Affichage des articles dont le libellé est Fleury-d'Aude. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Fleury-d'Aude. Afficher tous les articles

dimanche 13 février 2022

AMANDIER ROSE, AMANDIER BLANC (1).

7 février 2022.

L'autre jour, c'est Laeti ma nebeude qui m'a fait le plaisir d'en épingler un, même vite fait, en rentrant du boulot... Aujourd'hui, enfin, grâce à Véro et aux sorties de son groupe, des amandiers de 2022. 
 
21 janvier 2022.

 Heureusement que Loulou, le copain d'enfance, avait, avec quelques pétales éclos dès le 12 janvier, sauvé l'honneur des amandiers ! Sinon, je commençais à désespérer. Pas vous ? 
 
Bon, Midi-Libre a marqué l'événement avec un exemplaire du côté de Minerve, pris le 5 février... Bon, le commentaire ne mérite pas une bonne note mais on ira jusqu'à "passable" vu qu'ils sont gentils de laisser voir l'arbre même si on continue sans accepter (à propos des couquies... cokkies... pardonnez l'orthographe). 
 
Celui d'Aurore, du côté de Gruissan (3 mars 2018).

Un de ceux de Pierrot, en 2016.


24 février 2019 : un de ceux de Fabien. 

Celui de Martine au pied de l'Alaric (2018).

Même Guy, poète de l’éternel (c’est pour la rime) trop pris par le temporel, a noté :
« Les amandiers sont en fleur depuis une semaine et les premières asperges sauvages ont fait leur apparition… Janvier a été très doux pour les Pérignanais. » (fin janvier 2018)
En prime, l’orthographe « en fleur » nous offre la floraison absolue de milliers de fleurs au grand bonheur des abeilles… 
 
Sur un talus aux herbes folles, celui de Monique la Gardoise.

 
 

vendredi 28 janvier 2022

...ASPERGES VERTES, AMANDIERS BLANCS...

Non, il n'y a pas de comparaison possible entre la flopée d'amis entre guillemets des réseau sociaux et les copains de toujours du réseau du cœur, du quartier, du village. Bien sûr que la vie, en plus de ceux qui s'aiment, sépare ceux qui ont fait un bout de chemin d'enfance ensemble. Pourtant, parfois, l'informatique permet de renouer avec certains de ses camarades d'école, de ses copains du quartier. 

Nous avons joué aux billes, refait le monde à la nuit tombante, et parlé des filles, aux abords du parc de Gibert, même en hiver quand plusieurs couches d'habits arrivent mal à empêcher la froidure du Cers de pénétrer...

"... Les feuilles mortes se ramassent à la pelle,
Les souvenirs et les regrets aussi
Et le vent du nord les emporte
Dans la nuit froide de l'oubli..."
chantait Montand dès le début des années 50.  

On a couru ensemble le coteau de Fontlaurier sans la peur mais sans trop approcher non plus la masure et le feu des gitans, sur l'aire devant. 

"... Chante gitan,
Ton château en Espagne.
C'est le chant des errants qui n'ont pas de frontière,
C'est l'ardente prière
De la nuit des gitans."
chantaient les Compagnons de la Chanson, et Dalida aussi (vers 1958). Je ne préméditais pas de raconter ces souvenirs en chansons mais comme elles accompagnaient et encadraient bien nos premières impressions et sensations ! 

Quelle magie quand on est gosse ! quelle impression de pays béni ce coteau de Fonlaurier ! En vis à vis, la colline du moulin, en limite le tracé ondoyant allant vers les quatre chemins, bordé tout le long, d'amandiers, de bouteilhetiers (azeroliers), de touffes de genêts, de mattes d'asperges. En haut une garriguette parfumée de thym. Tout au bout encore des moulins et le phare dans le souvenir des avions de l'Aéropostale !

Oui, il est entré loin en nous, ce coin qui nous a vu grandir. Nous y avons déterré les poireaux sauvages dans des vignes en larges terrasses, cueilli les asperges sauvages de ses hauts talus, goûté la magie de la fleur d'amandier qui réveille les abeilles pionnières et nos premiers émois d'adolescents... 

"Quand nous jouions à la marelle
Cerisier rose et pommier blanc
J'ai cru mourir d'amour pour elle
En l'embrassant..."
chantait André Claveau, toujours dans ces années 50.

Alors quand un copain de toujours, après les soixante et quelques années qui nous voient survivre aux rouleaux et remous de leurs vagues, publie, du premier bouton au diadème entier de la ramure, son premier amandier fleuri de 2022, sa première botte d'asperges, tous ces souvenirs reviennent fort : ce paysage, ses couleurs, son relief particulier, ce ciel toujours aussi bleu, l'ambiance de la vie d'alors... 

Merci Loulou de mon quartier pour ton partage sur l'Internet... On boira un coup, lou cop qué vèn, la fois prochaine, on revivra Fontlaurier, les gitans, les filles qui nous faisaient jouer à la marelle, la fleur d'amandier messagère des jours meilleurs, tant qu'on peut encore faire la nique à "la nuit froide de l'oubli"...    


Photo Loulou Jourdain (12 janvier 2022) Merci Loulou.

Photo Loulou Jourdain (12 janvier 2022) Merci Loulou.

Asperges sauvages 24 janvier 2022. Photo Loulou Jourdain aimablement prêtée comme celles qui précèdent. 


mardi 25 janvier 2022

CHEMIN D'ÉCOLE (6) Depuis la côte...

Jean, mon grand-père paternel, le vigneron, est né le 4 juin 1897 à la métairie de La Pierre, domaine des Karantes, commune de Narbonne, en pleine Clape. Comme les enfants des châteaux de Tarailhan et Marmorières, administrativement comptés sur le territoire de Vinassan, ceux des Karantes allaient à l'école à Fleury, la seule alors accessible (entre 1903 et 1910). Nous nous devons aussi d'évoquer les enfants dits "des campagnes", des domaines nombreux alors (autour de 20 sur le territoire de la commune !). Ceux des Cabanes, plus loin dans le temps, astreints à plus de dix-sept kilomètres journaliers, ont disposé d'un local provisoire vers 1885, avant que le comte de Villeneuve, propriétaire de Saint-Louis-de-la-Mer n'offre le terrain, vers 1910, en vue d'une construction définitive (1), devaient quitter la classe une heure avant les autres pour ne pas être rattrapés par la nuit. 

"... Je n'ai toujours pas vu La Pierre, ce refuge lové dans une combe en pleine garrigue, un milieu complètement étrange, sûrement, pour mes aïeux, réfugiés économiques descendus des forêts et monts de l'Arize, dans l'Ariège, passant d'un coup du frais au sec, du froid au chaud, des prairies aux garrigues, des papillons bleus aux cigales brunes, des sapins et myrtilles aux pins et asperges sauvages. Nous ne verrons donc pas encore le débouché de ce chemin d'école qu'il serait peut-être judicieux et moins difficile de retrouver par l'autre côté, en partant de la côte, dos à la mer..."

C'est ce que je pensais et écrivais lors du dernier épisode sauf que ces choses-là comptent trop : latentes, elles sommeillent prêtes à se rappeler à vous au moment opportun, même si, par rapport au présent, on fait comme si ce n'était qu'anodin, futile, seulement par curiosité.  

Et un jour, avec l'idée d'aller aux Exals, juste une balade, manière de brûler quelques calories, la petite voix insiste "Ce n'est pas loin dans les terres... et si tu essayais d'aller voir où es né ton grand-père ?" 

Vue vers le Nord-Est avec les constructions des hauts de Saint-Pierre.

Les Exals, ces yeux-de-mer, exsurgences karstiques, sources de la famille des caudiès, suivant l'appellation locale, ces "chaudiers" où l'eau sourd (2 a, b, c) tempérée en toute saison, mais ici comparables à des étangs reliés à la mer, appréciés des pêcheurs pour les migrations de poissons, et tout autour par des mémères, souvent par paires, qui amènent toutou faire la crotte.  

Vue vers l'ouest avec un couvert forestier de pins d'Alep.

Les chemins enserrent un mamelon où les pins serrés, trop nombreux, ne grandiront pas. A contourner par la droite, la carte à l'esprit, pour cheminer, cap à l'ouest, vers cette combe, ce piémont favorable à la vigne où des humains aussi s'acharnèrent à ancrer leurs racines.  

Vue vers l'Est.

Vue vers l'Est.
 

(1) de quand date l'école occupée aujourd'hui en tant que capitainerie, il me semble ?

(2 a) Chaudier, nom commun :  ouvrier chargé de chauffer le métal à bonne température. 
Chaudier, verbe intransitif : entrer en chaleur en parlant des levrettes (Émile Littré). 
Chaudier, nom commun : dommage qu'il n'y ait pas cette entrée en tant que source chaude, admise instinctivement par les occitanisants.
 
(2 b) Les Exals alimentés entre 5 et 10 mètres sous la surface, explorés en plongée à la profondeur de 110 mètres. 

(2 c) Qu'en est-il de l'aquifère sous la Clape ? Hier, un reportage racontait que le Cap, ville capitale de l'Afrique-du-Sud, manquait d'eau. Aussi la municipalité envoie-t-elle des équipes couper des arbres, des pins d'Alep acclimatés jadis pour fournir du bois. L'employé à la tronçonneuse (beaucoup n'ont que des scies manuelles) parlait de 200 litres/jour économisés, la scientifique de service de 80 litres pour un arbre de 15 cm de diamètre dont la racine pivotante volerait en profondeur l'eau de l'espèce humaine... Ainsi, sur la Montagne de la Table, tout au bout de l'Afrique Australe, le pin d'Alep pourtant plus clairsemé que dans la Montagne de la Clape, est à éradiquer... Et si ces racines retenaient la terre ?   


mercredi 22 décembre 2021

CHEMIN D'ÉCOLE (4) "... Et là-haut, toujours plus haut... alors que la bêtise humaine..."

Là haut, toujours plus haut va le pauvre papillon magnétisé vers cette luminosité à la puissance cosmique. Appelle-t-elle impérativement la flammèche intérieure rallumée sur les traces de son passé ? Allons, un mirage seulement ! 

La Clape ? un milieu longtemps ratiboisé par la déforestation, les fours des potiers, des verriers et autres producteurs de chaux nécessitant beaucoup de bois à brûler. Résultat, le couvert dégradé de kermès pour remplacer les chênes verts. Cette garrigue est ensuite restée un milieu ouvert grâce ou à cause du pastoralisme, les nombreux troupeaux paissant la baouco et ne laissant aucun avenir aux jeunes arbres. Le cadre de ce chemin d'école encore présent mais vieux de quelques cent-vingt années était tout autre (encore, à ma connaissance, trois troupeaux au village à la fin des années 50). C'est seulement au bout de plusieurs siècles que, sans qu'on y prêtât attention, le paysage a radicalement changé quand les pins ont joué aux envahisseurs et encore à cause de notre espèce dont le zèle, toujours plus dangereusement libéré des lois de la nature, a imposé ses règles spécieuses basées sur le toujours plus, la concurrence, le profit. Acteurs du cercle vicieux et mortel à terme qu'ils ont promu, les hommes, en effet, violentent et essorent le milieu : ici, ils concassent le clapas (la pierraille) et vont chercher, dans un opportunisme sans scrupule, loin ou profond, une eau dont le manque, lié au changement climatique, fera sauter un jour l'enchaînement du cycle mer-ciel-terre et videra des aquifères fossiles... Que penser, par exemple, non loin de nous, et dans l'espace, de ces déserts qui firent de l'Arabie de Saoud un pays exportateur de blé ?!?! Incroyable non ? 

Revenons aux vignes de Fleury, dans la garrigue, les coteaux, la plaine, où celui qui ne met pas sa vigne sous perfusion n'est plus dans la course... Tant pis si, comme pour le pétrole ou l'atome, la question de l'eau reste encore pour ceux qui viendront après... "Après moi le déluge", et ailleurs la désertification du "je m'en lave les mains". Et que ceux qui n'ont que le fric et la dette en bouche soient bannis sur une île où ils pourraient s'entredévorer ! 

La campagne de Camplazens entourée de son vignoble.

Mais là, en voyant Camplazens campé dans son vignoble, bien sûr que nous sommes à des lieues de ces catastrophes annoncées et il s'agit de longer le plus discrètement possible, sans penser à ce goutte-à-goutte qui n'apporterait que de l'eau... Aïe, une voiture et ils sont trois à ausculter, à se consulter, dans une rangée... Plutôt aller à la rencontre que de prendre la poudre d'escampette tel un suspect potentiel. 

"Bonjour messieurs, vous préparez les vendanges ? 

~ Oh ce ne sera pas terrible cette année... " 

Ils sont aimables, souriants, pas sur la défensive, à l'image du domaine sans clôture, sans panneau d'exclusion. Je demande comment rejoindre la barre. Ils ne sauraient me dire sinon, vaguement, qu'il faut aller plus haut, toujours plus haut, vers le soleil du matin, sans préciser avec hauteur que je pénètre leur bien, une propriété privée... Justement, entre la garrigue et les souches, un large no man's land défriché mais qu'il serait peu productif de planter, monte vers une éminence. 

... toujours plus haut vers le soleil du matin...
 
Le radôme du Plan de Roques au loin.

Curiosité et espoir de la bonne surprise interfèrent : on voit la ligne de la barre, côté pente douce, sous un ciel plus aveuglant encore et, à droite, pour se situer, le radôme de l'armée au Plan de Roques. Plus bas, un chemin à gauche devrait permettre de contourner sans traverser les vignes, sans abuser de l'amabilité ambiante. Bonne idée avec un soleil qui, avec les heures, ne fait pas semblant : le long de ce chemin en transversale, des pins et une garrigue touffue en tempèrent l'ardeur. Au bout, hélas, caché dans les broussailles, les épines, un ravin à sec, de ces ruisseaux excessifs, rageurs seulement lors d'un orage ou épisode méditerranéen. Passer en force n'est pas envisageable : je n'ai plus ni l'âge, ni la motivation ni la tenue pour... même les sangliers se ménagent des pistes. L'obstacle oblige à presque un retour en boucle, par le bord des vignes qui plus est... Même hors de vue de la campagne, il n'est pas bon d'abuser du bon vouloir des possédants. 

Fleurs...

... et fréjal.

 En amont, peut-être à un kilomètre, pourtant, un accès marqué par un passage de roues. Un raidillon ponctué régulièrement par les abris de pierres ou de palettes des chasseurs de palombe lors des passes d'automne. On comprend mieux pour les roues, celles des "quaquatre" comme le dit Nadau, le troubadour des Pyrénées, en présentant "Saussat", sa chanson en occitan (voir "Chemin d'école", épisode 3). Dans les clapasses, les pierriers, quelques fleurs compensent, de leurs touches de couleur, la grise sévérité du fréjal.   

Et là haut, toujours plus haut, cette lumière puissante, tant sur le paysage que sur mon passé...

 


vendredi 17 décembre 2021

CHEMIN D'ÉCOLE (3) Qui a dit "La propriété c'est le vol" ?

 

Pour se situer, la départementale entre Fleury et St-Pierre en haut à droite, le plan de Roque, hauteur stratégique d'où opère un radar de l'armée, en bas à gauche. Merci l'IGN !

A un moment donné, il faudra bien que ce grillage prenne une autre direction, avec la possibilité de contourner pour, cap au levant, trouver les ruines peut-être encore d'une bergerie d'antan, la Caune, accompagnée, qui sait, d'une grotte, au seuil de la barre de Saint-Pierre. De là haut, pour la première fois de ma vie, suite à cette aventure en terre inconnue, si loin dans mon imaginaire et pourtant si proche du chevelu fasciculé à peine exploré des racines familiales, il me sera enfin possible de voir la Pierre, les deux constructions, ruines, vestiges ou encore de quelque utilité, le point de chute de la migration descendue de l'Ariège, point tangible habité par des aïeux, vers la fin du XIXe siècle. 



 Foutu grillage, barrage à 90 degrés de la direction à prendre, qui, tel une paradière, mène obligatoirement au piège, à l'une des pantanes du trabacou à poissons de l'étang (nous étions avec les pêcheurs de l'Ayrolle en novembre).... Le chemin, bien carrossable malgré quelques flaques à sangliers dans une paire de cuvettes argileuses, et quelques affleurements de fréjal (1), semble régulièrement utilisé ; il monte encore en même temps que la question d'une première fois, entre curiosité et souci : quoi donc en haut ? la vue sur la mer ? Des terres interdites et le délit d'entrée sur la propriété d'autrui ? Ne pouvant suivre le chemin d'école de papé Jean et du cousin Étienne que j'ai connu aussi, je me console en pensant le rejoindre en haut de la barre, au-dessus d'un piémont fertile avec, plus loin, la mer pour un point de vue unique. 

Camplazens.

Et bien, en haut, pas tout encore mais une campagne dans son écrin de vignes : ce ne peut être que Camplazens. Ici aussi ils ont concassé la garrigue pour planter toujours plus (2) mais pas de grillage, pas de panneau agressif ou d'une pédagogie cauteleuse. Il n'empêche, le promeneur, même correct et respectueux des gens et de la nature (ce n'est malheureusement pas le cas de tous (3)), gênant par bien des aspects, doit se faire discret par rapport aux propriétaires... et aux chasseurs qui louent, qui paient... Raison de plus pour qu'on sache de quels chemins, de quels espaces, la collectivité qui elle aussi paie ses impôts, peut profiter !  

(1) Dans le trésor du Félibrige, lou fréjalié est le tailleur de pierre dure... Il me semble que le nom donné à Fleury, à ce calcaire dur et gris est "fréjal"...  

(2) Le Languedoc terre de grande production vinicole, a su prendre le virage à 180 degrés pour une indiscutable qualité : le prix toujours plus élevé des bouteilles en atteste. Une bonne partie des domaines a été acquise par de gros investisseurs de tous horizons : les campagnes de jadis sont devenues "châteaux", il en est ainsi des domaines cités dans cette chronique (Tarailhan, les Bugadelles, Camplazens, Vires, les Karantes) et si quelques uns, à l'extérieur ou au village ont su négocier ce tournant, les étrangers sont nombreux (Etasuniens, Anglais, Suisses... à quand les Chinois ?)... et la tramontane de leur stratégie intéressée qui n'a jamais existé dans la Clape n'arrête pas de souffler sur leurs pages web... 

(3) "... Il y a des glaciers, des rochers, la pelouse les sapins, les hêtres, les bouleaux, les papiers gras et des bouteilles de bière, ce qui aurait tendance à démontrer que les cons ne supportent pas l'altitude..." Nadau qui raconte les Pyrénées avant de chanter Saussat (en occitan traduit en français): 

https://www.youtube.com/watch?v=J1k04LGD--g


mardi 14 décembre 2021

CHEMIN D'ÉCOLE (2) Nantis, manants, chasse et culture...

"... La vieille classe de mon père,
Pleine de guêpes écrasées,
Sentait l'encre, le bois, la craie
Et ces merveilleuses poussières
Amassées par tout un été..." "Automne", René-Guy Cadou (1920 - 1951). 

A gauche de la mairie de Fleury, l'école des garçons.


La vieille école, fille du progrès, du temps où les filles n'avaient pas encore droit à l'enseignement laïque et où la "salle d'asile" n'était pas encore une maternelle. La vieille école si nouvelle, que la commune l'inaugura vers 1880, sur le site du vieux cimetière où longtemps remontèrent les petites perles de verre des couronnes mortuaires. La vieille école fréquentée par le grand-père Jean et son cousin Étienne au milieu des années 1900 (Jean est né en 1897). Puis vint le tour de mon père, vers 1930... l'avait-on agrandie alors ? Par la montée d'un étage ? C'est celle que je connus, de 1956 à 1960... Puis mes fils au début des années 80. Certains de mes condisciples arrivaient des campagnes, le cartable à la main et dans l'autre, une manne d'osier rectangulaire d'un volume gênant pour des bras encore courts. Des vendanges au 14 juillet, ils portaient la saquette, le repas emporté. 

Ils ne doivent pas être aussi encombrés mais ils sont chargés, Étienne et Jean, à pied. Suivent-ils le bord de la garrigue ou le cours, le fossé pratiquement toujours à sec du ruisseau lié à l'ancien étang fermé de Fleury ? Nous les accompagnons sur le retour, au moment de traverser la Clape, pour continuer le trajet, poursuivre le voyage intime dans ce qu'il y a à passer de son lignage vers sa postérité.   


 

Deux choses : d'abord la surprise de ce joli chêne, ensuite, celle, cachée aux grands flux, d'un calvaire suite à un un décès, sur le chemin même : un homme jeune (24 ans), le 16 avril 1868... à trois heures du matin...  http://chroniquesdeperignan.free.fr/Calvaires/croix_de_molveau.html 

Le vélo cadenassé et caché dans les fourrés, il faut continuer à pied le long d'une propriété grillagée, celle avec cette bâtisse aux airs de manoir empâté, qu'on voit de trop loin, une insulte de parvenu aux humbles bergeries qui se fondaient jadis dans le paysage. Ce n'est pas bien aimable de ma part, c'est à cause du grillage et, en prime, à ce panneau, derrière, voulant impressionner, et qui voudrait dissuader de passer... 


Voyez-vous un chemin derrière le grillage ? Ou alors est-ce pour celui d'où la photo a été prise et dont l'accès n'est pas interdit ? Cela n'est pas sans rappeler des on-dit, vieux d'une vingtaine d'années, à propos de chemins échangés ou cédés entre la mairie et les privés... Médisances de la part des pedzouilles du coin sûrement... Personnellement, j'ai un service à demander à la municipalité, l'opacité ne faisant pas bon ménage avec le vivre ensemble, à savoir qu'elle fasse connaître, même sans trop inciter, les chemins libres d'accès...En attendant, pour la forme, serait-ce protéger de planter un ou deux bons clous dans un pauvre arbre, d'autant plus quand on a les moyens d'une vidéosurveillance ? C'est à prendre bien sûr de la part du pedzouille, du natif buté et borné que je suis... 

Quelle idée aussi de vivre assez vieux pour avoir connu le coin un demi-siècle en arrière ! Il est vrai, une époque classique, avec ses riches se démarquant toujours des autres, pour le dire sans aborder de front les libertés, égalités et autres fraternités trop bien claironnées, du temps où les grands propriétaires prenaient un soin jaloux de leurs landes et garrigues. Pour le gibier, pour s'adonner au plaisir de la chasse, ils invitaient, souvent des édiles, non sans arrière-pensées. Afin d'assurer un bon tableau final, ils payaient un garde à temps plein, compétent pour aider la nature, limiter les nuisibles qu'ils soient animaux ou braconniers... Au Courtal-Naout, la bergerie d'en haut et non une insignifiante "cour" comme le prétend le site du manoir empâté, le garde d'alors, autodidacte et toujours en quête de partage humaniste, m'avait invité pour une visite... jusqu'à m'indiquer un champ certainement destiné à nourrir la sauvagine mais où, dans les chardons, poussaient les couderles (du nom occitan désignant, sauf erreur, le pleurote du panicaut). En montant vers la Barre de Saint-Pierre, il m'avait signalé, non sans évoquer Socrate et les condamnés à mort, des pieds de grande cigüe aux alcaloïdes mortels. Certains auront reconnu Pierre Bilbe, dont le souvenir vient souvent à ma rencontre, ici, sur les chemins de mon grand-père Jean.   

dimanche 12 décembre 2021

CHEMIN D'ÉCOLE (1)

 
Depuis la Clape qui se hausse du col, prétentieuse de retenir un peu le soleil, un jour nouveau caresse les toits du village. Les volets s'ouvrent sur une irrépressible envie d'aller vers lui comme un appel vers sa naissance, son monde, la mer là-bas, comme pour tendre vers l'horizon toujours recommencé, l'Est de l'origine de nos cultures, de nos lendemains... Qui sait ? Au moins, savoir, avec ce chemin d'école, où cet appel du large vers son étroit passé va mener. Cap sur son destin, exploration sans limites de son voyage intérieur, en mode doux, à bicyclette, à pied et dans la tête, sans ce bruit de moteur qui dit trop que nous ne l'utilisons pas raisonnablement.
 
La petite vigne de Pouillet, replantée depuis. Derrière, les champs de l'ancien étang. 

Au premier carrefour, on sait mieux. Vicinal, le chemin domine les champs de l'ex-étang asséché, mais pas pour évoquer une préhistoire sur pilotis. Pouillet : un tènement, quelques pieds de vigne, qu'il hérita, par son mariage, d'une belle-mère veuve jeune, toute de courage, de vaillance... Pour la pause de "midi"sur la braise de sarments, il commençait toujours par quelques escargots poivre et sel, sacrifiés sur le gril des vendanges mais si bons, dit-on, pour la santé. 
 
Un contournement du domaine de Tarailhan autorisé j'espère... 
 
Plus loin, Tarailhan, le château, la campagne, pour dire "domaine", plutôt tourné vers Fleury mais déjà sur le territoire voisin de Vinassan... Passait-il par là, plus loin dans le temps, pour aller à l'école ? 
 

 
 
Le Courtal Crémat.

Après quelques coups de pédale sur la route de Saint-Pierre, le Courtal Crémat, une bergerie ruinée, qui brûla un jour, d'où son nom, sûrement. Des genêts envahissent les devants ; des lierres mangent les murs écroulés ; des figuiers cachent les ouvertures et prennent l'espace des toits crevés. On dit qu'ils sont immortels... Entretiennent-ils le souvenir de ceux qui vivaient là ? En 1866, le berger et sa famille, six personnes au nom torturé par quelque scribouillard inconséquent à l’État -Civil (SIgala ou SEgala ? (2) Peut-être une question de sérieux et de respect de la part de l'autorité administrative à l'encontre des couches les plus modestes de la population ?  
 
A l'arrière-plan, la garrigue pelée alors que depuis, les pins ont poussé partout

Sur la bordure amont de la cuvette asséchée peut-être antérieurement à la présence romaine (700 av. JC ?) (3), sa vigne du Courtal Crémat. Une terre de pico-talènt disait-il, littéralement "qui excite l'appétit" donc qui ne nourrit pas assez... "Es de sablou", c'est du sable, d'ailleurs ils plantèrent des griffes d'asperges, un temps. Sur une photo, il s'occupe du chariot de comportes, dangereusement stationné sur la route, dirions-nous aujourd'hui...
 
Son chemin d'école rejoignait-il ici la départementale ? Ou passaient-ils, avec le cousin Étienne, en suivant le lit du ruisseau appelé à devenir "du Bouquet", ultime affluent de l'Aude, par le château de Tarailhan ? Jamais il n'en parla. Moi, au contraire, parce qu'il est lié à bien des lieux et recoins de la commune, sa maison, sa cave, ses vignes pour le travail, la garrigue pour la chasse et sa naissance, la mer pour la parenthèse estivale de quelques dimanches, je ne parle ici que de lui... "IL", lui qui se grillait deux ou trois escargots en guise d'apéritif, lui qui disait de ses ceps qu'ils poussaient dans une terre de pico-talènt, lui qui, enfant, par tous les temps suivait son chemin d'école, "IL" mon grand-père Jean Dedieu, mon grand-père d'ici...
 
(1) locution copiée suite au titre d'une jolie série télé.
(2) Source : Les Chroniques Pérignanaises

vendredi 12 novembre 2021

La FÊTE du VILLAGE, la SAINT-MARTIN à FLEURY.

 Il y a bien longtemps...

"La foire. 

La fête du village est le jour de son saint patron, Martin, évêque de Tours.

A l’époque, notre fête, souvent accompagnée des températures clémentes de « l’été de la saint Martin », « l’estivet de san Marti », durait plusieurs jours, selon la place du 11 novembre dans la semaine. Les baraques des forains et les manèges s’installaient tout au long de la rue devant la mairie. Les manèges se dressaient sur la place du village : le « Colimaçon » ou chenille devant le café Gazel devenu café Combes, puis Rochut et enfin Calavéra avant d’être transformé en marché couvert et perception. Les « casseroles » certaines années (avant une certaine interdiction après de graves accidents), le « Mur de la mort » et ses motos près de l’église, et, avant cela, le manège Carboneau des chevaux de bois, actionné encore par un fort cheval. 

Sujet de manège - Moto Fonlupt wikimedia Commons Auteur Dinkum

 Seul, le manège des autos tamponneuses (à l’époque avec des roues importantes, à rayons), se dressait tout au loin, sur la place du ramonétage beaucoup moins étendue qu’à l’heure actuelle.

Les « petits forains » se faisaient une place auprès des loteries traditionnelles : billard japonais, stands de tir, tir aux pigeons vivants… Il y avait là le marchand de « gisclets », tubes remplis d’eau pour arroser gentiment les filles et qui pouvaient resservir (on ne payait alors que la recharge).  

Et naturellement la roulette (limitée à vingt numéros et à quatre zéros [A, B, C, D] au lieu d’un seul pour augmenter les gains du tenancier) avait aussi droit de cité..." 

François Dedieu / Caboujolette / 2008.