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dimanche 22 septembre 2019

LA RÉCOLTE A ROUCH / Vendanges à Salles-d'Aude


Nous avons idée que  les vignes sont sur le territoire de la commune et pourtant, au hasard d'un héritage sûrement, l'une d'elles, à Rouch, pour l'oncle Noé, se trouve à Salles d'Aude, tout comme pour mon arrière grand-mère Joséphine, qui en avait une al Fount de la Léquo, à Vinassan.
Journal des vendanges de 1939  (suite).
Vendredi 22 septembre. Toujours pour Norbert et l’oncle Noé. Nous sommes allés vendanger à Rouch (on prononce « Routch ») la vigne que l’oncle possède à Salles, après le stade. 26 comportes, 8 degrés 4.
Le matin, il se met à pleuvoir. 

Pas facile de publier ce journal des vendanges 1939 quand ce qui change au fil des jours est que "Paulette s'est fait piquer" ou que "Le matin, il se met à pleuvoir". Pas possible d'en rester à ces phrases trop sèches...  Même celui qui les a écrites nous l'a confié : 

"...J’ai voulu en faire le compte rendu succinct, mais au bout de trois ou quatre jours ma plume fatiguée devait s’arrêter. Qu’importe ! Ce vieux cahier rose « Standard » de la « Grande Librairie Breithaupt-Cariven »,[…] ce vieux cahier donc en porte témoignage..."

Quoi qu'il en soit, je suis le premier à en remercier l'auteur, D'abord je lui dois d'être là et puis il n'a que 17 ans en septembre 1939. Et comme ce journal de vendanges ne peut que nous donner l'envie de prolonger, après avoir accroché les comportes, après l'évocation des bébêtes du vignoble, cette fois nous aurons l'opportunité de parler de nos voisins Sallois et de leur village. 


Rouch ? Merci aussi aux cartes de l'IGN qui nous disent où ça se trouve. Oui, en direction de Coursan, en gros parallèlement au lit artificiel de l'Aude, en laissant sur la gauche le moulin de Céleyran. 

Salles-d'Aude, pays des Fagots, compte nombre d'éminents personnages, Jean Camp, Alexandre Macabiès, Clovis Roques, l'abbé Deffuant. Et cela ne pouvait pas mieux tomber puisque le premier nommé a écrit sur la vigne les vendanges, le vin. 


Jean Camp (1891 - 1968). Auteur dramatique, poète, félibre, hispanisant, conférencier, il a écrit le roman Vin Nouveau en 1929. 

Un court extrait sur les vendanges : 
"... Porteurs et presseurs sont à l'affût du moindre grappillon oublié sous les pampres. On l'arrache d'un coup pour en barbouiller la joue de la vendangeuse négligente. La fille a beau baisser la tête, opposer sa croupe tendue à l'assaillant, celui-ci n'est pas une mauviette. Muscles gonflés, il dompte la volonté rebelle qui l'affronte, tord d'un poing rude les bras hâlés qui veulent l'affronter, écrase la grappe tiède sur la joue brune ; puis, goulûment, dans le brouhaha excitant que fait l'assistance, il mord le visage en sueur que le raisin rougit, les lèvres humides, le cou flexible, et ne lâche sa victime que lorsque, de guerre lasse, elle lui a rendu ce baiser goulu qu'il vient de lui donner, âcre et sucré et enivrant comme l'essence même de la vendange..." 


 

 


samedi 21 septembre 2019

LA POUSARANCO DE L'ONCLE NOÉ / Les vendanges 1939 à Fleury.

Jeudi 21 septembre 1939. Nous vendangeons aujourd’hui pour l’oncle.
Comportes remplies : 62 à 7 degrés 2. Nous sommes à Aigos Claros. 


Dernier ressaut du ruisseau du Bouquet (1) : Aigos Claros, encore un tènement au nom limpide et qui nous emballe plus particulièrement parce que notre inimitable oncle Noé y entretenait un jardin des délices. Et pour les mille et un légumes du potager, l’oncle puisait l’eau avec une pousalanco (ou pousaranco ?) fièrement pointée vers le ciel quand elle ne prélevait pas l’eau dans une conque aménagée, certainement un pousadou (2) ! Ah qu’elle était jolie la noble conquête de l’oncle Noé ! D’où en avait-il eu l’idée ? La pouzalanco ? un balancier à puiser l’eau, le chadouf fameux de Mésopotamie ou d’Égypte. 

Chadouf_familial_en_Egypte Creative Commons Attribution Auteur Le plombier du désert. C'est vrai que l'image s'accorde autant que la felouque avec le fellah mais il suffit de se replonger dans l'Histoire et les souvenirs de Fleury pour retrouver la pousaranco de l'oncle Noé.
En été, les melons venaient bien au jardin d’Aigos Claros, du temps où comme pour les hommes, enfin, à en croire les femmes, il fallait en goûter dix pour en trouver un de bon ! En attendant, c’est du propre ces propos de dévergondées puisque souvent le premier amoureux était celui d’une vie... Au service militaire, l’oncle Noé écrivait à tante tous les jours et même dans l’âge, ils formaient un couple aussi soudé qu’attendrissant... Ah ! tante Céline qui donc testait les melons avec une comporte à côté... de quoi cumuler une cinquantaine de kilos ! Toujours gaie, elle sondait et goûtait en effet chacun d’eux pour n‘en garder qu‘une paire, le reste, la comporte, allant directement aux poules. Le temps n’était pas encore celui des melons toujours bons, c’était avant ceux de Canguilhem à Coursan qui ont fait la réputation du marché de Saint-Pierre... Et à parler de légumes, un maraîcher pays continue d’y faire pousser sa production puisque le jardin de Galabru père n’est pas loin en regardant vers la Glacière... 

La plaine de l'Aude à Fleury en regardant vers les collines de Nissan-lez-Ensérune.
 Aigos Claros est-ce entre les côteaux et la plaine ? A l’occasion de la récolte 1939, soit 62 comportes d’un faible degré, on est tenté de dire „la plaine“ où la quantité équilibrait la qualité moins productive des côteaux.  

(1)   Oui... je sais, certains n’osent pas me reprocher de n’avoir pas publié le dernier volet à propos du ruisseau du Bouquet... Quelle importance...
(2)   Pousa d’aigo en occitan c’est puiser de l’eau. 

Et le chadouf de Léonard de Vinci au Clos Lucé ?  commons wikimedia Author Duch

mardi 6 novembre 2018

EN PASSANT PAR RÉVEILLOU / Fleury-d'Aude en Languedoc

La route quitte la Combe Levrière. Après la trajectoire rectifiée de l'ancien tracé appelé les Esses, elle gagne le plat de Réveillou. 



Réveillou : non loin de la mer, plutôt que l'installation un peu bohème des cabanons et des caravanes en plein clapas avec quand même une paire de maisons en dur, entre les deux vignes à gauche, une ruine. Une ruine si modeste qu'en la voyant de la route, une célèbre petite chèvre aurait pu s'exclamer dans son patois : " Que c'est petit ! [...] comment ai-je pu tenir là-dedans ?". 

Alors que les domaines viticoles, les campagnes comme on dit, restent habités, seuls les éboulements et décombres, quand des vacanciers ne les ont pas acquis et restaurés, témoignent de l'occupation, encore un siècle en arrière, des anciennes métairies ou bergeries. Rien qu'aux abords de la route de Saint-Pierre, La Broute, Les Légers, Les Courtals, Crémat ou Naout, les Bugadelles,Tuffarel, Réveillou, étaient occupés. Sur le canton voisin, la Caune, la Pierre où habitait la famille d'un petit Jean, mon futur grand-père. Je le vois, passant tous les jours d'école, la barre des Karantes, la garrigue du Cascadel, un col de la Crouzette à 49 mètres d'altitude s'il vous plaît ! pour rejoindre la communale la plus proche, celle de Fleury... 16 kilomètres aller retour. 



A Réveillou, c'est notre bon oncle Noé, jamais à court d'un mot d'esprit, d'une boutade ou d'une blague, qui se rappelle à notre souvenir : 

"... Vesetz, vous voyez Réveillou, la ruine, mon ancêtre Andrieu y était installé à une époque où même les plus pauvres étaient accablés d'impôts (1), gabelle, cens et la dime, ce dixième de tout ce qui rentrait à la maison, qu'il fallait verser à l’Église... le curé devait faire le percepteur aussi... Et béh, mon ancêtre Andrieu, dix enfants dans cette ferme, une pièce unique, a eu l'idée de le porter son dizième pitchou, au ritou ! Il devait être gêné le curé ; c'était sûrement risqué de rouspéter atal, de se faire remarquer de la sorte. Heureusement, la Révolution était dans l'air du temps..."  

(1) Je crois qu'il aurait fait le rapprochement, aujourd'hui, avec les taxes à tour de bras que nous impose le sieur Macron... une de ses expressions typiques émaillerait nos échanges " Mè, de qué fa lou gouvernomént ?!" (Mais que fait le gouvernement ?!).  


  

jeudi 27 septembre 2018

VENDANGES, AMBIANCE… / Fleury-d'Aude en Languedoc


De gauche à droite, mes grands-parents Ernestine et Jean Dedieu, Céline et Noé Andrieu (grand-oncle) Photo François Dedieu.


Papa raconte que la bonne humeur est de mise, on rit beaucoup, on chante aussi dans les vignes. Les mains sur les reins, les vendangeurs se redressent pour honorer et applaudir un morceau plébiscité du répertoire familial, comme au dessert d’un menu de fête. On n'est pas à la pièce ! 
L’oncle Noé se fait prier avant d’entonner « Michaëla », l’histoire d’Antonio le pêcheur, éperdu d’amour mais pour qui tout s’écroule en un instant… 

(de g. à d.) Mamé Ernestine sous sa "galino", mon parrain Norbert, l'oncle Noé, tati Marcelle, papé Jean, maman (Jiřina francisé en Georgette... on francisait beaucoup à l'époque...), tonton Jojo. Photo François Dedieu.
Entre pudicité et réserve, les grands, qui, pour parler entre adultes, permettent de se lever de table, manière de ménager les chastes oreilles en envoyant les enfants jouer dehors, lèvent aussi un coin du voile au détour d’un couplet égrillard ou sensuel.

La mémoire retient :
« … Quelques paroles (j’ignore la suite) de Michaëla  (et non Manuela, premier succès de Julio Iglesias).

« … Quel est donc ce billet                       
Entre tes seins caché                                  
Michaëla ?                                                  
Et, pâle de fureur,                                     
Antonio le pécheur                                    
LUT  ce mot  
Qui lui brisa le cœur :
« Michaëla la brune,
Ce soir au clair de lune,
Comme par le passé,
Nous irons nous griser
De baisers… »
   (Pages de vie à Fleury-d’Aude / p. 296-297 / Caboujolette / 2008 / François Dedieu)

Ce pigeonnant balconnet que nous ne saurions voir ferait-il venir de coupables pensées aux tartuffes ? Non, non ! Chez l’oncle Noé, comme de bien entendu, c’est la diction très personnelle qui doit attirer l’attention lorsqu’il prononce « LUT ce mot » comme il le ferait pour le luth, l’instrument !
Quant à la chanson, de quand date-t-elle ? Qui sont son ou ses auteurs ? Par qui a-t-elle été créée ? Mystère… Il y a bien quelques demandes, quelques bribes sur les forums mais la piste se perd vite. A long terme, néanmoins, à l’occasion d’une nouvelle tentative, on peut trouver.  
 
Et s’il n’est pas possible d’entendre la chanson, et si l’oncle n’a pas eu l’opportunité de nous dire d’où il la tenait, nous en savons désormais d’autant plus, qu’avec la partition, la mélodie ne tient plus du secret  :

https://www.partitionsdechansons.com/pdf/15911/F.L.-Benech-Leo-Daniderff-Micaella-Mia.html

Micaëlla mia, chanson napolitaine  1910, paroles F.L. Benech / musique Léo Daniderff,

Bonsoir Micaëlla jolie,
Comment, n'es-tu pas endormie ?
- Pour te voir en secret,
Comme maman dormait,
Antonio, ce soir, je suis sortie !
Sur la mer la nuit est plus belle,
Partons tous deux dans ma nacelle »
Et sur le flot berceur,
Antonio le pêcheur
Dit bientôt à l'élue de son cœur :

REFRAIN :
« Micaëlla ma brune,
Ce soir au clair de lune,
Viens avec moi comme aux beaux jours passés,
Te griser
De baisers !
Tu m'as juré, ma mie,
De m'aimer pour la vie,
Moi je t'adore
Bien plus encore
Micaëlla mia !

Mais en la prenant par la taille
Antonio tout à coup tressaille
« Quel est donc ce papier entre tes seins cachés ? »

Compromettant, ce papier ? Alors c’est qu’elle n'a pas d'idée, Micaëlla !
Allons ne gâchons pas le sentimental de la chose, le romantisme tournant à l’aigre, au drame peut-être, parce qu’Antonio, qu’il soit napolitain, calabrais ou corse ou encore de Castille, languedocien voire catalan... a le sang vif, chaud, exotique et méditerranéen… 

Mamé Ernestine avec son grand tablier à escargots, souvent proche d'un oncle Noé treufet e aïssablé ! (moqueur, faisant des niches). Photo François Dedieu.

 PS : à Isa, ma cousine. Sois gentille si tu repiques une ou des photos, de mentionner la source "François Dedieu". Ou si tu veux "JF Dedieu"... je compte sur toi.