mercredi 9 avril 2025

BALADE à AUDE (3) Interdit aux moins de 70 ans !

ATTENTION ! article INTERDIT aux moins de 70 ans et même aux âmes sensibles d'âge autorisé... 

« ...Sous ses grelots légers rit et voltige encore,
Tandis que, soulevant les voiles de l'aurore,
Le Printemps inquiet paraît à l'horizon... » 

Indigo-zinzolin ? 

Oui, malingre, chétif mais je ne peux le renier, mon premier de l'année, fin mars. En huit jours, c'est une véritable explosion de coquelicots, d'iris  et la bourrache presque en tapis... 

Des vraies ? 


Comme pour contredire le  « Printemps inquiet » d'Alfred de Musset, les fleurs sauvages ou ensauvagées semblent se rire des bourrasques du Cers, ce jour-là, fortes et pressantes pourtant de plus d'une centaine de kilomètres par heure : l'iris rit de devoir rabattre ses jupons indigo- zinzolins, ceux du petit coquelicot ne s'envolent pas non plus. Sinon, pour résister, faudrait-il être en plastique ? du bout des doigts se confirme que non : ces fleurs n'ont pu qu'échapper à un jardin. 

Descendre le chemin vicinal de la plaine, le long, d'abord, de la Cave de la Communauté... un champ, jadis de melons, m'oblige au souvenir de mon pauvre cousin Jacky (1952-2007). Le fossé change vite de nom, prenant celui du dernier affluent du fleuve, au cours si original depuis la cuvette de l'Étang, en principe fermée et que les hommes ont pourtant réussi à assécher en lui faisant passer les collines. 

Merci l'IGN !


Un peu en amont de ce Ruisseau du Bouquet, à Aigos Claros, le grand-père de Jacky, mon grand-oncle Noé (1901-1978) entretenait un jardin fertile grâce à une posaranca, un balancier pour puiser et remonter l'eau de l'arrosage (« chadouf » en “ français ” !). Jacky, Noé et entre les deux, encore d'un commerce des plus plaisants, le père, Norbert (1924-1989), mon parrain. 

Détournez-vous, vous dans la fleur de la jeunesse, d'un propos qui devrait être interdit, disons, aux moins de 70 ans car après, pour ceux qui vieillissent petit à petit, l'idée de la mort se domestique, bien que couplée à celle de la vie en fleur, à l'image d'un printemps enthousiaste, présomptueux... Pour preuve, au grand soleil, le vélo qui file, vent arrière, bien huilé, sans bruit parasite, même avec l'air, la voix de Brassens (1921-1981) en tête, sur une partie du poème de Lamartine (1790-1869) « Pensée(s) des Morts » (le mot se retrouve aussi au pluriel). Brrr, désolé, décrochez aussi, âmes sensibles de plus de 70 ans ! Pour ma défense, Lamartine a alors 40 ans ; dans sa famille c'est une véritable hécatombe, la tuberculose, le choléra ont frappé. Néanmoins, lui même a commenté : 

« Cela fut écrit à la villa Luchesini, dans la campagne de Lucques, pendant l'automne de 1825 […]

J'écrivis les premières strophes de cette harmonie aux sons de la cornemuse d'un pifferaro aveugle, qui faisait danser une noce de paysans de la plus haute montagne sur un rocher aplani pour battre le blé, derrière la chaumière isolée qu'habitait la fiancée ; elle épousait un cordonnier d'un hameau voisin, dont on apercevait le clocher un peu plus bas, derrière une colline de châtaigniers. C'était la plus belle de ces jeunes filles des Alpes du Midi qui eût jamais ravi mes yeux ; je n'ai retrouvé cette beauté accomplie de jeune fille, à la fois idéale et incarnée, qu'une fois dans la race grecque ionienne, sur la côte de Syrie. Elle m'apporta des raisins, des châtaignes et de l'eau glacée, pour ma part de son bonheur ; je remportai, moi, son image. Encore une fois, qu'y avait-il là de triste et de funèbre ? Eh bien ! la pensée des morts sortit de là... » Source « Pensée des Morts »Wikipédia. 

Monsieur de la Palice en conviendrait sans conteste : la vie est bien plus forte que la mort ! (à suivre)


dimanche 6 avril 2025

BALADE à AUDE, vandales et infects (2)

 Laissons le cabanon abandonné, livré à quelque chemineau des temps modernes, de ces asociaux ou pas gâtés par la vie jusqu'à ces marginaux qui ont pu s'y abriter mais qui laissent des traces trop visibles de leur passage, de leur squat. Si n'étaient que les cendres d'un feu pour se réchauffer, pour cuire, souvent c'est souillé par des ordures, des inscriptions donnant plus l'idée d'une rancœur contre la société, d'une intolérance agressive plutôt que d'une empathie solidaire ; pour preuve, alors qu'on voudrait voir si un râtelier, une mangeoire, parlent des chevaux compagnons de travail, tant la souillure racle la gorge, le mouchoir sur la bouche, on craint même de passer le seuil d'un tel havre déserté... En outre, à propos d'autres, catégorie de ces nouveaux occupants, propriétaires, héritiers ou illégaux, leurs chiens, garderaient-ils des cambrioleurs, restent souvent libres de s'attaquer aux promeneurs, manière d'interdire le passage légal devant ces métairies. Aujourd'hui dans le rejet d'autrui, ces mas, ces granges d'une vie d'avant, restaient alors interdépendants du village, de toute une communauté connexe. 

L'Horte d'Andréa sous un angle du souvenir...  

L'Horte d'Andréa, justement, aujourd'hui fermée au regard par force tôles et panneaux de bois dépareillés, jadis avenante avec sa treille des beaux jours. Andréa venait régulièrement vendre sa production potagère au fond d'une maison donnant sur l'ancienne place du marché à Fleury (1). 

Au-dessus du portillon, en attendant les pétales blancs, l'habit vert du rosier rustique... et pour cause de soleil aveuglant quand l'âge infléchit la vision, mon empreinte digitale heureusement, seulement sur la photo...  

En revenant vers Notre-Dame-de-Liesse, pour ne pas dire vers l'autoroute qu'il faut longer, la grange encore mentionnée sur la carte IGN Béziers 7-8 (2) n'est plus. En reste le jardinet à l'étroit sur la rive, du temps de Cadène, et son rosier grimpant promettant des fleurs blanches, mais son terrain cultivé avec au moins un cerisier puis des melons d'été n'existe plus que dans le flou des mémoires. 


Avec José, mon pauvre ami parti le 26 février 2024, nous occupions régulièrement un coin de pêche au muge, bien caché sous des guigniers encore généreux en arrière-saison. Là encore, la rivière me laisse le choix ou non d'en garder le souvenir. Plus pitoyable, ce qui demeure du coin affouillé par les eaux mué en dépotoir... aux vandales de passage se joint l'inconscient ordurier ordinaire... 

Toujours sur ce retour, il me semble croiser Néné, ancien voisin de l'avenue de Salles, qui, avec les jeunes de sa suite, vient voir où en est l'immersion (3) destinée à contrer les remontées de sel dans les vignes de la plaine. (à suivre)  

Maison de l'ancienne place du marché à Fleury. Photo : Josette Saborit-Dolques.

(1) de ces maisons détruites pour mettre l'église en valeur et faire une grande place ouverte agrémentée de poires d'or (symbole du village Pérignan) sur des jeux d'eau certes raisonnables mais à sec depuis que les sécheresses affectent notre bordure méditerranéenne. Je dois à Josette les précisions sur Andréa et cette maison de village où son arrière-grand-père fut jardinier ; elle continue de cultiver et de partager ses précieuses connaissances sur la vie passée du village, présente aussi puisque ceux de son âge (classe 47) auront le plaisir de retrouvailles annuelles autour d'un repas bien partagé. 

Josette fut invitée un jour à entrer dans la demeure d'Andréa, bien arrangée. Mon ami Jean-Pierre, grand marcheur alors, m'a eu dit avoir parlé avec la femme du lieu (ce devait être Juliette, une des filles). 

Désolation, bien des années plus tard, à la vue de l'intérieur saccagé, des photos à terre et souillées, œuvre d'êtres infects ne respectant rien (témoignage de Josette).

(2) de 1972, correspondant alors à ce que nous appelions “ carte d'état-major ”. 

(3) Avant que le fleuve travailleur n'apporte petit à petit à son delta, ici était la mer autour de l'île de la Clape.