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samedi 7 juin 2025

INSTITUTEURS toujours... galerie d'images.

 




Message_de_sa_fiancée,_Alain_est_mort_depuis_10_jours under the Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International license. Author SD.Chatane 


L'école de Pergaud à Landresse.


Grézieu_(69) 2017 under the Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International license. Auteur Aavitus

Fétichisme mémoriel. 








Ah Alain Mottet (1928-2017) dans Le Bossu ! 



MAÎTRESSES toujours...

 Maîtresses toujours, instituteurs toujours, cher compagnonnage de la communale, des coquelicots et marguerites pour avoir aussi contribué à faire fleurir le respect des enfants et de soi, malgré la timidité extrême de nos effusions, de belles rencontres me poussent à regratter la page, à moins m'en vouloir aussi d'une nonchalance coupable.

Logés à la même enseigne que tous, des instits femmes ou hommes partent sans que nous acceptions le vide laissé ; raison de plus, au contraire pour resserrer les rangs dans cette solidarité de corps qui nous a tant confortés.

Le souvenir “ tranquille ” d'Alain-Fournier (1886-1914), de Louis Pergaud (1882-1915), celui plus personnel de René Pesqui (1937-2017), dit « L'oncle », parce que du pays et pour le dernier stage CM2 à Grézieu-la-Varenne avec les tilleuls en fleur (juin 1972), celui, plus poignant de Jean-François Knecht (1957-2007), compagnon à Mayotte, forcent d'un coup mes défenses émotionnelles. En cause, un décès soudain, choquant (51 ans), et d'autres dont je n'avais pas idée, tant à la fois que j'en déborde. Pardon.

Le premier, dans les “ tranquilles ”, celui d'André David (1893-1915), certes de l'École Normale Supérieure, pour son travail aussi expéditif que remarquable sur la Montagne Noire. Bien des critères pour rester honoré...

Le second, hélas d'actualité, de Sébastien Saffon (1974-2025) qui après dix-sept ans dans le primaire, a passé une maîtrise d'Histoire. Riche de ce qu'il a transmis sur la vie agricole du Lauragais dont « Ceux de la Borde Perdue », sa trilogie « La Combe » ; il nous quitte du jour au lendemain, nuit du 17 au 18 mai 2025.

On cherche, on prolonge (c'est formidable l'Internet !) pour tomber sur « Les grandes heures des moulins occitans »,encore sur le Lauragais, d'Huguette et Jean Bézian (1935-2015), instituteurs tous deux d'origine.

Alors vagues sous un crâne, je pense à Roger Bels (1921?-2001?) qui nous a laissé un beau livret sur le département de l'Aude... et, tout à fait en accord avec le mot de Michelet

« Chaque homme est une humanité, une histoire universelle »

(petit dépit les majuscules manquantes à « Homme » et à « Histoire » [quel culot !]).

En remontant presque aux sources, je me dis qu'au titre de collègue j'aurais dû aller parler à Francis Patrac (1935-2018) : il a enseigné à Salles-d'Aude où peut-être des publications d'élèves Freinet dorment dans un placard ; il connaissait si bien la faune, la nature de notre garrigue...

Pour finir, en hommage au lien entre Albert Camus et son instituteur Louis Germain (1884-1966), je m'en voudrais de passer à côté des enseignants de notre école à Fleury, chronologiquement Louis Llobet (1935-2009) qui avec son épouse nous ont encadrés en tant qu'ados autour d'une activité Théâtre, et en classe, Louis Robert (1906-1993) malgré sa méthode à l'ancienne et, une fois retraité (lui) plus pour nos promenades complices... et Monsieur Rougé, au CE2, c'est mon Monsieur Germain à moi, de ceux, (il y eut des profs par la suite dont Marcel Sinsollier [1932-2024]) qui vous découvrent un coin de bleu quand votre ciel n'est pas beau...

Nul besoin de coterie entre nous, le lien nous dépasse, pour avoir toujours eu le souci de laisser fleurir nos enfants, restons solidaires aussi des vivants qui de près ou de loin, nous ont côtoyés, nous côtoient, nous ont apporté, nous apportent.

Chers collègues de la communale, des coquelicots et marguerites, institutrices toujours, maîtres toujours !

samedi 30 décembre 2023

SUR LA ROUTE DE MADISON (fin)

 .../... La conquête de toute façon très éphémère de "pics" d'émotion vertigineux, le vécu de passions ordinairement inaccessibles, par définition fugaces, sont-ils préférables, quitte à devoir en payer, en creux, le prix en dépressions sinon en phases de platitude déprimante, d'électroencéphalographie plate ? Ces surcharges émotionnelles apportent-elles ou nuisent-elles à une moyenne concernant l'existence ? Peut-on croire à un trop-plein de bonheur promis ? N'est-ce pas effrayant ? Plutôt que de tenter, ne vaut-il pas mieux se sustenter, se contenter de sa petite vie bonhomme ? 


Se pose aussi la sempiternelle question de la morale, d'une morale plutôt, historiquement au bénéfice exclusif de l'homme, du mâle. La femme ? une femelle, une possession, consentante en amour ou devant s'offrir à un devoir conjugal pouvant aller jusqu'au viol légalisé, une réalité malheureusement confortée par cette morale arbitraire servie par des lois abusives. Chez Francesca, le couple ne s'inscrit pas dans ce rapport de force mâle-femelle, le seul indice de domination de la part du mari étant qu'il a préféré avoir l'épouse au foyer plutôt que libre de s'émanciper par le travail de cette forme de servitude... lui, ne semble pas nécessiter un dérivatif, copains, jeu, alcool, supporter quelconque à son travail à la ferme, familiale depuis des générations ; un seul indice je disais, de la place du mari, mais lourd, d'importance bien que moins insidieux que l'usage de la force, de la violence, démontrant tout de même une emprise psychologique machiste. Enfin, ne nions pas ce rapport de subordination, de sujétion à sens unique, faisant peut-être que la spectatrice, éventuellement, le spectateur, et c'est mon cas, craint davantage un retour inopiné du mari qu'il ne craindrait celui de l'épouse si la situation s'en trouvait inversée... Un séducteur passant à l'acte se retrouve non seulement pardonné mais presque admiré, une séductrice se fait traiter de salope... Suivant le sexe de la personne concernée, la communauté se permet de passer l'éponge ou de condamner sans pitié (il me semble, mais j'ai dû rêvasser à un moment, qu'une femme dans le film se retrouve ainsi mise au ban de la petite colonie ; il y avait de cette mise à l'index, de ces ragots dans le dos, dans notre petite société villageoise encore dans les années 70...). 
Et puis, est-ce exprimer qu'on est propriétaire en disant "ma femme", "mon mari" ? Quant aux réactions actuelles si agressives de la part d'un féminisme plutôt borné, image du balancier qui repart trop loin dans l'autre sens en croyant équilibrer l'excès contre lequel il se bat, plutôt que de n'en plus finir, si j'ai adopté l'expression " la fille qui m'accompagne " de Cabrel, à ce stade, en souhaitant qu'elles ne soient pas soumises à la mesquinerie ordinaire des médisances, commérages (comment dit-on " commère " à propos des hommes ?) et qu'en-dira-ton, je vous laisse à vos pensées et réflexions... 

Alors, la vie ne vaut-elle que par les pointes d'adrénaline, addictions et pulsions animales qui ramènent au rapport de force (je crains d'employer "Homme", "humain", qui disent trop le sexe dit fort). Un écrivain sut si bien les exprimer : 

«...quand les sèves montantes ont enfiévré dans leurs veines le sang ardent des mâles aux sexes cruels, par qui se perpétue l'œuvre auguste des maternités douloureuses. » Le viol souterrain, De Goupil à Margot, Louis Pergaud 1910. 

Bien sûr, un sentiment fort, un amour réciproque arrivent à inverser complètement cette vision désobligeante de la perpétuation de l'espèce... ce qui n'exclut pas le ou les accrocs à la fusion monogame sinon les doubles-vies... 

Imes_covered_bridge 2006 Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International Author Ymblanter

Madison County, Cedar_Covered_Bridge, Iowa,_USA,_2016 Author Brian W. Schaller

En français, le film est titré " Sur la Route de Madison ", comme le roman best-seller pourtant écrit du point de vue du mari, donc à revers du choix de Clint Eastwood. Plutôt le titre original " The Bridges of Madison County " : les ponts du comté de Madison, d'abord parce qu'il ne faut pas chercher Madison en tant que localité, la destination étant un comté (du nom de James Madison [1751-1836] quatrième président des États-Unis [1809-1817]), de ce découpage en carrés de gruyère de l'État de l'Iowa (où naquit Marion Robert Morrison dit John Wayne [1907-1979]), ensuite parce que la parabole du pont peut se décliner à l'envi, d'une rive à l'autre, d'un être à l'autre, forçant le passage, à l'image d'un amour ardent, vigoureux, en toute saison, puisqu'ils sont couverts, certainement pour parer aux hivers rigoureux dus à la descente de l'air polaire et aux terribles tornades (2022 par exemple). 

Damage_near_Winterset 2022 National Weather Service Domaine public

Ouf, avouons que ces dernières considérations permettent de se dépêtrer de cette problématique prégnante, concernant pleinement l'être pétri de contradictions que nous sommes... Streep Eastwood méritent bien de figurer dans les couples mythiques du cinéma ! 

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vendredi 29 décembre 2023

SUR LA ROUTE DE MADISON (1)

Dans les créations qui obligent à l'introspection. A-t-on ? Aurait-on ? Serait-on passé à côté d'un amour comparable ? Une passion de cet ordre est-elle venue un jour perturber ce qu'une vie ordinaire a de routinier ? Dans un autre ordre d'idée se pose une réflexion sur le vivre ensemble : le ressentiment sur une insécurité réelle sinon plus documentée qu'avant verrait-il, de nos jours, une femme parler puis partir dans la voiture d'un inconnu ? Dans un deuxième temps, se pose la sempiternelle question sur la morale et le naturel abhorré tant l'humain veut s'extraire du déterminisme, de l'instinct animal au sein de ce qui est pourtant le besoin de procréer... Et pour finir, en conclusion, si de ressentir un certain bonheur tant que nous pouvons accompagner, sans trop de mal pour nos proches et nous, la fuite des jours, permettait d'avancer positivement dans la vie ? 

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« Tu sais, je l'ai vu le film que tu évoquais, un brin cassant, avec la photo du couple Streep-Eastwood, comme si c'était une tare de ne pas le connaître. Au début, je te dis franchement, cette Amérique profonde m'a agacé, comme toujours, avant que l'histoire d'amour ne me retienne, parce que partagée, parce qu'occidentale, parce que je ne sais rien de ce sentiment dans les autres cultures, traditionnelles, en Asie, en Afrique... ou encore chez les Inuit, les Indiens dont ceux d'Amazonie... J'ai aussi pensé, non sans regrets vu ce qui se passe en ce moment, à Docteur Jivago (1965) ; 

Trailer Doctor_Zhivago (film de 1965),Yuri_Zhivago (Omar Sharif 1932-2015) and_Lara (Julie Christie 1940) Author Trailer screenshot (Freddie Young) 


Sur la Route de Madison (1995) est à mettre au même niveau, au plus haut du genre. Désolé pour mon inculture mais, spontanément, hormis Out of Africa (1985), encore avec Meryl Streep, assurément une actrice hors pair, et, dans une moindre mesure, Les Oiseaux se Cachent pour Mourir (1983) vu que le thème principal est le célibat des prêtres et que sur la forme, une série de huit heures ne peut que multiplier les personnages se succédant dans le temps, diluant de leur nombre dans un effet antinomique la passion amoureuse qui se doit d'être intense et dense... Quant au titre en français, il n'est qu'une interprétation plus que relative de l'anglais « The Thorn Birds » qui se réfèrerait plutôt au lien épine-oiseau, pourquoi pas à la pie grièche qui empale ses proies sur des épines ? (mais ce n'est encore qu'une autre interprétation de ma part). 

« Sur la Route de Madison », une histoire d'amour, d'attirance trop forte faussement innocente : une femme qui se propose d'accompagner un inconnu dans sa voiture révèle le désir qu'elle ressent, c'est aussi vrai fin 2023 que dans les années 60 sauf qu'aujourd'hui s'ajoute la dimension insécuritaire ; l'homme, reporter photographe, pas plus naïf, tout solitaire endurci qu'il se croit être, sait d'emblée qu'une probabilité de séduction est offerte. Et si, par convention, leur connivence affirme qu'il n'y a aucun mal à cela, elle laisse comprendre aussi que la possibilité de se laisser aller à se faire du bien est ouverte... 
Et nous, en tant que témoins, en tant que voyeurs, à regarder poindre cette passion, notre constat n'est pas celui d'un accusateur, nous ne sommes pas en situation de les accabler. Ceux qui réprouvent et condamnent sont libres de changer de canal, et au cinéma, entrer voir le film dans une salle de cinéma en connaissance de cause, exprime déjà une empathie à l'égard de ce type de liaison amoureuse. 
Qu'est-ce que la vie ? un long fleuve tranquille ? régulier ? ou au débit coupé par la sécheresse, débordé par une ou des crues imprévisibles ? On peut ou non les envier... ce n'est qu'une question de psychologie, de mentalité, de façon de considérer la vie : le train-train, la routine, la tranquillité, est-ce appréciable ? (à suivre)

lundi 5 décembre 2022

PAUVRES CHEVAUX ! LIBRES OISEAUX...

Quelques notes et prolongements : 

* c'est parce que les chevaux étaient épuisés que les belligérants ne purent bloquer l'adversaire dans la Course à la Mer, que les Français ne purent tirer avantage de la victoire de la Marne, que les Allemands échouèrent dans leurs offensives du printemps 1918.  

** le soldat de 14 était très bien nourri au point que ce qu'il jetait attirait les rats. Les chevaux eux, étaient mal nourris... chez les Allemands beaucoup sont morts de faim. 

*** si 1/4 des chevaux mourut directement des batailles et bombardements, les 3/4 périrent à cause des maladies, du manque de soins, de la nourriture insuffisante, de dysenterie, par noyade, faibles au point de ne plus pouvoir lever la tête dans des boues liquides montant jusqu'aux chevilles des cavaliers.  

**** inoculer la morve, la gourme, la maladie du charbon chez les chevaux de l'adversaire fait partie des armes de guerre. 

militaires et mulet (1936) Auteur  agence de presse Meurisse wikimedia commons Domaine public

***** il a tant fallu importer des mules d'Espagne que cela donna lieu à un trafic ; des mules amenées en Cerdagne passaient en Espagne puis revenaient par le Perthus, générant un profit substantiel aux trafiquants, une fois acquises par l'armée française. 

***** " Les chevaux et les mulets de l'armée se sont montrés d'une valeur inestimable en conduisant la guerre à une fin heureuse. On les trouvait sur tous les terrains d'opérations, remplissant leurs tâches fidèlement et en silence, sans pouvoir espérer aucune récompense ni compensation. " Général Persching. 

****** Maurice Genevoix, admiratif des Poilus se battant et mourant pour la France (1), parlerait-il du soldat qui s'arrache à vif une balle dans un testicule, de cet autre qui maintient dans sa chemise ses tripes alors qu'il a le ventre ouvert, démontre une belle émotion pour les bêtes innocentes mais entraînées dans la folie guerrière... Pauvres chevaux, pauvres bêtes si belles, vigoureuses mais si vite fourbues, efflanquées, misérables. Et quand les hommes récupèrent, les chevaux restent tête baissée, ce qui dit tout de leur moral... Genevoix parlerait-il des cris terribles des blessés, bien égaux devant la mort, implorant avec les mêmes intonations, en allemand ou en français, il n'oublie pas non plus le hennissement d'un cheval qui agonise, aigu tel le cri d'un oiseau de nuit " ...le hennissement aigu, poignant, qui montait sous les étoiles devant la misère, la méchanceté des hommes... ". 

Du village abandonné des Éparges (Meuse),  il se souvient, sur les pavés, de la galopade éperdue de petits sabots d'une bande de gorets en fuite. Dans ce village, alors qu'il souffle un instant dans la " Maison d'école " avec, au tableau le dernier problème du maître, il se tourne vers la fenêtre parce qu'une forme approche, c'est un vieux cheval avec un sillon de sang à l'épaule. Il le fait passer par le couloir pour rejoindre la cour, derrière, offrant un abri plus sûr. Il le revoit, le vieux cheval, huit jours plus tard, mais étalé, entouré des cadavres des vaches mitraillées par les Allemands. 

Sa consolation (et il rejoint en cela Louis Pergaud), c'est la présence fidèle des oiseaux, symboles  de liberté, de vie. Il leur doit du réconfort " à nos frères de poils et de plumes ", la honte aussi d'être dans le mauvais camp des hommes, mais le recul, finalement, sur notre engeance remise à sa place pour ne pas faire bon usage de sa position dominante... La folie, la cruauté, la bêtise des hommes ne sont finalement qu'un remous dans la vie, la nature qui continuera avec ou sans nous... 

oiseau Carduelis_carduelis Chardonneret élégant wikimedia commons Author Marie-Lan Nguyen

Sous les bombardements, les oiseaux témoignaient que le cours des choses se poursuivrait malgré la fureur irrépressible des bipèdes... les trois-quarts d'entre eux ont disparu parce qu'on tue la terre  au nom d'un productivisme effréné et qu'on s'empoisonne pour pas cher, on va au désastre et l'overdose de loisir est de plus en plus addictive parce que la vie de tous les jours n'apporte pas de bonheur... 

Après le covid, la guerre en Ukraine, la remise en cause, en touchant le porte-monnaie, des énergies fossiles, comme s'il fallait absolument s'évader d'une vie peu désirable (pour ceux qui en ont les moyens !), les réservations à la neige ont augmenté de 22 % ! 

Dans " Le Berger des Abeilles" 1974 / Grasset, Armand Lanoux réfléchit sur la guerre d'Espagne, annonciatrice du séisme nazi : il parle d'une " carmagnole, d'une marseillaise stupide... " 

"« Amusez-vous
Foutez-vous d’tout
La vie, entre nous, est si brève... » 

La chanson de 1934 ne présage rien de bon pour ce qui devrait suivre... 

(1) Son témoignage " Ceux de 14 " regroupe quatre livres sur la guerre, véridiques, minutieux, fidèles, Chaque lieu, chacun des faits sont bien précisés, chaque homme apparaît par son nom...   

www.le-site-cheval.com/images/articles/evenements/guerre-14-18/La_guerre_de_14-18_et_le_sort_des_betes.mp3 première diffusion 21 avril 1957 de l'entretien sur France Culture 

Sites et références : 

" Le Cheval de Guerre ", roman de Michael Morpurgo (1982 en G.B., 2008 seulement en France !), adapté au cinéma par Steven Spielberg. 

Le site Cheval - Guerre 14/18 : Oubliés les 11 millions de chevaux, ânes et mulets enrôlés en masse durant la guerre de 1914-1918 ? - Equitation Pédagogique et Ludique (le-site-cheval.com) 

Les animaux dans la grande guerre (radiofrance.fr) 

et sur ce blog : 

https://dedieujeanfrancois.blogspot.com/2015/02/fleury-en-france-les-chevaux-de-14.html 

https://dedieujeanfrancois.blogspot.com/2015/02/les-chevaux-de-14-suite-fin.html 

https://dedieujeanfrancois.blogspot.com/2015/02/un-monument-au-cheval-de-trait-fleury.htm





jeudi 11 novembre 2021

Aux MORTS de la GRANDE GUERRE

 Le 11 novembre marque chez nous la fête du village, la saint-Martin. Enfant je ne vivais que la fête, la foire, le repas de famille. après le dessert et jusqu'au soir, n'existaient que les lumières, les flonflons, les manèges, la voix racoleuse des loteries, les odeurs, de caramel, de praline, de pomme d'amour, celle aussi, de la poudre des carabines. Aucun remord, seulement le regret des plaisirs qui passent vite et la hantise de l'école qui va reprendre.  

Et quoi avant ?  mais rien... peut-être la messe pour louer le saint patron ? Sinon, vraiment, rien... 

Et la cérémonie au monument ? 

Fleury-d'Aude, 11 novembre 1990, diapositive François Dedieu.

Quelle honte de se revoir seulement en fêtard, en jouisseur, de faire l'impasse, au faîte de l’ignorance et de l'inconscience ! Je suis le pire du troupeau ! Au comble de la confusion, j'essaie de comprendre mais je ne saurais dire la date qui me vit corriger cette négation de l'armistice de 1918... au collège sûrement mais sans faire le lien avec les réjouissances festives du 11 novembre... 

Mon grand-père qui s'engagea comme artilleur, c'est sûr qu'il n'a jamais rien dit, pas plus à moi qu'à qui que ce soit... Mon père ? ou moi plutôt qui n'ai rien voulu entendre, vu l'incompréhension profonde entre nous deux. Les instituteurs ? comme je me demande encore s'ils en parlaient et s'ils amenaient les enfants le 11 novembre au Monument aux Morts, c'est que je dois encore être le seul coupable...

Mais ce matin, comme à chaque date anniversaire (1), je lis, posément, non pour passer plus vite à autre chose, le nom en commençant par le prénom de ces hommes, jeunes pour la plupart, Poilus avec la majuscule mais sans la barbe ou la moustache bien fournies. Si je ne le faisais pas, j'en serais vraiment mal. Si je commençais ici avec les lumières, les flonflons, ce serait déshonorer mon village, trahir les anciens, mépriser ce témoin à passer même si nous ne savons pas ce que ceux d'après en feront. 

Tout à l'émotion de leurs noms qui résonnent dans les limbes de ma conscience, avec Louis Barthas, le tonnelier de Peyriac-Minervois et ses carnets de guerre si merveilleusement écrits, avec les dessins savoureux de Pierre Dantoine, en occitan, parce que cette langue aussi est partie mourir pour la patrie, avec Louis Pergaud qui, voulant épargner les horreurs de la guerre à son épouse, lui laissa l'honneur d'être veuve, je veux finir avec les mots poignants de Pagnol pour Lili, son copain des collines :

« Dans une noire forêt du nord, une balle en plein front avait tranché sa jeune vie, et il était tombé sous la pluie, sur des touffes de plantes froides dont il ne savait pas les noms…» (Marcel Pagnol)

 1914 (22)

Août : JOUX Léon, le 18,

CARAVEILHE Louis, HEBRARD Antonin, le 20,

SOULA Jean-Baptiste, le 22,

ESTEVE Jean, FAJOU Auguste, SOULET Maurice, le 27,

FAURE Zephirin, le 29,  

MOLVEAU Henri, le 30 août.

 Septembre 1914 : FOUNTIC Antoine, le 3,

PUJOL Jacques, le 7,

GELIS Léon, le 15,

ROMAIN Emile, le 16,

CROUX Sylvain, le 26,

PALARDELLE Auguste, le 30 septembre.

 Octobre 1914 : VINCENS Henri, le 12,

ESPIE Eugène, le 17,

BARRAU Georges, le 22,

DAUGA Ludovic, le 30 octobre.

 Novembre 1914 : FAURE Antoine, le 12,

ROSSIGNOL Eugène, le 19 novembre  

 Décembre 1914 : THERON Auguste, le 11

 1915 (16)

Janvier 1915 : FITAL Paul, le 20,

FONTIES Olivier, le 27 janvier.  

 Mars 1915 : ANGUILLE François, le 5,

PEDROLA Valentin, le 6,

RICARD Léopold, le 13,

RAYNAUD Honoré, le 15,

BONI René, le 19,

VISTE Joseph, le 30 mars.  

 Avril 1915 : PROUZET Henri, le 18 avril.

 Mai 1915 : PELISSIER Sylvain, le 7 mai,

ESCARE Charles, le 9 mai.

 Juin 1915 : SIMON Charles, le 6,

QUINTILLA Emile, le 7 juin.

 Juillet 1915 : GRASSEAU Paul, le 2   

 Décembre 1915 : ALQUIER Joseph, le 3,

BERTOLI Daniel, le 31 décembre. 

dessin de Pierre Dantoine, album "La Guerre".

 
1916 (12)

Février : ARTOZOUL Auguste, le 15,

 Mars : DESENFANTS Georges, le 2 mars.

 Mai 1916 : PEYREL Gaston, le 21 mai.

 Juin 1916 : SAGNE Paul, le 30 juin.

 Juillet 1916 : BOURJADE Jean, le 7 juillet.

 Août 1916 : CARAVEILHE Noël, le 7,

                    CABRIER Emile, le 18 août.

 Septembre 1916 : COLL Joseph, le 4,

                             DOGLIO Louis, le 23 septembre.

 Octobre 1916 : MESTRE Antoine, le 18 octobre.

 Décembre 1916 : COURAL Joseph, MAUREL Louis, le 15 décembre.

 1917 (6)

Janvier 1917 : RAMON Henri, le 24 janvier,

 Mai 1917 : SOUCASSE François, le 1er mai.

 Juin 1917 : VINAYSSE Pierre, le 15,

                   LOCAMUS Maurice, le 30  juin.

 Juillet 1917 : VERCELLI Honoré, le 7 juillet.    

 Septembre 1917 : DE VILLENEUVE François, le 30 septembre.

 1918 (8)

Janvier 1918 : BERTOLI  Joseph, le 5 janvier.

 Février 1918 : BOURREL  Raymond, le 12 février.

 Juin 1918 : SOUCASSE Henri, le 1er juin.

 Juillet 1918 : IZARD Paul, le 13 juillet.

 Août 1918 : AURIOL Georges, le 24 août.

 Septembre 1918 : RAYNAUD  Joseph, le 6 septembre.

 Octobre 1918 : FONTAS  Louis, le 17,

                        ANCELY  Adolphe, le 19 octobre.

 1919 (1)      

GERVREAU  Maurice, le  6 février 1919.

 1921 (1)    

TEISSEIRE  Henri, le 4 mars 1921. 

(1) Du Vignoble à la Mer, l'ancien journal municipal a eu la bonne idée de publier deux ou trois mensuels avec la fiche détaillée de chaque héros sacrifié.

dimanche 24 octobre 2021

VENDANGES - LA SARDO / 11. Francis Poudou, Christian Signol, Jean Camp

Dans le groupe, le rituel rend hommage à la perpétuation de la vie. Il rassemble les participants et dans un état d'esprit empathique, insuffle une énergie partagée qui contribue à poursuivre sa destinée. Dans ce cadre, les agapes festives prises en commun illustrent le partage et la solidarité de destin. Après le rite de la dernière charrette, celui du repas de clôture des vendanges, en plus de signifier "être des nôtres" pousse la convivialité à boire "comme les autres", jusqu'à jongler, dans la griserie sinon l’ivresse, avec la démarcation du besoin animal, instinctif, de la chair après celui de la chère ; l'occasion de se désinhiber, de se libérer d'une tension primitive, pour s'affubler d'une circonstance atténuante, pour transgresser les frontières, s'autoriser un écart, serait-il fantasmé, faire un accroc à une morale aliénante.    

La Sardo : 

 
La récolte rentrée, la tradition voyait le propriétaire payer le repas de fin des vendanges à ses employés. Une tradition déjà passablement mise à mal dans les années soixante.
Le nom de ce repas "La sardo" restait pourtant. On peut lui associer sa version empreinte de religiosité, le "dièu lou vol" (n'allez pas me chicaner en corrigeant "diu", "dius", "dièus", "dio", ou encore "diou"... ).

Dans son livre sur le canton de Coursan (Vilatges al Pais / 2005) Francis Poudou et les habitants relèvent (page 94), "Lo Dius o Vòl" :

"Lo Dius o vòl.
La dernière charrette fleurie, les vendanges se terminaient par une fête que l'on appelait "Lo Dius o l ! (Si dieu le veut on se retrouvera l'an prochain), repas ou goûter pris en commun et généralement offert par le propriétaire."

Dans "Les Vignes de Sainte-Colombe", Christian Signol écrit :

"... Le dernier soir Charles Barthélémie accorda le "Dieu-le-veut", l'ultime festin destiné à récompenser la vaillance des vendangeurs. Comme c'était la coutume il y eut des mets exceptionnels : bouilli aux câpres, boudin noir et fricassée de volailles, puis des chants, des danses, des rondes et des farandoles qui se perdirent dans les vignes pour de mystérieux adieux..."

Signol évoque avec pudeur les suites sensuelles de ce repas festif. 
 
Avec Jean Camp, en parallèle à une description délicate de différents cépages, il y a l'enlèvement des Sabines dans l'évocation de la sarde :
 
"... Demain nous mangerons la "sarde", tous assis à la même table. Je paie le rancio à tout le monde. Placide, au barricot ! [...] De la charrette qui vient d'arriver et qu'on a laissée au bord du chemin, les hommes tirent planches et tréteaux, et dressent une longue table à peine branlante. les bancs s'alignent tout au long. Puis viennent les corbeilles débordantes de lourds pains ronds, les grands paniers de fricassées, les jattes de volailles rôties, fleurant le romarin, les cassoulets figés qu'une flambée de bois sec va faire ronronner tout à l'heure, les soupières de salades vertes où s'entassent l'anchois pilé, les œufs durs, les tomates douces, l'huile, le poivre, le sel, les piments rouges et les "chapons" spongieux frottés d'ail, les panerées de coques légères saupoudrées de sucre, les flans tremblotants, les crèmes onctueuses et les débordements de raisins fins : muscats déjà ridés aux grains poisseux de miel, chasselas ferme à la robe nuancée, "terrets" blonds de peau épaisse mais de parfum franc, grappes de malvoisie au goût de violette, picpouls énormes et blanc-vert, et même, mêlé aux aristocrates de la table, le modeste et juteux aramon, le roi de la plaine, avec ses prunes serrées d'un beau noir, son jus clair, sa chair tendre et sa généreuse abondance.
Un tonneau de cinquante litres est hissé avec précaution jusque là et calé contre le portail. Le régisseur y met cannelle mais veille à sa sécurité. Puis, les petits barils de vin blanc, de vin vieux, s'accotent près de lui. Enfin, pour le dessert, les bouteilles pansues de rancio qui mettront le feu aux joues des dîneurs.
Les femmes ont retroussé leurs manches et leurs jupes. Accroupies devant des foyers improvisés, elles réchauffent les potées de légumes, les marmites où chantonne bientôt la graisse fondante. D'autres battent la salade ; d'autres couvrent de branchage fin les desserts qui ont attiré un vol de mouches et d'insectes..."
 

Jean Camp
 La sarde se passe dans la Clape, quelque part aux abords de la chapelle des Auzils (extrait de Vin Nouveau, un roman de Jean Camp paru en 1929).