Quarante kilomètres à vol d'étourneau entre Colombières, le village de Jean-Claude Carrière et Fleury-d'Aude, entre le pied du Massif Central et le rivage méditerranéen. Peu de distance mais une géographie très contrastée et pourtant une vie commune où chacun peut se reconnaître, retrouver le souffle vital légué par les aïeux, supputer la pression latente d'un jacobinisme nordiste sur un Sud qui veut vivre...
Au fil des pages, quelques thèmes partagés, estampillés "Languedoc".
LE
VENT. 12 mars 2021. 4 heures du matin : 10° avec le marin, de la
douceur mais il ne fera pas plus de 13 degrés cet après-midi puisque le
vent va tourner au nord-ouest. Ah, en parles-tu du vent ? Oui : "le
pays est [...] froid l'hiver à cause du vent du Nord qui descend en
sifflant du massif...".
C'est
vrai que nous aussi avions l'habitude de dire "vent du Nord" pour un
air pourtant venu d'ailleurs. Mais tout comme nous, tu ne mentionnes pas
la tramontane.
Suivi
: finalement le vent hésite entre sud-ouest et nord-ouest, dans le
premier cas ce serait "labech" et est-ce que le proverbe trouvera à
justifier demain "labech tardièr, cers matinièr" ? (labèch du soir, cers du matin).
LA
MER. A t'entendre il te tardait de dépasser ton monde fermé, encaissé
entre "... Le Caroux, haut bastion escarpé qu'on qualifie d'imposant et
de pittoresque..." et au sud la chaîne basse et arrondie de Sauvagnère.
Pourtant, par le versant raide du Caroux, une fois en haut sur le
plateau, on voit la mer.
A
Fleury, vers 1930, à l'époque de ta naissance, il s'en trouvait
toujours une paire, à l'école, qui n'avaient jamais vu la mer. Alors le
maître les emmenait un jeudi sur les hauteurs de la Clape et deux mille
mètres plus loin, près le Pech de la Bado, vers 160 mètres d'altitude,
on la voit la mer, plein Est, à six kilomètres à peine.
Note
: depuis les coteaux au sud-ouest (Fontlaurier, le Phare) ou ouest (le
château d'eau), on la voit la mer. Au-delà de l'étang de Vendres, on
reconnait l'immeuble de Valras.
LES GAVACHES. Déjà, pour situer Colombières tu ajoutes :
"Juste un mot sur les gavaches (prononcer gabatchs).
Ils vivent au nord, dans les régions froides et peu civilisées des
montagnes centrales. Ils parlent patois et ne sont bons qu'à faire
brouter les vaches. A certaines saisons ils descendent dans les terrains
méridionaux comme travailleurs périodiques. C'est l'occasion pour nous
de voir comme ils sont frustes et ignorants. Le gavache est la référence
barbare..."
Et
nous Audois qui sommes les Gabaches en chef des Catalans (1) eux-mêmes
Gabaches de qui déjà ? Des Catalans d'Espagne ? Des Espagnols non
catalans ? Le mot aurait un rapport avec le goitre dû à une carence en
iode chez les montagnards de France partis faire les moissons de l'autre
côté des Pyrénées dans une Espagne bien plus verte qu'aujourd'hui (les
migrations ne se font pas en sens unique !), et ce depuis 1530 !
L'espèce humaine étant d'une nature douce et non agressive, goitre et
crétin devinrent synonymes.
Si
les Mexicains ont eu dit (ou disent encore ?) "gabacho" en parlant
d'Européens ou de Yankees, un affairisme historique met au second plan
le côté péjoratif du terme lorsque, à la frontière du Roussillon, terre
aragonaise durant quatre siècles, une interprétation plus apaisée vient
traduire le traditionnel "Catala bourou, Gabach porc !"(2), à savoir
que sur la frontière où avaient lieu les échanges, les uns proposaient
des ânes réputés, les autres des cochons !
Et nous, du Bas-Pays, nous disions plutôt "mountagnols" que gabaches...
Encore les interconnexions entre l'Occitanie, l'Espagne, le Mexique !
(1) nomment-ils ainsi les Occitans du nord du département des Pyrénées Orientales (Fenouillèdes notamment) ?
(2) Catalan tu es un âne, Gabach tu es un porc.
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