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dimanche 21 août 2022

La GEOGRAPHIE modèle les HOMMES.

Juste une poignée (18 août 2022)

Vision depuis l'embouchure de l'Aude ; fin de ce panorama en partant des Pyrénées plongeant dans la mer, avec le Lauragais et le Tarn, avant le demi-tour vers le sud pour cette pêche aux tenilles... alors les pensées et l'imaginaire se tournent vers le nord du Golfe, la Provence, son haut-pays et au-delà...  

Saint-Felix-Lauragais wikimedia commons Auteur Asabengurtza

Le Lauragais de la polyculture, des volailles de grain, d’une humanité paysanne des années (50-60) si bien retracée par Sébastien Saffon (roman "Ceux de la borde perdue"). Loraguès aussi d’un cassoulet historique à Castelnaudary. Seuil de Naurouze, pays de cocagne pour le pastel où les moulins tournaient au vent marin devenu d’autan à l’intérieur des terres... Les rigoles de la Montagne Noire qui alimentent le Canal du Midi.

Ce tour d’horizon se termine avec le Tarn « en haut », la vallée du Thoré pour ses laines et le cuir, Mazamet connue internationalement pour sa renommée industrielle et Laurent Jalabert, champion cycliste... Castres pour son rugby et Jaurès, Lautrec, un patronyme que nous retrouverons, plus proche de notre village et là-bas pour un ail rose si doux en bouche.

Libre de plonger dans un panorama sans fond, dans de l’eau pourtant peu profonde, c’est inouï d’être ainsi emporté dans une exploration à côté, plus pittoresque et enrichissante qu’une vacuité de plage à cocotiers... non, je suis partial : à Mayotte aussi une culture ancienne est plus que respectable... " Chaque homme est une histoire universelle " disait Jules Michelet !

Comme le cheval dans la vigne, à un moment donné, au bout de la rangée, il faut tourner dans l’autre sens, surtout si l’instinct dit de revenir sur un possible banc de coquilles, reprendre le piétinement, s’aider de lents zigs et zags pour soulager les reins attelés à la lame qui fait geindre le sable. Tourner le dos aux Pyrénées bleues, au voyage en Espagne. 

Vers un nord toujours du Midi, quelque part à tribord, ce sont les collines de Pagnol, si cousines, par la géologie, par nature, de notre Clape. Avec la Provence, l’occitan vient, de son accent, de ses consonances, confluer avec la langue française même si le mariage entre la Durance et le Rhône n’a pas tenu, à cause des humains, pour l’économie mettant à mal la géographie (détournement des eaux), pour l’ethnocentrisme du français, langue du Jacobin dominant (qu’en est-il, chez nous encore, du romand dit francoprovençal ?). Et pourtant, ce n’est pas une ligne de crête des Alpes, montagne si présente pour l’Europe jusqu’aux Carpates de même nature, qui couperait l’entité occitane puisque la langue est officielle sur l'autre versant, dans les vallées italiennes !

Comme en pendant à l’Espagne, le cousinage avec l’Italie, le brassage avec l’immigration aussi, jusque chez nous bien que plus marqué de l’autre côté du Rhône, au point de figurer dans la littérature, la filmographie, je pense à Manon et aux charbonniers de Jean de Florette ; à Nice, les réseaux sociaux n’ayant pas que du mauvais, Bébert de Garibaldi, par ses dialogues avec sa mémé fait beaucoup pour garder un parler niçard qui nous reste familier !

Et ce cinéma italien, aussi proche des méridionaux qu’il est distant avec l’Europe nordiste ! Le Voleur de bicyclette ou la Strada d’un néoréalisme touché par la vie difficile des pauvres, à la télé, parce qu’au cinéma la programmation préférait  divertir avec les peplums et les westerns-spaghettis. 

La Durance vers Oraison wikimedia commons Auteur Wikicecilia

Pour passer en Italie, sur la route, Manosque de Jean Giono, Sisteron de Paul Arène... Le barrage de Serre-Ponçon (1), Briançon... Il est intéressant de constater que le Sud qui nous anime ne se limite pas à la façade méditerranéenne, Après les Pyrénées, les Alpes, pour Emilie Carles, Marcel Scipion et toujours la Durance descendant de là-haut.  05 Hautes-Alpes, 04, Alpes-de-Haute-Provence, oh la jolie appellation qu’on dit devoir à Jean Giono de Manosque. «L’eau vive», le film, on lui doit aussi. Comment ne pas se surprendre à fredonner «Ma petite est comme l’eau...» mise en musique et en chanson par Guy Béart. Comme la Durance « domptée » est emblématique des hommes triturant la nature à leur profit. En rejoignant Nyons par l’ancienne nationale venant de Gap, serait-ce en passant par la Drôme provençale, l’eau vive de l’Eygues fredonne de même en moi... 

(1) après une longue sécheresse, le lac a enfin vu son niveau au plus bas remonter de 20 centimètres (août 2022). 

samedi 19 décembre 2020

LE POUMAÏROL, un pays perdu (1)/ CES VIEUX SCHNOKS ERRANTS, QU'ON LES CONFINE, QU'ON LES VACCINE, QU'ON LES INOCULE !


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Serge et Roger, deux copains d'avant, du même village, désormais septuagénaires, se sont retrouvés dans une vieille complicité d'autant plus partagée que tous deux, outre les affres du temps, subirent jadis celles du divorce. 

Serge : " Mais si je te dis, il faut y aller ! Un pays perdu, dans les hauts, le plateau du Poumaïrol, tu peux chercher, rien sur la toile, juste une chronique complètement imprévisible sur les filles de là-bas ! C'est pour nous ! Tu sais, ça me fait penser à un film avec Michaël Caine mercenaire, il défendait une vallée perdue avec des gens encore en dehors d'une guerre terrible, celle de Trente Ans je crois... 

Roger : Michaël Caine ? il est mort non ? 

- Non je ne crois pas, c'est Sean Connery qui est mort, ils jouaient ensemble dans l'Homme qui Voulait être Roi, enfin quelque chose comme ça... Il est chouette cet acteur anglais, il jouait dernièrement sur Arte, un film sur la guerre froide, à Berlin... C'est fou, ces vieux films, j'aime tellement que j'ai du mal à me laisser embarquer dans les récents... 

- Je crois bien être comme toi : Arte, ils ont passé les Sept Mercenaires, Mon Nom est Personne et qu'est-ce que tu veux, j'adore, ces gros plans de grandes gueules ! Entre parenthèses ils ont programmé aussi les Grandes Gueules avec Bourvil et Ventura ! Je ne sais pas si c'est passé au cinéma Balayé. Tu te souviens, l'ambiance quand les Francis, Farinau, Arnaud et Kaiser, et ceux que j'ai oubliés (après tout ils n'ont qu'à nous faire coucou !), tapaient des pieds au fond de la salle chaque fois que ça dézinguait, avec le vieux Balayé qui les houspillait pour la forme. Alors ça riait, ça ricanait avant de chahuter de nouveau ! Qu'est-ce que tu veux, j'en ai encore les larmes aux yeux même si ce n'est plus de rire... C'était quelque chose, l'ambiance, en plus de celle du film... 

- Au moins on profitait du spectacle, encore gamins, sur les bancs devant, encadrés par madame à la caisse, et la mamé Calavéra pour les cacahuètes sans oublier le bambou de Balayé ! 

- "Fafa", "Patanet"... et les autres ? C'est malheureux la mémoire, même les surnoms m'échappent... 

- Et pardi, ça se travaille... 

- Et dire qu'Henri le mécanicien en a dressé une belle liste, remontant loin dans le temps mais aussi de ceux de nos âges... 

- Comme quoi ? 

Roger : A froid comme ça, je ne sais pas, tiens comme "Mazo" ou "Chuello", les pauvres, ça me fait quelque chose de penser à eux... J'aimerais avoir des nouvelles de "Lapanne" ... 

- C'est vrai qu'il s'en est sorti d'une... Tiens, j'ai croisé "Caïus" pendant le confinement...  

Roger : Tu as raison ! parlons des vivants, il vaut mieux et puis il faut les apprécier tant qu'ils sont là plutôt que les regretter une fois morts ! Comment il est Caïus ?

- Bien, pas un poil sur le caillou mais la ligne et toujours le même sourire malgré le confinement... Il faut vivre macarel ! Démarre ton engin, on y va, je te dis ! Ça va être chouette ! 

- Minute papillon ! Qu'est-ce que tu crois ? Tes filles du Poumérol, c'est pas les filles de Pomérol quand une loi méchamment assimilationniste obligeait à franciser même le nom de nos immigrés d'Espagne ? La famille Palmérola... Sinon ton Pomérol dans la Montagne-Noire, ça s'est perdu dans les brumes d'une France de paysans... C'est une vieille histoire ! Et puis il est loin ton coin ?

-  Si je te dis qu'on y va, c'est que ce n'est pas loin, dans le Tarn, aux limites de l'Aude et de l'Hérault ! Les vieilles histoires et les graillous, ça nous connait, même à deux... Alors... Et puis pas moyen cette année d'aller faire une sortie en Espagne, virus oblige !

Roger : Tu as prévu pour l'intendance...

- Écoute, j'ai une bonne barquette de cassoulet mais pas que de mounjetos, cuit avec les couennes, la saucisse, enfin, ce qu'il faut, pas encore congelé... Et du congelo, un bourguignon, ça te dit ? Et on achète en chemin, le pain en priorité et ce qui nous fait envie, des huîtres s'ils en ont, sinon des moules, on verra bien !  

- Hééé ! où tu vas si vite ! Le couvre-feu, tu y as pensé ? 

Serge : Quoi ? On a le droit de circuler non ? et à partir de vingt heures on bouge plus... de toute façon tu sais bien qu'à cette heure-là, ça fait plus d'une heure qu'on est à l'apéro... 

- Pétard t'es pire que les Chevaliers du Fiel ! 

- Tu crois que c'est du vrai jaune qu'ils picolent pur, sans eau ? 

- Et non heureusement, c'est ce genre de sketch qui demande l'exagération... A tous les coups, c'est de l'antésite... Si je te suis, sobres à midi et relâche le soir comme pour toutes nos virées... 

Serge : Oui, oui ! Aïe qu'elles sont jolies les filles du Poumaïrol ! 

- Holà ! plutôt que de dire que ce n'est plus de nos âges, disons qu'il n'est pas interdit de rêver, que nous trinquerons à leur santé, de loin ! Et attention aux 135 euros chacun, ça ferait cher la sortie ! Ils mettent 100.000 flics et gendarmes pour contrôler la nuit !

- Mais non, attends je te dis, la nuit on trouve un chemin forestier, ça nous connait... à l'aventure, en toute discrétion, toujours ! on a même le droit de sortir la table et le fauteuil à côté ! Alors tant que la santé le permet, si elle ne permet pas autre chose, un bon moment à passer, comme d'habitude, et puis de parler d'un temps qui ne reviendra pas ne peut pas faire de mal... 

- La table ? en décembre ? la nuit ? n'y compte pas... Sinon, impossible d'être et d'avoir été...

Serge : On peut plus... on peut plus... on peut ce qu'on peut et l'occasion fait le larron non ? méfi de l'eau qui dort... et des chercheurs de champignons !

Roger : Ce n'est pas l'eau qui nous fait dormir, plutôt ce qu'on picole surtout que pour parler des filles, on est bons... 

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- Qu'est-ce qu'on ne ferait pas avec la langue... Heureusement qu'on crapahute en balade et pour les champignons !

- Hé ! ça émoustille cette vie rustique même si à force le verre n'est plein qu'au huitième, quitte à compenser avec les coups en trop. La nostalgie nous fait boire. Au moins, ça nous ouvre l'appétit, puis, le ventre plein, on pète, on rote, on ronfle chacun dans sa bauge de sanglier solitaire ! 

Serge : Oui mais qu'est-ce qu'on ronfle ! Et si ce n'était que l'envie de festoyer, ne dis pas que cela ne nous garde pas en forme ! Et tu sais bien qu'il n'y a qu'une possibilité de ne pas mourir... 

- Et oui, c'est vieillir mais alors en vieux-jeunes ! La preuve, pour les filles du Poumérol ? Ount as trapat aco ? Où tu les as trouvées ?

Serge : Figure-toi que j'ai lu un post, écrit par "Djèou", sur Fleury et le coin... Tu le connais "le Djèou" ? c'est un petit canaillou celui-là, enfin un vieux canaillou comme nous, il annonce qu'il va écrire sur les raisins et les châtaignes, et l'air de ne pas y toucher... trois points de suspension après, il ajoute en sous-titre "les filles du Poumaïrol"... 

Roger : Et il est allé voir ? 

- Non, il l'a lu, il en parle, des Mountagnoles descendues pour les vendanges, les olives, les sarments... un mode de vie perdu, d'avant la guerre de 14...  qui a rejoint ces histoires de gentilles bergères... sauf que là, en groupe, elles n'hésitent pas à provoquer... des allumeuses...

- Et bien sûr, ce sang neuf dans les villages de la plaine laisse des traces. 

- Comme tu dis enfin, surtout qu'en groupe, elles n'ont pas froid aux yeux... Et même rien que d'être présentes, tu te souviens, les petites Espagnoles pourtant si réservées, elles en ont fait gamberger plus d'un à l'âge où ça fouette le sang...

- Je sais, près de soixante ans plus tard, on s'est dit bonjour avec une qui vendangeait chez Lamur. 

Serge : Et alors ? 

- Et alors rien, c'est comme la mayonnaise, si tu ne remues pas assez, elle ne monte pas ? Nous avions juste à nous dire que nous étions de la même colle, une certaine année et plus rien, juste un constat qui ne remue plus rien... 

- Pourtant, jusqu'où ne serait-on pas allés pour une fille, même à vélo... 

Roger : M'en parle pas, deux fois j'ai fait plus de cinquante kilomètres pour me prendre une claque d'avoir mis la main où il ne fallait pas... de bons souvenirs !

Serge : de bons souvenirs ??? 

- Bien sûr, j'étais jeune, je pédalais bien, en sifflant et en chantant même... "Jamais de la vie on ne l'oubliera..." ... la première fille qui nous claqua dans les bras... 

- Mais puisque tu dis que c'est de l'histoire ancienne...

- Sans l'ancien, pas de nouveau ! Mourons pour des idées, "d'accord, mais de mort lente", tiens, encore comme Georges, un de plus mort à soixante ans, tu te rends compte... Et cette grognasse de Lagarde qui ose dire que les vieux sont un problème ! 

Serge : C'est elle le problème oui, la tanèque qui pompe du fric parce que la retraite ne lui suffirait pas ! 

Roger : Brrrrrr.... Pour des idées de filles alors... je préfère le Brassens qui nous fait les portraits de Marinette, d'Hélène, de Margot, de Flora des neiges d'antan... 

- Et doña Sabine " Chantez, dansez, villageois, la nuit tombe...". On la chantera, tu vas voir. Et quand on sortira pisser, par-dessus les hêtres, les sapins et le brouillard, on les entendra faire la fête, les villageois du Poumaïrol... et lorsqu'ils nous verront, quelle hospitalité pour des voyageurs attardés comme nous... ils nous recevront à bras ouverts !

Roger : C'est ça, ils vont te donner leurs filles comme dans la Guerre du Feu, la peuplade qui veut éviter la consanguinité ! Méfie-toi qu'ils ne te brûlent pas comme Martin Guerre ! En attendant, regarde bien la météo qu'il a neigé il y a peu, je ne sais pas si le chauffage marche et la route glisserait trop pour mon engin...qu'on ne soit pas récupérés par les secouristes...

- Ils nous en voudront pas ! Nous leur chanterons : "Le vent qui vient à travers la montagne" nous a rendus fous... 

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