jeudi 22 février 2018

LA MER ENTRE PARENTHÈSES / St-Pierre-la-Mer, Les-Cabanes-de-Fleury.


Nous avons laissé Paulou, viticulteur en villégiature dans sa baraque de toile et de tôle, sur sa dune, les jumelles pointées sur un cargo au large, entre Sète et La-Nouvelle.
https://dedieujeanfrancois.blogspot.com/2018/01/mistral-fernandel-pagnol-arene-beart.html (30 janvier 2018).



La mer. Le symbole du bateau s’en trouvait joliment inversé car il n’était donné d’entendre, sobrement encore, que le désir de revenir pour ceux, ces émigrés de l’intérieur, qui avaient dû partir. Sauf que, loin de cesser, l’hémorragie a continué, plus fort encore à cause des crises du vin. Le pays saigné s’est rebiffé. Le Larzac qu’il fallait défendre a réveillé aussi la braise sous la cendre bonhomme des Languedociens. La colère, l’éveil des consciences a été instinctivement porté par la langue d’Oc avec le slogan « VIURE AL PAÏS », chanté par un instituteur de Couffoulens dans l’Aude :

« … Vos vau parlar d'un país
Que vòl viure.
Vos vau parlar d'un país.
Que morís[1]… » Claudi Marti (1940).

Le tenilleur aussi dut partir pour la ville. Lyon, de bons souvenirs quand même (normal à vingt-cinq ans) mais les barres d’HLM vingt-et-un jours une fois sans voir le soleil, ça ne s’oublie pas. Et vingt-et-un jours de décalage pour voir les bourgeons des platanes débourrer, un crève-cœur…
Bien sûr, à vingt-cinq ans, une tendre et douce, mignonne, cordon bleu, deux bambins adorables, le désir d’avancer sans « si » instillant le doute, l’envie de garder le cap sans chavirer ni sancir, sans même se douter que ça puisse tanguer… La vie emporte comme les flots vigoureux du Rhône. Mais quand le fleuve impétueux s’avoue impuissant à vous ramener au pays dans le Sud, le syndrome du bateau qui passe peut soulager. Romantisme ordinaire, aventure par procuration, baume au cœur néanmoins, en chanson encore…

« … Quand je vois passer un bateau
Je rêve de me foutre à l'eau
Et n'ai besoin d'autre Sésame
Que d'être là, à mon piano,
A rêver sur la gamme. » Guy Bontempelli (1940-2014).    

La mer. Le soir, une flottille de voiles latines part des Cabanes : les barques catalanes pour la pêche de nuit, au lamparo, pour des filets renflés de poissons bleus d’argent...
En été, le clair crépuscule et le Golfe faussement « tendre » vu du bord (avec le Cers, les vagues ne se forment qu’au large) ne peuvent évoquer les Travailleurs de la mer de Victor Hugo (1802-1885)


« … Lui, seul, battu des flots qui toujours se reforment,
 Il s'en va dans l'abîme et s'en va dans la nuit.
 Dur labeur ! tout est noir, tout est froid ; rien ne luit.
 Dans les brisants, parmi les lames en démence… » Les Pauvres gens.

Misère mise à part, même pauvre, notre Méditerranée sourit encore. Mais début septembre, pour la rentrée, les pieds à nouveau contraints, entre Rhône et Sâone, le sourire est crispé…  


[1] d = h × ( 12742 + h ) {\displaystyle d={\sqrt {h\times (12742+h)}}} « … Je vais vous parler d’un pays qui veut vivre. Je vais vous parler d’un pays qui meurt… »  

Photos autorisées : 
1. Une idée des baraques sur le sable à saint-Pierre-la-Mer 1952. 
2. pxhere cargo grossi. 
3. wikimedia commons barques catalanes Author Ville de Canet-en-Roussillon. 

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