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vendredi 2 juillet 2021

Sur le pont de Coursan, on y danse (fin)

 Plus de dix ans plus tard, le cardinal de Richelieu doit encore passer à gué et ce n'est qu'à partir de 1685 que grâce aux impôts supplémentaires (déjà...) votés par les États du Languedoc, l'idée de pont pourra se matérialiser. Henri Gautier (1660 - 1737), ingénieur du roi puis inspecteur du corps des Ponts-et-Chaussées, participe à la construction des cinq arches d'origine (la dernière rive gauche se retrouve enterrée suite à une inflexion du lit de l'Aude (encore un caprice d'un fleuve trop travailleur et porteur de sédiments ? et à quelle époque ?).

Portant l'ancienne nationale 9, d'importance pour les échanges Nord-Sud via le Massif Central, l'ouvrage s'en trouvera régulièrement retouché : les trottoirs à partir de 1882 jusqu'à leur encorbellement en 1924, la chaussée élargie en 1905 et portée à 6,50 mètres (avec des trottoirs de 2 m !). Les matériaux ont évolué :  de la fonte à l'origine pour les parapets puis du ciment armé avant l'aluminium anodisé plus actuel. Les modifications se conjuguent avec des réparations, restaurations et un entretien fonciers ; ainsi la voute centrale a été consolidée par injection de béton en 1967, les fondations des piles renforcées par un rempiétement en 1983, le tablier en 1985.     

"... Le petit pont de Coursan..." peut-on lire parfois de la part d'un (sur Wikipedia), qui, à l'instar du Parisien narguant le provincial, tendrait à dénigrer le pays profond, ne prêchant que par la grande ville. Laisse donc, Coursannais : ce quidam, jaloux de notre joli pont avec aussi des ouïes comme à Toulouse n'est même pas capable de compter jusqu'à quatre puisqu'il parle de trois arches seulement... Ne parlons pas de la cinquième...   

Daïsso péta Coursannot, maï que s'en fouten d'aquel piot... 

S'il ne faut pas déprécier pour autant le pont de Cuxac en amont, ceux de Salles et Fleury en aval, serait-ce pour des raisons que la raison ne connaît pas, il est assurément beau et photogénique, ce pont qui vit passer tant d'illustres personnages... Alliées à son profil cambré donnant sur Notre-Dame-de-Rominguière, l'église qui adopta la tour de guet wisigothique en guise de clocher, ses ouïes, ouvertures circulaires, si utiles pour l'écoulement d'une lame d'eau importante, ses arches encore, plein cintre, encadrant celle en anse de panier, en allègent joliment la structure... 

Panier des paysannes... Le riche limon des rives du fleuve continue de donner de bons légumes et l'été des tomates en quantité... La joie s'ajoute à l'esthétique pour la belle saison et la fête de la Barque... et si ce n'est pas sur le pont, graillons et flonflons, "... Dansez, chantez, villageois, la nuit gagne... le vent qui vient..." (clin d’œil à Georges Brassens...). 

Sources : wikipedia & site de la ville de Coursan. 

Sur le pont de Coursan, on y danse... (1)

Coursan depuis le pont / wikimedia commons / Author Christian Ferrer... merci l'auteur même si la saison ne répond pas à l'entrain de la belle saison...
 

Sur le pont de Coursan, on y danse, on y danse... Aussi bien que sur celui d'Avignon pardi, puisque le quartier voisin fête la Barque plusieurs jours durant encore, parfois, au mois d'août... Graillons et flonflons, des moules aussi... Que reste-t-il de sa renaissance dans les années 60 quand des orchestres réputés drainaient la jeunesse des villages voisins ?   

Le quartier médiéval de la Barque c'est celui qui domine l'Aude, derrière le mur haut et épais censé protéger des crues. Sinon les gens s'enfermaient derrière le portail de Notre Dame et les remparts quand le guet, depuis la tour au-dessus du gué, (par la suite clocher de la Rominguière), signalait une approche non reconnue, aiguillonnée par la hantise d'un raid sarrasin.  

C'est donc un passage à gué, voire grâce à un bac, idéalement situé sur la trajectoire la plus courte entre Narbonne et Béziers qui a valu l'installation du village. Corciano marque le passage de l'Aude sur la via Curtia plus directe par les collines de Nissan que la via Domitia plus à l'ouest, coupant la pointe de l’Étang de Capestang, plus exposée encore aux hautes eaux des inondations. 

Si la présence d'un pont de bois reste historiquement confuse, le tour de France à l'initiative de la régente Catherine de Médicis pour présenter son fils au royaume et à l'Espagne parle d'une traversée difficile de l'Aude à Coursan il est vrai le 4 janvier 1565. Et si pont il y eut, nul doute qu'il n'a pas tenu longtemps suite à une colère récurrente du fleuve. Le site de la ville relève un paragraphe de l'Histoire Générale du Languedoc : 

 " Le 14 octobre 1632, le Roi Louis XIII, la Reine, suivis de toute la Cour partis de Béziers à 11 heures du matin pour se rendre à Narbonne, passèrent l'Aude à gué à 4 heures du soir (sans doute au lieu dit "La Barque"). Il s'éleva aussitôt un orage extrêmement violent accompagné d'éclairs et de tonnerre et d'une si grande abondance de pluie qu'en moins de 2 heures la rivière et tous les ruisseaux du voisinage débordèrent, inondèrent toute la plaine à une lieue aux environs de Narbonne, ce qui produisit une fange si épaisse, que la plupart des carrosses et fourgons de la Cour s'embourbèrent et que presque tous les cochers ou charretiers furent obligés de dételer leurs chevaux et d'abandonner leurs bagages pour se sauver. Une heure plus tôt, le Roi et la Reine auraient été noyés."

(à suivre) 

Sources : wikipedia & site de la ville de Coursan.