samedi 30 décembre 2023

SUR LA ROUTE DE MADISON (fin)

 .../... La conquête de toute façon très éphémère de "pics" d'émotion vertigineux, le vécu de passions ordinairement inaccessibles, par définition fugaces, sont-ils préférables, quitte à devoir en payer, en creux, le prix en dépressions sinon en phases de platitude déprimante, d'électroencéphalographie plate ? Ces surcharges émotionnelles apportent-elles ou nuisent-elles à une moyenne concernant l'existence ? Peut-on croire à un trop-plein de bonheur promis ? N'est-ce pas effrayant ? Plutôt que de tenter, ne vaut-il pas mieux se sustenter, se contenter de sa petite vie bonhomme ? 


Se pose aussi la sempiternelle question de la morale, d'une morale plutôt, historiquement au bénéfice exclusif de l'homme, du mâle. La femme ? une femelle, une possession, consentante en amour ou devant s'offrir à un devoir conjugal pouvant aller jusqu'au viol légalisé, une réalité malheureusement confortée par cette morale arbitraire servie par des lois abusives. Chez Francesca, le couple ne s'inscrit pas dans ce rapport de force mâle-femelle, le seul indice de domination de la part du mari étant qu'il a préféré avoir l'épouse au foyer plutôt que libre de s'émanciper par le travail de cette forme de servitude... lui, ne semble pas nécessiter un dérivatif, copains, jeu, alcool, supporter quelconque à son travail à la ferme, familiale depuis des générations ; un seul indice je disais, de la place du mari, mais lourd, d'importance bien que moins insidieux que l'usage de la force, de la violence, démontrant tout de même une emprise psychologique machiste. Enfin, ne nions pas ce rapport de subordination, de sujétion à sens unique, faisant peut-être que la spectatrice, éventuellement, le spectateur, et c'est mon cas, craint davantage un retour inopiné du mari qu'il ne craindrait celui de l'épouse si la situation s'en trouvait inversée... Un séducteur passant à l'acte se retrouve non seulement pardonné mais presque admiré, une séductrice se fait traiter de salope... Suivant le sexe de la personne concernée, la communauté se permet de passer l'éponge ou de condamner sans pitié (il me semble, mais j'ai dû rêvasser à un moment, qu'une femme dans le film se retrouve ainsi mise au ban de la petite colonie ; il y avait de cette mise à l'index, de ces ragots dans le dos, dans notre petite société villageoise encore dans les années 70...). 
Et puis, est-ce exprimer qu'on est propriétaire en disant "ma femme", "mon mari" ? Quant aux réactions actuelles si agressives de la part d'un féminisme plutôt borné, image du balancier qui repart trop loin dans l'autre sens en croyant équilibrer l'excès contre lequel il se bat, plutôt que de n'en plus finir, si j'ai adopté l'expression " la fille qui m'accompagne " de Cabrel, à ce stade, en souhaitant qu'elles ne soient pas soumises à la mesquinerie ordinaire des médisances, commérages (comment dit-on " commère " à propos des hommes ?) et qu'en-dira-ton, je vous laisse à vos pensées et réflexions... 

Alors, la vie ne vaut-elle que par les pointes d'adrénaline, addictions et pulsions animales qui ramènent au rapport de force (je crains d'employer "Homme", "humain", qui disent trop le sexe dit fort). Un écrivain sut si bien les exprimer : 

«...quand les sèves montantes ont enfiévré dans leurs veines le sang ardent des mâles aux sexes cruels, par qui se perpétue l'œuvre auguste des maternités douloureuses. » Le viol souterrain, De Goupil à Margot, Louis Pergaud 1910. 

Bien sûr, un sentiment fort, un amour réciproque arrivent à inverser complètement cette vision désobligeante de la perpétuation de l'espèce... ce qui n'exclut pas le ou les accrocs à la fusion monogame sinon les doubles-vies... 

Imes_covered_bridge 2006 Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International Author Ymblanter

Madison County, Cedar_Covered_Bridge, Iowa,_USA,_2016 Author Brian W. Schaller

En français, le film est titré " Sur la Route de Madison ", comme le roman best-seller pourtant écrit du point de vue du mari, donc à revers du choix de Clint Eastwood. Plutôt le titre original " The Bridges of Madison County " : les ponts du comté de Madison, d'abord parce qu'il ne faut pas chercher Madison en tant que localité, la destination étant un comté (du nom de James Madison [1751-1836] quatrième président des États-Unis [1809-1817]), de ce découpage en carrés de gruyère de l'État de l'Iowa (où naquit Marion Robert Morrison dit John Wayne [1907-1979]), ensuite parce que la parabole du pont peut se décliner à l'envi, d'une rive à l'autre, d'un être à l'autre, forçant le passage, à l'image d'un amour ardent, vigoureux, en toute saison, puisqu'ils sont couverts, certainement pour parer aux hivers rigoureux dus à la descente de l'air polaire et aux terribles tornades (2022 par exemple). 

Damage_near_Winterset 2022 National Weather Service Domaine public

Ouf, avouons que ces dernières considérations permettent de se dépêtrer de cette problématique prégnante, concernant pleinement l'être pétri de contradictions que nous sommes... Streep Eastwood méritent bien de figurer dans les couples mythiques du cinéma ! 

LosPuentesDeMadisonBSO bandassonorasdecine Partage autorisé sans but commercial

          

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire