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jeudi 8 juillet 2021

LA DERNIÈRE DU DERNIER AFFLUENT... Fleury-d'Aude en Languedoc

Il y a deux ans, j'écrivais "... Désormais dans la plaine, le ruisseau du Bouquet entame la dernière partie de son cours microcosmique, notre dernier épisode à suivre, je pense...". J'ai dû vérifier tant un flou imprécis vient nimber le souvenir que l'on a du temps et des choses. Personne n'a marqué son impatience, personne ne s'est manifesté pour ce dernier épisode... mais bien d'autres motivations positives poussent à écrire sans exiger pour autant quoi que ce soit en retour... L'eau reste l'eau même si ce n'est jamais la même qui passe... 
 
Articles antérieurs (2019) : 
https://dedieujeanfrancois.blogspot.com/2020/01/le-fleuve-et-le-ruisseau-lettre-un-ami.html
https://dedieujeanfrancois.blogspot.com/2019/05/libre-libre-comme-avant-le-dernier.html
 https://dedieujeanfrancois.blogspot.com/2019/04/prisonnier-comme-jamais-le-dernier.html 
idem pour les cinq autres parties de cet épisode

Le ruisseau du Bouquet, à ma connaissance, le dernier de l'Aude, rive droite (et rive gauche ?), intermittent certes, mis à mal par l'implacabilité de l'été mais si permanent pour ses natifs... Venu en théorie des garrigues de la Clape, barré vers la mer et obligé de décrire une boucle vers l'intérieur, il passe ce qui fut l’Étang de Fleury par une cave maîtresse (Mayral) où des sources claires le révèlent. Sa cuvette étant fermée par des collines, l'étang fut drainé peut-être avant la colonisation romaine grâce à un souterrain. 

https://dedieujeanfrancois.blogspot.com/2019/04/des-pistes-pour-la-partie-enterree-du.html

A son débouché, passant sous l'avenue de Salles (à l'ouest du village), il rejoint la source proprement dite du Bouquet où les femmes puisaient une eau si bonne et lavaient le linge avant la construction du lavoir plus en aval (les bains-douches aussi). Au-delà, avec l'extension des maisons en lieu et place des jardins potagers, le cours d'eau est enterré et cette tendance s'est même prolongée avec les constructions de ces dernières années après son passage sous la départementale de Lespignan (pont de la Mouline). 

Il faut rejoindre alors la ligne de frondaisons pour en apprécier l'ambiance bucolique : encore un jardinet sur une laisse de limon, au fond des vignes avec parfois, un abricotier, d'épais rideaux de carabènes (roseaux), une broderie de ronciers coupée de beaux frênes, de minuscules grèves de sable, des blèdes et épinards sauvages aux abords. Au bout du vallon, dans un ultime ressaut précédant la plaine, Aigos Claros, le jardin aux merveilles de l'oncle Noé, annoncé par le balancier incliné vers le ciel de sa pouzalanco (dite aussi pouzaranco... un chadouf) que je ne peux qu'imaginer. 

Pardonnez-moi de répéter le cours d'un si petit ruisseau comme si je reprenais, sans jamais me lasser, du front au menton, le visage d'une femme aimée... le monde a beau être vaste, on n'en finit pas de revisiter son petit pays... Peut-être en corrélation avec le "qui trop embrasse mal étreint"... 

Une fois dans la plaine, le ruisseau ne peut aller droit vers la rivière : sur près de trois kilomètres, se joignant à la cave de la Communauté, un des nombreux fossés chargés de drainer la plaine, il doit suivre un piémont de garrigue plus bas que le niveau du fleuve trop travailleur. C'est parce que cette zone, le Pastural, est facilement inondable qu'elle ne comprend que des prés avec des recoins où poussent des joncs ou des senils (roseau des roselières, à balais, pour le chaume aussi...). Quelques moutons y paissent encore, leurs crottes en témoignent, le pont des pâtres aussi... (à suivre). 










mardi 23 avril 2019

PRISONNIER COMME JAMAIS... / LE DERNIER AFFLUENT (9ème partie).

Liminaire : les vues manquent cruellement. Vivement qu'un reportage photo suive ces épisodes sur le dernier affluent secret de l'Aude. Pas si hors-sujet, des légumes manière de redonner le goût de l'été et surtout d'une vie plus saine et respectueuse que l'existence hors-sol qu'on nous incite encore à mener ! 

BÉTON ET GOUDRON SUR LA VIE SIMPLE D’AVANT. 

Fleur du câprier.
Notre ruisseau qui passe sous la rue, à côté des cabinets, retrouve enfin l’air pur, la campagne. La proximité de l’endroit, l’eau disponible par des puits peu profonds, ont incité les habitants à cultiver un potager dans un coin de leur vigne : Jean et Joseph n’arrêtent pas, presque une seconde journée après la vigne, aux beaux jours : fèves, blèdes, fraises, petits pois, artichauts, haricots verts ou paille, cornichons, câpres, tomates, aubergines, poivrons, pommes de terre... Avec le cabanon sous le figuier et un arbre fruitier, cerisier, abricotier ou pêcher. Autant de conserves et de confitures pour le ménage. Autant d’économies et la possibilité d'acheter une nouvelle vigne, d'avancer, de prospérer. 


Des figues grosses comme ça !
 Le ruisseau, lui, entretient le souffle vital sur ses bords : des arbustes, des frênes de belle taille, des bergeronnettes hoche queue. Le rouge du sang dans ma main, une mésange bleue, me rappelant à jamais que le respect de la vie n’est pas à prendre à la légère.
Le ruisseau court vers la plaine, il occupe un fossé, longe la remise où Soldeville, le boucher, abat ses bêtes.
D’un côté, les murs très hauts des maisons, tels des rempart, ouverts seulement d‘un fenestrou pour se garder de l'ennemi, du Cers fort et froid de l’hiver. De l’autre, toujours des jardins avec les coupe-vent de roseaux. Camille et Émilienne, nos voisins en travaillent un, je crois, par là.
Le fossé se creuse et s’élargit encore. Un pontil imposant permet d’accéder à une maison, rive droite, la seule depuis l’abattoir, abritée derrière un épais rideau de carabènes (roseau, roseau à quenouille, canne de Provence dont on fait les canisses)... 

Arundo_donax rideau de roseaux Wikimedia Commons Author Peter Forster.
„... La maison de brique isolée à l’époque était celle de Roger Colomé, qui habite à présent (il a perdu sa femme voilà deux ou trois ans) 7, rue du Bouquet, juste après la maison où était jadis la famille Moulin. C’est son père qui m’avait demandé de lui lire cette fameuse étiquette sur le fût vide de retour, ce qui m’avait énormément surpris de voir quelqu’un qui ne savait pas lire même son nom...“ Caboujolette 2008 / François Dedieu.

On le dénigrait le ruisseau quand des effluents de la coopé et de la distillerie se déposaient dans le concave du cours ou dans les cœurs qu’on vexe pour rien... quelques relents plus que sains puisqu’on y trouvait des vers de terre de trente centimètres pour les anguilles ! Plus un écho aujourd’hui, plus de rossignol la nuit au fond du jardin public pas plus que les anguilles des premières pêches d‘avril ? Et au-delà, plus de vignes, de jardins écolos, plus d’arbres et de roseaux : le bucolique, le romantique ont cédé la place à une logique aussi démographique qu’économique de lotissements, de ronds-points et de ralentisseurs... Un nouvel aqueduc souterrain étouffe le petit ruisseau prisonnier comme jamais sous un sarcophage de béton et de goudron... un univers en extension au-delà de la route de Lespignan, qui va encore ensevelir les abords, enrober plus loin encore les ronciers, les arbres, les blèdes et les épinards que plus personne ne cueille tant le substrat en apparence aseptisé est gangréné par une chimie du fric qui empoisonne ! Des herbes là où il ne faut pas ? De l’eau, du sel et du vinaigre, macarel ! et Sonmanto ira se rhabiller ailleurs ! Arrêtons d'acheter complices, nous avons de quoi faire plier les porteurs de mort ! 

Le village s'étend dans l'espace. Si cela fait près de deux siècles que les gens sont sortis des remparts pour créer des faubourgs, la rue des Barris notamment (barri = faubourg), la tendance s'est généralisée depuis cinquante ans.

"... La maison près des HLM
A fait place à l'usine et au supermarché

Les arbres ont disparu..." chantait Nino Ferrer

https://www.youtube.com/watch?v=RgW_AX8cuqo

Mais ça ne sent pas "l'hydrogène sulfuré, l'essence", peut-être "la guerre, la société", concernant surtout ses marges, ses exclus dont les villes veulent se décharger par l'entremise (encore un mot du chanteur) de la loi obligeant les communes de plus de 3500 habitants à se doter de 20 % (bientôt 25) de logements sociaux, pour plus de mixité sociale.

"... C'n'est pas si mal
Et c'est normal
C'est le progrès..." 


Impossible aujourd'hui  d'accepter ce que Nino Ferrer appelait encore "le progrès" en 1971 lorsque, au nom d'une économie mondialisée, une clique capitaliste toujours plus avide peut nous mener à terme à l'extinction de l'espèce, à moins que comme le ruisseau, l'humain puisse renaître d'un monde meilleur. 

Confiture de figues grises... encore la chanson de Nino Ferrer...