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samedi 6 avril 2024

QUAND TOUT S’ÉCROULE À L’AQUEDUC ! (7ème partie) Dimanche de Pâques 31 mars 2024.

Avec l’accord plausible (1), pour Tarailhan, des frères Raymbaudi, marchands à Narbonne et G. Pagesi, pareur dans cette même ville (rue de la Parerie, non ?) et celui des frères de Malves, seigneurs de Marmorières, Amalric Ier, baron de Pérignan (2) depuis 1281, s’est vite chargé (peut-être a-t-il été autorisé par sa hiérarchie) d’assécher l’étang de Tarailhan. 

© François Dedieu / diapositive / 1967. L'Étang de Fleury vu depuis la colline de Montredon (moulin). C'est la partie que se réservait, à l'origine, Amalric Ier, seigneur de Pérignan; On remarque que le cyprès sur le route de St-Pierre, n'est plus, que les pins de la garrigue à gauche ainsi que ceux du Pech Azam à droite, sont moins envahissants qu'aujourd'hui...  

Dès cette date, pour sa possession correspondant au Nord, aux 2/3 de la surface, il passe deux contrats d’emphytéose “ centum quadraginta sestariatas de terra que nunc jacet sub aqua ”, pour cent quarante séterées de terre se trouvant alors (nunc ?) sous l’eau. Si le drainage est en rayons avec évacuation au centre comme à Montady, en éventail (comme à Canohès, Pézenas), à Pérignan il peut se comparer à un réseau foliaire (3) dont les veines donnent dans la nervure médiane principale qui poursuit le ruisseau du Cascabel traité de Cave Maîtresse. Nous retrouvons cette qualification dans le fossé mère, ruisseau de la Mairale (4), la nervure médiane principale donnant sur l’évacuation souterraine. Au moins un pont de pierre atteste d’une certaine largeur pour ce fossé. Une fois asséché, un arpenteur entreprend le bornage des nouvelles parcelles (5), en principe en suivant les fossés auxiliaires. L’entretien, les curages des fossés, le contrôle de l’état de l’aqueduc souterrain sont aussi arrêtés légalement.

En 1286, cinq ans plus tard, suite au décès du premier signataire un nouveau bail est signé “ portem stagni nunc dessicati et agotatum ” la porte de l’étang désormais (nunc ?) vidée et asséchée.

En 1321, Aymeric Ier, fils d’Amalric Ier, concède, en lots, aux Pérignanais, la part en réserve de son père (qu’il faisait travailler à son profit). Un document de 1514 fait état d’un plan avec 58 lots attribués par tirage au sort à treize intéressés.  

De la confrontation entre la future bastide de Tarailhan et le seigneur de Pérignan datent les premiers conflits ; dès 1286. les imprécisions, le statut des terres, des tenanciers, les inondations vont nourrir nombre de procès.

Début XVIIème (1610-1620, peut-être sous Charles ou Hercule de Thézan-St-Géniez alors baron) un long procès oppose Tarailhan et les tenanciers de Pérignan au seigneur : les premiers cités ne veulent plus payer de redevances sur les 140 séterées de 1281 ; ils font état de déguerpissements datant de 1377, attendu que suite à ces expulsions d’occupants illégaux qui auraient occupé des parcelles, peut-être suite à des inondations, les terres délaissées n’ont pas été concédées, les tenanciers s’estiment libres de ne plus payer ( en font-ils autant que les occupants illégaux jadis expulsés ? il est vrai que les seigneuries n’ayant plus réclamé les redevances que par intermittence, les différents tenanciers arguent que les parcelles ne seraient plus soumises au privilège de noblesse)... Le parlement de Toulouse tranchera en faveur du seigneur, un nouveau partage de l’étang se fera en 1616 (34 parcelles pour les tenanciers pérignanais).

S’il n’y a aucune preuve du drainage de l’étang durant l’Antiquité, il n’empêche que l’histoire de notre dépression aux 2/3 communale demeure des plus intéressantes. Plus de sept siècles nous séparent de l’aqueduc souterrain... quelques années entre mes assertions néanmoins plutôt formulées au conditionnel (je m’avance, affirmant cela) et le propos actuel. Bref j’ai été long à la détente, l’article du Midi-Libre de 2012 aurait dû m’alerter. Il informait que la municipalité confiait la gestion de l’aqueduc et des fossés en amont au Syndicat Mixte du Delta de l’Aude, cet entretien ne pouvant plus être assuré par l’association des propriétaires riverains (cela n’est pas sans rappeler les anciens usages...). 

Carrefour des Quatre Chemins. Sous terre, l'aqueduc vient de la droite pour, suite à un angle droit, s'engager vers le village par le chemin des Arbres blancs (en face sur la photo). 

À cette occasion, un hydrogéologue, un ingénieur (et un troisième “ larron ”) ont alors parcouru le souterrain. Contrairement à ce qui peut se dire, ils n’ont pas mentionné de ramification pour un second conduit vers le village... À partir d’où ? qui devrait remonter à contre-pente ? Avec une marteilhière à la jonction pour fermer en cas de fort débit ? ne serait-ce pas plutôt à propos du souterrain du château ? Avec la gravure sur un mur de notre église, toutes les quêtes ne peuvent que nous faire avancer...       

(1) L’étang est alors sous deux juridictions : la seigneurie de Pérignan au Nord, celle alors de Narbonne au Sud, pour Tarailhan et Marmorières (aujourd’hui Vinassan).   

(2) Fils d’Amalric Ier, vicomte (un degré de noblesse au-dessus de baron) de Narbonne, qui aurait servi en Terre Sainte (huitième croisade ?) Source Le canton de Coursan, Opération vilatges al Pais, 2005.  

L'étang asséché depuis le Pech Azam ; en bas, l'enceinte de l'ancien terrain de rugby. 

(3) La comparaison avec une feuille peut se continuer avec le pourtour de cette feuille, appelé alors “ le Cercle ”. Avec la majuscule, c’est toujours un nom de tènement au Nord-Ouest de l’Étang de Fleury « ...cette vigne nous donna des pois et des pois chiches entre 1940 et 1944. Elle jouxtait la vigne de Germain Rey où fleurirent plus tard des rangées de poiriers... » Caboujolette, Pges de vie à Fleury II, François Dedieu 2008.  

L'Étang depuis le Pech Azam. Les parcelles géométriquement régulières jusqu'au ruisseau mairal. 

(4) Mairal (en occitan, le “ i ” se prononce tel un “ y ”), de la même racine que “ maternel ”, “ principal” s’agissant d’un cours d’eau (nombreux de ce no dont un à Narbonne).

(5) Les parcelles sont-elles évaluées en “ cesti ” et non en arpents ? Gravé sur un mur de l’église Saint-Martin, figure la valeur du “ cestus ”, division de mesure de superficie à usage local. Sur quel mur cette gravure ? On attend les investigations des passionnés du Da Vinci Code !

dimanche 21 mai 2023

La BULLE de Fleury enfin dégonflée...

Les éléments de réflexion reposent sur le site " Argus des Communes " (chiffres de 2021). Sont pris en compte les villages voisins ainsi que les stations balnéaires du Golfe du Lion, du Grau-du-Roi à Cerbère (sauf Sète, Le Barcarès, St-Cyprien par manque de données). 

Il faut tourner bien des pages d'archives (2014) pour avoir un comparatif de la santé de notre commune particulièrement mise à mal par une mégalomanie propagandiste des socialistes au pouvoir voulant faire communiquer le président Mitterand sous l'eau de l'observatoire sous-marin avec je crois, Jean-Loup Chrétien alors dans l'espace à l'origine (à lier peut-être au duplex réalisé  le 14 décembre 1988 avec le Club Dorothée...). Sinon n'étaient prévus que les vœux du président pour la nouvelle année. Enfin, pour le dire crûment, un entêtement aussi borné que catastrophique des courtisans décideurs vu que le premier couillon venu du coin savait qu'il y avait une arrivée d'eau douce, ex ou résurgence sur le site, rendant le projet impossible pour cause de turbidité de l'eau. 

Moralité : un groupe politique sans opposition audible a tendance à se faire plus gros que le bœuf. À toujours promouvoir l'image du chef, il donne dans le culte de la personnalité. Pour Fleury-d'Aude changeant, et pour cause, de majorité, il a fallu non seulement assumer les pertes mais en plus se défendre de cette élite rose à la tête du département qui bien que coupable au premier chef, nous aurait enfoncés davantage... une version locale du "responsable mais pas coupable"...  

Bref un pouf de 9 millions d'euros dont la moitié pour le contribuable local... plus les intérêts... plus le million pour démolir... peut-être deux à trois mille euros par habitant, qui sait ? (peut-on compter 3000 habitants en moyenne de 1989 à 2019 ?).   

Tous les tableaux  vus en 2014 (chiffres de 2012 ?) restaient accablants pour Fleury et le premier des réconforts, concernant de cette tendance 2021, est de constater que la situation s'est bien assainie grâce aux équipes successives de Guy Sié et André-Luc Montagnier ; le "pour vivre heureux vivons cachés", s'il veut parer un tant soit peu la déferlante touristique, n'est plus aussi catégorique. 

Tour_Balayard_Fleury_d'Aude the Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International Auteur Lefoo


DÉPENSES. La quine de tête des moins dépensiers : Fleury-d'Aude, Le-Grau-du-Roi 1ers,  Leucate 3e, Agde 4e, Valras, Villeneuve-lès-Maguelone 5es. 
Les cinq derniers : Armissan 30e, La Palme, 31e, Sérignan 32e, Cerbère 33e, Palavas-les-Flots 34e. 

Ville-architecturale-de-la-Grande-Motte  the Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported, 2.5 Generic, 2.0 Generic and 1.0 Generic Author Jjoulie


SANTÉ FINANCIÈRE. La tête : La-Gde-Motte 1er, Mauguio 2e, Collioure 3e, Port-Vendres 4e, Argelès-s-Mer 5e. 
La queue : 34 e ex aequo Fleury, Coursan, Lespignan, Vendres, Marseillan, Villeneuve-lès-Maguelone. 

Lespignan the Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International Auteur JYB Devot

COMMUNES en IMPÔTS PERÇUS. Les moins chères : Lespignan 1er, Torreilles 2e, Vinassan 3e, Nissan-lez-Ensérune 4e, 
Les plus chères : Le-Grau-du-Roi 30e, Argelès-sur-Mer 31e, Agde 32e, La-Gde-Motte 33e, Palavas-les-Flots 34e. 
NOTE : à Gruissan, Port-la-Nouvelle, Leucate et Narbonne, les impôts sont plus élevés qu'à Fleury. 

Aude_-_Eglise_Saint-Martin_de_Vinassan the Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International Author EmDee



FRAIS de FONCTIONNEMENT : les plus économes : Vinassan 1er, Lespignan 2e, Armissan 3e, Salles-d'Aude 4e, Portiragnes 5e. 
Les plus dispendieuses : Mauguio 30e, Sérignan 31e, Port-la-Nouvelle 32e, Frontignan 33e, Palavs-les-Flots 34e. 

FRAIS de PERSONNEL (déterminants dans le fonctionnement) : les plus économes : Lespignan 1er, Le-Grau-du-Roi 2e, Vinassan 3e, Armissan 4e, Salles-d'Aude 5e. 
Les plus dispendieuses :  Mauguio 30e, Sérignan 31e, Frontignan 32e, Port-la-Nouvelle 33e, Palavas-les-Flots 34e. 

COMMUNES qui INVESTISSENT (ce qui peut expliquer les dépenses) : les plus actives : Lespignan 1er, Agde 2e, Valras 3e, Vendres 4e, Port-la-Nouvelle 5e. 
les plus inactives : Vinassan 30e, Salles-d'Aude 31e, Ste-Marie 32e, Armissan 33e, Cerbère 34e. 

ENDETTEMENT. Les moins endettées : Cuxac-d'Aude 1er, Gruissan 2e, Port-Vendres 3e, Vinassan 4e, Armissan 5e. 
Les plus endettées : Lespignan 30e, Agde 31e, Marseillan 32e, Vendres 33e, Vias 34e.
 
Église_Cuxac_d'Aude the Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International Auteur Meria Geoian

NOTE : si 15 communes (Sérignan, Narbonne, Portiragnes, Cerbère, Le-Grau-du-Roi, Nissan, Port-la-Nouvelle, Valras, Palavas) sont plus endettés par habitant, 18 le sont moins que Fleury. 

REMBOURSEMENT de la DETTE. Les moins impactées : Cuxac-d'Aude 1er, Salles-d'Aude 2e, Port-Vendres 3e, Armissan 4e, La Palme 5e. 
Les plus impactées : Villeneuve-lès-Maguelone 30e, Palavas 31e, Port-la-Nouvelle 32e, Leucate 33e, Agde 34e. 

NOTE si 9 communes ont à rembourser davantage, 24 ont moins à rembourser que Fleury (voir l'intitulé "Santé financière").    
 

 

 

  

   

lundi 20 février 2023

APRÈS LES CABINETS, LE PEÏRAL DE JACQUES / Fleury-d'Aude en Languedoc

 Nous en parlions avec l’exploration de l’aven. S’il fait beau, c’est un lieu de balade agréable, à dix minutes, un quart-d’heure, tout au plus, après les cabinets municipaux qui marquent la fin du village. 

De quand datent ces commodités et lieux d’aisances ? D’après le livre sur le canton de Coursan (Vilatges al pais / 2005) l’éclairage électrique est de 1902 (80 lampes de seize bougies qui succèdent aux 32 réverbères à pétrole de 1880) ; en 1908, le conseil municipal a délibéré pour une bicyclette à l’usage des gardes municipaux et de l’appariteur (il est précisé qu’elle servira à la poursuite d’un éventuel malfaiteur...). Que lire encore : un moulin à huile (1885), l’adduction d’eau potable en 1912, l’effort toujours croissant pour instruire garçons et filles (1880 les écoles, 1909, la maternelle dans l’ancienne école des sœurs, 1939 on ajoute un étage aux écoles [« De Pérignan à Fleury », le livre des Chroniques Pérignanaises est riche de détails à ce sujet). 

Carte des cabinets municipaux à Fleury-d'Aude figurés sur la carte de la France 1950 de Géoportail. 
 
Qui pouvait penser, encore en 1979, qu'il y aurait des places de parking (piscine) à la place des cabinets, un grand carrefour à portée, le tilleul de la Liberté, toutes ces maisons qui ont remplacé les vignes. même pour ces dernières, la forme des ceps en gobelet, sans fils et piquets de fer est devenue rare... L'amandier n'a pas encore fleuri mais nous ne sommes que début janvier...  Diapositive François Dedieu.  

Mais rien sur ces commodités si importantes pour ne pas jeter où on peut le pissadou avec son complément solide, les maisons du vieux village, sans cours ni jardins ne disposant pas de cabinets particuliers. Je crois me souvenir que les cabinets municipaux sont au nombre de quatre (à l’Est sur le chemin vers la garrigue, au Sud-Est vers la garrigue aussi et pour rejoindre la route de St-Pierre après le tènement de Baureno, au Nord-Ouest, en bas de la rue du lavoir, au Nord au Puits-Sûr... Sur les photos aériennes des années 50-65 disponibles sur le site aussi national que public et admirable de Geoportail, à condition se savoir ce qu’on cherche, aux sorties du village, on trouve les édicules Est, vers la garrigue, on devine celui de la rue du lavoir... celui du Puits-Sûr, par contre, est difficile à distinguer. Bâties sur une cuve septique dépassant du sol disons jusqu’à 1 m 50, chacune de ces constructions regroupe deux cabinets séparés par la cabine de vidage des seaux, dotée d’un robinet d’eau. Sur le toit maçonné en pente, un conduit assez haut doit évacuer les odeurs dérangeantes.         

Après s’être bouché le nez, car pour le reste, à moins que ce soit pressant... Et puis les locaux préfèrent fumer naturellement les vignes... Passez donc le chemin des Cayrols, en principe, des « hauteurs rocheuses », mais je n’en connais qu’une dans ce coin, celle du peïral, de la carrière de Jacques... Alors ce pluriel m'échappe. Avec le cabinet, à une certaine heure, c’est aussi la limite entre la zone éclairée et l’obscurité de la nuit, à suivre dans le prochain épisode " Aventure au peïral de Jacques ". 


lundi 19 décembre 2022

ROSAS...

 Il est vrai qu'à la fin des années 60, nous devons être peu nombreux à penser que prononcer " ROSES " serait respecter l'identité catalane de la province espagnole à nos portes, de même nous disons "Figueras" pour le chef-lieu de la comarque de l'Alt Empordà, la ville où poussent les figuiers... c'est comme parler d'aller " en Espagne " et non en Catalogne... Il faut peut-être y voir, pour un pays centralisé qui dit "Roussillon" et non "Catalogne Nord", la négation du particularisme, la hantise de la sécession... une pensée à relativiser puisque dans l'autre sens ils doivent dire qu'ils viennent en France. 

Alors allons faire un tour en Espagne, quelques heures, avant tout pour des achats moins onéreux de l'autre côté de la frontière, sinon, en touristes, pour la journée. Ce que nous sommes loin d'évaluer est que dans ces années 60, le tourisme à plus grande échelle (séjours, investissements immobiliers) représente la moitié des entrées de devises ainsi que l'acceptation implicite de la dictature, Franco laissant entendre qu'une forte présence étrangère conforte le bien-fondé de sa gouvernance. 
Au village, le Club des Jeunes, parfois grâce au Foyer Léo Lagrange de Coursan, organise des sorties à Rosas, à Figueras. Que des garçons dans le car il me semble... Les filles seraient-elles encore très " encadrées " à la maison ? Les pays de l'Europe du Sud, méditerranéens, restent corsetés dans des valeurs traditionnalistes, machistes, que la religion conforte. Ce carcan, le tourisme de masse va le mettre à mal. Ainsi, sur la Costa Brava, pour un jeune homme, il est dit que vivre avant le tourisme, c'est une seule fiancée, rentrer avant dix heures le soir, intégrer pour plus tard que le divorce et l'adultère sont montrés de doigt... Avec le tourisme, la fiancée en hiver, celles, passagères, de l'été, la fête jusqu'au petit matin, la vie privée moins livrée au qu'en-dira-t-on...   
Roses_Fischerhafen  licence Creative Commons Attribution 3.0 (non transposée) Auteur Gordito 1869

Rosas, à l'origine un port de pêche, une jolie station balnéaire de plus en plus fréquentée. Au fil des années, aux locations va s'ajouter, à titre collectif ou individuel, la construction d'appartements ou de résidences secondaires. Chez nous, c'est la raison pour laquelle la politique essaie de retenir les estivants avant la frontière grâce au développement, suivant le plan Racine, des stations du Languedoc-Roussillon. 
Nous concernant, la journée à Rosas, en avril ou mai, c'est pour l'exotisme des palmiers, des filles locales auprès desquelles on se fait photographier. Aussi un repas dépaysant avec tapas ou la paella au restaurant, manière d'imiter les embourgeoisés du village, d'un certain âge, qui partent, parfois loin, pour une bonne table. On se groupe par affinité, on court les menus fichés à l'extérieur des établissements, on se croise, on échange de bons tuyaux. Ensuite ce sont les achats, cartes postales, cigarettes et cigarillos, allumettes de cire, menus objets d'orfèvreries usinées, castagnettes ou éventail à offrir... La promenade en bord de mer, le retour des chalutiers, des barques catalanes et après les cagettes de poissons pour la criée, c'est le retour. Fin de la sortie. 

Roses_Palmenpromenade  licence Creative Commons Attribution 3.0 (non transposée). Auteur Gordito 1869

Sources : en plus de sites divers dont wikimedia, le tourisme des années 60 à destination de l'Espagne : le cas des Français [article] Esther Sanchez, Histoire économie et société, année 2002, pages 413-430


mardi 8 novembre 2022

PERDU LE NORD ou carrément à l'OUEST ? (2)

PETITE EXPLICATION DE CARTE 


De quand date la norme de regarder l'Aquillon en haut d'une carte quand certains faisaient le contraire ? Ce qui n'empêche rien ; c'est rare non de ne pas être latéralisé ? Tout ça pour vous parler de François de la Blottière (1673-1739) pour sa "Carte de partie de Languedoc frontières de Roussillon qui conprend la coste de la mer depuis le fort de Salces jusquà la hauteur de Narbonne..." et dessinée en regardant le Midy (1722). 

Carte de partie de Languedoc, frontières de Reussillon qui comprend la coste de la Mer depuis le fort de Salces jusqu'à la hauteur de Narbenne, où se trouve le cours des rivières d'Aude, d'Orbieu, de la Berre et de la Gly, le cours de la Robine d'Aude et partie du Canal Reyal de communication de deux Mers | Gallica (bnf.fr)

* A remarquer que pour la carte qui a dû demander tant d'heures d'efforts, l'auteur n'a pas pris le soin élémentaire de partager l'espace disponible pour les lettres qui se resserrent pour "Languedo..." exposant "c" faute de mieux ! 

** Ce même cartouche indique les cours d'eau dont, à titre de curiosité, la Gly ainsi que la Robine d'Aude. 

*** D'après "l'eschelle", les distances peuvent s'évaluer en grande lieue de France de 3000 toises ou en lieue commune de France de 2500 toises. 

NOTE : l'orthographe des noms de lieux est celle de la carte sauf pour les prolongements et analyses. 




Concernant l'Aude, le dessin représente bien le cours tortueux du fleuve, exhaussé de par l'importance des sédiments transportés (deuxième en volume après le Rhône). Son tracé permet de comprendre pourquoi les limites du département sont ce qu'elles sont. 
Entre Sallèles et Coursan, au nord figure la Plaine de Coursan, réputée sous l'Ancien Régime, pour ses bons rendements en blé, avant que la vigne ne s'imposât. Entre Coursan et Narbonne, une chaussée et nombre de fossés de drainage laissent penser que c'est ce qui restait de l'étang salin où, un siècle avant Narbonne affermait pour des poissons ! 


L'ancien bras sud du delta, devenu aujourd'hui "Canal de la Robine", se nomme alors "Robine d'Aude". A Narbonne, elle délimite les quartiers de Cité au Nord et de Bourg au Sud. 
Après être passée entre l'Étang des Capitouls à l'Est et celui de Bages à l'Ouest, la Robine atteint la pointe de "L'Isle de Ste Luçie où elle se jette entre les Étangs de "Peiriac" (plus mentionné de nos jours) et celui de Sigean. Figure alors un chenal jusqu'au Port-de-La-Nouvelle, dit "Canal des Romains". 



A partir de Coursan, l'Aude n'en finit pas de divaguer jusqu'au pied de l'Esquino de Camel. C'est à cet endroit, au Pas-du-Loup, qu'en 1632, Anne d'Autriche a failli se noyer comme 200 de ses soldats ! (collines de Nissan). Passant à portée de l'Étang de Lespignan, le fleuve finit dans l'Étang de Vendre (aussi appelé " Étang de Fleury "). 

A portée de Coursan, en direction de Narbonne figure le château de Granselve (à l'origine une grange cistercienne, "... dont on dit que " Fontfroide est la fille" / Livre du Canton de Coursan, Francis Poudou) inclus aujourd'hui dans la localité (en face de la zone d'activité). 

Entre Coursan et Salles, les châteaux de Céleyran et du Pech de Céleyran, si remarquables depuis la route, n'existent pas. Seuls, figurent la métairie de Seudre sur le côteau ainsi que le moulin "du phare" au-dessus de la coopérative. Dans la plaine de Salles, on remarque nombre de fossés drainants. 


On trouve ces fossés à Pérignan aussi, mais dans une cuvette fermée du bord de La Clape : les drains de l'Étang de Fleury d'où part le ruisseau du Bouquet créé par les hommes ! Le ruisseau est dessiné de même que son cours souterrain qui, depuis l'étang, contourne bien la colline du moulin de Montredon (voir à ce sujet les articles sur le dernier affluent). 


Pour ce qui est des routes, si on reconnaît celles de Salles, de Saint-Pierre, de la partie vers les Cabanes mais qui s'en va suivre celle des campagnes au pied de La Clape (la localisation et le nom des fermes nous interrogent / à St-Pierre aussi, des noms nous laissent perplexes). En direction de Vinassan, ce n'est pas celle d'aujourd'hui, par le château de Marmorières, c'est le chemin qui passe par le phare des aviateurs, le Pech de la Pistole avant de redescendre vers St-Félix (autoroute A9 actuelle) en bas du Four à chaux et de Mader, le trajet pour Narbonne suivi par mon arrière-grand-mère, embêtée, une fois, par les loups !). Rien vers Lespignan, Béziers et l'Hérault sinon vers " N. D. de Lie  sans nul doute possible, Liesse dont la chapelle a malheureusement été vandalisée il y a peu. En 1622 les Dominicains de Liesse furent autorisés par Louis XIII de passage à Béziers, à établir un passage de l'Aude par barque (la construction du premier pont suspendu ne fu décidée qu'en 1800). 

En conclusion, considérons le respect du détail concernant le plan de notre localité : le château, la tour ronde de l'hôpital d'alors sont précisément situés. 

Finalement, même si cette concomitance de cartes m'a entraîné dans les tumultes du Palais Bourbon et des enfantillages détestables en période de crise, je préfère, et de loin, cette petite explication de carte au dégoût de la politique, en espérant aussi que de Salses à Carcassonne, en passant par les Corbières, cette publication Gallica de la BnF (2021) a de quoi attiser la curiosité de bien des amateurs de patrimoine.    
  

mardi 27 septembre 2022

VENDRES tour d'horizon...

Un dernier point sur le site officiel de la ville de Vendres, commune du littoral languedocien : suite aux onglets "Découvrir" "Le village", en illustration, une carte ancienne des plus intéressantes rappelle que le Canal du Midi aurait pu passer par l'Etang de Vendres avant de longer la côte vers Agde... sauf que cette carte indique un tracé autre que celui prévu initialement par les étangs au nord (Capestang, la Matte, de Vendres) puisque ce "Nouveau Canal" serait parti de la Robine, en amont de Narbonne pour passer, semble-t-il, par Coursan, Salles et Fleury (Pérignan sur la carte !). Ah ! si la proximité coléreuse de l'Aude n'avait pas menacé le trajet ! Ah ! si en prime Riquet, malgré le Malpas à passer et l'escalier d'écluses de Fonséranes à prévoir, n'avait pas tenu à conduire son canal par sa ville, Béziers !  Ah ! si le nez de Cléopâtre... 

(sans autorisation pour la publier, je vous renvoie au site ci-dessous) 
https://vendres.com/Decouvrir.php#HISTOIRE 

Fontaine Place de Vendres 2009 wikimedia commons Auteur Mairie de Vendres

Vendres, c'est une charmante promenade sous les platanes. Au bout, une fontaine, des gens qui viennent pour cette eau de source, et pour les nouvelles et ragots du village, presque comme dans "Jean de Florette", à l'époque des cruchons en terre, de ceux qui gardent bien la fraîcheur en été. Signe des temps procéduriers dus à de mauvais coucheurs, il y a longtemps que l'eau est dite "non potable"... 

Vendres, ce sont des exploits au rugby (champion 1968 Languedoc 5e série, 1969, France 3e série, 1973, 1975 France Honneur, 1978 France 3e Division)... 

Vendres, c'est "l'Alexandra", une boîte de nuit des années 60-70 qui drainait la jeunesse  de toute la région... 

Vendres, c'est un clocher-tour sur une hauteur, familier dans le paysage, et son vieux cimetière à portée si on monte vers le Crès et Sérignan. 


Vendres c'est l'étang du même nom, un site magnifique, au pied des collines dont le Crès de galets roulés (alluvions de l'Orb ?). Un temple de Vénus au bord de l'eau sinon des bains alimentés par un aqueduc ou une villa romaine Un étang pour une faune devenue aussi fragile que rare... et dire que dans les années 60 on y tirait la nuit, à faire des centaines de victimes, dans les dortoirs des étourneaux ! 

Dans le dictionnaire topographique de l'Hérault (1865) par Eugène Thomas, en plus de la mention d'un moulin sur l'Aude mais dans les limites de Lespignan, sont mentionnés les fermes et gros domaines du territoire. A l'entrée "Vendres", on ne trouve que : 

"... Terminium de Veneris 1140 Livre noir [du Chapitre de Saint-Nazaire] : [816-1209] / par J. Rouquette,... Vendrés 1760 mais la première version "Vendres" semble apparaître en 1625..." 

Oh ! un livre noir qui mérite assurément d'investiguer plus loin ! N'en prenant pas l'initiative et non sans ressortir que ce  blog a déjà évoqué et le Canal du Midi et le tour de l'Etang de Vendres (il suffit de cliquer dans "rechercher dans ce blog", relevons seulement qu'à parler des moulins, il est dit quelque part dans l'historique de nos contrées qu'au moins les moulins de Vendres appartenaient ou devaient payer Fleury (banalités pour les moulins ?). De ce rapport dominant-dominé, est-il resté un vieux litige sur les limites du département et des communes limitrophes, l'Aude, dans ses caprices, ayant poussé ses méandres plus au nord ? (à suivre)


mardi 6 septembre 2022

LESPIGNAN (7) rien de clos tant qu'on veut tourner ses pages sous son pouce gauche...

"Viens avec moi, petit... Viens, donne-moi la main
Nous allons parcourir le caillouteux chemin
Qui mène en serpentant aux Pins de la Mairie.
Là, tu découvriras la superbe prairie
Qui met son tapis vert aux pieds de Lespignan..."

Pierre Bilbe. "Viens avec moi petit..." 

Diapositive François Dedieu / années 60. 

Des villages s'offrant à la vue depuis la petite centaine de mètres de la Clape dominant directement le village, Lespignan semble le bout de l'agrafe fermant la plaine de l'Aude avant que le fleuve, tel un ailier ne prenne le couloir pour aller à la mer comme on file à l'essai. Les rimes de Pierre le disent bien, la vue de la plaine et de Lespignan dans ses collines blanches nous rapprochent. Autant celui qui le dit que ceux qui le lisent doivent revenir sur ce rien à dire supposé quand, par facilité, on ne voudrait que survoler. Pourtant, si l'esprit se pose, le questionnement ressemble à un carottage à travers toute la sédimentation que les années ont accumulée, apparemment riche mais toujours à explorer... 

Ainsi, l'Aude, le pont, les mentalités "village" promptes à s'échauffer agrémentaient notre premier volet ; un vernis seulement tant le liant de notre Languedoc méditerranéen demeure fort.     


Dans un deuxième temps, la nature d'alors nous rappelle que ce qu'il en reste doit nous préoccuper : la plaine, le fleuve en imposent au point de porter jusqu'au surnaturel de la dame blanche. Un concert de grenouilles, est-ce que ça existe encore ? 


Des vestiges de villas, un port romain du temps de la transgression marine puis les divagations du fleuve sur ses limons : son vieux lit a laissé bien des terres côté audois et bien des jalousies en regard, dans l'Hérault. Une réalité rappelant de loin le Couesnon qui, "dans sa folie, mit le Mont en Normandie". 


Après une forte pluie dans le bas du village, l'huile de pépins de raisins, le moulin de Mauriçou, les gitans... 


Conter fleurette tant la plaine et ses abords bucoliques, comparés aux étiques garrigues, inspirent des amours cachées. Sinon, des vignes qu'on dirait orphelines depuis que sa cave coopérative, comme celle de Vinassan, a été livrée aux démolisseurs... Et je voudrais croire que les Lespignanots savent encore faire la fête, en été et surtout pour Carnaval, une tradition si ancrée dans les mémoires dans l'espoir du renouveau et la consolation de peines pourtant ineffaçables. 


L'horloger d'antan, l'oléiculteur d'aujourd'hui... 

Alors pour effacer cette impression d'en garder sous le coude, en complément, un dernier jet... du jus de raisin plutôt puisque les Amis de Lespignan fêtent les vendanges à l'ancienne le 17 septembre (j'attends leur permission pour ajouter leurs affiches). Amis ils sont et en tant que tels ils savent se retrouver l'hiver pour un loto occitan à l'ancienne (formidable initiative !) et, aux beaux jours, autour d'une bonne table au meilleur endroit, devant le moulin de Mauriçou (sa restauration leur doit beaucoup) ! 

Insolite : sur cette hauteur ouverte aux vents marin et d'Espagne, une plate-forme de lancement pour parapente a été réalisée. Une activité récréative mais nécessitant beaucoup de sérieux... On en est plus que convaincu quand le journal fait état de l'accident du 18 avril 2022 : deux jambes cassées non loin, qui plus est de l'autoroute très fréquentée... 

Pour ajouter à cette reprise des six précédents articles, les détails donnés par le DICTIONNAIRE TOPOGRAPHIQUE. 

Des moulins existaient sur l'Aude, ce qui paraît étonnant quand on sait que le cours du fleuve a longtemps divagué dans la plaine avant d'être canalisé de Coursan jusqu'à l'embouchure.   

Brousse écart
Cazimbaud 2 moulins sur l'Aude 1809
Clotinières ferme 
La Comboulette, la Coumoulette
Déjean moulin sur l'Aude 1809
Font de Lisse écart
St-Aubin-Causse f., St-Aubin le bas ou St. Aubin rivière (recens 1840) f. , St Aubin le Haut f., 
St. Paul f., 1184 
Lespignan ecclesia sant Petri de Laspiniano 1156 / Laspignanum jusqu'en 1173 / Lespignanum 1222 / Lespinha 1370 - 1504 / De Lespignaguo 1518 / Lespignan seigneurie de la viguerie de Béziers 1529 / L'Espignan 1635 - 1721 / Lespinhan 1649 / lespignan 1625 - 1688 / Prieuré-cure 1760 appartenant à l'archip. de Cazouls et ayant pour patron S. Petrus ad Vincula 



 Les affiches promises même si elles arrivent en octobre... quoique on peut encore grappiller quelques raisins... Quant au loto de mars, avouez que la langue occitane a plus que des accents rabelaisiens ! 

Et de la part de nos voisins et amis il ne reste plus qu'à espérer las castanhos e lou vi nouvel, les châtaignes et le vin nouveau, en octobre, qui sait ?!  


lundi 13 juin 2022

Le "EN MÊME TEMPS", à éviter !

Le "en même temps" est à éviter ! Libre à qui le souhaitera d'y noter un désaccord politique avec le monarque républicain qui fait perdurer la Constitution d'une Ve République pourtant en "mort cérébrale" : on ne peut être pour un jour et contre avec des promesses non tenues de révision, une politique génératrice de crises continuelles... Ne parlons pas davantage des députés godillots d'un président omnipotent et d'une opposition cristallisant les extrêmes, l'illustration du jour concerne le millefeuilles des règles et des lois et "en même temps", le grand écart entre la volonté déclarée et son application sur le terrain.  

Il y a les plus beaux mais jusqu'aux plus modestes sans trop de choses à montrer, tous les villages de France, porteurs de chapitres d'histoire, témoignent du vieux pays qui est le nôtre. 




Fleury-d'Aude, village sans prétention, et, en même temps, annexe sinon dépendance périphérique à Narbonne, dispose de deux monuments classés historiques : la tour Balayard et la chapelle des Pénitents...  Etrange ce classement (protection nationale) ou inscription (protection régionale), déjà qu'il illustre bien  l'embrouillamini compliqué et néanmoins ordinaire de nos administrations. Notons par exemple, à Coursan, que seul le clocher de Notre-Dame-de-la-Rominguière est classé. A Fleury, l'église Saint-Martin pourtant datée pour partie du XIe siècle, ne figure aucunement dans cette protection ; même remarque pour les restes imposants du château. 


En prime, les sites aimés par les habitants comme la dernière tour ronde restant des remparts, le porche, la rampe de la Terrasse (du château), la rue étroite dans un cœur de village aux petites maisons si serrées et imbriquées qu'on disait familièrement "la médina", l'escalier donnant, de suite à gauche sur la forge du maréchal-ferrant. Le tableau ne serait pas complet sans le Grand Café Billès, où les générations à différentes époques se souvenaient de la venue du ténor Affre, des parties de cartes, du billard, des bals, du cinéma, ou du judo ou du ping-pong, de la salle de banquets sinon du siège du rugby ; historiquement il ne devait rien représenter puisque sans aucun état d'âme, il devait disparaître pour des places de stationnement.  C'est aussi du "en même temps". 

"Le 13 mai 1996 cette magnifique construction fut démolie pour laisser place à un parking au centre du village" Les Chroniques Pérignanaises, de Pérignan à Fleury, 2009.  

Ainsi, les constructions, les démolitions doivent passer un contrôle supplémentaire, celui des Architectes des Bâtiments de France, de vrais cerbères au début, durs, stricts. Dans le périmètre de la chapelle, impossible de rabaisser le portail pourtant surdimensionné à l'époque des chariots de comportes ou de foin. 

Le problème est que, depuis l'abbé Pierre, le constat insatisfaisant concernant le parc de logements a amené le pouvoir à favoriser l'accession à la propriété en aplanissant les contraintes. Pour ne pas ajouter au mécontentement général, le contrôle si contrôle il y a, se fait lointain, les velux se multiplient, le plastique des volets roulants jure aux dépens des vantaux traditionnels en bois alors que l'esthétique de l'éclairage municipal et l'enfouissement des réseaux attestent de l'implication publique... 



A la réflexion bien que partielle des deux précédents paragraphes s'ajoute, toujours dans le périmètre immédiat de la chapelle, la réalisation, par la commune de 11 logements locatifs sociaux sur 600 m2 au sol, nécessitant la démolition de l'habitat ancien peut-être insalubre, peut-être en danger d'effondrement... 


Bien sûr, les Pérignanais de cœur, qui passaient, montaient ou allaient au pain, à "la douceur d'Aimé", chez le boulanger-pâtissier Monestier, avec, au comptoir, les sourires de sa dame et de sa fille qui reste dans nos souvenirs, dans ce "Centre ancien de la Placette" ainsi dénommé dans les transformations actuelles, ne peuvent qu'être troublés par ces démolitions. Espérons seulement que le résultat final ne jurera pas avec l'aspect ancien du "centre historique", la proximité de la chapelle des Pénitents, cela consolerait du temps qui nous pousse, d'une certaine dépossession et de l'émoi bien légitime pour qui tient à ses racines...     

dimanche 29 mai 2022

L'ÂNE de mamé Antoinette (fin)

 


Un témoignage qui nous est resté au hasard de dizaines de cassettes audio dont quelques unes seulement, les plus nombreuses étant musicales, ont gardé des voix. Certaines ne sont plus. Qu'Antoinette, Marcel et Valentine me pardonnent d'afficher leurs prénoms. C'étaient de braves gens. (La cassette est transcrite presque intégralement, à peine adaptée pour être écrite et lue). 

Mamé Antoinette : j’allais faire de l’herbe pour les vaches. Cet âne chaque fois que je foutais une fourchée, il ruait. Je l’ai chargé tant que j’ai pu, sans faire de bruit, puis doucement me coucheri sur l’herbe. J’avais pris une branche de frêne et encore j’avais laissé quelques nœuds. Et alors pingo pango... tu veux faire le fou, je vais t'aider !

Marcel (le fils) : c’était presque à la route nationale, la traverse qui vient à Vinassan. 

Antoinette : malheur on doublait les bicyclettes. Quand on est arrivés il voulait tourner vers la maison. Pas question, j’ai continué à le taper. Puisque tu en veux "n'auras" (tu en auras). On est arrivés au chemin de St Félix. Alors je l’ai laissé retourner. Ah il était devenu doux comme tout ! Avio coumprès (il avait compris).  

burro de Galice wikimedia commons Auteur Fernando Losada Rodriguez

Valentine (la fille) : cet âne dès que tu lui mettais la charrette...

Antoinette : je l’avais parce qu’on avait les vaches. Et je n'ai plus eu de vache. Alors plutôt le vendre. 

Marcel : et oui, c'était la guerre... 

Antoinette : et c'était difficile de les nourrir. Elles étaient maigres, elles ne donnaient plus de lait. Autrement je l’aurais pas vendu. Papa il ne rentrait pas (à l'écurie), il en avait peur. Un jour l’âne l’a coincé contre le mur. Il l’aurait tué. Heureusement mon père et Vincent étaient là, ils ont réussi à le sortir. Il était méchant. Autrement je faisais la laitière, j’avais quatre vaches.  

Marcel : elle a fait naître des petits veaux, je m’en rappelle comme si c’était hier.

Antoinette : je faisais la fermière, la laitière, la vétérinaire. Les vaches on les a gardées sept ou huit ans. Son père jamais il a voulu les traire «Tu les a voulues les vaches, tu les as...» Il fallait traire le matin et le soir, et quand il pleuvait, quand il neigeait... C’était dur mais moi je me régale... 
Les vaches il a fallu les vendre. Sinon, pour traire, la main des femmes est plus douce que celle des hommes. Autrement, les veaux, je n’avais besoin de personne. Je l’avais castré et tout. Alors ce sont des gens de Coursan qui sont venus, des gens un peu âgés, dans les soixante ans, par là. Des gens braves. Moi ça m’agaçait, je voulais le vendre. Enfin je lui ai dit. Moi ça m’agaçait. Je lui ai dit "Ecoutez, y a des fois, on l’a fait castrer mais y a des fois qu’il n’est pas franc... 

Burro en Galice wikimedia commons Auteur Fernando Losada Rodriguez

Marcel : on l’avait acheté à Narbonne et mon père est revenu dessus, comme un pérot comme on dit (est-ce pour le bélier marchant devant le troupeau ?). Un dimanche après-midi, ils sont revenus tranquilles, l'âne doux comme un agneau. Eux l’ont pris comme mon père l’a pris. Un nouveau propriétaire. Il montre son meilleur côté. On n’en a plus entendu parler...

Antoinette : Oh on n’en a plus entendu parler ??

Marcel : enfin de quelque temps, quoi !

Antoinette : un jour il me vient un monsieur pour parler à papa d’une vigne à vendre ou à acheter, je sais plus, mais des années après. Il me fait « il me semble que je suis venu ici ». Et moi de répondre "Il me semble que je vous remets...Oh c’est pas vous qui êtes venus m’acheter l’âne ? ". Ah ! un neveu à ceux qui avaient acheté l'âne. 

Le neveu : Oh c’est pas moi, c’est mon oncle et ma tante. 

Antoinette : et alors à propos ? 

Le neveu : A propos ! mé dis (il me dit)(rires dans l’assistance) Mon oncle il chargeait du bois. Y avait ma tante sur le chariot (les rires sont communicatifs). Et cet âne est parti comme en 14 (les rires redoublent). La pauvre. L’âne il a traversé les fossés et tout (fous rires). Il a perdu ma tante qui est tombée dans le canalet (fous rires à se tordre). Mon oncle depuis il est malade, il a eu une crise cardiaque (c'est terrible de rire, cela ne se contrôle pas !).

Antoinette : paï beleu ? (pas peut-être ?)

Le neveu : paï beleu me dis...

Antoinette : mais moi, i disi, il était méchant mais quand même je le domptais !

Le neveu : on a dû le vendre, c’est des gitanes qui l’ont acheté.

Antoinette : les gitanes raï ! (seraient-ils plus aptes à dominer les ânes ?) 

Le neveu : c’est qu’au bout de trois mois, je ne sais pas ce qu’il leur avait fait aux gitanes. Les gitanes aussi il a fallu qu’ils le vendent. Mais lou pauré papéto, ils ont eu peur, depuis il en est malade.

Marcel : une fois on passe devant la coopé, elle n’y était pas, la coopé. Rendez-vous compte si j’étais jeune. On prend le chemin de la plaine. 

La plaine de Vinassan. 

Valentine : aquélo plancho boulinguèt (cette planche a valdingué).

Marcel : Mon père avait mis une planche et nous dessus. Mais le chemin, y avait des trous, c’était pas goudronné. Et cet âne qui commence à prendre la quatrième, dans la descente en plus. La planche saute et nous deux de cul au fond de la charrette. Il pouvait pas sentir une bicyclette devant lui ! Je m’en rappelle comme si c’était hier.

Antoinette : j’ai travaillé chez les propriétaires puis j’ai fait la laitière et quand j’ai arrêté j’ai repris le travail ; y avait douze femmes avec moi. Quand ils me voyaient arriver, tout aco s’arrestavo, se rambavoun de la route (tout le monde s'arrêtait et s'enlevait de la route). Je vous dis qu’à Coursan, je vous mens pas, cette femme il l’a faite tomber il l’a perdue ! Moi quand je montais jamais je me mettais sur la planche. 

wikimedia commons Auteur Cocollector