Photo : Étang de Pissevaches. Cette année, c'est plein encore et les gens vont voir les flamants roses comme ici, en 2017 : Étang_de_Pissevaches Auteur Krzysztof Golik |
Aude, Languedoc, Tchécoslovaquie, Ariège, Pyrénées, Océan Indien, Lyon, Brésil, ports familiers mais unique maison des humains. Apprendre du passé, refuser la gouvernance cupide suicidaire. Se ressourcer dans l'enfance pour résister, ne pas subir. Passer ? Dire qu'on passe ? Sillage ? Aïeux, culture, accueil, ouverture aux autres, tolérance, respect, héritage à léguer (amour, écoute, cœur, mémoire, histoire, arts...) des mots forts, autant de petites pierres bout à bout qui font humanité.
lundi 4 novembre 2024
Un LANGUEDOC dans une FLEUR d'AMANDIER. Présentation.
jeudi 13 janvier 2022
LE DELTA DE L'AUDE, UNE PETITE CAMARGUE
En préalable à une balade romantique entre Saint-Pierre et Les-Cabanes, j'en étais resté à démontrer qu'il n'existait aucun lien entre le fait d'être né quelque part et de s'en trouver pour autant "imbécile heureux" (1). Quitte à me demander encore, peut-être sans raison, si nous n'aurions pas plutôt tendance à plaindre un apatride que le contraire, je tourne le dos à la polémique. Dans les facettes nourricières du milieu propre à influer sur les gens, natifs et autres, le delta de l'Aude, aux terres gagnées sur la mer et qui ont rattaché La Clape, hier encore une île, au continent.
Saint-Pierre-la- Mer, au pied de la garrigue. A partir des pins de Périmont, la balade vers Les-Cabanes-de-Fleury vient compiler le présent sur les strates de souvenirs plus anciens. Ne suivons pas, le long de la Clape, le sentier vers l'Oustalet, là où nous allions couper les carabènes (2) de la véranda devant la tente. Non, il faut se décider à traverser la zone lagunaire, ces confins que l'étang occupe plus ou moins l'hiver, en période de grandes eaux.
L'été en principe, on peut passer même si la surface craquelée reste traître, cachant sous une mince couche sèche, un sable noir, vaseux et collant où l'on s'embourbe en moins de deux. Bien que du coin, j'y bloquai une fois les roues du vélo dans une gangue très adhérente. Étaient -ce les vapeurs du gris-de-gris mis en bouteille au domaine de Gaysart qui m'avaient rendu distrait ? Ce qui est sûr est qu'elles avaient rendu la mésaventure très joyeuse, du moins avant que de devoir nettoyer... Mais je me répète, j'ai déjà raconté ça, fin août me semble-t-il... tout comme de s'embourber avec la voiture... "Non papa, on va s'embourrer ! " redoutait mon aîné...
https://dedieujeanfrancois.blogspot.com/2021/08/pissevaches-saint-pierre-la-mer.html
Suite à ces espaces plutôt familiers, il fallait et il faut toujours passer la chaussée de la Grande-Cosse, inondable peut-être, en cas extrême, redescendre un peu plus loin, s'engager de l'autre côté où la piste se dirige résolument vers les dunes du littoral. La carte indique bien qu'elle rejoint un ancien lit de l'Aude. Le Payroulet, les Terres Salées, des territoires où l'eau douce le dispute au sel, où le privé veut prendre le pas sur le public : qu'en est-il de cette clôture barrant initialement le passage ? Ou, est-ce ouvert parce que les taureaux camarguais n'y sont plus ?
Plus loin, une petite rivière empêche de passer... Étrange : il n'a pas plu depuis belle lurette... N'est-ce pas pour dissuader ? inciter à faire demi-tour ? L'eau pour l'agriculture ? l'eau pour la chasse ? Et la multiplication des pompages à la rivière, autorisés ou non, qu'en est-il ? Par moments, des salves de coups de fusil derrière la chaussée qui clôt le vaste domaine de Saint-Louis, jadis aux Salins du Midi. Choquant, en pleine journée... Il me semble qu'à l'affût, le gibier se tire le soir, la nuit, le matin mais qu'il se repose durant le jour. Non, excusez mes craintes mais ce n'est peut-être que du ball-trap. Le pouvoir de l'argent donne aussi celui de détruire à grande échelle, est-ce la raison de cet a priori négatif et accusateur ? Pour en finir avec cette eau, si c'était pour entretenir les zones humides afin d'en préserver la biodiversité ?
Aujourd'hui, le réalisme voudrait me fermer les portes du rêve alors qu'en post-adolescence romantique, à l'âge des premiers émois, des amours incertaines, c'est ici, sur la piste de limon, de sable et de sel, que je revoyais celle à laquelle je m'accrochais toujours, touché par les destins croisés de l'Arlésienne, Mireille, Magali, la condition première étant le moment de la journée. Il faut que le soleil donne fort, à la verticale presque, quand la nature et les hommes l'évitent. Alors on se retrouve seul, écrasé sous la chape implacable. Alors, la survie commande de rejoindre la forme incertaine, dansante, d'un tamaris ou d'un pin... Sauf qu'entre maléfice et enchantement, sur la platitude désolée de la sansouire, là où des croûtes de sel rappellent un chott du Sahara, les mirages savent faire danser aussi comme une silhouette disloquée et floue d'une femme en perdition : c'est Mirèio, l'héroïne de Mistral, empêchée d'épouser Vincèn, son amoureux aux origines trop modestes. En dernier recours, elle va aux Saintes-Maries-de-la Mer, implorer les saintes mais elle n'y arrive que pour y mourir, frappée d'insolation lors de la dure traversée de la Camargue. Autre histoire contrariée, celle de Jan qui se défenestre pour avoir, par respect des conventions sociales, renoncé à la femme qu'il aime, une "coquette" déjà promise mais à un parti moins intéressant, l'Arlésienne. Et comme pour conforter toute cette mythologie, dans les années 60, on entend à la radio :
"... Magali, Magali,
Qu’est-ce qui t’a pris de t’en aller pour le pays de nulle part
Parce qu’un gitan t’a regardée en faisant chanter sa guitare?
Magali (3)..."
Tout y est : le refrain en occitan "... L’amour que pourra pas se taïre, e ne jamaï se repaua, Magali...", les gitans, le soleil qui rend fou ; en prime, l'évocation de la grande steppe de la Crau, créée par la Durance, encore une fille folle de Provence.
Mais il faut absolument rejoindre les pins là-bas. Ce n'est que dans leur ombre bienfaisante que la fièvre s'apaisera même si on aime prolonger en imaginant le chaume sur les murs blancs de chaux de la maison du gardian, une cabane de sénils comme dans la Salanque ou celles, à l'origine, des pêcheurs de l'embouchure de l'Aude.
Plus prosaïque, alors que Mistral est récompensé du Nobel de littérature pour son poème en occitan (autre chose qu'une collection de la Pléiade, à la réputation surfaite, truffée d'auteurs d'extrême droite sinon fascistes), encore pour une histoire de femme, la Vénus d'Arles (1er siècle avant JC), force est toujours de constater qu'elle reste détenue à Paris (4)... Entendez-les donc, ces racistes historiques rejetant la "race du Sud" mais s'accaparant la culture méditerranéenne !
Pourtant, rien ne saurait gâcher la fin de cette balade. Au bout de la piste, le camping, puis toute la poésie du fleuve vers les Cabanes-de-Fleury, d'autant plus qu'en septembre, le pays respire à nouveau après la saison touristique (une pensée pour Gilbert Bécaud)... Le Cers a, une fois de plus, lavé et le ciel et nos âmes...
dimanche 22 août 2021
Saint-Pierre-la-Mer / étang de PISSEVACHES / photos.
samedi 21 août 2021
PISSEVACHES / Saint-Pierre-la-Mer
Début des années 60, un vieux monsieur toujours alerte vient tous les après-midi. Il laisse l'épouse aux bavardages des femmes sous la véranda et part à Pissevaches sans souci d'un soleil d'été, trop direct. Sous la chemise, à l'habitude des gens d'ici, il porte toujours un tricot de corps blanc ; aux pieds, bien qu'ajourées, toujours des sandales, claires aussi, comme les chaussettes. Tout est net et quasi neuf mais ses cartilages usés le font marcher en canard : le genou gauche part sur le côté avant d'atterrir. L'allure, le pantalon de lin flottant au vent, le chapeau lui donnent un air de comique américain du temps du muet. Son dada, ce sont les coquillages laissés par la mer, surtout les escargots. Il ne nous vient pas à l'idée qu'il y va, comme Botticelli, pour une Vénus sortant du bain...
Pendant qu'il court les laisses de mer, plus à l'intérieur, ils sont nombreux autour du canal antichar voulu par les Allemands, avec une épuisette ou au bouchon, à traquer les cranquettes (crabe vert ou enragé), les lisses, ces petits muges en bancs ou encore les jols (athérines) pour une friture de mélette. Le bord est ourlé de coques ouvertes par centaines : ces coquillages morts n'engagent pas au ramassage des vivants. Plus loin, dans l'étang encore en partie en eau grâce au grau intermittent que les coups de mer ouvrent parfois, certains piègent les petites soles sous le pied.
Au volant de son Aronde, le vieux monsieur repart à Fleury avec Maria son épouse, avant sept heures nouvelles, avant que le soleil couchant n'aveugle les conducteurs. Nous la suivons sa voiture, dans la montée, avec les quelques unes qui font la chenille jusqu'en haut de la garrigue. La Barre de Périmont couvre déjà Saint-Pierre, la plage, les baraques de Pissevaches et en partie l'étang qui nous accompagne, de son ombre.
samedi 14 août 2021
PISSEVACHES DEPUIS PÉRIMONT (2) / Saint-Pierre-la-Mer.
Chardon d'Espagne. |
Il n'empêche, cet ultime rempart de la Clape sur la mer est déjà remarquable par sa nature. Imaginez une échine rocheuse en pente douce vers l'étang, des romarins, mouches et garrouilles (1), buissons à mener la nuit des chasses au dahut (ah... les nuits d'été à Saint-Pierre...). Des pins, seulement en bas d'une falaise morte, avec quelques roseaux qui disent l'eau pas loin et au premier plan, le vert malachite relevé de blanc et le jaune jaune des capitules du chardon d'Espagne (2). Tout s'oublie, pourtant il suffit un jour d'une circonstance, la découverte des couleurs de Cézanne, de sa palette bien du Midi, pour que jaillisse l'émotion profonde au souvenir de ce coin de Saint-Pierre avec cette fleur à ne cueillir qu'avec les yeux... mais présente aussi, quand on les ferme, avec les senteurs de la garrigue après l'orage de juillet...
Ce qui reste des pins de Périmont... |
Au bout, en contrebas, comme pour ne pas contrarier le Cers et ses rafales, une pinède, enfin une huitaine d'arbres ; une ombre rare et si goûtée pour le pique-nique du lundi de Pâques, la première fois gourmande d'une salade niçoise jusque là inconnue... Mais quelle idée ce riz froid bien blanc avec ces œufs durs et ces olives bien noires dans la mayonnaise ! Et ce n'est pas tout parce qu'il y a le secret que tout le monde connait... Non non, pas le tunnel sous la garrigue, creusé par les Allemands et où Daudel l'épicier a eu fait pousser des champignons de couche... Sous le transformateur, toujours au bout de Périmont (jadis il y eut une redoute / voir encore le site "Ma Clape à ce propos) une échelle de fer pénètre les entrailles de la Terre et donne sur un lac bleu bien mystérieux.
Une douzaine de mètres à peine et après le village sur pilotis, la vue s'ouvre. Le regard porte à treize kilomètres environ (3). Presque dans la perspective de l'immeuble de Valras, le château d'eau de Saint-Louis des Cabanes borne une platitude de terres salées avec l'étang de Pissevaches, formé et déformé au fil des époques par le delta de l'Aude et la mer. .
A jouir de la vie, à s'éveiller aux merveilles de la nature, à apprécier le coin, on n'analyse pas plus loin... Tout vient à point, dit-on, petit à petit, quand sonne l'heure... Voilà que je fredonne, peut-être parce que, un peu à droite d'Agde, on voit Sète, la ville de Brassens qui me pardonnera de le pasticher "Il suffit d'être à Périmont, c'est tout de suite l'aventure..." Le nom déjà "Pissevaches", une aventure mais laissons cela aux années 10 et 20 de ce siècle (4)
(1) cistes et kermès.
(2) le nom m'a été amicalement soufflé par "Ma clape" un site à ne pas manquer pour ceux qui aiment nos garrigues uniques jusqu'au bord du Golfe http://www.maclape.com/#propos sinon sur facebook https://www.facebook.com/maclape11.
(3) https://fr.wikihow.com/calculer-%C3%A0-quelle-distance-se-trouve-l%27horizon
(4) Dans la promotion touristique de la commune voici ce que nous avons vu fleurir comme panneau :
Tout reste audible et se discute : le panneau et son hypothèse univoque (photo de 2014) n'a pas été renouvelé. Désolé, mais l'autre jour je n'ai pris que le paysage... J'y retournerai...
Au fond, la Barre de Périmont vers 1958. |
samedi 31 août 2019
LE GIBIER D'EAU... PLUTÔT EN PARLER QUE SE BRAQUER ! / Fleury-d'Aude en Languedoc
Manquent les premières lignes, sur la page précédente... ce sera corrigé dès que possible... |