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mardi 25 juin 2019

LA DERNIÈRE CLASSE (suite) / Les touristes, la saison à la mer.

Rappel : que celle ou celui qui sait n'hésite pas à corriger... Sei pas mal sapios ! je ne suis pas susceptible...  

Entre l'étang de Pissevaches et la mer, un des canaux anti-chars creusés sur ordre des Allemands.
« … Puèi arriveron los Allemands, fagueron parti los toristos, raseron San Pèire (Puis arrivèrent les Allemands, ils firent partir les touristes et rasèrent Saint-Pierre)[…] Apuèi la moda tornet. Ero la moda d’anar passar l’estiu a la mar dal quatorze juillet al quinze d’augost (Ensuite la mode revint. C’était dans le vent de passer un mois à la mer, du 14 juillet au 15 août). Partision ame lo chaval. Dins la carreto i avio las bonbonas, la pailhassa, la pastura dal chaval, lou farrat per lou faire bèure, la grilho, un parel de souquos et tot aco a la mar. De cops portavon la tendo, de cops lo borras sul tomban de la carreta et fasion l’ostal. (Ils partaient avec le cheval. Dans la charrette, les bonbonnes, la paillasse, le foin du cheval, le seau pour le faire boire, la grille, une paire de souches et tout ça à la mer).   

Sain-Pierre, le camping sauvage.
[…] A partir de 1936, lo pople aimavo l’idèia de l’estiu a la mar (… le peuple aimait l’idée de l’été à la mer) […] Ero lo camping sauvage de san-Pèire et de Las Cabanos (c’était le camping sauvage de Saint-Pierre et des Cabanes.) […] Apuèi lous riches qu’aimont pas se barrejar ame lo pople commencèron de faire basti d’ostalasses al bord de la mar (Par la suite les riches qui n’aiment pas se mélanger commencèrent à faire bâtir de belles demeures) […] Lous riches fan montar lo prètz de la terro. Los ostalses coston un prètz fol. La vida monto (les riches Font Monter le prix des terrains, celui des maisons […] ensachon de tondre lo toristo mè tondon tabes lo type dal pais ! Volen pas ese lo bronzociul de l’Europe (ils essaient de tondre le touriste mais ils tondent aussi le gars du coin ! Nous ne voulons pas être le bronze-cul de l’Europe […] E aco duret (et cela dura)…  

[…] Arrivet un type, Racine, avia una mission, faire demorar al pais (un type, Racine, est arrivé, avec pour mission de garder les vacanciers en France). […] « Anan los despaysar. Anan mettre de lions a Sigean (on va les dépayser en mettant des lions à Sigean) […] A Grussan, anan mettre d’ostalses como de dromadaris (à Gruissan des maisons comme des dromadaires). […] Anan mettre las marinas pieds dans l’eau de la Grande-Motte et lo monde se va creire au Macchu-Pichu, au temple des Incas ! Commencet de foutre de gosts a la con un pou de pertout (On va mettre des marinas pieds dans l’eau à la Grande-Motte et les gens vont se croire au Pérou ! Il a foutu un style à la con un peu partout). […] et nos autris siogueren doblidats […] pas completomen. Racine avio compres que lo toristo et los mouisals podio pas anar ensemble […] Racine aguet per misión de faire morir toutis los mouisals (et nous autres fûmes oubliés, pas complètement, Racine avait compris que le touriste et les moustiques ne pouvaient aller ensemble, il eut pour mission de faire mourir tous les moustiques. (à suivre).  

LA DERNIÈRE CLASSE / la sason a la mar, la saison à la mer.



Préalable : plutôt que la graphie mistralienne si commode pour justifier la phonétique « d’aqui darrè » (de derrière les gabels, les boufanelles, pardon les fagots) le pur jus pérignanais, et encore, du quartier d’en haut, nous nous efforcerons de respecter la norme orthographique classique à propos de ce cours d’occitan, assortie, malheureusement d’une palette de fautes de non-pratiquant sinon de mécréant… (Si quelqu’un veut bien corriger, rien ne vaut les desseins partagés).

Comment ne pas évoquer ces récréations à rallonges de fin d’année, veille du 14 juillet. Le village s’est adapté au moins depuis juin à l’heure d’été : les hommes partent à quatre heures vieilles pour sulfater et soufrer tant que le vent n’est pas levé encore. A onze heures la journée de longue est terminée : frais et changés, ils se regroupent au cagnard pour parler vigne bien sûr et aussi cancaner aussi fort que les canes. Le 14 juillet, date charnière pour la saison à la mer qui commence mais pour un mois seulement et pour les femmes, les vieux, les gosses, parce que pour les hommes, à moto et surtout à mobylette, l’ouvrage continue dans l’océan de vignes, suivant un emploi du temps tenant compte des heures où la rage du soleil plombe le pays.

Comme le décor attendrissant que la troupe locale n’a pas les moyens de changer, en arrière-plan, cette atmosphère, ces scènes déteignent sur  le dernier cours d’occitan des Chroniques Pérignanaises. C’est que le prof est un pays, il suffit aussi de voir l’envie qu’il a, de proposer, de séduire, de partager, pour imaginer comme il a pu les aimer, les enfants. Ce lien privilégié, il l'entretient avec ses élèves dès qu'il distribue ses photocopies à un public de grands enfants justement, des seniors, chenus, noueux bien que dans l’air du temps, donc alertes et l’œil vif dans l’ensemble… Et puis, la plus jeunette ne doit compter encore qu’entre cinq et six dizaines d’anniversaires…  

Introduction à l’été, aux vents du cru, à l’intention des touristes : lo Cerç (1) (W-NW), son pendant, lo Marin (SE), lo Grèc que ven de Lespignan (N) (et pourquoi pas de Vendres, plutôt NE sinon E).
Oui, une chorégraphie des vents, un petit Cerç le matin virant au marin vers midi, lui-même tournant au vent d’Espagne (lo Labech) l’après midi avant que le Cerç ne reprenne la ronde : « Labech tardiè, Cerç matiniè ! ». Le beau temps de mer, d’autant plus que, précise le maître, ce sont bien trois semaines, en moyenne, de vent violent, qui plombent la saison (2).

« … Es lo moment d’anar se passejar din la garrigo (c’est l'opportunité d’aller en promenade dans la garrigue). Es an aquel moment que lo prefet dis « cal tampar la garrigo » (c’est le moment que choisit le préfet pour dire qu’il faut fermer la garrigue). Lo turisto se dis “bon hurosoment, an previst lo fioc d’artifiço aneit” (le touriste se dit qu’il y aura le feu d’artifice aujourd'hui) e lou prefet i torna “lo vent buffa a mai de setanto, pai de fioc d’artifiço ! » (et le préfet remet ça en interdisant le feu d’artifice si le vent dépasse les 70 kilomètres par heure) Fa que lo turisto agacha la plancarta “Espagne 70 km” anan faire un bout de cami de mai.” (du coup le touriste voit le panneau pour l’Espagne et décide de faire un bout de chemin de plus).   


Entre le touriste et l’indigène, c’est comme un passo attraction-répulsion, empathie-rejet.

« … Los premiers toristos, la modo das bans de mar, perde qué la sal conserva lo cambajo (les premiers touristes, la mode des bains de mer parce que le sel conserve le jambon). Apres arriveron lous “gandards”, de types qu’arrivavon d’un pou de pertot en Franço, a partir dal mes de jun, dormission sur la sabla ???, se lavavon a la mar e ajudabon a la traina. (Ensuite arrivèrent les "vauriens", des types de partout en France, à partir du mois de juin, ils dormaient sur [mot que je n’ai pas saisi : le sable ? les oyats ?], se lavaient à la mer et aidaient à tirer le filet de la traîne). Avion una partida de peis. Lou peis lo manjavon e ne vendion per quatre sous per crompar de tabac et de vin. ( Ils gagnaient leur part de poissons, en mangeaient, en revendaient pour s’acheter du tabac et du vin). Se venion ero mai per tastar lo vin dal miéjour… hurosoment fasio nou quand avio una bona annada e ne podios ne beure dos litros, per tirar la traina i a vio pas de problema… (S’ils venaient c’était plus pour le vin du midi… heureusement il ne titrait alors que neuf degrés les bonnes années et ils pouvaient en boire deux litres, pas de problème pour tirer la traîne). » 

I a mai de monde que de peis ! Il y a plus de gens que de poissons !
Un gandard pla d'aici davant son campoment (annados 70) / Un gandard bien d'ici devant son campement (années 70, Les-Cabanes).

mardi 18 septembre 2018

L’ARIÈGE, UN PARCOURS POIGNANT...

Trois mois que nous avons laissé notre tenillaïre, notre pêcheur de tellines, à Saint-Pierre-la-Mer, plus exactement à portée du grau plus ou moins existant de l'étang de Pissevaches (vache = source). Suivant qu'il tire son engin vers le sud ou le nord, le paysage immédiat lui fait revisiter un pays marqué par la Méditerranée, les montagnes, des Pyrénées aux Cévennes et jusqu'aux Alpes, un pays d'hommes avec en commun une culture occitane d'autant plus revendiquée qu'elle reste niée et méprisée par l'hégémonie jacobine, indécente et crasse de Paris. 


Tandis que la lame de fer crisse sous quelques centimètres de sable, avec le clapotis d'une mer bridée par le Cers, ce vent de saine colère, frère du Mistral, sa progression lentement scandée, d'un pied sur l'autre, permet cette évasion. Ce tour d'horizon le voit dans les Corbières, le Kercorb, les petits territoires et terroirs entre Lavelanet, Mirepoix et le Lauragais (pays de l'aure, du vent d'Autan, si complémentaire au Cers déjà nommé). Son esprit, son imaginaire ont suivi aussi le cours de l'Aude, entre les gorges de Pierre-Lys et Carcassonne mais, avant de suivre le fleuve vers la mer, avant de revenir sous le ciel qui a favorisé ses racines languedociennes, il tient à remonter en Ariège, non sans ressentir toujours le même frisson ardent : c'est de là-bas que les siens, les Mountagnols, sont descendus vivre dans la plaine...   


A l'image d'autres poisons qui avec le temps viennent gâcher le paradis exponentiellement perdu de l’enfance, Rieucros en Ariège, Rieucros des belles vaches, du bon lait et des yaourts, Rieucros si exotique des années 50-60 pour un petit méditerranéen, porte le même nom que la vallée en Lozère près de Mende, avec un camp de « concentration » pour les brigadistes internationaux de la république espagnole. Ces mêmes « étrangers indésirables[1] » qui ont joué un rôle si symbolique lors de la libération de Paris que les actualités mensongères et l’Histoire fallacieuse ont dû taire les noms des halfs-tracks de la Nueve « Guadalajara », « Brunete », « Teruel », « Ebro », « Santander », « Guernica », de « LA NUEVE », une compagnie de la 2ème DB de Leclerc, pour que cela fasse plus français ! Ce sont pourtant eux que sollicita le général De Gaulle pour se rendre à Notre-Dame, deux jours plus tard, le 26 août ! Il existe aussi une France du collaborationnisme coupable, du patriotisme veule, de l’esprit cocardier prétentieux, du retournement de veste cynique, spécieux !  

 
Il préfèrerait revenir sans arrière-pensée à ces cousins éloignés qui ont une ferme du côté de Pamiers avec des vaches, des poules, le cochon. Ils leur avaient fait la surprise après un 16ème de finale de 4ème série perdu contre Mirande. Le patriarche s’appelait Baptiste (les diapos de 1968 entretiennent la mémoire !). Papé Jean leur avait payé le restaurant à Varilhes, la salle surplombait l’Ariège, du pigeon au menu et les premières pommes-dauphine de sa vie. Et puis, les carcasses du père et du grand-père, béret sur la tête, se touchant presque devant lui, dans la Dauphine bleu séraphin, ça ne s’oublie pas. 
D’autres cousins habitaient à Escosse ; ils avaient des nouvelles plus qu’épisodiques. Léon de Béziers, le cousin cheminot marié à Marcelle, avait une Dauphine jaune, lui, mayonnaise ou crème pâtissière si vous aimez mieux ! Il revenait plus souvent à Rimont, non loin de Saint-Girons, pour la retraite. 

Montagagne / les vaches, l'école, l'église.
Sa famille directe descend de Montagagne, canton de Labastide-de-Sérou. En descendant de Pamiers, il faut prendre à droite la RN 117, traverser Foix dominée par le château de Gaston. Ah la N 117 ! Perpignan-Bayonne par le piémont pyrénéen ! Avant d’attaquer les lacets d’un versant boisé et sauvage, la route remonte le cours de l’Arize. A Nescus[2], en 1976, un vieux paysan labourait encore avec une vache joliment parée d’un « pare-mouches » sur les yeux aux couleurs vives d’un rideau de coton espagnol, au port de cornes fringant, complice avec ses vieux restés alertes qui déclarèrent avec gourmandise et un brin de solennité que chaque année, ils engraissaient encore le cochon. C’est la moyenne montagne mais Montagagne est déjà à près de 800 m, deux fois plus haut presque que Nescus dans la vallée. Il y était passé déjà, à l’occasion d’un périple à Lourdes, pour compenser auprès de sa grand-mère devenue veuve, manière de donner corps aux terres que les aïeux, du côté des hommes, avaient dû quitter à la fin du XIXème siècle. L’école abandonnée avec encore une carte Paul Vidal de La Blache au tableau, les fleurs perles-de-verre fanées du cimetière et dans le pré récupéré avec le temps par les voisins, une féérie de plusieurs centaines de papillons[3]. Au-dessus de toutes ces ailes bleues, le sentier vers le col des Marrous, la montagne de l’Arize, une empreinte d’ours dans la neige, les forêts, les estives, les myrtilles du mois d’août… Derrière, le Couserans, trois lignes de montagnes dont la dernière, crête frontière avec l’Espagne, où les glaciers ont laissé le mystère des cirques et des lacs. Le Couserans, terre des mountagnols partis faire les moissons, les vendanges, ou colporteurs ou montreurs d’ours. Le Couserans, terre d’histoire qui vit les Demoiselles, les paysans déguisés en chemises de femmes, faire la guerre contre les abus des puissants. Peut-on faire un rapprochement avec la lutte antérieure des Camisards des Cévennes ?    

Malheureusement le présent s’ingère dans ce regard serein sur les Pyrénées et tout ce passé sans lequel nous ne serions pas. Son venin s’indigère, attaque les souvenirs, la mémoire, tant de l’homme que du pays : un prédicateur intégriste islamiste a généré sa métastase jusque dans un petit village de l’Ariège[4]. Est-ce le retour par l’intérieur de la menace porteuse de terreur d’un islam originel, une menace plus virulente que le djihad de conquête pour une Méditerranée soumise au croissant, en moins d’un siècle après la mort de Muhamad, et foncièrement différente des razzias de pillage[5] ?

Dans la sérénité d’un matin agréable aux tenilles, des injustices révoltent, des révoltes grondent, des menaces tenaillent, l’Histoire à venir inquiète. Difficile de faire comme si. L’idée de revisiter le Sud ne pouvait se limiter à la géographie et au passé historique. Après l’euphorie des lendemains de guerre, les baby-boomers sont témoins de l’imminence des  bouleversements qui s’annoncent, de la dilapidation d’un héritage en principe seulement emprunté aux enfants...  
         
Après les « petites » Pyrénées, avec le Couserans ce sont les grandes, l’occasion de remonter aussi l’auge glaciaire de l’Ariège, vers l’Andorre. Nous prendrons aussi la route qui monte au Chioula et vers le plateau de Sault, dans l’Aude, en ne manquant pas de faire étape à Sorgeat avec ses maisons blotties au-dessus d’Ax-les-Thermes, un peu à l’écart. Ici, l’histoire du lieu, la mémoire, servie par des passionnés suivis et soutenus, contribue à entretenir la vie du village, l’Internet aidant.
La peste de 1631, l’émigration, le repas du cochon, les moissons, le battage, des contes, des histoires dont un sermon pour mettre en garde des ouailles trop enclines à se laisser aller, ne serait-ce que lors de la fête du village… Un morceau de bravoure en occitan, avec traduction, à collectionner !   

« ... Sauretz que cal garda galinos
Las teni dins la basso cour
Quant le rainart rodo à l'entour… » 1915, Jean de BALET dit Sauto Barraillo, curè de Sourjat, reproche aux mères permissives :
(Vous devriez savoir qu’il faut garder les galines Les limiter à la basse-cour Quand le renard rôde alentour).   



[1] « Camp de concentration », « étrangers indésirables », appellations officielles de 1939 ! 
Libération de Paris 24 août 1944 : "... Le jour-là, le premier officier de la fameuse 2è DB à entrer dans l’Hôtel de ville de Paris, déjà occupé par le Comité national de la résistance, était un Espagnol, Amado Granell, lieutenant de la Nueve. Et les premiers véhicules à entrer sur la place de l’Hôtel de Ville n’étaient pas –contrairement à ce que retiendra l’histoire officielle- les chars Romilly, Champaubert et Montmirail dont les noms fleurent bon la France profonde mais des half-tracks, des véhicules blindés plus légers et munis de mitrailleuses, pilotés par des Espagnols de la Nueve et nommés Guadalajara, Teruel ou encore Guernica..." 
Ces mêmes Espagnols qui ont assuré la sécurité du Général de Gaulle lors de son fameux discours sur Paris outragée... 
[2] A la ferme de Méras, Olivier Courthiade élève des races anciennes, travaille avec des animaux, prépare des plats du terroir et parle occitan ! 
[3] La moitié des papillons des prairies a disparu en 20 ans…
[4] Cette menace traumatisante date d’une paire d’années et le venimeux en question, « l’émir blanc de l’Artigat » vient d’être condamné à 30 mois de prison
[5] 732, la Bataille dite de Poitiers a eu lieu à Vouneuil-sur-Vienne, plus près de Châtellerault. Elle est importante plus pour conforter la prise de pouvoir carolingienne que pour initier une reconquête par les Chrétiens d’une Europe méridionale envahie par les Arabes et qui devait rester à l’islam plus de 700 ans ! 

vendredi 13 juillet 2018

1938-2018 LA CÔTE NARBONNAISE, Saint-Pierre-la-Mer par Jean CAMP

1938-2018 LA CÔTE NARBONNAISE par Jean CAMP[1]  extraits

Enfin… « extraits »… faut le dire vite puisque tout ce qu’a écrit Jean Camp sur les Cabanes-de-Fleury et Saint-Pierre-la-Mer est répété ici. 

Carte postale ancienne / grossissement.
 « … Engagez-vous maintenant le long de la Clape odorante : le sable est tiède, le vent léger et, certains soirs, les palombes envahissent les bosquets de pins aux parfums de résine. Saint-Pierre et sa plage aux reflets de mica, son rocher La Vallière avançant son front déchiqueté dans les vagues, sa tour trapue de la douane qui, jadis, surveillait l’horizon et ses villas à la bonne franquette attirent, chaque été, des milliers de fidèles. On y vient, attiré par le goût profond de la vie des nomades, pour jouir de la belle saison sous quatre pans de toile, cuisiner en plein air, dormir sur le sable et croire que, tout progrès aboli, on est un de ces primitifs tannés qui promenaient de la Grèce au Maroc leur indolence d’enfants du soleil…
Fuyons pourtant, car un haut-parleur enroué crache ses rengaines trop connues sur les huttes entoilées… »

Ce petit article se poursuit avec un paragraphe aigre-doux à propos de Narbonne-Plage. Ensuite, pour répondre à un titre pour le moins décalé, l’auteur accorde seulement une phrase ou deux pour Gruissan, La Nouvelle, La Franqui, Leucate. 

Ainsi, Jean Camp, éminent hispaniste, émigré de l’intérieur, complice d'un jacobinisme historique, victime consentante d’une « centripèterie » parisienne, ne cache rien de l’amour atavique et presque exclusif qu’il porte à notre coin, marqué par ce balcon de la Clape sur la plaine, l’Aude frontière qui glisse entre les peupliers puis les tamaris avant Les Cabanes, ce bout du monde qu’on aimerait voir à jamais préservé. A Saint-Pierre-la-Mer, il met l’accent sur l’ambiance à part de ce camp aussi bohème que nomade, sur les dunes et le « sable mouillé », que nous connaîtrons en tant que « camping sauvage » jusqu’à son interdiction, au milieu des années 70. 

L'estiu a la mar


[1] EN LANGUEDOC MEDITERRANEEN / Revue des Agriculteurs en France 8, rue d’Athènes PARIS / Supplément au numéro de juin 1938.