La route quitte la Combe Levrière. Après la trajectoire rectifiée de l'ancien tracé appelé les Esses, elle gagne le plat de Réveillou.
Réveillou : non loin de la mer, plutôt que l'installation un peu bohème des cabanons et des caravanes en plein clapas avec quand même une paire de maisons en dur, entre les deux vignes à gauche, une ruine. Une ruine si modeste qu'en la voyant de la route, une célèbre petite chèvre aurait pu s'exclamer dans son patois : " Que c'est petit ! [...] comment ai-je pu tenir là-dedans ?".
Alors que les domaines viticoles, les campagnes comme on dit, restent habités, seuls les éboulements et décombres, quand des vacanciers ne les ont pas acquis et restaurés, témoignent de l'occupation, encore un siècle en arrière, des anciennes métairies ou bergeries. Rien qu'aux abords de la route de Saint-Pierre, La Broute, Les Légers, Les Courtals, Crémat ou Naout, les Bugadelles,Tuffarel, Réveillou, étaient occupés. Sur le canton voisin, la Caune, la Pierre où habitait la famille d'un petit Jean, mon futur grand-père. Je le vois, passant tous les jours d'école, la barre des Karantes, la garrigue du Cascadel, un col de la Crouzette à 49 mètres d'altitude s'il vous plaît ! pour rejoindre la communale la plus proche, celle de Fleury... 16 kilomètres aller retour.
A Réveillou, c'est notre bon oncle Noé, jamais à court d'un mot d'esprit, d'une boutade ou d'une blague, qui se rappelle à notre souvenir :
"... Vesetz, vous voyez Réveillou, la ruine, mon ancêtre Andrieu y était installé à une époque où même les plus pauvres étaient accablés d'impôts (1), gabelle, cens et la dime, ce dixième de tout ce qui rentrait à la maison, qu'il fallait verser à l’Église... le curé devait faire le percepteur aussi... Et béh, mon ancêtre Andrieu, dix enfants dans cette ferme, une pièce unique, a eu l'idée de le porter son dizième pitchou, au ritou ! Il devait être gêné le curé ; c'était sûrement risqué de rouspéter atal, de se faire remarquer de la sorte. Heureusement, la Révolution était dans l'air du temps..."
(1) Je crois qu'il aurait fait le rapprochement, aujourd'hui, avec les taxes à tour de bras que nous impose le sieur Macron... une de ses expressions typiques émaillerait nos échanges " Mè, de qué fa lou gouvernomént ?!" (Mais que fait le gouvernement ?!).