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mardi 14 décembre 2021

CHEMIN D'ÉCOLE (2) Nantis, manants, chasse et culture...

"... La vieille classe de mon père,
Pleine de guêpes écrasées,
Sentait l'encre, le bois, la craie
Et ces merveilleuses poussières
Amassées par tout un été..." "Automne", René-Guy Cadou (1920 - 1951). 

A gauche de la mairie de Fleury, l'école des garçons.


La vieille école, fille du progrès, du temps où les filles n'avaient pas encore droit à l'enseignement laïque et où la "salle d'asile" n'était pas encore une maternelle. La vieille école si nouvelle, que la commune l'inaugura vers 1880, sur le site du vieux cimetière où longtemps remontèrent les petites perles de verre des couronnes mortuaires. La vieille école fréquentée par le grand-père Jean et son cousin Étienne au milieu des années 1900 (Jean est né en 1897). Puis vint le tour de mon père, vers 1930... l'avait-on agrandie alors ? Par la montée d'un étage ? C'est celle que je connus, de 1956 à 1960... Puis mes fils au début des années 80. Certains de mes condisciples arrivaient des campagnes, le cartable à la main et dans l'autre, une manne d'osier rectangulaire d'un volume gênant pour des bras encore courts. Des vendanges au 14 juillet, ils portaient la saquette, le repas emporté. 

Ils ne doivent pas être aussi encombrés mais ils sont chargés, Étienne et Jean, à pied. Suivent-ils le bord de la garrigue ou le cours, le fossé pratiquement toujours à sec du ruisseau lié à l'ancien étang fermé de Fleury ? Nous les accompagnons sur le retour, au moment de traverser la Clape, pour continuer le trajet, poursuivre le voyage intime dans ce qu'il y a à passer de son lignage vers sa postérité.   


 

Deux choses : d'abord la surprise de ce joli chêne, ensuite, celle, cachée aux grands flux, d'un calvaire suite à un un décès, sur le chemin même : un homme jeune (24 ans), le 16 avril 1868... à trois heures du matin...  http://chroniquesdeperignan.free.fr/Calvaires/croix_de_molveau.html 

Le vélo cadenassé et caché dans les fourrés, il faut continuer à pied le long d'une propriété grillagée, celle avec cette bâtisse aux airs de manoir empâté, qu'on voit de trop loin, une insulte de parvenu aux humbles bergeries qui se fondaient jadis dans le paysage. Ce n'est pas bien aimable de ma part, c'est à cause du grillage et, en prime, à ce panneau, derrière, voulant impressionner, et qui voudrait dissuader de passer... 


Voyez-vous un chemin derrière le grillage ? Ou alors est-ce pour celui d'où la photo a été prise et dont l'accès n'est pas interdit ? Cela n'est pas sans rappeler des on-dit, vieux d'une vingtaine d'années, à propos de chemins échangés ou cédés entre la mairie et les privés... Médisances de la part des pedzouilles du coin sûrement... Personnellement, j'ai un service à demander à la municipalité, l'opacité ne faisant pas bon ménage avec le vivre ensemble, à savoir qu'elle fasse connaître, même sans trop inciter, les chemins libres d'accès...En attendant, pour la forme, serait-ce protéger de planter un ou deux bons clous dans un pauvre arbre, d'autant plus quand on a les moyens d'une vidéosurveillance ? C'est à prendre bien sûr de la part du pedzouille, du natif buté et borné que je suis... 

Quelle idée aussi de vivre assez vieux pour avoir connu le coin un demi-siècle en arrière ! Il est vrai, une époque classique, avec ses riches se démarquant toujours des autres, pour le dire sans aborder de front les libertés, égalités et autres fraternités trop bien claironnées, du temps où les grands propriétaires prenaient un soin jaloux de leurs landes et garrigues. Pour le gibier, pour s'adonner au plaisir de la chasse, ils invitaient, souvent des édiles, non sans arrière-pensées. Afin d'assurer un bon tableau final, ils payaient un garde à temps plein, compétent pour aider la nature, limiter les nuisibles qu'ils soient animaux ou braconniers... Au Courtal-Naout, la bergerie d'en haut et non une insignifiante "cour" comme le prétend le site du manoir empâté, le garde d'alors, autodidacte et toujours en quête de partage humaniste, m'avait invité pour une visite... jusqu'à m'indiquer un champ certainement destiné à nourrir la sauvagine mais où, dans les chardons, poussaient les couderles (du nom occitan désignant, sauf erreur, le pleurote du panicaut). En montant vers la Barre de Saint-Pierre, il m'avait signalé, non sans évoquer Socrate et les condamnés à mort, des pieds de grande cigüe aux alcaloïdes mortels. Certains auront reconnu Pierre Bilbe, dont le souvenir vient souvent à ma rencontre, ici, sur les chemins de mon grand-père Jean.   

dimanche 3 octobre 2021

J'AIME comme ils ont parlé des VENDANGES / 1. Christian Signol.

 Avec plus d'une quarantaine d'ouvrages depuis Les Cailloux bleus en 1984 (au moins un par an), parfois en diptyques ou trilogie pour la Rivière Espérance, Christian Signol, natif du Quercy (Les-Quatre-Routes-du-Lot), reste inspiré par ces pays plus ou moins hauts d'un ouest qu'on dit adouci du Massif Central. 

Alors quelle n'est pas ma surprise lorsque vers cinquante ans, la veine romanesque amène l'auteur sur nos terres avec Les Vignes de Sainte-Colombe tome 1 et la Lumière des Collines tome 2... Et cet intérêt qui le transporte sur le versant complètement opposé à l'océanique, marqué par la Méditerranée, loin de paraître fantaisiste, est au contraire ancré dans une motivation profonde... peut-être liée à son vécu...  

Couverture de Marc Taraskoff ?

En effet, on ne peut que saluer un travail bibliographique fourni (plus de onze références de livres) s'appuyant sur l'histoire politique et sociale, celle des crises viticoles... Rien d'anachronique dans sa prose. Bigarreau sur le gâteau, en guise d'ingrédients, un lexique fidèle à ce qui se dit en Languedoc... ne parle-t-il pas des bouffanelles, du rabassié, d'un croustet, d'une grésale, de banastes, de caraque, de cansalade, d'espoudasser, pour les mots qui me restent en mémoire ? Il y a aussi un peu d'occitan mais c'est une langue en commun en deçà et au-delà de la ligne de partage des eaux jusque du côté de Montluçon... 

Serait-ce pour dire du bien de l'écrivain, par respect pour la propriété intellectuelle, après une citation liminaire, c'est en paraphrasant pour un rendu très imparfait que je reprends l'évocation des vendanges dans Les vignes de Sainte-Colombe. 

*****

"Le cers avait chassé la marinade en une nuit et le soleil était revenu, aussi implacable qu'il l'avait été depuis le début de l'été." 

Les charrettes enguirlandées sont revenues de Narbonne avec les mountagnols embauchés pour les vendanges, des gens peu loquaces, gardant en soi. Le lait de vache et les fromages imprègnent les habits des hommes. Les femmes portent des jupons bouffants. Moins vifs que les locaux, ils étaient plus endurants à la tâche et ne rechignaient pas à rentrer à pied en fin de journée. A leur descente, le régisseur organise : un videur et un porteur pour une base de quatre coupeuses et autant d'ensembles, avec le personnel de la propriété et les journaliers du village, pour former une colle plus ou moins grande, menée par une mousseigne, une femme "maîtresse", de confiance, du domaine, sachant trouver le rythme accepté tant par le patron que les travailleurs. 

Sourire de celui qui va rentrer la récolte, joie des vendangeurs qui vont gagner de quoi vivre pendant quelque temps. Un matin plein d'entrain entre les cris des enfants, les chevaux qui se répondent, les roues ferrées grinçant sur l'empierrage.../... 

Si le soleil n'est pas vaillant, avec le mouillé les femmes doivent réchauffer et se frotter les mains. A huit heures le régisseur donne le signal du déjeuner (le gîte et le couvert sont compris dans le contrat). 

Dès le matin une fille se fait caponner : les garçons lui écrasent sur le visage le raisin oublié de plus de sept grains, un rituel ancien assurément machiste dans l'antagonisme accepté des sexes. Sinon les autres grappillons restent pour les nécessiteux du village, une fois que le ban du grappillage sera annoncé. 

1914. les hommes étant réquisitionnés, les femmes ne sont pas descendues de la Montagne Noire et on a fait appel aux Espagnols, plutôt en couples établis. Quelques accès de joie supplantent néanmoins la morosité du début malgré la crainte du glas pour un soldat tombé au front. La récolte fut belle mais on ne fêta pas le Dieu-le-veut cette année-là. 

1918. Beaucoup de chaleur. De nombreux Espagnols ont été embauchés tant la récolte s'annonce belle. La nature régulant la vie, une femme de Ginestas tombera enceinte ; trahi, le mari repartira sitôt arrivé en permission et mourra quelques jours plus tard, en Argonne. Et ces jeunes veuves qui ne cachent pas leur attirance pour ces hommes providentiels ? Des idylles se nouent et une villageoise laissera même ses enfants pour passer la frontière avec son nouvel amour.  

***** 

Restent à découvrir d'autres vendanges dans le tome 2, "La Lumière des Collines", entre la terrible guerre et celle d'Algérie. 

*****

Les Vignes de Sainte-Colombe a obtenu le prix des lecteurs du Livre de Poche 1996. 

La Lumière des Collines a obtenu le prix des maisons de la Presse 1997.

dimanche 22 août 2021

Saint-Pierre-la-Mer / étang de PISSEVACHES / photos.

Le bout de la route "des campagnes" ; au fond c'est l'étang.

Certaines années, la surface en eau est plus grande.




Août 2021.

Août 2021.

Salicorne / Août 2021.

Août 2021.

Les troncs laissés, un kilomètre à l'intérieur des terres, témoignent de la puissance des tempêtes du Golfe du Lion.

Août 2021.

 

mercredi 11 août 2021

PISSEVACHES, plus qu'un étang lagunaire...

Couçi dision en aquèl temps ? Comment disait-on en ce temps-là ?  "Piçovaco" ? Pissevaches... J'ai du mal à accepter le "SS" pour le son "s"... Plutôt le "ç" peut-être latin, plus sudiste, un tantinet wisigoth, qui sait... 

Enfin, par cette belle matinée d'août, si la mer miroite sereine avant de montrer les zébrures annonçant le gentil temps du marin avant midi, elle ne s'offre plus comme avant, après le zip de la fermeture éclair. La tente, sur une butte de sable sec, dans les oyats, au-dessus des joncs de l'arrière. 

La tente derrière la rangée de baraques installées bien avant la saison pour retrouver la place. Devant, marron, le sable mouillé avec le campement des estivants, un patchwork de toiles orange, bleues, vertes, un désordre apparent car bien avant que le garde-plage ne vienne prélever le franc journalier pour la poubelle, tout le monde laisse libre la piste pour les véhicules des gens, la camionnette du boulanger, celle du marchand "A la cèbo, à la cèbo, à la cèbe de Lézignan !", celle, rouge et jaune, du cirque du jour pour la représentation du soir, les camions "de glace", de pêches vendues par plateaux ou, plus occasionnellement d'un lot de journaux et revues avec en prime la casquette. En limite de cette dépression noyée sous les eaux une bonne partie de l'année, le sable blanc, en côte douce vers le bourrelet du bord de mer avec le premier rang de toiles et de caravanes, les pieds sur la plage. Une place pas du tout enviée par des locaux goguenards, un brin imbus de leur attache natale au milieu, qui, au contraire, pronostiquent qu'avec le coup de mer du quinze août, ils vont mamer.  

A droite, vers le rebord de garrigue et le petit port colonisés par les Narbonnais, le rocher avec l'épave du bateau espagnol où le cousin Jojo plonge chercher des moules, où le cousin Jacky pêche des aiguilles aux vertèbres vertes à bleues, fluorescentes. A gauche, comme une introduction aux grands espaces sauvages, Pissevaches, gamin, ce nom pouvait prêter à rire ; pourtant, à mon insu bien que pressenti, sentencieux, magique comme un sésame pour le monde qu'il est, de mystères et de mythes, comme une initiation avant de m'engager dans un milieu mi-doux mi-salé, gagné par le fleuve sur la mer, avec sa dune, ses marais, ses salicornes, ses saladelles lilas qu'il appelle vendangeuses, dans le sillage d'une Mirèio faite mienne, parce qu'il arrive à papa de déclamer Mistral et que mes années confondent sans peine le château-d'eau de Saint-Louis-de-la-Mer aux Cabanes avec le clocher fortifié des Saintes-Maries-de-la-Mer en Camargue.

Pissevaches, c'est d'abord un village de baraques (1), permanent, sur pilotis pour résister aux assauts des vagues. Et dire que je ne sais rien de ses habitants amphibies, anonymes ; seul un nom me reste, "WONDER", celui d'une marque de piles sur une plaque émaillée rouge, bleue et blanche, d'un mètre carré au moins, idéale pour protéger des planches rongées ou pour signaler une épicerie aussi improvisée que clandestine. Ne connaissant pas ces irréductibles îliens, je ne les vois que de loin, depuis la plage où je ne fais que passer (à suivre).

(1) lorsque le plan Racine et l'envahissement légalisé de ce qui fut la plage du camping sauvage conduisit à la démolition du village sur pilotis, ses irréductibles, regroupés en association, obtinrent une parcelle dans le lotissement naissant des "Baraquiers". Faveur ? privilège ? rien à côté des hectares "cédés" aux promoteurs de grands ensembles ! 








dimanche 11 juillet 2021

APPEL A TÉMOIN (Coursan)

Rien de grave et de stressant, soyez rassurés... 

Années 60... Et oui, la nostalgie reste ce qu'elle a été depuis qu'elle est... Du noir et blanc, du témoignage argentique, de valeur... Il est de Coursan ou alors il y a des attaches solides... 

Dans un exposé illustré de huit photos, sur un drôle de format à carreaux rectangulaires, à l'encre, dans une écriture soignée tant pour la forme que pour l'orthographe, il nous présente son village. 

Il devait être élève à Victor Hugo, le collège de Narbonne. 

S'il se reconnait, afin que son travail lui soit restitué,50 ans, au moins, plus tard, qu'il décrive les deux dernières photos. 





jeudi 8 juillet 2021

LA DERNIÈRE DU DERNIER AFFLUENT... Fleury-d'Aude en Languedoc

Il y a deux ans, j'écrivais "... Désormais dans la plaine, le ruisseau du Bouquet entame la dernière partie de son cours microcosmique, notre dernier épisode à suivre, je pense...". J'ai dû vérifier tant un flou imprécis vient nimber le souvenir que l'on a du temps et des choses. Personne n'a marqué son impatience, personne ne s'est manifesté pour ce dernier épisode... mais bien d'autres motivations positives poussent à écrire sans exiger pour autant quoi que ce soit en retour... L'eau reste l'eau même si ce n'est jamais la même qui passe... 
 
Articles antérieurs (2019) : 
https://dedieujeanfrancois.blogspot.com/2020/01/le-fleuve-et-le-ruisseau-lettre-un-ami.html
https://dedieujeanfrancois.blogspot.com/2019/05/libre-libre-comme-avant-le-dernier.html
 https://dedieujeanfrancois.blogspot.com/2019/04/prisonnier-comme-jamais-le-dernier.html 
idem pour les cinq autres parties de cet épisode

Le ruisseau du Bouquet, à ma connaissance, le dernier de l'Aude, rive droite (et rive gauche ?), intermittent certes, mis à mal par l'implacabilité de l'été mais si permanent pour ses natifs... Venu en théorie des garrigues de la Clape, barré vers la mer et obligé de décrire une boucle vers l'intérieur, il passe ce qui fut l’Étang de Fleury par une cave maîtresse (Mayral) où des sources claires le révèlent. Sa cuvette étant fermée par des collines, l'étang fut drainé peut-être avant la colonisation romaine grâce à un souterrain. 

https://dedieujeanfrancois.blogspot.com/2019/04/des-pistes-pour-la-partie-enterree-du.html

A son débouché, passant sous l'avenue de Salles (à l'ouest du village), il rejoint la source proprement dite du Bouquet où les femmes puisaient une eau si bonne et lavaient le linge avant la construction du lavoir plus en aval (les bains-douches aussi). Au-delà, avec l'extension des maisons en lieu et place des jardins potagers, le cours d'eau est enterré et cette tendance s'est même prolongée avec les constructions de ces dernières années après son passage sous la départementale de Lespignan (pont de la Mouline). 

Il faut rejoindre alors la ligne de frondaisons pour en apprécier l'ambiance bucolique : encore un jardinet sur une laisse de limon, au fond des vignes avec parfois, un abricotier, d'épais rideaux de carabènes (roseaux), une broderie de ronciers coupée de beaux frênes, de minuscules grèves de sable, des blèdes et épinards sauvages aux abords. Au bout du vallon, dans un ultime ressaut précédant la plaine, Aigos Claros, le jardin aux merveilles de l'oncle Noé, annoncé par le balancier incliné vers le ciel de sa pouzalanco (dite aussi pouzaranco... un chadouf) que je ne peux qu'imaginer. 

Pardonnez-moi de répéter le cours d'un si petit ruisseau comme si je reprenais, sans jamais me lasser, du front au menton, le visage d'une femme aimée... le monde a beau être vaste, on n'en finit pas de revisiter son petit pays... Peut-être en corrélation avec le "qui trop embrasse mal étreint"... 

Une fois dans la plaine, le ruisseau ne peut aller droit vers la rivière : sur près de trois kilomètres, se joignant à la cave de la Communauté, un des nombreux fossés chargés de drainer la plaine, il doit suivre un piémont de garrigue plus bas que le niveau du fleuve trop travailleur. C'est parce que cette zone, le Pastural, est facilement inondable qu'elle ne comprend que des prés avec des recoins où poussent des joncs ou des senils (roseau des roselières, à balais, pour le chaume aussi...). Quelques moutons y paissent encore, leurs crottes en témoignent, le pont des pâtres aussi... (à suivre). 










vendredi 2 juillet 2021

Sur le pont de Coursan (supplément photos)

 Je savais qu'elles y étaient... elles datent de 2011 ! 

Coursan, le mur qui ne protège pas toujours des crues violentes de l'Aude.
vue vers l'aval

il manque des cloches on dirait...

vue vers l'amont




Sur le pont de Coursan, on y danse (fin)

 Plus de dix ans plus tard, le cardinal de Richelieu doit encore passer à gué et ce n'est qu'à partir de 1685 que grâce aux impôts supplémentaires (déjà...) votés par les États du Languedoc, l'idée de pont pourra se matérialiser. Henri Gautier (1660 - 1737), ingénieur du roi puis inspecteur du corps des Ponts-et-Chaussées, participe à la construction des cinq arches d'origine (la dernière rive gauche se retrouve enterrée suite à une inflexion du lit de l'Aude (encore un caprice d'un fleuve trop travailleur et porteur de sédiments ? et à quelle époque ?).

Portant l'ancienne nationale 9, d'importance pour les échanges Nord-Sud via le Massif Central, l'ouvrage s'en trouvera régulièrement retouché : les trottoirs à partir de 1882 jusqu'à leur encorbellement en 1924, la chaussée élargie en 1905 et portée à 6,50 mètres (avec des trottoirs de 2 m !). Les matériaux ont évolué :  de la fonte à l'origine pour les parapets puis du ciment armé avant l'aluminium anodisé plus actuel. Les modifications se conjuguent avec des réparations, restaurations et un entretien fonciers ; ainsi la voute centrale a été consolidée par injection de béton en 1967, les fondations des piles renforcées par un rempiétement en 1983, le tablier en 1985.     

"... Le petit pont de Coursan..." peut-on lire parfois de la part d'un (sur Wikipedia), qui, à l'instar du Parisien narguant le provincial, tendrait à dénigrer le pays profond, ne prêchant que par la grande ville. Laisse donc, Coursannais : ce quidam, jaloux de notre joli pont avec aussi des ouïes comme à Toulouse n'est même pas capable de compter jusqu'à quatre puisqu'il parle de trois arches seulement... Ne parlons pas de la cinquième...   

Daïsso péta Coursannot, maï que s'en fouten d'aquel piot... 

S'il ne faut pas déprécier pour autant le pont de Cuxac en amont, ceux de Salles et Fleury en aval, serait-ce pour des raisons que la raison ne connaît pas, il est assurément beau et photogénique, ce pont qui vit passer tant d'illustres personnages... Alliées à son profil cambré donnant sur Notre-Dame-de-Rominguière, l'église qui adopta la tour de guet wisigothique en guise de clocher, ses ouïes, ouvertures circulaires, si utiles pour l'écoulement d'une lame d'eau importante, ses arches encore, plein cintre, encadrant celle en anse de panier, en allègent joliment la structure... 

Panier des paysannes... Le riche limon des rives du fleuve continue de donner de bons légumes et l'été des tomates en quantité... La joie s'ajoute à l'esthétique pour la belle saison et la fête de la Barque... et si ce n'est pas sur le pont, graillons et flonflons, "... Dansez, chantez, villageois, la nuit gagne... le vent qui vient..." (clin d’œil à Georges Brassens...). 

Sources : wikipedia & site de la ville de Coursan. 

Sur le pont de Coursan, on y danse... (1)

Coursan depuis le pont / wikimedia commons / Author Christian Ferrer... merci l'auteur même si la saison ne répond pas à l'entrain de la belle saison...
 

Sur le pont de Coursan, on y danse, on y danse... Aussi bien que sur celui d'Avignon pardi, puisque le quartier voisin fête la Barque plusieurs jours durant encore, parfois, au mois d'août... Graillons et flonflons, des moules aussi... Que reste-t-il de sa renaissance dans les années 60 quand des orchestres réputés drainaient la jeunesse des villages voisins ?   

Le quartier médiéval de la Barque c'est celui qui domine l'Aude, derrière le mur haut et épais censé protéger des crues. Sinon les gens s'enfermaient derrière le portail de Notre Dame et les remparts quand le guet, depuis la tour au-dessus du gué, (par la suite clocher de la Rominguière), signalait une approche non reconnue, aiguillonnée par la hantise d'un raid sarrasin.  

C'est donc un passage à gué, voire grâce à un bac, idéalement situé sur la trajectoire la plus courte entre Narbonne et Béziers qui a valu l'installation du village. Corciano marque le passage de l'Aude sur la via Curtia plus directe par les collines de Nissan que la via Domitia plus à l'ouest, coupant la pointe de l’Étang de Capestang, plus exposée encore aux hautes eaux des inondations. 

Si la présence d'un pont de bois reste historiquement confuse, le tour de France à l'initiative de la régente Catherine de Médicis pour présenter son fils au royaume et à l'Espagne parle d'une traversée difficile de l'Aude à Coursan il est vrai le 4 janvier 1565. Et si pont il y eut, nul doute qu'il n'a pas tenu longtemps suite à une colère récurrente du fleuve. Le site de la ville relève un paragraphe de l'Histoire Générale du Languedoc : 

 " Le 14 octobre 1632, le Roi Louis XIII, la Reine, suivis de toute la Cour partis de Béziers à 11 heures du matin pour se rendre à Narbonne, passèrent l'Aude à gué à 4 heures du soir (sans doute au lieu dit "La Barque"). Il s'éleva aussitôt un orage extrêmement violent accompagné d'éclairs et de tonnerre et d'une si grande abondance de pluie qu'en moins de 2 heures la rivière et tous les ruisseaux du voisinage débordèrent, inondèrent toute la plaine à une lieue aux environs de Narbonne, ce qui produisit une fange si épaisse, que la plupart des carrosses et fourgons de la Cour s'embourbèrent et que presque tous les cochers ou charretiers furent obligés de dételer leurs chevaux et d'abandonner leurs bagages pour se sauver. Une heure plus tôt, le Roi et la Reine auraient été noyés."

(à suivre) 

Sources : wikipedia & site de la ville de Coursan.


samedi 13 mars 2021

LE VIN BOURRU de J.-C. Carrière / lecture à quatre z'yeux


Quarante kilomètres à vol d'étourneau entre Colombières, le village de Jean-Claude Carrière et Fleury-d'Aude, entre le pied du Massif Central et le rivage méditerranéen. Peu de distance mais une géographie très contrastée et pourtant une vie commune où chacun peut se reconnaître, retrouver le souffle vital légué par les aïeux, supputer la pression latente d'un jacobinisme nordiste sur un Sud qui veut vivre... 

Au fil des pages, quelques thèmes partagés, estampillés "Languedoc".

LE VENT. 12 mars 2021. 4 heures du matin : 10° avec le marin, de la douceur mais il ne fera pas plus de 13 degrés cet après-midi puisque le vent va tourner au nord-ouest.  Ah, en parles-tu du vent ? Oui : "le pays est [...] froid l'hiver à cause du vent du Nord qui descend en sifflant du massif..."
 C'est vrai que nous aussi avions l'habitude de dire "vent du Nord" pour un air pourtant venu d'ailleurs. Mais tout comme nous, tu ne mentionnes pas la tramontane. 
Suivi : finalement le vent hésite entre sud-ouest et nord-ouest, dans le premier cas ce serait  "labech" et est-ce que le proverbe trouvera à justifier demain "labech tardièr, cers matinièr" ? (labèch du soir, cers du matin).

LA MER. A t'entendre il te tardait de dépasser ton monde fermé, encaissé entre "... Le Caroux, haut bastion escarpé qu'on qualifie d'imposant et de pittoresque..." et au sud la chaîne basse et arrondie de Sauvagnère. Pourtant, par le versant raide du Caroux, une fois en haut sur le plateau, on voit la mer. 
A Fleury, vers 1930, à l'époque de ta naissance, il s'en trouvait toujours une paire, à l'école, qui n'avaient jamais vu la mer. Alors le maître les emmenait un jeudi sur les hauteurs de la Clape et deux mille mètres plus loin, près le Pech de la Bado, vers 160 mètres d'altitude, on la voit la mer, plein Est, à six kilomètres à peine. 
Note : depuis les coteaux au sud-ouest (Fontlaurier, le Phare) ou ouest (le château d'eau), on la voit la mer. Au-delà de l'étang de Vendres, on reconnait l'immeuble de Valras.   
 
ane-sang-et-or nanou.over-blog.org

LES GAVACHES. Déjà, pour situer Colombières tu ajoutes :
 
"Juste un mot sur les gavaches (prononcer gabatchs). Ils vivent au nord, dans les régions froides et peu civilisées des montagnes centrales. Ils parlent patois et ne sont bons qu'à faire brouter les vaches. A certaines saisons ils descendent dans les terrains méridionaux comme travailleurs périodiques. C'est l'occasion pour nous de voir comme ils sont frustes et ignorants. Le gavache est la référence barbare..."

Et nous Audois qui sommes les Gabaches en chef des Catalans (1) eux-mêmes Gabaches de qui déjà ? Des Catalans d'Espagne ? Des Espagnols non catalans ? Le mot aurait un rapport avec le goitre dû à une carence en iode chez les montagnards de France partis faire les moissons de l'autre côté des Pyrénées dans une Espagne bien plus verte qu'aujourd'hui (les migrations ne se font pas en sens unique !), et ce depuis 1530 ! L'espèce humaine étant d'une nature douce et non agressive, goitre et crétin devinrent synonymes.   
Si les Mexicains ont eu dit (ou disent encore ?) "gabacho" en parlant d'Européens ou de Yankees, un affairisme historique met au second plan le côté péjoratif du terme lorsque, à la frontière du Roussillon, terre aragonaise durant quatre siècles, une interprétation plus apaisée vient traduire le traditionnel "Catala bourou, Gabach  porc !"(2), à savoir que sur la frontière où avaient lieu les échanges, les uns proposaient des ânes réputés, les autres des cochons ! 
Et nous, du Bas-Pays, nous disions plutôt "mountagnols" que gabaches...  

Cochon_recueilli_par_le_Refuge_GroinGroin wikimedia commons Photo_de_L214_-_Éthique_&_animaux

Encore les interconnexions entre l'Occitanie, l'Espagne, le Mexique ! 

(1) nomment-ils ainsi les Occitans du nord du département des Pyrénées Orientales (Fenouillèdes notamment) ?
(2) Catalan tu es un âne, Gabach tu es un porc. 


mercredi 3 mars 2021

JEAN-CLAUDE CARRIERE... il nous a tant aimés...


Tant de facettes à apprécier, à admirer chez cet homme... Internationalement reconnu mais pas cosmopolite, il s'inscrit parmi les rares qui, au lieu de rester confinés dans un cercle certes de culture mais aussi, le succès aidant, de quant-à-soi pour le moins pétant plus haut que... enfin, pédant pour le moins, choisissent de rester dans l'atmosphère et sur le plancher de toute la population plutôt que de ne plus la voir, depuis leur bulle élitiste. 
 
On pourrait y voir un lien entre "être de nulle part" et "naître quelque part". Le parcours de Jean-Claude Carrière, bien que louvoyant entre les deux, penche incontestablement pour la fidélité aux racines, au village natal, Colombières-sur-Orb. L'accent, l'occitan, le vin sont estampillés du Sud et comme pour chacun de nous, l'enfance est déterminante pour la suite. Jean-Claude n'a-t-il pas exprimé lui-même que le meilleur juge de ce que nous sommes devenus est l'enfant que l'on a été ? 
 
Alors j'ai été choqué par ce qu'il a laissé entendre sur les Gilets Jaunes et le désir populaire (quel gros mot !) de référendum (1), et je me méfie des projections de la bulle jusqu'en province, (l'organisatrice du festival de Nîmes ne nous apprend-elle pas que Carrière a dit "... madame Macron me récite parfois des passages de la controverse de Valladolid... " ? lui rend-elle service en dévoilant cela ?), donc attention à cette culture d’État propagandiste et à ses médailles élyséennes ! Faisons abstraction de ce clinquant ! 

Jean-Claude Carrière, enfant du pays revenu à des sources que tu as si bien honorées, nous te comprenons, nous t'acceptons sans aucune condition. Y aurait-il dans ces mots une définition au verbe aimer ? N'est-il pas plus important de dire que toi tu as offert à nos cœurs de quoi avancer sur le chemin, que toi tu nous a aimés ? 
 
(1) Cette fois-là, il était aiguillonné à France Inter par Salamé et Tesson fils, le Spiderman faillible des façades. Sauf que Carrière, inconsciemment, a finalement bien ébranlé le discours unique des voix de leur maître... deux ans après j'en suis à me demander s'il n'a pas fait exprès de déraisonner en parlant de la Pologne attaquant la Hongrie et que pour Napoléon c'était même allé jusque là, à émettre de faux roubles pour subvenir aux besoins de l'armée en Russie !?!? Les pros de la parole démagogique en restèrent cois de perplexité ! 

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mardi 25 février 2020

MOUSTIQUES & DÉMOUSTICATION / Fleury-d'Aude en Languedoc.

Etang_de_Pissevache wikimedia commons Auteur Hugolesage
Faute d'inspiration, pourquoi ne pas revenir en arrière ? Quel(s) sujet(s) avaient bien pu inspirer ce blog les mois de février passés, à commencer par 2014 ? Et les motivations sont bien maigres pour inciter le lecteur à remonter le temps, poussé qu'il est à ne pas rester en arrière du troupeau, dans un flot d'informations aussi orientées que peu durables. Manipulé, incité à la mémoire courte, il ne peut que fuir en avant même si les lendemains jadis chantants s'avèrent désormais plus qu'incertains.
Il en va de même pour l'auteur. Ponctuellement, il a néanmoins quelques raisons de se tourner vers ce qu'il a commis. En premier lieu parce que lui aussi a oublié, qu'il a besoin d'un stimulus pour s'y retrouver. Ce n'est que quand il se dit "Ah oui !" que les interrogations l'atteignent. Assume-t-il ses écrits ? Ne se retrouve-t-il pas en porte-à faux ? Reste-t-il lui même ? Ses mots ne sont-ils pas la preuve de ses contradictions ? A-t-il correctement exprimé sa pensée ? 

En janvier et février 2014, le titre "AMÉNAGEONS, DÉVELOPPONS, COLONISONS !", concernerait-il notre commune littorale de Fleury, manque de précision. Aujourd'hui nous dirions "MOUSTIQUES et DÉMOUSTICATION".
Passons, lisons ce premier volet.

"En juin 1963, l’État charge le haut-fonctionnaire Pierre Racine (1909 - 2011) de la Mission Interministérielle pour l’Aménagement Touristique du Littoral du Languedoc-Roussillon. L’ex-directeur de cabinet du premier ministre Michel Debré (entre 1959 et 1962) doit présider à la création de stations balnéaires ou à l'aménagement de l'existant (1) dans le but de recevoir un million de touristes, en plus des villégiatures plus ou moins implantées dont Saint-Pierre-La-Mer (2), depuis la vogue naissante des bains de mer, en 1846. 

Saint-Pierre-la-Mer wikimedia commons Auteur Hugolesage
   
    Une région où les vents règnent en maîtres. En effet, sur les eaux plus ou moins saumâtres, sur la mer, dans les pins, les tamaris, les roseaux et les oliviers de Bohême, les dépressions du Golfe de Gênes ou du Golfe de Gascogne génèrent des courants souvent violents. Si cette forte circulation représente une contrainte, nous lui devons néanmoins quelques effets positifs : l’humidité dans un sens, la chasse aux miasmes dans l’autre,  au-dessus des étangs, des lagunes, grâce aux vents de terre, dont le Cers. Et ils contrarient aussi les moustiques. Sauf que la mission Racine ne saurait s’en remettre seulement aux courants d’air pour chasser ces aèdes, anophèles, ces culex et leur parentèle fournie de cousins. Le prestige de la France est en jeu et, les avancées économiques accompagnant l’expansion démographique, c’est avec le DDT qu’on va faire taire les innombrables "bzz" des uns et le bourdonnement inaudible des quelques autres qui ont le toupet d’alarmer sur les risques de cancer et de "reprotoxicité" du produit ! La chimie, un moyen et non des moindres dans l’arsenal pour le progrès et l’avenir glorieux ! Et cette guerre-là sera gagnée dans le but de proposer la Côte d’Améthyste (3) aux touristes filant sur l’Espagne tout en détournant cette même pression de la Côte d’Azur saturée. Le projet permettra par ailleurs de diversifier une économie fragile car liée à une monoculture peu sûre, celle de la vigne. Il peut accompagner aussi l’arrivée des Pieds-Noirs dont une majorité préfère s’installer autour de la Grande Bleue.

(1) Port-Camargue (30), La Grande-Motte, Carnon, Le Cap d’Agde (34), Gruissan, Port-Leucate (11), Port-Barcarès, Saint Cyprien (66).  
(2) inclue par la Mission Racine dans l’unité touristique "Gruissan", théoriquement seulement.  Michelin et l’IGN persistent à écrire « Saint-Pierre-sur-Mer ».
(3) une appellation qui ne prendra pas."
 


Saint-Pierre-la-Mer  Wikimedia Commons Auteur Hugolesage

Notes :
1) en 2020, Michelin et l'Institut Géographique National ont bien corrigé avec la mention "Saint-Pierre-la-Mer".
2) concernant notre maître vent, le Cers, jamais mentionné par la baronnie météorologique du Nord qui n'a que des tramontanes à tout bout de champ, on retrouve le nom même "Cerç" ou "Mestral" dans la basse vallée de l'Èbre. Ainsi, entre le Rhône au Nord et l'Èbre au Sud, l'Aude et son couloir s'inscrivent-ils en toute modestie...
3) La Côte d'Améthyste, de la Camargue à la Côte Vermeille. 
4)  "... une monoculture peu sûre, celle de la vigne", une activité économique rentable certes mais en dents de scie, alternant toujours des cycles fastes et des phases difficiles.   

Finalement, alors que ce printemps 2020 inquiète parce qu'il a un mois d'avance, que les moustiques sont plus qu'envahissants même en hiver, que ce propos concerne, veille de l'élection municipale, la gestion de la commune, quand bien même la démoustication se situerait à un niveau plus que régional (des Pyrénées-Orientales au Var), au moins pour ces trois raisons, n'était-il pas inutile d'en reparler.  

photo offerte par iha.