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jeudi 12 mai 2022

LESPIGNAN (6) "Mets de l'huile..."

Dans l'avenue principale, manière de parler du bon vieux temps, travaillait l'horloger. Il tenait aussi une permanence, un jour précis, à Fleury, au café Billès, annoncé par l'appariteur "L'horloger de Lespignan est installé...". C'est qu'on réparait les montres, de ce temps là et une semaine après on la récupérait : 

"Oh ce n'était pas grand chose, quelques gouttes d'huile et c'est reparti. 
Le client paie, sort et confie ce qu'il en est au premier compatriote venu : 
"Ça fait cher du litre !"

Toujours dans l'axe principal, avant que les directions respectives de Nissan tout droit, de Béziers à droite, ne se séparent, traversée par la voie principale, la place de la Bascule (1) avec des commerces d'un côté ; au fond, un très joli trompe-l'œil habille de belle façon la vacuité d'un mur aveugle ; de l'autre un étranglement ouvre sur les platanes devant l'école, là où se monte le podium pour l'orchestre, là où se déroulent les festivités. 

Belle palette de couleurs... 

L'un des commerces est (était) la boucherie de Freddy ; sa modestie m'en voudra un peu de l'évoquer mais il est de Fleury, je le connais depuis qu'il est petit, et il a toujours été volontaire. Autant de raisons pour ne pas taire qu'il a commencé dans une petite remise avec un petit élevage de cailles avant de poursuivre dans cette voie, étendant même son activité jusqu'à proposer un choix de pâtés, de charcuteries, de toutes sortes de viandes cuisinées, en conserves et tout ce qui m'échappe. En prime, l'Internet nous apprend qu'il est à la Pétanque Joyeuse... Signe des temps : les féminines (2) sur les photos, boules en mains. Plus intéressant bien qu'en témoignage d'une intégration naturelle (à Fleury aussi, ce n'est pas tatoué sur leur front que bien de nos compatriotes sont d'ailleurs) (3), Freddy, depuis qu'il a lâché son affaire s'adonne à la passion des oliviers, plantés à raison de huit centaines (peut-être plus aujourd'hui). Des olives pour faire de l'huile, opération que pour sa récolte et celle d'autres récoltants, il assure lui-même. Un peu de pub en attendant un reportage... de préférence confié avec grand plaisir à une, un ami du blog motivé et disponible... Heureusement qu'il est là Freddy... sans lui ce serait parler pour ne pas dire grand chose, par manque d'implication. 



Au-delà, vers Nissan, une très républicaine "Maison du Peuple" pour les lotos, je parle de ceux de jadis je crois, autorisés dans le cadre d'un calendrier précis (incluant peut-être les mois d'hiver). Nous y sommes allés une paire de fois ; c'était dépaysant de passer l'Aude et de se retrouver dans une position d'estrangers, plus encore si ce n'était pas un local qui emportait la partie ! Il n'empêche, ce serait aussi intéressant qu'ethnographique d'apprendre les tournures locales, les formules en français et souvent en occitan, particulières à chaque village, et qui accompagnent la sortie des numéros, "13 ma sœur" par exemple. De fil en aiguille, au moins deux lotos passés sont évoqués, le premier (dans l'ordre des découvertes sur le Web), par les Amis de Lespignan, mettant à l'honneur l'occitan et le soutien à l'Ukraine ; le second, de 2021 qui, entre parenthèses semble proposer des lots d'argent, ce qui par le passé était interdit, est organisé par le club de parapente, encore en 2021, alors que nous vivions dans la candeur d'un Monde sans guerre... les morts de plus loin ne nous affectant pas particulièrement...  

Est-ce qu'un septième volet pour revenir sur les Amis de Lespignan et du parapente et la topographie non encore abordée, suffiront pour clore la série ? Merci Lespignan. 

(1) Il s'agissait d'une balance à bascule pour peser les charges lourdes, camions, remorques...  

(2) signe des temps, si à travail égal correspondait un salaire égal entre les femmes et les hommes, il n'y aurait pas de temps de travail hebdomadaire augmenté, pas de durée de cotisation rallongée, pas de retraite à 65 ans alors que l'espérance de vie en bonne santé est généralement dépassée. Mais tant que la classe politique qui, dans sa déclinaison actuelle, continue de passer les plats à ce un pour cent de profiteurs-exploiteurs, sera élue par des veaux (cf De Gaulle) (et génisses... égalité oblige), l'orthodoxie de cette économie prédatrice qu'on nous sert comme normale pourra  

(3) signe des temps, cela fait bien quelques lustres que les apports allogènes forment la majorité de la population. A Fleury, le maire, voilà bien cinq ans en arrière, était bien placé pour attester qu'il ne restait plus que 800 autochtones sur la commune. Est-ce que Lespignan, sans station balnéaire compte encore une bonne proportion d'originaires ? 

dimanche 13 décembre 2020

RAISINS de la PLAINE, CHÂTAIGNES des VERSANTS.... les filles du Poumaïrol...


Châtaignes sur le marché d'Apt 2010 wikimedia commons Author Véronique Pagnier

La finalité du manuel scolaire parle d'autant plus d'elle même qu'elle précise "orthographe, grammaire, conjugaison..." etc, alors que nous nous proposons de continuer notre page sur un produit à part, un fruit de saison qui, après les raisins des vendanges, les coings en pâte ou en gelée, participait à la livrée de l'automne. 

Au village, seulement en montant la rue de la porte Saint-Martin, il y avait au moins quatre ou cinq épiceries proposant des cageots de châtaignes, succédant, en produits d'appel, aux caissettes rondes, en bois tendre, des alencades salées bien rangées en éventail. Ces harengs, marquant la présence des vendangeurs espagnols, exprimaient un exotisme ravigotant dans une mentalité villageoise pour le moins retranchée. Les châtaignes, elles, outre de corriger la perception qu'on avait alors de l'étendue de la plaine, accentuée par le moutonnement toujours recommencé des vignes en monoculture, alors qu'au Nord-Ouest, la vue distincte de la bordure méridionale du Massif-Central confirmant l'aspect d'amphithéâtre depuis l'Espinouse et, en descendant vers la côte, les garrigues, le Minervois, marquaient aussi la présence d'une main-d’œuvre de Mountagnols, décrochant d'un millier de mètres, plus avant dans le temps, pour la récolte des raisins, quand ce n'était pas pour d'autres travaux.   

Les filles du Poumaïrol, descendues pour les vendanges, ne remontaient dans la Montagne Noire qu'avant Noël, après les pommes, les châtaignes de l'Argent-Double, et en bas, les olives et parfois les premiers sarments à ramasser !  

Châtaigne Cévennes wikimedia commons Author historicair 29 décember 2006 UTC 15 h18
 

P. Andrieu-Barthe parle d'elles dans le numéro 156 de la revue Folklore (hiver 1974) : 

"... Les Châtaignaisons duraient une grande partie du mois d'octobre et parfois de novembre 

Portant un grand tablier de sac relevé en sacoche, des mitaines aux mains, elles ramassaient les châtaignes tombées à terre, armées d'un petit marteau de bois, "le massot", pour ouvrir les bogues piquantes.../... Le soir à la veillée, elles rangeaient la récolte du jour à l'aide d'un grand tamis "la clais" suspendu au plafond, dont le fond grillagé calibrait les fruits. Les jours de pluie, elles triaient les haricots secs, les petits "moungils" réputés ou "enfourchaient" les oignons, c'est à dire les liaient par douze sur des tresses de paille de seigle. C'était, avec les pommes-de-terre et les navets noirs, la principale nourriture du pays. 

La récolte des olives était redoutée à cause du froid et celle des sarments aussi car le vent glacé de Cers balayait la plaine. Elles attachaient solidement "la caline" sur leur tête et glissaient sur leurs vêtements des blouses de grosse toile. Les voyageurs étrangers qui passaient, remarquaient avec étonnement ces femmes qui paraissaient en chemise, en plein hiver, dans les vignes.../

... Ces filles du Poumaïrol étaient réputées pour leur vaillance à l'ouvrage ; robustes et fraîches, leur gaieté résonnait en chansons et plaisanteries, parfois d'une rustique verdeur. Les gars des villages, émoustillés par leur venue, se livraient à des farces d'usage, faisant enrager les employeurs, qui se croyaient, à cette époque, responsables de la vertu de leurs employées. 

Mais, depuis la guerre de 14, le plateau du Poumaïrol s'est lentement dépeuplé, les belles haies de hêtres sont retournées au taillis, les prairies se plantent de sapins et les filles sont descendues vers les usines du Tarn où leur gaieté n'est plus si sonore. On ne mange plus de châtaignes et de haricots, la diététique moderne les ayant rendus suspects, à leur place croissent les genêts et la broussaille, et qui se souvient encore des chansons des châtaigneuses ? 

"... Barraquet eit mort
Eit mort en Espagno
E l'en enterrat amé de castagnos 
Ah ! qui pouyen trouba
Per la Barraquetto
Ah ! qui pouyen trouba 
Per la marida
Las castagnos et le bi noubel 
Fan dansa las fillos, 
Fan dansa las fillos. 
Las castagnos et le bi noubel 
Fan dansa las fillos et lou pandourel."

 

jeudi 3 janvier 2019

LAS OULIVAS / Languedoc




LAS OULIVAS, Brancas d’Euse, Francès Dezeuze.

Pèr un bèu jour d’otobre es un delice
De ramassà l’ouliva encara verda.
Vas escalà dins l’aubre, sus las brancas.
Coumà un aucèl, negat entre las fiolhas,
Las ausiràs, pèr lou garbin bressadas,
En se frilhant, cantà sa musiqueta,
E coumprendràs lou plesi que l’èrt linde
De nostre cièl baila a lou que l’aspira.
Lèu, toun saquet se coufla de fruch moufle,
Repetelat e ferme couma un malbre.
S’un brouquilhou sec, de fes, t’escarraugna
Fas un pouto sus lou sang que perleja.
Te vese, pioi, davans la gerla rounda,
Pousant emé la cuilhèira traucada,
Que l’aiga-sau, couma acò, s’en escoula,
Un boun pougnat d’oulivas salabrousas.
Ras d’un fioc vièu d’èuse, emé tous coulègas,
En esperant lou plat de cagaraulas,
Tout en charrant, descrasses la jinjiva.
E toun regal es de reveire l’aubre
Ounte, en siblant, as amassat d’oulivas,
Galoi couma un estournèl de passage.

mercredi 26 décembre 2018

UNE BELLE CUEILLETTE... / L'école publique...

Wikimedia Commons plume sergent-major the copyright holder of this work, irrevocably grant anyone the right to use this work under the following license

"... Plume sergent-major mon amie..." chante Serge Lama... L'école, la classe, le maître plus rarement la maîtresse côté garçons, le porte-plume mâchouillé d'un bout, prune de l'autre de cette encre violette laquée à la pointe de la plume, l'encrier de porcelaine blanche...

"... La vieille classe de mon père,
Pleine de guêpes écrasées
Sentait l'encre, le bois, la craie..." 

Odeur des pluies de mon enfance, René-Guy Cadou, 1965 (1)

Bien sûr qu'il comptent tellement, le maître et l'école, communale, républicaine, gratuite, laïque, obligatoire ! L'école procréatrice de destins offre aussi de belles cueillettes, pour marquer l'enfance, arrêter l'heure, le temps de dix petits textes, d'une publication témoignant aussi de l'époque... André (trois du même prénom), Jean-Pierre, Jacques, Renzo, Aimé, Claude, Christian, Roger... ils sont dix contributeurs. Ils ont entre 9ans 1/2 et 13 ans et derrière leurs petites rédactions travaillées mais si personnelles, il y a l'instituteur de l'école de garçons. Il ne dit pas son nom mais met seulement ses capacités, son sérieux, sa modeste mais précieuse exemplarité, sa modernité éducative. Le petit journal mensuel, la petite imprimerie scolaire, c'est la pédagogie Freinet. Nous sommes en 1951-1952. Nos jeunes garçons, pour ceux qui sont toujours là, seront bientôt octogénaires mais gageons que la fraîcheur des jeunes années leur déride et aiguillonne toujours l'existence. 



Souvent je feuillette ce numéro 1, 8ème année, rédigé et imprimé à l'école de garçons de Salles-d'Aude, l'unique entre mes mains, toujours à relire encore parce quelques éclats toujours renouvelés ne demandent qu'à enluminer les têtes.
Cette fois c'est le texte de PUECH Jacques, 10 ans, qui m'a accroché. Si mon esprit buissonnier est  parti entre Noël et Pâques, sous l'olivier chargé ou l'amandier fleuri, c'est le porte-plume aux lèvres, dans une classe sentant l'encre, le bois, la craie que je l'entends lire :

  

PS : entre nous, je préférais la plume "Gauloise", question de caractère...



(1) René-Guy Cadou (1920-1951) au destin poignant... "Je ne ferai que quelques pas sur cette terre", "Le temps qui m'est donné, que l'amour le prolonge." 

photos non autorisées :
2 & 3 serait-ce pour témoigner...
4. Et si c'est interdit, on dessine !