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lundi 11 novembre 2024

11 NOVEMBRE

 Merci Bob d'avoir anticipé le 11 novembre avec ton évocation des Éparges de Maurice Genevoix...

Fleury 1990 Diapositive François Dedieu... papa mettait le costume, allait à la cérémonie suivie de l'apéritif convivial... Aujourd'hui aussi, beaucoup de monde... 


« J'ai donc ouvert « CEUX DE 14 » qui comprend cinq volumes « SOUS VERDUN » (25 août 1914- 9 octobre 1914), préfacé par Ernest Lavisse alors directeur de l'École Normale Supérieure dont Genevoix était élève [...] La deuxième édition de 1925 rétablit les passages censurés en 1916 (1). Genevoix était lieutenant et fut grièvement blessé en 1915. Il a ajouté son récit qui s'appuie sur des notes quotidiennes « La mort de près » ainsi que deux romans « Jeanne Robelin » et « La Joie ». Il avait décidé de rendre hommage à tous ceux qui étaient tombés à ses côtés : aux noms donnés dans le récit correspondent les noms authentiques, soulignés. »

Caboujolette (Pages de vie à Fleury II), 2008, François Dedieu.

(1) Genevoix mentionnait au moins trois paniques dont la plus terrible à la tranchée de Calonne, le 24 septembre 1914.

Un écho languedocien tiré de tout un carnet que nous devons au dessinateur carcassonnais Pierre Dantoine (1884-1955) et en occitan siouplèt ! Pas encore sur Wikipedia... j'en reste choqué ! 


samedi 27 juillet 2019

LE TEMPS NOUS A-T-IL POSÉ UN LAPIN ? (fin) / passé, nature et guerre / Maurice Genevoix. .

Avec Maurice Genevoix,  loin de tout académisme, le talent se fait scalpel pour livrer une réalité à vif, celle d'une guerre "Grande" surtout à cause de l'horreur dont les hommes sont capables, celle d'une nature dans laquelle il faudrait se faire oublier plutôt que de tout vouloir régenter. 
Homme de conviction, Genevoix reste un auteur d'une grande modernité. "Tendre bestiaire", pourtant de 1969, en témoigne. Avant l'ablette et le castor, ne débute-t-il pas par l'abattoir, avec le sang de la vache puis l'abattoir qui le hante, celui des hommes qui meurent au combat ?

Fleury-d'Aude / aux limites du village, l'abattoir de Soldeville, un des deux bouchers du village.

"J'en demande bien pardon. Si ces pages luminaires sont dures, elles étaient nécessaires. Elle éclairent, en lueur contrastée, tout ce livre, tout ce "tendre" bestiaire vivant." M. G. 

Wikimedia Commons. Maurice Genevoix. Portrait. Auteur et autorisation Anne Tassin. Photo Jacques Tassin. 
Page 49 : "... J'ai connu l'âge d'or du lapin. C'est au garenne que je pense, on l'entend bien. 

Page 52 : "... L'air était doux, presque immobile [...] On se croisait, on se saluait, on faisait claquer ses oreilles, on se frottait le bout du nez [...] 
Depuis, il s'est trouvé un "Monsieur" qu'irritaient les "dégâts des lapins". C'était un savant. Il a écrit à un autre savant, expert en microbiologie, spécialiste en ultra-virus. Un tout petit paquet est arrivé par la poste, et les lapins sauvages ont eu la myxomatose. 

Page 53 : C'est une épouvantable maladie, qui fait flamber et enfler la tête de ses victimes, leur tire les yeux hors des orbites [...]
Il m'est arrivé encore, en Sologne, d'avoir devant les yeux, par un beau soir, à la lisière d'une pinède et sur une lande fleurie de bruyères, le spectacle d'une ville de garennes sortie de ses terriers, sous le ciel. Tordus, contraints, perclus de tous leurs membres, de tous leurs reins,les lapins se traînaient, allaient au devant les uns des autres comme pour se prendre mutuellement à témoin, en appeler de leur souffrance, et peut-être implorer, des uns aux autres, un secours qui ne viendrait pas. 
Et soudain, l'un ou l'autre, il y en avait un qui hurlait. un cri perçant, vrillant, prolongé, qui venait du fond des entrailles. Cela, je l'avais entendu, au soir tombant, sur des champs de bataille meurtriers. Qu'un blessé vienne à crier ainsi, un autre crie, et bientôt, tous les autres. Et ces cris, mutuellement, s'exacerbent, tendent vers un paroxysme que l'on peut bien dire infernal, et que l'oreille ne peut plus supporter. 
La nuit tombait sur le bois, sur la lande. Je ne voyais plus les garennes. Mais toute la plaine continuait de crier." 

Oryctolagus cuniculus (European_rabbit) Wikimedia Commons Auteur Bj.schoenmakers.



dimanche 30 juin 2019

JEAN MOULIN, un bâillon sur le racisme jacobin...

Contre le racisme congénital de la France du Nord moquant le Midi et pire encore, diffamant sans retenue le soldat de 14 quand il était de racine occitane, catalane ou corse, comme une claque aux Gervais, Clémenceau et consorts... 

Auguste Gervais, sénateur accuse "l'aimable Provence" de lâcheté. Les journaux du Midi le taxeront de "honte du sénat et fumier de la presse". 

Georges Clémenceau : "On connaît la nature impressionnable des Méridionaux [...] Qu'on les encadre et qu'on le mène au plus fort du feu pour leur donner, sans retard, la chance de réparation à laquelle leur passé leur donne droit...". "Le tigre", Clémenceau, ce Vendéen député puis sénateur du Var ?!?! Celui-là même qui convoquant la presse, après lui avoir fait l'aumône d'un billet de train avait démoli Marcellin Albert, le cafetier d'Argeliers porteur de la révolte des vignerons de 1907... La sympathie paternaliste de son chapeau ramolli sur sa grosse moustache cachent mal ses côtés obscurs... 

 "À l’occasion des commémorations du 70e anniversaire de la mort de Jean Moulin, le CIRDOC-Mediatèca occitana, situé sur la même place que sa maison natale, avait proposé un éclairage sur un aspect méconnu de la jeunesse du grand héros de la Résistance...

https://occitanica.eu/items/show/3079?fbclid=IwAR02ets1cE3Yx6GfIbG33ADPUZTKsmTuq_GdyK2JCCm6kMTk1QliQYOlmxQ#lg=3&slide=0


Alors la France, toujours honte de tes ascendances latines ?

jeudi 3 janvier 2019

BOUNO ANNADO 2019

le chemin des Bellons Author Fr.Latreille
 
Le Château de ma Mère, DVD 2005, film de Yves Robert 1990. 


" A l'an que vèn, si sèn pas mèï que siogessen pas mens !" 
 "À l'an qui vient, si on n'est pas plus, que l'on ne soit pas moins !"

Il dit quelque chose comme ça, le copain des collines, Lili des Bellons, du quartier de ce petit village de La Treille. Au début des années 1900, on souhaite encore les vœux à Noël.  
Dans "Le Château de ma Mère", pour la triste circonstance de la sépulture de son frère Paul (1898-1932), Marcel Pagnol évoque son compagnon des garrigues :

« Mon cher Lili ne l'accompagna pas avec moi au petit cimetière de la Treille, car il l'y attendait depuis des années, sous un carré d'immortelles : en 1917, dans une noire forêt du Nord, une balle en plein front avait tranché sa jeune vie, et il était tombé sous la pluie, sur des touffes de plantes froides dont il ne savait pas les noms… »

Bon, ça me fait peine, un peu et peut-être plus que ça, de voir que Pagnol ne fait pas l'effort d'exactitude... A propos d'un ami qui a tant compté il dit qu'il est décédé en 1917 or Lili, de son vrai nom David Magnan, "tué à l'ennemi", à Vrigny dans la Marne, a quitté la vie le 23 juillet 1918... Parfois les mots sont trop beaux, les idées évoquées propres à émouvoir sauf que face à la sincérité qui devrait marquer la courte trajectoire des Hommes sur cette terre, les jolies images peuvent relever de la sollicitation artistique, de l'artifice... 
Mais Marcel n'est qu'un homme, par définition imparfait et avec ses faiblesses, alors, pour le supplément d'âme qu'il sut apporter à ses semblables, pour ce que sa sensibilité nous a laissé d'exaltant, bien sûr, il n'en parait que plus humain et la tendresse qu'on lui porte reste intacte. 

Marcel_Pagnol_1931 Auteur anonyme


D'ailleurs peut-être, Marcel aurait pu en dire davantage sur Lili des Bellons. 
Tout petit, ne sachant prononcer son prénom "David", son ami des collines disait "Lili" et dans le Sud où on connait mieux le surnom que le nom de famille, "Lili" lui est resté. 
De taille moyenne il était bien comme le dépeint Marcel, brun de peau, des yeux noirs, de longs cils comme une fille... 
Il suivait bien l'école mais comme tant d'autres, s'arrêta au certificat d'études. 

Dans "Marcel Pagnol, l'homme sa vie, l'auteur son œuvre" (1980),  Georges Berni (1913-1998) rapporte ses paroles : 

"... Si j'ai la chance d'en revenir [...] j'irai monter un élevage de moutons au Jas de la Garette... " 

Et plus tard, lors d'une permission, en mai 1918 :

"... Je sens que je ne reviendrai plus..."

Après ses parents qui se laissèrent mourir de chagrin, il aimait beaucoup "Souffrance", son chien et "Bombay", son mulet.

Lili repose au cimetière de La Treille. 

Le pardon monsieur Berni, que je demande humblement pour avoir paraphrasé des passages de votre jolie plaquette, me refait penser à Pagnol qui avait allègrement réinterprété l’œuvre de Giono dont il avait racheté les droits. Giono ne supportant pas la version pagnolesque de ses livres s'en était su mal et la fâcherie dura seize ans avant qu'ils ne tombent dans les bras l'un de l'autre à l'occasion du tournage des "Lettres de mon Moulin" (1954).  

Michel_Galabru dans la Femme du Boulanger 2012 Author Gind2005

 https://www.lexpress.fr/informations/giono-pagnol-le-match-du-centenaire_601344.html

PS : pardon pour les voeux de Lili que le logiciel persiste à faire paraître dans la taille la plus petite ! (corrigé en janvier 2023). 
   

mercredi 15 novembre 2017

CEUX DE 14 / La "Grande Guerre"



«... En souvenir de mon père, je me suis mis à Maurice Genevoix, pour voir d’un peu plus près quelle était la triste vie des Poilus de 14-18.
J’ai donc ouvert « CEUX DE 14 » qui comprend cinq volumes. « SOUS VERDUN » (25 août 1914 - 9 octobre 1914) est préfacé par Ernest Lavisse, alors directeur de l’École Normale Supérieure dont Genevoix était élève (il faisait aussi partie du bataillon de Joinville des meilleurs gymnastes français).
La deuxième édition de 1925 rétablit les passages censurés en 1916 (1). Genevoix était lieutenant et fut grièvement blessé en 1915. Il a ajouté à son récit qui s’appuie sur des notes quotidiennes « La mort de près » ainsi que deux romans «Jeanne Robelin »et « La Joie ». Il avait décidé de rendre hommage à tous ceux qui sont tombés à ses côtés : aux noms donnés dans le récit correspondent les noms authentiques, soulignés.

(1) pour la censure, pour ne prendre que cet exemple, il était intolérable de raconter une panique même si elle avait eu lieu deux ans plus tôt. Or Genevoix le fait à trois reprises. La première, la plus terrible, eut lieu le 24 sept 1914 à la Tranchée de Calonne... »
François Dedieu (1922 - 2017), La Saint Martin p. 80, Pages de vie à Fleury II, CABOUJOLETTE, 2008.

C’est de mon grand-père Jean qu’il s’agit (1897 - 1967). Il n’a jamais rien dit sur sa guerre, jamais commémoré ni commenté la moindre date. Je ne l’ai jamais vu au monument aux morts. Au fil des ans, c’est à peine si ses proches ont pu l’entendre donner un détail, par le plus grand des hasards, comme la fois où, en parlanr de monsieur Monbiéla, il a raconté comment il a reconnu en ce  voisin pas très lointain, propriétaire aussi mais pas à plaindre, le comique troupier qui amusait les permissionnaires dans une gare entre Paris et Toulouse, peut-être Limoges. Alors comment a-t-on su qu’il n’écrivait pas justement ? Mamé Babelle, sa mère avait dû s’en confier aux autorités. L’officier chargé de le réprimander n’était pas reparti sans la lettre qu’il avait fait rédiger sur le champ !

«... Papé Jean, lui, né aux Karantes, commune de Narbonne, le 4 juin 1897, engagé « pour la durée de la guerre » en décembre 1915 (1) (il faisait partie, plus tard, de l’association des « moins de vingt-ans » dont l’imprimeur Lombard, à Narbonne, était secrétaire). Au front, on les appelait « les bleuets » et, chose curieuse, il fut longtemps membre d’une société de tir de Fleury baptisée du joli nom « Les Bleuets de la Clape... »

(1) ce qui lui aurait permis de choisir de rejoindre l’artillerie.
François Dedieu / CABOUJOLETTE p. 79.

  

Chez mes grands-parents habitait aussi l’oncle Pierre, célibataire. Papa a toujours pensé qu’il avait été pour lui le grand-père qu’il n’a pas eu. Ils sont ensemble dans le jardin pour les mauvaises herbes, pour arroser. Le jeudi, ils montent tous les deux faire un abri entre ses quelques pieds de vignes du coteau mais rien sur sa vie avant qu’il ne descende de l’Ariège, à peine une ligne sur sa « Campagne contre l’Allemagne ». Comme pour la modeste capitelle élevée rang après rang avec les pierres du terrain mais qui ne reçut jamais son toit...

«... une ou deux larges pierres, bien calées, forment un banc à l’intérieur [...] quelque vieille ferraille [...] crochet pour suspendre la musette [...] Et c’est assez [...] « per parar uno ramado », comme on dit chez nous (pour protéger d’une averse). Voilà, dans l’idée de l’oncle Pierre, ce qui aurait constitué notre «cabane bambou ».
D’où avait-il tiré le nom ? Du cabaret parisien, qu’il ne connaissait pas, son seul grand voyage ayant été, à part le fait de «descendre» de Montagagne, petit village de son Ariège natale, jusque dans la région narbonnaise, le « pays bas », comme disaient ces arrivants, le douloureux périple de la Grande Guerre, qui l’avait amené à quarante-deux ans en Alsace, où il devait être grièvement blessé ?.. » 
François Dedieu / CABOUJOLETTE p. 13

Sans l’Internet et malgré ces bribes qu’on doit à nos racines en partage, nous n’en saurions pas davantage.
Les livrets militaires, l’historique des régiments suivent nos hommes à la trace. (à suivre)

Dessins de Dantoine, en illustration


lundi 13 novembre 2017

« PAPA, ON Y RETOURNERA ! » / Hartmannswillerkopf, à ceux de 14-18 !

GUERRES ? RELIGIONS? ARMISTICES ? RÉCONCILIATIONS ? SURVIVANTS ? / La paix mène toujours à la guerre !

« Ceux qui pieusement sont morts pour la patrie... » Victor Hugo est Victor Hugo sauf que le fondamentalisme religieux égare au point d’impliquer un dieu, cette fois chrétien, dans des tueries d’enfer... Pire que la guerre, la guerre sainte !
Le « Dieu est avec nous ! » de la France envahie, le « Gott mit uns ! » des envahisseurs en attestent...

« Vertigineux » aussi, pour Jean-Claude Carrière philosophe (1) : 
    
«... Comment Dieu, immensément bon, a-t-il pu permettre l’existence du mal ? Au plan théologique cette question est vertigineuse. Quelle réponse donner à part l’existence d’un pouvoir presque égal à lui dès l’origine ?.. » Jean-Claude Carrière / Entretien sur la paix.
https://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/la-paix-est-toujours-menacee-par-198598

« Vertigineuse »... surtout qu’un abîme de fascisme menace, hélas, même à l’aube du troisième millénaire... En tomber là ? C'est rationnellement inacceptable !
Attention donc aux belles paroles propres à entraîner sans réfléchir... Mais autant mettre aussi de l’eau dans son vin plutôt que de glisser dans l’anachronisme. Quoique, en la circonstance, pas si coupable qu'il n'y parait alors que nous sommes confrontés à des problèmes sociétaux qui ont favorisé l’immixtion d’une religion contre la tolérance...
Et ça m’agace, ça m’agace de constater la menace d’un islam incompatible avec la  laïcité à partir du moment où, publiquement, il fait passer la loi de son dieu avant la loi des hommes !


Des quatre mémoriaux officiels de la guerre de 14, le Hartmannswillerkopf, en Alsace, est celui qui doit le moins à l’Église.
Veille du 11 novembre, exceptionnellement, j’ai marqué une trêve. Une paire d’heures, mon index accusateur vers les meneurs, les décideurs, politiques, administratifs, ces "mondialistes" si responsables du chaos qui finira bien par arriver, s’est replié. J’ai regardé la commémoration de l’armistice. J’ai fait mine de ne pas contredire une énième mise en branle des bonnes volontés si naïves par définition. J’ai feint de laisser passer cette béatitude ridicule faisant croire à la sincérité du renouvellement de la réconciliation franco-allemande, à un destin commun alors qu’économiquement, chacun tire la couverture à soi (et comme toujours, c’est la France qui prend froid...)... Chut... n’embrayons pas sur la vieille Allemagne qui n’arrête pas de prospérer et une France prétendument jeune qui n’en finit pas de péricliter.
Ils y étaient les jeunes du lycée franco-allemand de Fribourg-en-Brisgau, ceux de Guebwiller aussi... Leur présence active fut remarquable. Et ils ont rapproché les deux langues ! Encourageons-les en ce sens parce que depuis les Serments de Strasbourg, en 842, la mayonnaise n’a pas encore pris.
Proches aussi, nos présidents respectifs, sauf qu’en manque d’inspiration, ils n’ont pas eu l’éclair du geste fort, du rituel marquant l’Histoire... Il faut dire que la poignée de main Mitterand-Kohl date de 1984 et qu’en ce même lieu, si Hollande et Gauck (2014) ont empilé leurs mains sur la première pierre de l’Historial, ils se sont ensuite tenus comme un couple qui se cache. L’aurions-nous remarqué sans le gros-plan de la caméra ? L’étau de leurs doigts joints, à Oradour-sur-Glane, en septembre 2013, c’était beau ! Ils auraient pu le renouveler... Et là, ce 10 novembre 2017, ça balbutiait entre accolades et tapettes dans le dos. Si on persiste encore à se réconcilier, c’est que l’arrimage de la bonne entente tiraille toujours.
Et puis, que n’y met-on pas les moyens ! Depuis 2014, pourquoi, dans le Mémorial, les régiments allemands ne sont présents que sur des chevalets ? Et que du bleu-blanc-rouge dans les haies d’honneur ! Les porte-drapeaux ça ne se fait pas outre Rhin ? Mettre en commun mais faire sentir à l'autre qu'il n'est qu'invité !
Et dans le cimetière, perdue au milieu des croix, cette tombe musulmane restaurée, parce que vandalisée, qui dit tout de l’hypocrisie d’État concernant les indigènes de la République ? 
 

Pour une fois, j’ai suivi pourtant. C’est que nous y sommes montés par la route des crêtes, au Hartmannswillerkopf, le Vieil-Armand des Poilus, en juin 2015. Pour l’oncle Pierre sur le front d’Alsace, pour Jean mon grand-père, à Verdun. Du côté austro-hongrois, pour l’oncle Stañek, pour Jan mon autre grand-père, dans les Balkans. Tous en réchappèrent. Pour mes parents que les bombes de Dresde n’ont pas séparés. Pour mes fils et pour celui qui, comme tout un chacun, a besoin de concret, de signes palpables pour tenter d’ancrer celui qu'il est à sa chaîne humaine. Tous des survivants.
 
 
Qu’elle est douce, l'été, la paix retrouvée de la forêt vosgienne ! Qu’elle est apaisante, la douceur de la plaine d’Alsace, offrant, à nos pieds, ses bienfaits aux hommes ! C’est dur d’accepter la discordance entre la sérénité d’aujourd’hui et la fureur d’alors, de la part de ces mêmes hommes là où il n’est rien resté des arbres sinon des troncs hachés.
Serons-nous toujours condamnés à n’être que l'hybridation issue d’un mariage forcé entre le clair d’une générosité fraternelle et l’obscur d’une innommable abomination ?

Florian, mon dernier a conclu, mieux que je ne l'aurais fait, après avoir regardé aussi :

« Papa, on y retournera ! » 

Photos autorisées wikimedia commons : 
1.  Hartmannswillerkopf_1989 Author Lothar Spurzem
3. Hartmannswillerkopf from_the_crypta Author Michael Schmalenstroer

samedi 11 novembre 2017

LE 11 NOVEMBRE...


« ... Le 11 novembre, nous commémorerons l’armistice de la première guerre mondiale. elle dit et redit à nos enfants combien ce jour sans école est celui du souvenir des enfants de la commune morts pour la France et celui du respect de l’Histoire de notre pays... »


L’épigraphe de monsieur le maire dit bien l’essence même de ce jour particulier, serait-il aussi celui de la Saint-Martin, de notre fête patronale. Elle nous dit que le respect que nous devons au passé est loin d’être vain, qu’il pèse sur le présent et conditionne l’avenir. Cette conscience (1) sans laquelle l’humanité ne pousserait pas à la roue de son évolution est un trait propre à notre espèce. La  mémoire, le recueillement en sont des corollaires, ce qui ne veut pas dire qu’il faille les considérer comme un tout. Mais que la vie serait étriquée, sinon triste et morbide à s’en tenir seulement à une dignité susceptible de passer pour une posture. Il y faut ces liesses inscrites dans nos gènes par le cours des saisons et qui viennent naturellement équilibrer le fil ténu de la vie. Puritains, passez votre chemin ! 
La convivialité, le vivre ensemble : des valeurs qu'exprime le maire de Fleury, Chico du temps des copains (2), fidèle, par ses racines, à son terroir, avec des mots déjà gourmands pour une foire gastronomique... Des valeurs ancrées dans le temps pour les passeurs que nous sommes : le village, la pêche à l'Aude, la Barjasque sur la plage, un vol de perdreaux, la jeunesse en partage... Passons sur la date, une semaine avant la fête du village, calendrier moderne des festivités oblige... Et puis je ne vais pas chicaner alors qu’une mode aussi insidieuse que dangereuse veut nous imposer une célébration des courges qui n’a rien à voir avec nos traditions sudistes, macarel ! Bref, l’épicurisme, les plaisirs de la vie n’ont rien d’indécent... Montaigne en témoigne. Alors, à chacun de savoir ce qu’il a au fond du cœur sans s’abaisser à fustiger ce qu’il croit voir de mauvais chez les autres ! Le premier magistrat évoque donc les tripes, les langues de bœuf, les poulets aux champignons, les cochons de lait à la broche et autres agneaux rôtis ! On croirait Garrigou possédé par le démon de la gourmandise dans les Trois Messes Basses ! Tombent les flammèches de gras capiteux dans la lèche-frite ! Grésille le tourne-broche trop chargé devant la cheminée rouge de la braise vive des souches ! Tout le village communiait dans des ripailles déjà chantées par Rabelais ! 
  
Le 11 novembre, un bon repas marquait la fête du village, réunissant les familles. On s’habillait de neuf, on étrennait le manteau pour descendre dépenser ses sous à la foire, aidés en cela par les flonflons et les tirades racoleuses des forains. 

Estivet de la Saint-Martin ou Cers glacé descendu des Hauts-Cantons, il y avait dans ces réjouissances la récolte rentrée, le tas de souches pour l'hiver, le cimetière avec les chrysanthèmes à arroser, la cave avec le vin à naître dans le ventre des foudres chenus mais féconds...  
 
 
Et la Grande Guerre venue se greffer sur ces entrefaites ? Était-ce celle de 40-45 qui, telle la vague destructrice d’un tsunami, passée avec ses horreurs inédites par-dessus la première, en avait réduit les générations concernées à accepter un mal aussi ordinaire que banalisé ? C’est l’impression qui me reste et si l’instituteur amenait les enfants au monument, ce n’est pas en classe qu’il nous sensibilisa à nos morts (peut-être n'ai-je rien retenu et dans ce cas c’est que j’étais encore plus que je ne croyais, sur une autre planète...). A l’opposé du bourrage de crâne des hussards noirs de la République pour les « Provinces perdues » en 1870 et la fameuse « ligne bleue des Vosges », les vertus patriotiques ne sont plus exaltées ! Tout peut advenir d'une greffe...

« Ceux qui pieusement sont morts pour la patrie, ont droit qu’à leur cercueil la foule vienne et prie » a écrit Victor Hugo pour les combattants de 1870... oubliés depuis si longtemps... Aujourd'hui, le 11 novembre honore les morts de toutes nos guerres et France Info ne devrait pas si facilement excuser ceux que les anciens combattants agacent. Sans transmission mémorielle, sans conscience, l'humain, roseau d'autant mieux pensant que sa panse est pleine, ne se départirait pas de sa condition animale... 
  
(1) « La sagesse ne peut pas entrer dans un esprit méchant, et science sans conscience n’est que ruine de l’âme. » Rabelais / Pantagruel.(2) j'en souriais encore cet été quand dans l'été de Saint-Pierre, il présenta le tour des chant des Gypsies Kings...
Diapositives du siècle passé de François Dedieu :
1. Le clocher version XXème siècle."Quand on regardait l'heure au clocher".
2. Mamé Ernestine devant la cheminée... et une "piote" au tourne-broche !
3. Le cimetière en novembre 1967.
4. Croix de Pailhès / vue sur la plaine à l'amorce de la montée vers les Pins de Trémolières.
  
(2)
  

Diapositives du siècle passé de François Dedieu : 
1. Le clocher version XXème siècle : "Quand on regardait l'heure au clocher".
2. Mamé Ernestine devant la cheminée...et une "piote" au tourne-broche !.. 
3. Le cimetière en novembre 1967. 
4. Croix de Pailhès / vue sur la plaine à l'amorce de la montée vers les Pins de Trémolières.