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jeudi 14 septembre 2017

BERGOUNIOUX LE VERGOGNEUX... la pédanterie vaniteuse



La pédanterie vaniteuse suinte de ces coteries qui se veulent supérieures et France Culture donne souvent dans ces tartuferies à sens unique. Dans ces entretiens multiples, on réalise à force ce que la flagornerie a de réciproque entre l’intervieweuse et l’interviewé.  La Fontaine nous aurait-il aussi donné à entendre, en supplément au « ...flatteur vivant aux dépens de celui qui l’écoute... »,  la mycorhize intime entre flatteur et flatté ? Nous n’avons pas à être dupes de cette connivence intéressée car, avec Bergounioux, pas de débat : soit on lui sert la soupe, soit il nous sert lui-même ses convictions simplistes lors de conférences, avec le plus bel aplomb, sans jamais douter un tant soit peu ! Méfions-nous de ceux qui n’acceptent pas la contradiction, c’est malsain et pour le moins suspect...
Elise, la journaliste (1), abonde surtout dans son sens et lui, glousse des OUI répétés afin qu’ils communient, se confortent mutuellement...
 
Ho ! un théâtre chez les bouseux !

C’est à peine si à un moment, tant c’est gros, elle le reprend
« Vous êtes citadin... Où est la campagne ? »
 Alors qu’il s’est complu, jusque là, à dresser un tableau sinistre des campagnes et des ahuris qui la peuplent, Bergounioux, du bout des doigts, persiste à ne voir que de vieux sabots crottés : « ...  J’ai encore une parentèle du second degré encore paysanne qui vivent dans la gêne, l’inconfort qui ne sont pas perçus comme tels par les intéressés. Ils n’ont pas l’eau chaude au robinet, ils vont chercher l’eau au puits... »... La parentèle appréciera cette distanciation affectée... Avec les sabots d’Hélène (Brassens) et le « On dirait que ça te gêne de marcher dans la boue... » de Michel Delpech, Ferrat aussi revient en mémoire, lui qui aimait tant Paname mais trouvait néanmoins si belle une montagne ardéchoise autrement à l’écart par rapport au bassin voué à la polyculture de Brive-la-Gaillarde !

« Au marché de Brive-la-Gaillarde,
A propos de bottes d'oignons,
Quelques douzaines de gaillardes
Se crêpaient un jour le chignon... » (Hécatombe, Georges Brassens)

Rien ne se règle en comptants de gnons mais même à propos du foirail, jusqu’en 1966, 67, sur la place centrale, les mots de Bergounioux, ses juxtapositions à hue et à dia si parlantes, relèvent d’un mépris provocateur : «... Hommes vêtus de sarraus bleus ou de canadiennes.../... le teint fleuri, rubicond, qui parlaient un idiome que je ne comprenais déjà plus, c’est à dire le patois, l’occitan, poussaient à coups de trique des porcs stridents et des vaches indociles. Ils tenaient cette place.../... qu’ils laissaient souillée de paille avent de disparaître mystérieusement dans le vide environnant... » En 1967, la voirie a mis du goudron et a marqué de peinture blanche ce qui devait être un parking... »... Mensonge par omission (2). Du passé faisons table rase... (Bergounioux a-t-il pratiqué un communisme trop orthodoxe ?). Et lorsqu’il en conclut, changeant habilement de camp le temps d’un mot, pour ne pas s’attirer les foudres, se traitant d’« arriéré devant rattraper à marche forcée le monde moderne... », sans doute pense-t-il à l’élevage industriel, aux antibiotiques pour une viande à moins de trois euros au kilo.

Sa fatuité méchante et gratuite lui fait prendre les pieds dans le tapis quand il regrette d’avoir les centres universitaires à deux cents kilomètres, ce qui l’amène à se représenter égaré au milieu d’un désert. Un « abysse ténébreux » dans sa bouche, et pour mieux nous convaincre, il évoque un diamètre aux effets hyperboliques (400 km). A contrario et en même temps il apprécie d’avoir eu à disposition une riche bibliothèque à deux pas de chez lui, à Brive ! Il s’enthousiasme même au souvenir des incunables explorés ! Ah, copier sur un humaniste de la renaissance la traduction attendue par le prof le lendemain ! Après le chaud, il souffle le froid, parle de désenclaver, d’aller ailleurs, d’« accéder à des clartés dont nous étions excommuniés depuis la nuit des âges ». Et plus loin, craignant que ce ne soit toujours le cas, il persiste : « Ignorance morne à laquelle le désert vert dont je sors réduit ses habitants ». Difficile à suivre !
 
Oh ! un cinéma chez les ploucs !

Et que penser du morceau de bravoure qui suit ?
«... Il allait falloir s’armer d’une résolution farouche, pour parcourir à marche forcée et en brûlant les étapes tout le chemin qui nous séparait du temps présent, de l’effective réalité, de l’heure que marquait l’horloge des grandes villes. C’est une chose dont je pense avoir eu assez tôt et, sans joie, la prémonition. Nous habitons sur les marches du monde, nous ne sommes pas au monde mais peut-être, à force de soin, de zèle, de peine, peut-être que nous pouvons marcher à notre propre rencontre et, qui sait, un jour être enfin nous-mêmes, tels que le requiert cette heure qu’il est... »
Nier, pourrir la terre nourricière « à force de soin, de zèle, de peine », fermé dans son nombrilisme, sans évoquer comment ces marches du monde dont le Maquis des Monédières ont contribué à le sauver, ce monde justement !  C’est qui ce chantre d’un nihilisme libéral, ce chancre du communisme ? Il faut être dérangé pour asséner une idéologie proprement dégueulasse !

Vanitas vanitatum... tout est vanité chez Bergounioux, la forme bétonnant le fond ! Une fois de plus, la citation ci-dessus en atteste, ce lyrisme qui ne sert pas seulement ses pensées, se confond avec l’éloquence de l’orateur voulant emporter l’adhésion passive des masses. S’il est inoffensif tant qu’il marque la préciosité élitiste d’une minorité culturelle revendiquée de facto, le lyrisme peut ouvrir sur tous les dangers... L’Histoire nous le sert souvent en hors-d’œuvre d’une dictature à venir...  il peut, devenant public, officiel, se prolonger pour à la fois nourrir une bête immonde et s’en alimenter... Allons, je m’en voudrais de donner dans le procès d’intention... relevons seulement la pédanterie ridicule de ses hyperboles.

« ... avec un caban en toile cirée de ménagère accroché à chaque bras et je priais le ciel, enfin si je puis dire, d’avoir la force de regagner avec mes 40 ou 50 kilos de papier neuf, frais, après quoi, comme l’âne de Buridan sans doute... /... la voûte du ciel va  certainement s’entrouvrir et Jéhovah courroucé paraître et me foudroyer... /... il était sans exemple... /... dans toute mon Hégire, qu’un adulte puisse laisser 90 % de son salaire dans une librairie... »
Imbu de sa propension à tout dépenser pour des livres... se prendrait-il pour un Bernard Palissy ?!?!?!

La fausse modestie, stade ultime de la prétention, qui le fait s’excuser, par exemple, d’employer un imparfait du subjonctif s’exprime aussi quand il se présente en tant que surdoué :
Pierre Bergounioux : ... les adultes vers lesquels je me tournais n’étaient pas en mesure de me répondre...
Elise : mais vous dites que très tôt les adultes vous sont apparus comme ne pouvant pas...
PB : oui
Elise :... livrer de réponse...
PB : oui
Elise : ... n’ayant plus de valeur...
PB : oui,
Elise : à vous communiquer... 
PB : oui, j’exagère un peu mais je suis rentré en dissidence vers 18 mois, 2 ans... 

Ce professeur agrégé de lettres donne dans la philosophie, un domaine associé, par définition, à la notion de sagesse... Bergounioux est trop sûr de lui pour être sage ! 

«... Il faut presque une vie pour tirer les conséquences de ce qui nous a été donné, livré, offert, imposé lorsqu’on a commencé. Devenir adulte ne servirait à rien qu’à réparer les dommages et les pertes du commencement et exaucer les vœux que l’enfant que nous avons été a formés sans avoir les moyens ni matériels ni moraux ni intellectuels de les faire aboutir... /... Je n’ai plus varié depuis l’âge de 5 ou 6 ans. Je suis comptable vis à vis du gamin que j’ai été... »

Passons sur les adultes qui ne se sont pas chargés de la besogne, sur sa prétention d’écrire pour ne pas que les descendants aient à en régler les arriérés, des descendants qui n’auront pas à s’occuper de ce qui est resté inachevé... Enfin, c’est sûrement mon niveau intellectuel de "crétin rural" qui fait que je reste dur à la détente...

Maintenant que je relis l‘article qui annonce un film sur France3, j’aurais dû me méfier dès l’amorce « Déjà six heures. ce n’est pas sans appréhension que j’entame ce nouveau cahier. »... Puis «... l’impérieuse nécessité de la quitter (sa région natale) pour devenir écrivain... » Étrange vu qu’il dit, par ailleurs, que jusqu’à trente ans, il n’était pas question pour lui, d’écrire ? 
Quoiqu’il en soit, que soit vite oublié le jour du voyage qui me vit ouvrir ce journal parce que l’aéroport de la Réunion en dit beaucoup tout en offrant moins qu’avant (3)...
Ce n’est pas une sinécure de sortir les crocs contre celui qui écrit tant l’attraction bienveillante initiale qu’il exerce sur le lecteur, est naturelle. En le montrant du doigt, c’est plutôt un plaidoyer pour la France profonde des provinces et par-dessus-tout, ce sera notre prochain sujet, pour défendre notre langue, symbole de la sensibilité civilisatrice occitane, mise à bas, méprisée par des félons de l’acabit d’un Bergounioux !   

(1) ces hérauts des ondes trompettent, tels Laure Adler « un des plus grands écrivains français » (ne vous étouffez pas !). Tous et ceux de la radio et télé d’État, à l’image du privé, le petit doigt pas loin de la couture du pantalon... A France-Info, voilà un mois en gros, l’évocation de la présidentielle a donné « La démocratie vous salue ! Elle se porte bien ! »... J’ai failli avaler mon café de travers !

(2) Pourquoi ne dit-il pas que le bétail, surtout des veaux de lait, continuent de se négocier dans sa ville ? http://www.brive.fr/index.php/accueil/foires-et-marches/#1471428115596 c9294139-2f73
"Des marchés aux veaux de lait se déroulent en principe les 1er et 3ème mardi de chaque mois au Foirail du Teinchurier, avenue du Teinchurier ; six de ces foires sont primées.

A noter que la foire primée aux veaux de lait du Festival de l’élevage se tiendra exceptionnellement sur le site du festival (contre allée Tourny) le lundi 22 août.

Deux foires primées aux bovins gras auront lieu les jeudi 11 février et 17 novembre".

(3) retrouvons les vers de Desnos :

Maudit
soit le père de l’épouse
du forgeron qui forgea le fer de la cognée
avec laquelle le bûcheron abattit le chêne
dans lequel on sculpta le lit
où fut engendré l’arrière-grand-père
de l’homme qui conduisit la voiture
dans laquelle ta mère
rencontra ton père !

Néanmoins ne vous endormez pas ! Restez vigilants ! Moins on en a plus on l’étale, la culture, comme la confiture de ce pays perdu et déshérité pour lequel Bergounioux la vergogne exprime tant de répulsion mêlée de tant de mauvaise conscience... 


photos autorisées :
1. Le Corbeau et le Renard / La Fontaine / Illustrations Benjamin Rabier.
2. Le théâtre de Brive Author LucasD / commons wikimedia.
3. Cinéma Rex / Brive-la-Gaillarde Author Le Grand Cricri / commons wikimedia. 

Mardi 21 février 2023. Correction de l'article pour cause d'outrances de ma part dans la version initiale... 

BERGOUNIOUX LE VERGOGNEUX... le pédantisme vaniteux 

Un pédantisme vaniteux suinte de ces coteries qui se veulent supérieures et France Culture donne souvent dans ces tartuferies alambiquées, surfaites. Dans ces entretiens multiples, on réalise à force ce que la flagornerie a de réciproque entre l’intervieweuse et l’interviewé. La Fontaine nous aurait-il aussi donné à entendre, en supplément au « ...flatteur vivant aux dépens de celui qui l’écoute... »,  la mycorhize intime entre flatteur et flatté ? Nous n’avons pas à être dupes de cette connivence intéressée car, avec Bergounioux, pas de débat : soit on lui sert la soupe, soit il nous sert lui-même ses convictions simplistes lors de conférences, avec le plus bel aplomb, sans jamais douter un tant soit peu ! Méfions-nous de ceux qui n’acceptent pas la contradiction, c’est malsain et pour le moins suspect...

Elise, la journaliste, abonde surtout dans son sens et lui, glousse des OUI répétés afin qu’ils communient, se confortent mutuellement pour les serrés des fesses tout oreille bien que déconnectés à force d’intellectualisme...
C’est à peine si à un moment, tant c’est gros, elle le reprend
« Vous êtes citadin... Où est la campagne ? »
Alors qu’il s’est complu, jusque là, à dresser un tableau sinistre des campagnes et des ahuris qui la peuplent, Bergounioux, du bout des doigts, persiste à ne voir que de vieux sabots crottés : « ...  J’ai encore une parentèle du second degré encore paysanne qui vivent dans la gêne, l’inconfort non perçus comme tels par les intéressés. Ils n’ont pas l’eau chaude au robinet, ils vont chercher l’eau au puits... »... La parentèle appréciera cette distanciation affectée... Avec les sabots d’Hélène (Brassens) et le « On dirait que ça te gêne de marcher dans la boue... » de Michel Delpech, Ferrat aussi revient en mémoire, lui qui aimait tant Paname mais trouvait néanmoins si belle une montagne ardéchoise autrement à l’écart par rapport au bassin voué à la polyculture de Brive-la-Gaillarde !

« Au marché de Brive-la-Gaillarde,
A propos de bottes d'oignons,
Quelques douzaines de gaillardes
Se crêpaient un jour le chignon... » (Hécatombe, Georges Brassens)

Rien ne se règle en comptants de gnons mais même à propos du foirail, jusqu’en 1966, 67, sur la place centrale, les mots de Bergounioux, ses juxtapositions à hue et à dia si parlantes, relèvent d’un mépris provocateur sur les maquignons en bleus ou canadiennes, couperosés par la bonne chère, parlant : «... un idiome que je ne comprenais déjà plus, c’est à dire le patois, l’occitan...», poussant sans ménagement «... des porcs stridents et des vaches indociles...», laissant la place sale avant de se fondre dans la rusticité du temps. Diantre, cet homme-là ne doit consommer que ses mots ! Du passé faisons table rase... (mais quel communisme ce vergogneux a-t-il pratiqué ? en lien avec la réalité stalinienne des ouvriers devant être nourris par des paysans crevant de faim ?) Et lorsqu’il en conclut, changeant habilement de camp le temps d’un mot, pour être allé trop loin dans une analyse oiseuse, dans une dialectique de coupable voulant minimiser pour ne pas s’attirer les foudres, se traitant d’«...arriéré devant rattraper à marche forcée le monde moderne... », sans doute pense-t-il à l’élevage industriel, aux antibiotiques pour une viande à moins de trois euros au kilo.

Sa fatuité méchante et gratuite lui fait prendre les pieds dans le tapis quand il regrette d’avoir les centres universitaires à deux cents kilomètres, ce qui l’amène à se représenter égaré au milieu d’un désert. Un « abysse ténébreux » dans sa bouche, et pour mieux nous convaincre, il évoque un diamètre aux effets hyperboliques (400 km). A contrario et en même temps il apprécie d’avoir eu à disposition une riche bibliothèque à deux pas de chez lui, à Brive ! Il s’enthousiasme même au souvenir des incunables explorés ! Ah, copier sur un humaniste de la renaissance la traduction attendue par le prof le lendemain ! Après le chaud, il souffle le froid, parle de désenclaver, d’aller ailleurs, d’« accéder à des clartés dont nous étions excommuniés depuis la nuit des âges ». Et plus loin, craignant que ce ne soit toujours le cas, il persiste : « Ignorance morne à laquelle le désert vert dont je sors réduit ses habitants ». Difficile à suivre !
 
Et que penser du morceau de bravoure qui suit ?
«... Il allait falloir s’armer d’une résolution farouche, pour parcourir à marche forcée et en brûlant les étapes tout le chemin qui nous séparait du temps présent, de l’effective réalité, de l’heure que marquait l’horloge des grandes villes. C’est une chose dont je pense avoir eu assez tôt et, sans joie, la prémonition. Nous habitons sur les marches du monde, nous ne sommes pas au monde mais peut-être, à force de soin, de zèle, de peine, peut-être que nous pouvons marcher à notre propre rencontre et, qui sait, un jour être enfin nous-mêmes, tels que le requiert cette heure qu’il est... »
Nier, pourrir la terre nourricière « à force de soin, de zèle, de peine », fermé dans son nombrilisme, sans évoquer comment ces marches du monde dont le Maquis des Monédières ont contribué à le sauver, ce monde justement !  C’est qui ce chantre d’un nihilisme libéral, ce chancre du communisme ? Il faut être dérangé pour asséner une idéologie aussi partiale ! Moins grave, c’est seulement s’écouter parler dans une coterie souvent oiseuse...

Vanitas vanitatum... tout est vanité chez Bergounioux, la forme bétonnant le fond ! Une fois de plus, la citation ci-dessus en atteste, ce lyrisme qui ne sert pas seulement ses pensées, se confond avec l’éloquence de l’orateur voulant emporter l’adhésion passive des masses. S’il est inoffensif tant qu’il marque la préciosité élitiste d’une minorité culturelle revendiquée de facto, le lyrisme peut ouvrir sur tous les dangers... Allons, sans donner dans le procès d’intention... relevons seulement la pédanterie ridicule de ses hyperboles.

« ... avec un caban en toile cirée de ménagère accroché à chaque bras et je priais le ciel, enfin si je puis dire, d’avoir la force de regagner avec mes 40 ou 50 kilos de papier neuf, frais, après quoi, comme l’âne de Buridan sans doute... /... la voûte du ciel va  certainement s’entrouvrir et Jéhovah courroucé paraître et me foudroyer... /... il était sans exemple... /... dans toute mon Hégire, qu’un adulte puisse laisser 90 % de son salaire dans une librairie... » Imbu de sa propension à ne consommer que des livres, à tout dépenser pour... se prendrait-il pour un Bernard Palissy ?!?!?! Tout ce qui est excessif est insignifiant.

La fausse modestie, stade ultime de la prétention, qui le fait s’excuser, par exemple, d’employer un imparfait du subjonctif s’exprime aussi quand il se présente en tant que surdoué :
Pierre Bergounioux : ... les adultes vers lesquels je me tournais n’étaient pas en mesure de me répondre...
Elise : mais vous dites que très tôt les adultes vous sont apparus comme ne pouvant pas...
PB : oui
Elise :... livrer de réponse...
PB : oui
Elise : ... n’ayant plus de valeur...
PB : oui,
Elise : à vous communiquer... 
PB : oui, j’exagère un peu mais je suis rentré en dissidence vers 18 mois, 2 ans... 

Ce professeur agrégé de lettres donne dans la philosophie, un domaine associé, par définition, à la notion de sagesse... Bergounioux est trop sûr de lui, trop mégalo pour être sage ! 

«... Il faut presque une vie pour tirer les conséquences de ce qui nous a été donné, livré, offert, imposé lorsqu’on a commencé. Devenir adulte ne servirait à rien qu’à réparer les dommages et les pertes du commencement et exaucer les vœux que l’enfant que nous avons été a formés sans avoir les moyens ni matériels ni moraux ni intellectuels de les faire aboutir... /... Je n’ai plus varié depuis l’âge de cinq ou six ans. Je suis comptable vis à vis du gamin que j’ai été... »

Passons sur les adultes qui ne se sont pas chargés de la besogne, sur sa prétention d’écrire pour ne pas que les descendants aient à en régler les arriérés, des descendants qui n’auront pas à s’occuper de ce qui est resté inachevé... Enfin, c’est sûrement le niveau intellectuel de " crétin rural " qui fait qu’il reste dur à la détente...

Maintenant qu’il relit l‘article qui annonce un film sur France3, il aurait dû se méfier dès l’amorce « Déjà six heures. ce n’est pas sans appréhension que j’entame ce nouveau cahier. »... Puis «... l’impérieuse nécessité de la quitter (sa région natale) pour devenir écrivain... » Étrange vu qu’il dit, par ailleurs, que jusqu’à trente ans, il n’était pas question pour lui, d’écrire ? Mais qui n’est pas comptable de ses contradictions ?  
Ce n’est pas une sinécure de sortir les crocs contre celui qui écrit tant l’attraction bienveillante initiale qu’il exerce sur le lecteur, est naturelle. En le montrant du doigt, c’est plutôt un plaidoyer pour la France profonde des provinces et par-dessus-tout, (ce sera un de nos prochains sujet et de toute façon un fil rouge), pour défendre notre langue, symbole de la sensibilité civilisatrice occitane, mise à bas, méprisée par des félons de l’acabit d’un Bergounioux !   


Néanmoins ne vous endormez pas ! Restez vigilants ! Moins on en a plus on l’étale, la culture, comme la confiture de ce pays perdu et déshérité pour lequel Bergounioux la vergogne exprime tant de répulsion mêlée de tant de mauvaise conscience... 

lundi 11 septembre 2017

BERGOUNIOUX LE VERGOGNEUX... une notoriété urticante

La compagnie nationale offre toujours des journaux toujours d’un format peu commode dans l’avion et de toute façon orientés puisque presque tous les médias, donc y compris la presse, sont dans les mains de quelques milliardaires (1). Merci d’autant plus à Air France que l’escale à la Réunion ne fut pas des plus affriolantes (v. https://dedieujeanfrancois.blogspot.fr/2017/09/itineraire-dun-enfant-lasse-2017-iii-la.html). 


Page 19 du n° 22582 en date des 20-21 mars 2017, rubrique TÉLÉVISIONS :
« Pierre Bergounioux se livre / l’auteur prolifique et singulier évoque son enfance, le travail d’écriture, son rapport au réel »...
L’ignare qui se cache en moi me dit que je ne peux que gagner à connaître un nom avouant son origine occitane. Première lecture, et, pour le dire de façon subjective, rien ne vient en écho à mon transport initial... Bof, rien de nouveau, ni en bien ni en mal, pour le dire avec indulgence. En dehors de la phrase « En littérature, le roman ne l’intéresse plus : il le considère comme un divertissement bourgeois », seulement des impressions toutes relatives dans la rencontre de l’inconnu, peut_être une pointe de vanité. Seulement encore des impressions à ne pas prendre pour argent comptant tant elles sont tangentielles, superficielles, souvent mort-nées, en cul-de-sac.
Mais là, j’ai trop à cœur de satisfaire ma facette sudiste et le Net devrait contribuer à ma quête. France Culture se propose, cinq émissions de trente minutes.

Si le titre du premier entretien « Une petite patrie en Corrèze » s’inscrit positivement, tout est remis en cause dès le début, dès que Bergounioux évoque une enfance "ambigüe" et on se demande bien pourquoi avec des parents aimants qui aiment les livres, une mère bachelière... Il évoque alors un prétendu maléfice qui l’affecte, en tant que natif, selon ses propres mots, d’une de ces régions pauvres de la périphérie. Ce point de vue n’est-il pas déséquilibré ? 

Misérable bibliothèque-médiathèque de Brive !
Mais ce n’est rien par rapport à la charge à venir... « Qui veut noyer son chien l’accuse de la rage » affirme le dicton. Hélas, la suite va vite convaincre que l’enragé est bien Pierre Bergounioux ! Adieu l’empathie initiale ! D’abord il en a contre sa province sans fer ni charbon, sans bonnes terres. En fait il précipite un maelström et prémédite de secouer l’occitan dans l’œil de son cyclone. On sent la colère froide car il prend soin de garder un ton posé, sans inflexions qui le démasqueraient. La langue est châtiée, le vocabulaire riche. 

Il n’empêche, il tempête d’être né parmi les demeurés « ... On ne connaissait pas l’extérieur... ». A croire qu’il sort du Moyen-Âge ce baby-boomer de 1949 ! Comment accréditer cette idée de contrée reculée et fermée ? Ne serait-ce que grâce au service militaire et à fortiori, à ces guerres terribles 1870, 1914, 1939 qui nous virent céder face aux Allemands ?!?! Et puis, Brive-la-Gaillarde, au carrefour des axes Paris-Toulouse et Bordeaux-Clermont ! 

La gare ridicule de Brive-la-Gaillarde
Après cette perfidie lapidaire, c’est un réquisitoire hypocrite contre le languedocien trop grave pour ne pas donner lieu à un traitement à part et à venir sous peu.
 
Suit une autre banderille sur ses compatriotes arriérés au point de ne pas réaliser leur misère matérielle et spirituelle. Il faut être aussi spécieux que péremptoire pour alléguer qu’une province pauvre survit seulement, sans engendrer quoi que ce soit de positif !  Quelle honte de faire accroire que la Corrèze, Brive dans cette marge limousine voisine de l’Auvergne, de la Guyenne n’ont pas vu naître d’écrivains... Je pense à Eugène Le Roy (Jacquou le Croquant), à Claude Michelet né en 1938 (« Des grives aux loups »), à Christian Signol... Et plus largement, en parlant de la création, comment peut-on dire «... moins bonnes terres qui permettent seulement de survivre dépourvues d’art, d’architecture, d’invention plastique littéraire artistique, philosophique... ». Il suffit d’aller sur la page wikipedia de Brive-la-Gaillarde pour constater la démonstration du contraire ! On y trouve des ecclésiastiques, des politiques, des militaires, un vice-amiral, des journalistes, des peintres, des acteurs, des historiens, un réalisateur, un homme de télé, des joueurs de rugby, un prix Nobel de physique, un mathématicien médaillé Fields, un chef d’orchestre, un pianiste, un saxophoniste, un claveciniste... Il est sinistre ce Bergounioux ! 

Et puis quelle déception quand la découverte d’un nouvel auteur déçoit ! Les rencontres se doivent d’être bonnes, d’apporter bonheur et enthousiasme. Si je ne dis rien pour ces écrivains qui m’ont arrêté au bout de vingt pages, j’aime et j’aime dire que j’aime Cavanna, Vincenot, Kazantzaki, Pergaud, Lacarrière, Lanoux, Carrière, Arène, Scipion, Clavel, Pagnol, Genevoix... pour me limiter à ceux dont je vois la tranche depuis mon clavier. J’aurais aimé aller plus loin avec François Tolza, cet inconnu... Mais ces prétentieux qui ramènent tout à leur auguste personne, qui à force de trop parler, parlent faux, NON ! 

Malheureusement Pierre Bergougnioux en est et puisqu’il rabaisse à ce point les ruraux, les provinciaux, la langue occitane, il y a trop de raisons pour que j’économise mon venin ! (à suivre) 

(1) le 8 sept 2017, les médias annonçaient le décès de Pierre Bergé, présenté comme mécène de son compagnon et sauveur (sans qu’il soit fait mention de Niel et Pigasse, autres riches contributeurs) du journal "néogauche" Le Monde dont je lis le 22582ème numéro des 20-21 août 2017. 
 

Photos commons wikimedia : Brive-la-Gaillarde une ville déshéritée...
2. Misérable, la bibliothèque-médiathèque Author Mossot.
3. Ridicule la gare SNCF ! Author Plybrius. 

21 février 2023. Correction de l'article pour m'excuser de mes outrances... 

BERGOUNIOUX LE VERGOGNEUX... une notoriété urticante 

 

Quoiqu’il en soit, que soit vite oublié le jour du voyage qui lui vit ouvrir ce journal parce que l’aéroport de la Réunion en dit beaucoup tout en offrant moins qu’avant, parce que si le Crédit Foncier n’avait pas été malhonnête, il ne serait sûrement pas parti pour arriver à payer le lourd crédit de sa maison (30 % du salaire)  ...
La compagnie nationale offrait toujours, encore en 2017, des journaux bien que d’un format peu commode dans l’avion et de toute façon orientés puisque presque tous les médias, donc y compris la presse, sont dans les mains de quelques milliardaires. Merci cependant à Air France d’autant plus que l’escale à la Réunion ne fut pas des plus affriolantes (travaux, difficultés pour se connecter, une ou deux prises cachées non prévues pour recharger l’électronique...) 

Le Monde. Page 19 du n° 22582 en date des 20-21 mars 2017, rubrique TÉLÉVISIONS :
« Pierre Bergounioux se livre / l’auteur prolifique et singulier évoque son enfance, le travail d’écriture, son rapport au réel »...
Pourtant tout semblait au départ de bon aloi. Première lecture plutôt positive... Une parole « aussi douce et grave que la chose écrite », « En littérature, le roman ne l’intéresse plus : il le considère comme un divertissement bourgeois » et seule la réalité lui paraît importante avec, pour réponse, des essais et récits.

Jusque là, rien à dire sinon l’envie d’aller plus loin ;  le Net devrait contribuer à cette quête. France Culture se propose, cinq émissions de trente minutes. C’est là que tout se gâte, contrairement à ce qui était attendu...

Si le titre du premier entretien « Une petite patrie en Corrèze » s’inscrit positivement, tout est remis en cause dès le début, dès que Bergounioux évoque une enfance "ambiguë" et on se demande bien pourquoi avec des parents aimants qui aiment les livres, une mère bachelière... Il évoque alors un prétendu maléfice qui l’affecte, en tant que natif, selon ses propres mots, d’une de ces régions pauvres de la périphérie. Ce point de vue n’est-il pas déséquilibré ? 

Mais ce n’est rien par rapport à la charge à venir... « Qui veut noyer son chien l’accuse de la rage » affirme le dicton. Hélas, la suite va vite convaincre que l’enragé est bien Pierre Bergounioux ! Adieu l’empathie initiale ! D’abord il en a contre sa province sans fer ni charbon, sans bonnes terres. En fait il précipite un maelström et prémédite de secouer l’occitan dans l’œil de son cyclone. On sent la colère froide car il prend soin de garder un ton posé, sans inflexions qui le démasqueraient. La langue est châtiée, le vocabulaire riche. 


Il n’empêche, il tempête d’être né parmi les demeurés « ... On ne connaissait pas l’extérieur... ». A croire qu’il sort du Moyen-Âge ce baby-boomer de 1949 ! Comment accréditer cette idée de contrée reculée et fermée ? Ne serait-ce que grâce au service militaire et à fortiori, à ces guerres terribles 1870, 1914, 1939 qui nous virent céder face aux Allemands ?!?! Et puis, Brive-la-Gaillarde, au carrefour des axes Paris-Toulouse et Bordeaux-Clermont ! 

Après cette perfidie lapidaire, c’est un réquisitoire hypocrite contre le languedocien, trop grave pour ne pas donner lieu à un traitement à part et à venir sous peu.
 

Suit une autre banderille sur ses compatriotes arriérés au point de ne pas réaliser leur misère matérielle et spirituelle. Il faut être aussi spécieux que péremptoire pour alléguer qu’une province pauvre survit seulement, sans engendrer quoi que ce soit de positif !  Quelle honte de faire accroire que la Corrèze, Brive dans cette marge limousine voisine de l’Auvergne, de la Guyenne n’ont pas vu naître d’écrivains... Je pense à Claude Duneton (1935-2012), Claude Michelet (1938-2022, « Des grives aux loups »), à Denis Tillinac (1947-2020), à Michel Peyramaure (1922) à Christian Signol (1947)... Et plus largement, en parlant de la création, comment peut-on dire «... moins bonnes terres qui permettent seulement de survivre dépourvues d’art, d’architecture, d’invention plastique littéraire artistique, philosophique... ». Il suffit d’aller sur la page wikipedia de Brive-la-Gaillarde pour constater la démonstration du contraire ! On y trouve des ecclésiastiques, des politiques, des militaires, un vice-amiral, des journalistes, des peintres, des acteurs, des historiens, un réalisateur, un homme de télé, des joueurs de rugby, un prix Nobel de physique, un mathématicien médaillé Fields, un chef d’orchestre, un pianiste, un saxophoniste, un claveciniste... et sous le volet littérature, l’École de Brive ainsi que La Nouvelle École de Brive !

Économiquement ce n’est pas un désert non plus avec les élevages bovins, ovins pour la viande, le lait et les fromages, les canards gras, les fruits rouges ainsi que les pêches, les prunes, des vignes, du bois.

Un pays a une âme et même sans l’hydroélectricité, l’agroalimentaire, la métallurgie, on se doit de respecter ! Et puis que ferait-il, notre écrivain prolifique sans le papier ? Ce n’est pas Paris qui, à son intention ou pour les éditeurs et groupes de presse, lui fabrique le papier. Sans Rungis, héritière du ventre de Paris, qu’est-ce que le tertiaire aurait à se mettre sous la dent ?   

Il est sinistre ce Bergounioux ! 


Et puis quelle déception quand la découverte d’un nouvel auteur déçoit ! Les rencontres se doivent d’être bonnes, d’apporter bonheur et enthousiasme. S’il ne dit rien pour ces écrivains qui l’ont arrêté au bout de vingt pages, parce que ce sont certainement ses capacités qui sont en cause, il aime dire, en demandant pardon à ceux qu’il oublie, qu’il aime Cavanna, Vincenot, Kazantzaki, Pergaud, Lacarrière, Lanoux, Carrière, Arène, Scipion, Clavel, Pagnol, Genevoix... pour se limiter à ceux dont, depuis son clavier, il voit la tranche dans la bibliothèque. Et comme il aurait aimé aller plus loin avec François Tolza, cet inconnu... Mais ces prétentieux qui ramènent tout à leur auguste personne, qui à force de trop parler, parlent faux, NON ! 
Malheureusement Pierre Bergounioux en est et puisqu’il rabaisse à ce point les ruraux, les provinciaux, la langue occitane, il y a trop de raisons pour ne pas répondre tout en précisant que de citer dans une anthologie des vendanges (tome 1) reste aussi agréable que positif ! 

 

jeudi 16 juin 2016

FRANÇOIS CAVANNA ET L’AMOUR DES LANGUES / mémoire de l'Europe

FRANÇOIS CAVANNA ET L’AMOUR DES LANGUES



François Cavanna, LES RUSSKOFFS, pages 154 à 157, édition Livre de Poche 1981, extraits :

« ... J’en profite pour travailler mon russe. Et aussi mon allemand. J’ai découvert que j’aime ça les langues. Surtout le russe. J’ai toujours sur moi des petits calepins que je me fais avec des prospectus de la Graetz A-G cousus ensemble. Avant la guerre la firme fabriquait des lampes à vapeur d’essence, marque « Petromax », ils en vendaient dans le monde entier (1)... /... le verso est blanc, c’est chouette.
Je note tout avec mon bout de crayon, j’arrête pas de poser des questions... /...
... Je suis pour la première fois de ma vie confronté à des langues à déclinaisons. Dépaysement brutal. Je demande : « pourquoi tu dis des fois "rabotou", des fois "rabotié", des fois «"raboti"», des fois «"rabota"», des fois «"rabotami"», et des fois encore de bien d’autres façons... /...
... la seule Russe qui parle un peu français, la grande Klavdia, m’avait dit : nominatif, accusatif, génitif, datif, instrumental, prépositionnel, vocatif. J’étais bien avancé. Rebuffet qui a été au lycée m’a expliqué... /... C’est là que j’ai compris la différence entre l’instruction primaire, même «supérieure» et l’instruction secondaire. Tu te rends compte ? Pendant qu’on t’apprend «complément d’objet direct», à eux, au lycée, on leur apprend «accusatif». A toi, on t’apprend «sujet», à eux «nominatif» !.. /... Voilà qu’il y a une grammaire pour les riches et une grammaire pour les pauvres, dis donc !
Enfin, bon, le russe, je m’en suis vite aperçu, est aux autres langues ce que les échecs sont à la pétanque. Comment des moujiks arrivent-ils à se dépatouiller là-dedans, et même à faire des choses drôlement subtiles, le russe est la langue des nuances infinies, va savoir ! Mais quelle récompense ! Quel éblouissement ! Dès les premiers pas, c’est la forêt enchantée, les rubis et les émeraudes, les eaux jaillissantes, le pays des merveilles, les fleurs magiques qui lèvent sous tes pas... L’extraordinaire richesse des sons dont est capable le gosier russe, la fabuleuse architecture de sa grammaire, byzantine d’aspect, magnifiquement précise et souple à l’usage... Oui. je tombe facilement dans le lyrisme quand je parle du russe. c’est que ça a été le coup de foudre ! J’aime le français, passionnément, c’est ma seule vraie langue, ma maternelle, elle m’est chaude et douce, depuis ma dixième année, elle n’a plus de coins noirs pour moi, je m’en sers comme de mes propres mains, j’en fais ce que je veux. l’italien, que je comprends un peu, que j’apprendrai un jour, je ne le connais qu’à travers le «dialetto» de papa, je pressens un parler doux et sonore, à la grammaire jumelle de la nôtre, un jeu d’enfant pour un Français. J’ai fait de l’anglais à l’école, j’étais même bon, maintenant je m’attaque à l’allemand, c’est une langue formidable, restée toute proche du parler des grands barbares roux casseurs de villes en marbre blanc, si je n’avais pas connu le russe au même moment, j’en serais tombé amoureux, je le suis, d’ailleurs, mais la souveraine fascination du russe surpasse tout, balaie tout... /...
... Il y a une autre raison, bien sûr. Sans doute la plus puissante : le russe est la langue de Maria !.. /...
... Les babas entre elles parlent plutôt ukrainien. C’est très proche, c’est un dialecte russe, mais enfin il y a des différences. «khleb» le pain devient «khlib» en ukrainien; «Ougol» le charbon devient «vouhil»... /...
... En une semaine j’ai su l’alphabet cyrillique. Je lis et j’écris maintenant couramment. ça aussi ça fait partie du jeu, cette écriture irritante pour un non-initié... /...
... Je traîne partout mes calepins crasseux. je repasse les listes de déclinaisons aux chiottes, et puis je me les récite en bossant, en marchant, avant de m’endormir... »



FACULTATIF VOIRE SUPERFLU CE DÉCRYPTAGE SUBJECTIF :
François Cavanna (1923-2014) appartient à ces auteurs plus témoins de leur temps que prosateurs ex nihilo... On dit qu’il écrit comme on parle, sans réaliser la complication et le travail en regard.
Dans LES RUSSKOFFS, il prend de la distance et n’a que peu d’indulgence pour les peuples, confrontés à l’Europe des dictatures et des démocraties molles, trop manipulables, changeants, lâches, capables du pire à partir du moment où ils sont menés par des bergers trop mielleux pour être honnêtes, trop au fait de l’emballement, plus négatif que bon, des foules.
En lisant Cavanna, on se convainc que les peuples savent forcer des germes aussi mauvais qu’endormis ; ils cultivent la haine, une exécration qui a culminé lorsqu’un d’eux a voulu en effacer un autre de la surface de la Terre.  
Mais cela n’empêche pas l’auteur de faire passer aussi la sociabilité aimante de ces mêmes peuples, le vivre ensemble propre à chacun d’eux, les particularités qui en font des communautés uniques, autant d’intimités différentes, qu’une langue seule sait si bien traduire pour peu qu’on ose frapper à la porte.
Cavanna, sous ses airs bourrus et provocateurs, aime les langues parce qu’il aime des semblables. Il va toujours vers eux : c’est une de ses facettes positives, cachée sous un vernis "grande gueule". Et quand l’amour pour Maria, une déportée du travail ukrainienne,  s’en mêle, dans le crépuscule du Berlin hitlérien, dans le chaos et les brassages tragiques, sa fougue pour les langues de notre chère Europe (2) sonne telle une grande espérance.
Soixante-dix ans après, malgré la paix globalement sauvegardée, qui ne piétine pas d’impatience face à l’inertie, à l’immobilisme trop facilement consenti ? A l’heure où une politique détestable veut imposer une langue venue d’ailleurs, dès le cours préparatoire, à l’heure où une certaine opposition, oublieuse des guerres induites par la testostérone nationaliste, ne prône qu’un repli derrière les frontières, pourquoi ne pas recevoir la déclaration d’amour de François Cavanna pour nos langues en tant qu’aiguillon vers une Europe où l’humanisme prévaudrait sur le cynisme d’une économie ouverte, ouverte surtout à l’exploitation des êtres, à l’addiction consumériste, au pillage généralisé ?
En ce début de millénaire qui voudrait faire porter aux langues une symbolique économique, politique, religieuse, sans parler de l’espéranto que Cavanna promut un temps pour contrer l’hégémonie de l’anglais (son côté électron libre), il est urgent pour les peuples d’imposer ses idéaux au cynisme mondialisé.  


(1) Les petits pêcheurs de Mayotte, malheureusement de moins en moins nombreux chaque année, la ressource se trouvant légalement pillée par des flottes venues d’Europe, partent encore avec les « Pétromax », petites lumières ça et là sur le lagon...
(2) Pour moi... jusqu’à l’Oural et le piémont sud du Caucase sans oublier l’intégration des Balkans !

photos autorisées :
1. Commons wikimedia Cavanna signant "Mignonne, allons voir si la rose" auteur Oscar J. Marianez.
2. Cavanna STO fév 1943 Bundesarchiv_Bild_183-2002-0225-500,_Paris,_Werbung_für_Arbeit_in_Deutschland
3. Cavanna STO juillet 1942Bundesarchiv_Bild_183-H26364,_Paris,_Anwerbung_französischer_Arbeiter

vendredi 15 avril 2016

CAVANNA ET LES PEUPLES / mémoire de l'Europe


Le nom de François Cavanna (1923 - 2014) reste lié à Charlie Hebdo et aussi à Hara-Kiri, le journal « bête et méchant » des années 60 - 70. L’auteur gagne néanmoins à être connu pour le témoignage, à travers sa vie, sur le siècle passé.
Ainsi, ce qui pourrait n’être, de sa part, qu’une posture politique contestataire, prend une tournure autrement humaniste et philosophique. Ses écrits autobiographiques, en effet, apportent un éclairage instructif sur un sens commun, une intelligence humaine idéalisés et pourtant loin de transcender les instincts d’êtres régis surtout par l’extraction animale qui est la leur.
C’est pour le moins ce qui marque, lorsque, à l’occasion du grand brassage causé par la Seconde Guerre Mondiale, Cavanna, alors déporté du travail en Allemagne, nous livre, dans les RUSSKOFFS (Belfond 1979), sur fond de jeunesse, d’amour et de soif de vie, un instantané des visions et constats primaires de nationaux vis à vis d’autres peuples.
Verra-t-on, avec le temps, l’acquis influer toujours plus sur l’inné ? Doit-on en rester à un réalisme essentiellement pessimiste exprimant que la nature de l’homme ne peut être que ce qu’elle est ? Peut-on estimer raisonnablement que les mentalités peuvent évoluer du tout au tout ?
En plus de l’intérêt personnel que je porte à cette période particulièrement destructrice mais qui fit que mes parents se rencontrèrent à Dresde et que la suite fut plus heureuse pour eux que pour Cavanna et Maria, comme tous ceux qui veulent y croire, ces questions de fond, bien sûr, je me les pose...

pages 120 à 123 édition Livre de Poche 1981, extraits :
« Pour la plupart des Français, ici (à Berlin dans l’Allemagne de Hitler note JFD), les Russes, c’est de la merde. En toute innocence. Ça va de soi, quoi. Comme un colon considérant un bougnoule. Même pas par anticommunisme. Au contraire, cet aspect de la chose les leur rendrait plutôt sympathiques.../... Alors que les Belges, leur défiance du Russe tient essentiellement au diable bolchévique qu’il cache sous la peau.
Les Français on ne peut pas dire qu’ils n’aiment pas les Russes, ils ne les aiment ni ne les désaiment, ils n’aiment personne. Quel peuple économe de ses emballements ! .../... Au premier contact, traitent les Russes de haut, condescendants, amusés-méprisants, comme ils traitent le Sidi qui vend des tapis à la terrasse des cafés. Ces yeux braqués d’enfants curieux de tout, ces sourires grand offerts qui quêtent ton sourire et volent au devant de lui, cette amitié toujours prête à croire à l’amitié, cette terrible misère qui cherche quelle babiole t’offrir pour matérialiser l’amitié, cette violence dans le rire et les larmes, cette gentillesse, cette patience, cette ferveur, tout ça, les Français passent à côté... ».
D’après Cavanna, les Français feraient un peu comme les Allemands « ... sauf que les Allemands, eux, ils le font exprès, ils savent pourquoi. » Ils dénigrent les traits physiques, la façon de s’habiller, les traitent de « race à la traîne, pas des gens comme nous, quoi ! », les pensent encore au Moyen-Âge. S’ils en veulent aux Allemands « Les Boches, bon, c’est des sales cons...» ce n’est pas sans accointances « entre gens civilisés ».
«... Vis à vis des Russkoffs, les Français se voient dans le même camp que les Chleuhs : le camp des seigneurs.
J’ai l’habitude. Le Français méprise d’un bloc tout ce qui est rital. Le Rital du nord méprise le Rital du Sud et se sent, du coup, quelqu’un d’un peu, si j’ose dire, français...
Le Polonais aussi est méprisé mais déjà nettement moins que le Russe. Le Polonais hait le Russe d’une haine dévorante. Il en est, en retour haï d’une haine condescendante. Il hait aussi l’Allemand, le Polonais, d’une haine ardente mais pleine de déférence. L’Allemand hait le Polonais d’une haine somptueusement teutonique. Eux.../... détestent tout le monde et par-dessus tout les juifs... /... Ah si tiens, ils aiment la France... Les malheureux ! Dis "Napoléon" à un Polonais, il se met au garde-à-vous... /...
Les Tchèques aussi aiment la France. Mais d’une façon plus distinguée, plus culturelle. Nous on a mauvaise conscience. Munich, n’est-ce pas... On finit toujours par évoquer Munich. Alors le Tchèque te regarde et ses yeux te disent : « Tu m’as fait ça, ami. Tu m’as trahi. Mais ça ne fait rien, ami, je t’aime ». La France quoi qu’elle fasse, elle reste la France. C’est ça l’avantage d’être la France...  »

C’est direct, brut de décoffrage. C’est du Cavanna. Faut lui passer les gros mots. Sous des dehors excessifs, lui et ceux de son genre cachent une grande sensibilité. Dans « LES RUSSKOFFS », en dépit de la guerre, il y a aussi, sur ses « calepins crasseux », un amour indéfectible pour les langues avec une faveur pour le russe que parle la femme qu’il aime.
Bien plus tard, celui qui n’aura de cesse de fustiger les réformateurs de l’orthographe s’arrogeant le droit de saper une langue millénaire pour «... des gens qui ne lisent pas, qui liront de moins en moins, qui n’écriront pas davantage. On la fait pour ceux qui ne s’en serviront pas...», écrira «MIGNONNE, ALLONS VOIR SI LA ROSE », un éloge de notre langue sur plus de deux-cents pages... 


Je relis LES RUSSKOFFS, tous les soirs à 17h 30, au téléphone, pour mes vieux parents aux yeux fatigués, à 9000 kilomètres de moi et ils prolongent souvent avec ces souvenirs qui les ont secoués et une émotion qui nous remue toujours.
Merci Cavanna ! Merci François !   

Photos autorisées 1. commons wikimedia auteur supposé Virginiev. 
2. google images / youtube. 

samedi 20 février 2016

L'INSOMNIAQUE DU VAL / Mayotte, France en danger

Vendredi 19 février 2016, 16 heures. Depuis 48 heures et suite à une panne d’électricité de 4 heures (heureux tropiques !), le lycée de Sada tourne grâce à son groupe électrogène ??? On dirait un avion, à hélice mais un bimoteur ! Tout le quartier de Doujani attend avec impatience qu'il atterrisse !!!

Mais un communiqué aux médias qui m’a échappé tant je veux voir le mal de leur part, a dû informer de la situation... Il serait étonnant que des fonctionnaires si consciencieux pour le bien des enfants, au service des Mahorais, si peu carriéristes et intéressés par les primes, ne s'en soient pas excusés quelque part...

Samedi 20 février 2016, 8 heures. Ce matin, au lycée de Sada, alors que le groupe électrogène pétarade depuis plus de 60 heures déjà... (allez savoir pour quelle raison inavouable !), le professeur de français a demandé aux littéraires d’adapter un célèbre poème de Rimbaud à la situation... pardon Arthur...  

L’insomniaque du val.

C’est un trou de masures où ronfle l’électrogène
Accrochant tout le temps aux oreilles des gens
Son bruit. Où le diesel de son infernal sans-gêne
Remplit. C’est un petit val farci de polluants.

Un quidam jeune, ou vieux, métis ou blanc et noir
Vivant sur le coteau et même la baie en face
Veille. Il a mis la télé pour conjurer le soir
Vidé, à force, par les décibels qui menacent.

Le lycée en question, en porteur de culture
Impose son pétard ; le reste il n’en a cure !
Son électricité est son problème à lui !

Et comme les colons qui vinrent à Mayotte, 
Il se croit tout permis et jure qu’il décrotte
Alors que c’est pour sa clim et le frichti, ce bruit !

PS : pour ceux qui préfèrent les images, demain, si le joint de culasse tient, nous partirons en reportage...


            

jeudi 31 décembre 2015

DE L’ÂTRE À LA CHEMINÉE, IL N’Y A GUÈRE ! / le temps de Noël en Languedoc

DE L’ÂTRE À LA CHEMINÉE, IL N’Y A GUÈRE !
Je voulais écrire DE LA HOTTE  À LA SOUCHE, IL Y A PEU mais cela devenait aussi incompréhensible que "DE LA SOUCHE À LA SOUCHE IL Y A PEU...". Comment dire quand le vocabulaire si riche sur la réalité et la symbolique du feu au point qu’il a signifié la famille autour du foyer (la population se comptait, avant, en "feux"), vient nous embrouiller avec une homonymie insupportable entre le bois qui brûle en bas, pis ces ceps que nous appelons souches, et la cheminée, sinon son bout dépassant du toit ?
    Je pense à du Bellay, qui lui, a su tout exprimer avec trois moitiés de vers : «Quand reverrai-je, hélas, de mon petit village / Fumer la cheminée... » (Les Regrets, XXXIème sonnet). 
    Si quelqu’un peut m’aider car j’ai beau chercher, retrouver le contrecoeur, aborder des secrets sous son manteau, m’interroger aussi sur la languette ou le tablier tout en me demandant si le rideau était ce tissu jaune à l’origine, courant sur les trois côtés de la tablette avec, chez mamé Ernestine, ces femmes brodées dans les habits des provinces de France, jamais je n’ai été ainsi coincé par une souche ! 
                                        Mamé Ernestine et la cheminée / 1968, diapositive François Dedieu.

    Mistral peut-être pourra m’aider ! Dans le Trésor du Félibrige, nous trouvons qu’en Languedoc elle s’appelle cha-, ou che-, ou chi-, ou encore chuminièiro ! Sur ses différentes parties : « lou canoun de la cheminèio... /... lou dessus.../... lou founs.../... lou cantoun.../... la cheminèio marsiheso avec le potager construit à l’intérieur. Suivent des expressions comme « Se laissa mouri souto sa chaminèio », se laisser mourir dans l’abandon, « A pas manja soun pan souto la chaminèio», il a vaillamment gagné sa vie, « A fa soun cop souto la chaminèio », il a fait son coup en tapinois. Moins attendu venant de Mistral plutôt traditionaliste, une critique de la religion qui voit l’auteur préciser qu’il s’agit d’un dicton irrévérencieux désignant l’église, le curé, le vicaire et le marguillier :
    « Meisou sèns fournèl ni chaminado / Nouiris tres feiniants touto l’annado (Limousin).
Le travail de linguiste primait-il sur ses convictions ?
    L’article qui nous console de la frustration initiale, évoque ensuite François Ier avec « la cheminèio de Francès Premié « à Aigues-Mortes ainsi que la jolie cheminée « dóu rèi Reinié », du roi René, désignant, à Aix, une promenade au midi des remparts où le roi venait prendre le soleil et discuter sans façon avec tout le monde. Frédéric Mistral ajoute que Digne et Marseille ont aussi « leur cheminée du roi René ». Nous comprenons désormais ce que signifie « Se caufa à la chaminèio dóu rèi Reiniè ».
En attendant, moi qui voulais vous raconter une histoire de cheminée pour Noël, j’en suis resté au titre ! Lou prouchin cop, promis, surtout que ça s’est passé aux Cabanes de Fleury et il n'y a pas si longtemps...  

jeudi 24 décembre 2015

« MAINTENANT NOËL PEUT VENIR.» / Noël en Haute-Provence


« MAINTENANT NOËL PEUT VENIR.»
Avec Paul Arène (1843 - 1896) qui participa sans en recevoir les lauriers, à l’écriture des Lettres de mon Moulin, nous voici à Sisteron, entre Alpes et Provence. Toujours le soleil mais déjà le bon air des montagnes, l’eau fraîche des torrents sur les hauteurs drainées par la Durance et le Buëch. Entre les vergers, les bergers, les abeilles Paul Arène y vécut avant de monter à Paris. Depuis la capitale où se préparent des fêtes citadines, il retourne chez lui par la pensée.  

Paul Arène / nouveaux contes de Noël /http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k826342/f31.item.zoom


«.../... Au village, bien à l’avance, Noël s’annonce par toutes sortes de signes et de pronostics que chacun comprend sans avoir besoin d’être astrologue. Le porc déjà gras sous son toit vit entouré de soins gastronomiquement affectueux ; tel aux Iles de la Société, un parent dont on attendrait le succulent héritage. Dès les premières gelées, sur la route sonore et blanche, ont commencé à défiler, venant on ne sait d’où, d’innombrables troupeaux de dindes. Chaque ménage achète la sienne qu’on nourrira dans un coin de la basse-cour et qui, gavée de son et de noix, avec ses colères stupides, sa roue bruyamment étalée, le bizarre ornement qui se trimbale autour de son bec, apparaît aux yeux des enfants comme un grand oiseau fantastique.
    A la Sainte-Barbe, vingt-un jours avant la Noël, dans trois assiettes choisies parmi les plus belles du dressoir, on a étalé quelques grains de blé, lesquels arrosés soigneusement et tenus au chaud dans un coin de la cheminée, ne tardent pas à germer sans terre ni soleil, ce qui nous semblait un miracle. ces trois assiettes, minuscules champs de blé vert, symbolisant le printemps et les espérances de l’année nouvelle, sont destinées à figurer - avec les trois lumières dont la flamme, selon le côté où elle s’incline, désigne celui qui doit mourir - sur la table du grand repas, entre le nougat familial et le pain de Calende qu’une main prudente va découper, la part des pauvres réservée en autant de morceaux qu’il y a de convives.
    Cependant peu à peu le blé monte, et, d’abord blanc et pâle, peu à peu se colore de vert. Les jours passent, le moment approche, il s’agit de préparer la fête.
    Un matin, le valet s’en est allé au bois ; il a rapporté mystérieusement la maîtresse bûche depuis longtemps choisie, et qui posée sur les landiers par l’aïeul et le plus jeune enfant de la maison, arrosée de vin pur en souvenir des libations antiques, prendra feu soudain et s’enveloppera, ainsi que d’une vibrante broderie d’or, des mille étincelles de toutes ses mousses enflammées, pendant que les assistants chanteront : « Allègre, allègre, Noël nous rende allègres !»
    Maintenant, Noël peut venir ... » 


photos wikipedia et commons wikipedia Paul Arène & horloge de Sisteron Commons wikipedia Véronique plagnier.

mercredi 23 décembre 2015

DANS LA MONTAGNE, DES LUMIÈRES QUI MARCHENT... / Noël occitan


DANS LA MONTAGNE, DES LUMIÈRES QUI MARCHENT...
Parlant de ses parents, Joseph Delteil rappelle toutes ces lanternes qui avancent par les chemins vers la messe de minuit. Aussitôt, un conte de Noël vient cogner au portail, d’Alphonse Daudet, dans « Les Lettres de mon Moulin », un livre qui compte et fédère autour de nos identités occitanes... Comme quoi tous les méridionaux qui "montaient à Paris" n’y perdaient pas tous leurs âmes... Dans ce sens, Daudet a certainement contribué à la défense de l'esprit, de la culture occitane, et ce, dès l'enfance. Pourrait-il en être autrement avec le secret de Maître Cornille, la chèvre de Monsieur Seguin, le curé de Cucugnan... Si j’aime à jamais Les Vieux pour la chaleur de l’été et le thème douloureux de l’absence, la magie de Noël, l’évocation des tables chargées pour les fêtes me ravissent également. Et puis il y a l’hiver, le froid et la neige, les veillées idéalisées qui réunissent la famille autour du feu, du moins pour des gosses, libres encore du réalisme de l'âge adulte. Aussi, dans « Les Trois Messes Basses », les petits se trouvent vite pris dans la magie et les mystères des "Noëls Blancs". Suivons Daudet qui situe ce conte au pied du Mont Ventoux, « en l’an de grâce mil six cent et tant » :

 «... Dehors, le vent de la nuit soufflait en éparpillant la musique des cloches, et, à mesure, des lumières apparaissaient dans l’ombre au flanc du Mont Ventoux, en haut duquel s’élevaient les vieilles tours de Trinquelage. C’étaient des familles de métayers qui venaient entendre la messe de minuit au château. Ils grimpaient la côte en chantant par groupes de cinq ou de six, le père en avant, la lanterne en main, les femmes enveloppées dans leurs grandes mantes brunes où les enfants se serraient et s’abritaient. Malgré l’heure et le froid, tout ce brave peuple marchait allègrement, soutenu par l’idée qu’au sortir de la messe, il y aurait, comme tous les ans, table mise pour eux en bas dans les cuisines. De temps en temps, sur la rude montée, le carrosse d’un seigneur précédé de porteurs de torches, faisait miroiter ses glaces au clair de lune, ou bien une mule trottait en agitant ses sonnailles, et à la lueur des falots enveloppés de brume, les métayers reconnaissaient leur bailli et le saluaient au passage :
~ Bonsoir, bonsoir maître Arnoton !
~ Bonsoir, bonsoir, mes enfants !
La nuit était claire, les étoiles avivées de froid ; la bise piquait, et un fin grésil, glissant sur les vêtements sans les mouiller, gardait fidèlement la tradition des Noëls blancs de neige... » 




Notes : en plus du livre, le film de 1954 est passé à Fleury, au cinéma Balayé. Je pense aussi à Paul Préboist, acteur marseillais dans l’élixir du père Gaucher mais dans un autre film puisque Rellys tenait le rôle dans la production de Pagnol... Toi qui sais, si tu me lis...
Hier sur la 3, une très belle reprise de Marius par Daniel Auteuil, très réussie. mardi prochain ils donnent Fanny !Si ce n’est pas dans l’ambiance de Noël, notre Méditerranée est bien présente : ce serait dommage de s’en passer... 



Photos : 1. le Ventoux wikipedia england.
2. Le Ventoux depuis ST-Trinit le 4 décembre 2010 / commons wikipedia / auteur Véronique Pagnier. 
3. Daudet jeune (Les Lettres de mon Moulin, écrites avec Paul Arène,  datent de 1865 (l’auteur avait 25 ans).
4. Le Moulin de Daudet à Fontvieille.

lundi 21 décembre 2015

«TRADITIONS, NOËL, SUD, LANGUEDOC, AUDE...» / Aude & Languedoc


J’ai dû taper « Noël », « traditions », « Sud », « Languedoc », « Aude » et en moins de temps qu’il n’en fallut cette fois là à tonton pour prendre un brochet de 70 centimètres, l’ordi en a sorti des mètres. Des pages et des pages, en effet, un peu comme si, pour le poisson que je voulais accrocher, on avait vidé toute l’eau du lac. Force est donc de trier, de fouiller, en évitant la vase, à savoir l’incitation à consommer, toujours sous-jacente sur le Net mais sur-représentée puisque, en la circonstance, en premier, ce sont des invitations destinées à détourner le chaland vers la magie artificielle des marchés dits de Noël.
Patience, constance... Il est surtout question de persévérance quand on pose son bouchon dans l’espoir d’une bonne fortune... Sinon, pas de pêche miraculeuse, pas de petit poisson d’or tel celui du joli conte russe (1)... Demandez si ça vous dit mais ce serait hors de propos de le raconter ici... Le mien, de petit poisson surprise, attendait en deuxième page, et ses écailles brillantes m’ont pareillement ravi !
Le site invite à rencontrer Joseph Delteil (1894 -1978), l’écrivain-poète monté à Paris mais retourné vivre au pays, « al pais », puisque c’était écrit (2). Né d’un père charbonnier et d’une mère « buissonnière », à Villar-en-Val, mystérieux petit pays perdu dans des Corbières à l’écart des trépidations et trafics modernes, puis installé à Pieusse, terre de Blanquette (3), Delteil a gardé un vif souvenir de ses Noëls d’enfant, autour des années 1900. Lors d’un bref entretien radiophonique de 1970, Delteil a su faire partager l'importance qu'avait pour lui la célébration heureuse de Noël en famille. 


Puisque mon petit poisson d’or est aussi réel que mon Père Noël, vous devinez le bonheur que j’ai eu d’écouter, de passer et repasser l'entretien, pour transcrire puis lire et relire et revenir encore sur la parole de Delteil. Au-delà de la spontanéité de la discussion, de la grande exigence du direct qui ne rendent l'invité que plus humain, le message ne peut être plus clair. Et son accent valant mieux que mon inspiration incertaine, ci-joint les sites qui nous le gardent si présent pour passer et partager ce qu’il appelle « ses rites », transmis de père en père depuis l’antiquité.
Sources : merci Wikipedia, merci le Web !
Photo :  maison de Delteil à Pieusse / commons wikipedia / auteur : pinpin.

(1) Сказка о рыбаке и рыбке, Skazka o rybake i rybke) Le Conte du pêcheur et du petit poisson d’Alexandre Pouchkine, écrit le 14 octobre 1833, publié en 1835 dans la revue Biblioteka dlia tchteniia (Bibliothèque pour la lecture).
(2) est retourné vivre en Languedoc, à la Massane, un domaine proche de Montpellier. Dans ses oeuvres, des titres qui me parlent : Sur le Fleuve Amour 1922, Les Poilus 1925, Ode à Limoux 1926, Perpignan 1927, de J.-J. Rousseau à Mistral 1928, La Belle Aude 1930, La Cuisine Paléolithique 1964, La Delteilherie 1968... Joseph Delteil de même que son épouse Caroline Dudley, créatrice de la Revue Nègre, reposent au cimetière de Pieusse.
(3) La Blanquette de Limoux de la moyenne vallée de l’Aude, disputant au Champagne l’antériorité de ses bulles et d’un excellent rapport qualité-prix !

mercredi 8 avril 2015

CENT ANS DÉJÀ ! C’ÉTAIT... LOUIS PERGAUD


C’ÉTAIT... LOUIS PERGAUD... 

Le 8 avril 1915, cent ans déjà, non loin de Verdun, sur le front de l’Est disparaissait le sous-lieutenant Pergaud Louis, Émile, Vincent. Que son souvenir soit celui du « soldat connu » poussé à témoigner, à parler pour tous ceux qui n’ont pu se faire entendre ou qui n’ont pas voulu revenir sur cette guerre terrible. 


  




Tous ces hommes, des villes ou des villages, des usines ou des champs, portaient les gènes d’une France rurale, proche de la nature. L’inspiration qu’elle a toujours suscité chez les écrivains, loin d’être passéiste, se confond avec ce retour aux sources plus que jamais d’actualité quand seule la croissance est assénée, ressassée par une caste dirigeante escamotant les signes flagrants d’une catastrophe annoncée.

            Sur la forme, et j’espère encore que ce ne sera pas perçu comme une nostalgie réactionnaire qui aurait peur de demain, la prose de Pergaud rappelle ces bons maîtres, ces professeurs qui nous incitaient à employer des verbes expressifs, pour enrichir notre vocabulaire sans toujours répéter « être », « faire ». Au fil des ans et des lectures, pourtant, l’utilité de ces principes semble moins univoque qu’il n’y paraît, du moins chez les grands, ces artistes qui manient les mots comme d’autres les pinceaux, les burins ou les notes de musique. Pagnol, par exemple, sur l’affection entre un enfant et sa grand-mère : « Les grands-mères, c’est comme le mimosa, c’est doux et c’est frais, mais c’est fragile. » (Naïs).
Pour revenir à la Comté de Pergaud, dans la Guerre des Boutons, une phrase, presque la première de la première page, impossible à oublier tant elle foisonne dans sa simplicité : « C’était un matin d’octobre. » Peut-être parle-t-elle mieux au potache qui a eu à en orthographier la suite, mâchouillant consciencieusement son porte-plume, pour mieux réfléchir ou rêver, le regard perdu par-dessus le verre dépoli d’une fenêtre, sur le gris d’un ciel de rentrée des classes ?
« C’était », « C’était »... une expression si simple, si commune, et quelle émotion pourtant ! Pour ceux qui en sont aussi convaincus que pour le Quadrangle, le carré noir sur fond blanc de Malévitch, un florilège des paragraphes, de ceux qui déclinent l’époque et plantent le décor, amorcés sur cette tournure tant syntaxique que d’esprit :    

« C’était un matin d’octobre. Un ciel tourmenté de gros nuages gris limitait l’horizon aux collines prochaines et rendait la campagne mélancolique. Les pruniers étaient nus, les pommiers étaient jaunes, les feuilles de noyer tombaient en une sorte de vol plané, large et lent d’abord, qui s’accentuait d’un seul coup comme un plongeon d’épervier dès que l’angle de chute devenait moins obtus. L’air était humide et tiède. Des ondes de vent couraient par intervalles. Le ronflement monotone des batteuses donnait sa note sourde qui se prolongeait de temps à autre, quand la gerbe était dévorée, en une plainte lugubre comme un sanglot désespéré d’agonie ou un vagissement douloureux. 
L’été venait de finir et l’automne naissait... »
La Guerre des Boutons. Première page.

« ... C’était une belle journée d’automne : les nuages bas qui avaient protégé la terre de la gelée s’étaient évanouis avec l’aurore ; il faisait tiède : les brouillards du ruisseau du Vernais semblaient se fondre dans les premiers rayons du soleil, et derrière les buissons de la Saute, tout là-bas, la lisière ennemie hérissait dans la lumière les fûts jaunes et dégarnis par endroits de ses baliveaux et de ses futaies... »
La Guerre des Boutons. Page 71.

« ... C’était un soir gris et sombre. La bise avait couru tout le jour, balayant les poussières des routes : elle s’arrêtait un peu de souffler ; un calme froid pesait sur les champs ; des nuages plombés, de gros nuages informes s’ébattaient à l’horizon ; la neige n’était pas loin sans doute, mais aucun des chefs accourus à la carrière ne sentait la froidure, ils avaient un brasier dans le cœur, une illumination dans le cerveau... »
La Guerre des Boutons. Page 261.

« ...C’était un soir calme de fin d’automne. La nuit, à grands pas, venait, noircissait par degrés la chape bleue du ciel qui s’étoilait lentement. Pas un souffle de vent ne troublait la tiédeur enveloppante ; les fumées montaient calmes des cheminées, formant sur les carapaces bigarrées des toitures un léger manteau vaporeux. Les clarines tintaient joyeuses au cou des vaches qui rentraient des champs et marchaient d’une vive allure vers l’abreuvoir ; le marteau du forgeron Martin sonnait par intervalles sur l’enclume argentine, et tous ces bruits formaient une rumeur paisible et chantante qui était comme la respiration vigoureuse ou la saine émanation du village... »
Le Roman de Miraut. p. 129 (début du chap 10).  

« C’était un soir de printemps, un soir tiède de mars que rien ne distinguait des autres, un soir de pleine lune et de grand vent qui maintenait dans leur prison de gomme, sous la menace d’une gelée possible, les bourgeons hésitants... » 
De Goupil à Margot. / La tragique aventure de Goupil / 1er mot page 1 !  

             « ... et la grand-mère, comme de coutume, avait commencé de sa voix chevrotante,  un peu mystérieuse et lointaine, le conte traditionnel :
            « C’était il y a des temps et des temps, par un minuit passé, un soir de matines, quand la terre que nous labourons maintenant était encore toute aux seigneurs et que les grands-pères de nos grands-pères leur obéissaient... » 
De Goupil à Margot. / La tragique aventure de Goupil / page 55.


« ... C’était une symphonie de couleurs allant du cri violent des verts ardents et comme vernissés (réfléchissant le soleil sur les mille facettes de leurs miroirs comme pour jouer avec la plaine) aux pâleurs mièvres des rameaux inférieurs, dont les feuilles tendres, aux épidermes délicats et ténus, n’avaient pas encore reçu le baptême ardent de la pleine lune, bu la lampée d’or des rayons chauds, car leur oblique courant n’avait pu combler jusqu’alors que les lisières privilégiées et les faîtes victorieux... » 
De Goupil à Margot / La fin de Fuseline p 80 (une seule phrase particulièrement longue). 

 
« ... C’était un de ces premiers jours où la forêt, comme une femme qui a longtemps résisté, se laisse enfin aller toute aux caresses de l’amant, où elle vit de toutes ses fibres, où elle chante de toutes ses sèves, où les grands baisers du soleil l’ont investie comme un amour victorieux et conquise, et pénétrée toute, et où elle ne tend plus aux vivants, sous ses ombrages captieux, l’asile traître de son insidieuse fraîcheur... »   
De Goupil à Margot / La fin de Fuseline / toujours page 80.

« ... C’était une heure indécise d’une après-midi brumeuse. Aux écoutes sur la branche dépouillée d’un « foyard » où elle se reposait de quêtes infructueuses, Margot scrutait l’espace de son oeil inquisiteur et vif, quand, d’un fourré encore touffu, sous un chêne plus résistant, elle entendit le cri de ralliement de sa gent et y répondit aussitôt... »
De Goupil à Margot / La captivité de Margot page 125.   

            « ... C’était peut-être comme au crépuscule de jadis, près de la mare maudite ; mais là il n’y avait point d’eau ; nul arbre ne se dressait ; seule, au loin, derrière un épaulement de terrain, une fumée bleuâtre montait calme et droite dans le froid sec du matin... » 
De Goupil à Margot / La captivité de Margot page 129.   


« ... C’était une après-midi morose de fin d’hiver, un temps de dégel qui confinait tout le monde dans les maisons, dans la paix somnolente des chambres chaudes, tandis qu’au dehors le paysage se dénudait, sale, gris, cinglé de pluie, fouaillé de vent et semblant tituber de spleen comme un ivrogne reprenant sa marche après avoir dormi dans les fossés du chemin... » 
De Goupil à Margot / La captivité de Margot page 145.

           
« C’était l’hiver sur la plaine et sur la forêt. La neige glacée couvrait partout le sol. Depuis trois semaines pourtant elle ne tombait plus, mais le gel qui l’avait cristallisée en paillettes luisantes d’une finesse merveilleuse, l’avait rendue plus subtile encore et plus traîtresse. Pas un abri n’échappait à son assaut ; son emprise fluante et légère s’étendait aux recoins les mieux défendus et, selon le caprice des bises de décembre qui se plaisent à mener aux carrefours des chemins et aux croisements des tranchées forestières leurs bals blancs, le tourbillonnement gracieux des papillons immaculés s’élevait et s’abaissait, recouvrant au fur et à mesure de leur apparition, les traces mouvantes des passages frayés...»
Histoires de loups (en annexe). L’arrivée du maître (1ère page, 1er mot !).


« ... C’était un beau jour d’hiver ; le soleil, bas sur l’horizon, était sorti tard des brumes qui couvraient les coteaux et ne parvenait point, sous la bise qui soufflait sans relâche, à dégeler si peu que ce fût la croûte glacée qui recouvrait la terre. Des multitudes de traces d’animaux s’entrecroisaient à la surface de la neige et nous nous essayions à deviner quels étaient ceux qui les avaient frayées et si les traces étaient fraîches... »
Ébauche intitulée « La rencontre ». 

             Et pour ceux qui ne partageraient pas, si, par masochisme ils ont lu jusqu’ici, concluons en détournant Pergaud dans sa préface à La Guerre des Boutons : « ...j’ai le droit d’espérer qu’il plaira  aux « hommes de bonne volonté » selon l’Évangile de Jésus et pour ce qui est du reste, comme dit Lebrac, un de mes héros, je m’en fous. » L.P.