Jean, mon grand-père paternel, le vigneron, est né le 4 juin 1897 à la métairie de La Pierre, domaine des Karantes, commune de Narbonne, en pleine Clape. Comme les enfants des châteaux de Tarailhan et Marmorières, administrativement comptés sur le territoire de Vinassan, ceux des Karantes allaient à l'école à Fleury, la seule alors accessible (entre 1903 et 1910). Nous nous devons aussi d'évoquer les enfants dits "des campagnes", des domaines nombreux alors (autour de 20 sur le territoire de la commune !). Ceux des Cabanes, plus loin dans le temps, astreints à plus de dix-sept kilomètres journaliers, ont disposé d'un local provisoire vers 1885, avant que le comte de Villeneuve, propriétaire de Saint-Louis-de-la-Mer n'offre le terrain, vers 1910, en vue d'une construction définitive (1), devaient quitter la classe une heure avant les autres pour ne pas être rattrapés par la nuit.
"... Je n'ai toujours pas vu La Pierre, ce refuge lové dans une combe en pleine garrigue, un milieu complètement étrange, sûrement, pour mes aïeux, réfugiés économiques descendus des forêts et monts de l'Arize, dans l'Ariège, passant d'un coup du frais au sec, du froid au chaud, des prairies aux garrigues, des papillons bleus aux cigales brunes, des sapins et myrtilles aux pins et asperges sauvages. Nous ne verrons donc pas encore le débouché de ce chemin d'école qu'il serait peut-être judicieux et moins difficile de retrouver par l'autre côté, en partant de la côte, dos à la mer..."
C'est ce que je pensais et écrivais lors du dernier épisode sauf que ces choses-là comptent trop : latentes, elles sommeillent prêtes à se rappeler à vous au moment opportun, même si, par rapport au présent, on fait comme si ce n'était qu'anodin, futile, seulement par curiosité.
Et un jour, avec l'idée d'aller aux Exals, juste une balade, manière de brûler quelques calories, la petite voix insiste "Ce n'est pas loin dans les terres... et si tu essayais d'aller voir où es né ton grand-père ?"
Vue vers le Nord-Est avec les constructions des hauts de Saint-Pierre. |
Les Exals, ces yeux-de-mer, exsurgences karstiques, sources de la famille des caudiès, suivant l'appellation locale, ces "chaudiers" où l'eau sourd (2 a, b, c) tempérée en toute saison, mais ici comparables à des étangs reliés à la mer, appréciés des pêcheurs pour les migrations de poissons, et tout autour par des mémères, souvent par paires, qui amènent toutou faire la crotte.
Vue vers l'ouest avec un couvert forestier de pins d'Alep. |
Les chemins enserrent un mamelon où les pins serrés, trop nombreux, ne grandiront pas. A contourner par la droite, la carte à l'esprit, pour cheminer, cap à l'ouest, vers cette combe, ce piémont favorable à la vigne où des humains aussi s'acharnèrent à ancrer leurs racines.
Vue vers l'Est. |
Vue vers l'Est. |
(1) de quand date l'école occupée aujourd'hui en tant que capitainerie, il me semble ?
(2 c) Qu'en est-il de l'aquifère sous la Clape ? Hier, un reportage racontait que le Cap, ville capitale de l'Afrique-du-Sud, manquait d'eau. Aussi la municipalité envoie-t-elle des équipes couper des arbres, des pins d'Alep acclimatés jadis pour fournir du bois. L'employé à la tronçonneuse (beaucoup n'ont que des scies manuelles) parlait de 200 litres/jour économisés, la scientifique de service de 80 litres pour un arbre de 15 cm de diamètre dont la racine pivotante volerait en profondeur l'eau de l'espèce humaine... Ainsi, sur la Montagne de la Table, tout au bout de l'Afrique Australe, le pin d'Alep pourtant plus clairsemé que dans la Montagne de la Clape, est à éradiquer... Et si ces racines retenaient la terre ?
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