués qu’il faut se pincer pour admettre le caractère admirable de ces paysages dont nous semblons blasés. 


Avec le Paris-Port-Bou, toute cette beauté vous saute aux yeux. Jamais aussi bien perçue que dans les yeux des voyageurs du train de nuit. "Le train de nuit, c'est Paris à une heure de Perpignan : une demi-heure pour s'endormir, une demi-heure pour se réveiller" (1). La surprise donne à tous cet air émerveillé des enfants à Noël : la lumière toute méditerranéenne, magie de toutes ces nuances encore mêlées de bleus, de gris, de verts, le ciel, les étangs, le canal, les pins émergeant peu à peu de la nuit sous un soleil encore froid comme un œuf clair mais qui n’a plus rien à voir avec celui d’Austerlitz. 
    

Depuis sept millénaires, sur près de 250 km2 (2), le delta de l’Aude occupe à peu près la surface qui est la sienne  aujourd’hui. Le littoral abordé par les Romains ressemble beaucoup à celui que nous connaissons. Le maintien artificiel du bras méridional de l’Aude (barrage ou digue seulement à Sallèles ?) (3) ne permettait déjà plus d’atteindre Narbo Martius et les marchandises passaient des navires de haute mer sur des barges à fond plat, à hauteur des îles de Sainte-Lucie et de l’Aute. La Clape a longtemps gardé son insularité ; appelée « Île du Lec », elle se trouvait en effet séparée du fossé comblé de Narbonne par un étang salin qui s’est maintenu jusqu’au XVIIIe siècle (4).     

(1) train supprimé en décembre 2016...
(2) plus marqué, le delta de l’Ebre s’avance sur 320 km2 tandis que celui du Rhône avec une Camargue plurielle (la Petite et la Grande) s’étend sur 1500 km2.
(3) «... Gaston Galtier (La côte sableuse du Golfe du Lion [Bulletins de la Société languedocienne de Géographie - année 1958] pense que le bras oriental, plus court et présentant une pente plus forte, écoulait la majeure partie des eaux et que les Romains ont barré ce bras oriental à Sallèles pour augmenter le tirant d'eaux du bras méridional et le rendre plus propice à la navigation, ce qui paraît plausible en raison de l'importance du port de Narbonne.../... à la suite de l'inondation de 1316, l'Aude a emporté le "barrage" de Sallèles et repris son cours primitif dans le bras oriental... /... les efforts déployés, après la rupture du barrage, pour maintenir le cours de l’Aude vesr Narbonne se sont révélés vains. Depuis le milieu du XIVe siècle et jusqu'à la fin du Moyen-Âge, l'Aude n'arrose qu'irrégulièrement la ville. Une nouvelle robine doit être établie à Moussoulens en 1468.../... Ces efforts restent vains ; le 3 octobre 1531, l'Aude change définitivement son cours et quitte Narbonne.../... La situation des embouchures de l'Aude ne sera stabilisée qu'au début du XIXe siècle : la Robine a été canalisée de Moussoulens à la mer, la branche nord sera à son tour canalisée en Brumaire an VIII...» (22 oct- 21 nov 1799).
Source Vilatges al pais, Canton de Coursan (2005 / Francis Poudou et habitants) 
(4) Etang Salin sur les communes de Vinassan et Narbonne, restes du lacus Rubressus, desséché en 1585 grâce au canal Ste Marie. La mention des salines de Coursan apparaît en 844. Estang salin ou marais de la Clape 1680. Le canal de l’étang-Salin ou de Ste marie prend à Coursan le trop-plein de la rivière Aude, arrose les basses plaines de Coursan (A l’estang 1768), Armissan (Tot lo lonc de l’Estanh 1537), Narbonne et se jette dans l’étang de Campignol au roc de Conilhac. 
https://dedieujeanfrancois.blogspot.com/search?q=Coursan

 
Crédit photos commons wikimedia : 
1. autorail quittant Calvi auteur Didier Duforest
2. Étang_de_l'Ayrolle,_Gruissan Auteur Christian Ferrer / cliché pris vers l'ouest depuis l'île Saint-Martin / La voie ferrée et le canal séparent l'Ayrolle de l'étang de Bages-et-de-Sigean. 
4. Étang de Bages et de Sigean  depuis Sainte-Lucie Author Christian Ferrer / photo prise vers le sud : on distingue la petite île de la Nadière ainsi que les silos et les cuves à hydrocarbures de Port-la-Nouvelle. 

Photo de nos impôts : 
3. Ile de l'Aute vue aérienne Conservatoire du Littoral

lundi 3 avril 2017

ODE AU-DELÀ DU DELTA... (2) / Aude au delta caché









photos : 1, 2, 3. canaux anti-débarquement de la deuxième Guerre Mondiale. 
4 & 5. Étang de Pissevaches (Fleury d'Aude). 
6, 7 & 8. Flore des dunes. 

L’Atax (1) des Romains ne se vante jamais d’avoir enfanté, à force de sédiments, ces terres basses depuis Capestang jusqu’aux Cabanes-de-Fleury en passant par Salles, Fleury, Lespignan et Vendres, sans oublier au sud la plaine narbonnaise ainsi que les atterrissements autour de Gruissan et au-delà des îles Saint-Martin, Sainte-Lucie, par ce bras abandonné, devenu Canal de la Robine, jusqu’au débouché de Port-la-Nouvelle.

Marges floues aux calmes vénéneux que seuls des vents fous peuvent balayer. Platitudes qui transportent vers un horizon incertain, aux confins de la vie, de la mort, vers un éternel recommencement. Va-et-vient fougueux ou paisibles, féminité au goût de sel d’une mer qui monte, virilité doucereuse d’un fleuve qui pénètre. Vents tempétueux, flots impétueux que le ventre chaud de la mer attire. Le mourir du désir, d’étreintes impérieuses mais si vulnérables. Le mourir des desperados. La mort plutôt que l'inconsolable. Les fantômes tragiques de Mirèio ou Magali et cette Lydie au prénom grec, mirage de quelques rencontres au milieu des saladelles...

Le delta, potentialité d’un au-delà, indéfinissable et pourtant palpable, plus tangible et positive que la négation de « La possibilité d’une île »... « Le bonheur n'était pas un horizon possible » (Michel  Houellebecq / Fayard / 2005). Le delta fera toujours rêver... Un domaine ne portait-il pas ce surnom de « Californie » ? Un autre ne se qualifie-t-il pas comme étant celui « Du bout du monde » ?

Sous les trains de nuages qui se poursuivent, un poète si frais et pourtant trop lucide pour son âge n’a pas tant bavardé pour l’exprimer :

«... Je ne parlerai pas, je ne penserai rien :
Mais l’amour infini me montera dans l’âme,
Et j’irai loin, bien loin, comme un bohémien,
Par la Nature, ~ heureux comme avec une femme. »
Arthur Rimbaud / Poésies / Sensations / mars 1870 (plus près de ses quinze encore que de ses seize ans !)     

(1) « Atacos, Atax, Attagus ». "Atacos" peut-être pour « très rapide, fougueux » aurait aussi donné le nom du peuple des Atacini. http://www.arbre-celtique.com/encyclopedie/atax-atacos-aude-808.htm

vendredi 24 février 2017

NOTRE MAÎTRE VENT, LE CERS / L’itinéraire en Terre d’Aude / Jean GIROU 1936.


Je ne sais plus qui a évoqué le Cers en tant que plus vieux nom de vent en France. Je sais que nos commentateurs météo et leurs consœurs très charmeuses nous gargarisent trop de ces tramontanes venues de tous les horizons... Nous ne voulons pas les exclure mais seulement rendre une juste place à celui qui reste lié à l’Aude comme le Rhône l’est au Mistral... 

A propos de notre maître vent le Cers, tiré de L’Itinéraire en Terre d’Aude, extraits : 


(page 240) « ...Pour aller à Quéribus, il faut, de Cucugnan, monter vers le Grau de maury ; avant d’arriver au col, un sentier muletier part à gauche dans la pierraille de la garrigue, une demi-heure de marche et l’on arrive aux premières défenses du château. la montée en serait facile, si, d’ordinaire, un vent terrible ne vous fouettait, un cers violent, qui, après avoir parcouru à grandes foulées les terres hautes des Corbières, va se lancer dans la plaine d’Estagel, d’un bond de plus de 500 mètres.
Arrivés aux blocs de pierre de la première enceinte, il faut gravir un couloir d’accès; le vent, en rafale, vous plaque contre la muraille, vous abat vers la terre, avec une telle force et un tel acharnement que marcher devient une lutte; enfin une murette, on respire, un peu de repos et il faut repartir. le Cers vous reprend comme une proie, vous déshabille et vous soulève... /... Mais cette bataille avec le vent est récompensée par les beautés architectoniques de ce château et par son panorama exceptionnel... » 

Page 286, en parlant de la montagne d’Alaric : «... Les habitants de Montlaur, de Camplong et de Ribaute, bannières en main, montaient en chantant à San Miquel. L’ascension en plein Cers, sous le soleil de septembre, devait être déjà un sacrifice;.. » 


Page 301, dans la partie Narbonne : «... D’autres temples s’élevaient en ville, consacrés à Minerve... à Hercule, à Apollon, à Bacchus, à Cybèle, à la Concorde, à Saturne et à Circius le vent impétueux du Cers dont Caton disait : « Il se déchaîne avec violence; quand on parle, il vous remplit la bouche; il renverse un homme armé et une voiture chargée » ; de nos jours, le Cers a gardé la même fureur, certains jours de tempête, il enlève les toits, renverse en gare de La Nouvelle les wagons et, combien de fois n’a-t-il pas lancé contre un platane les automobilistes pris dans son tourbillon... » 


Page 323, pour l’étang de Bages et de Sigean : « ... Nous voici en bateau, l’on part par bon Cers du ponton de la Nautique;.. »

Dans son livre sur l’Aude, Jean Girou, nous le constatons, n’a pas manqué de mentionner le Cers... Plus de 300 mots pour du vent ! Et toujours, sauf une fois, avec la majuscule... Je ne me doutais pas que ma fantaisie n’avait rien d’original... En parlant de majuscule, remarquons les deux de "La Nouvelle" et la seule de "la Nautique". 

Crédit photos : 1. Château de Quéribus ; derrière le Grau de Maury ; au-delà le fossé du Fenouillèdes. Auteur Nidira.
2. Montagne d'Alaric, dernier pli des Corbières vers le nord. auteur Eric Andréoli.
3. Cathédrale St-Just-St-Pasteur Narbonne. Author Dennis Jarvis.
4. Port La Nouvelle. Auteur Joyce 11.