Dans tous les cas, c’est une atmosphère très méditerranée ; elle sature l’esprit : les rouge, bleu, blanc de la joute, le blanc de la chaux des murs, du phare, le bleu dit “ charron ” ou “ charrette ” (1), pourtant sur les portes et volets des maisons blanches du pourtour de la mer. Ah ! fredonner « bleu blanc... » de Marcel Amont (1929-2023) qui vient de nous quitter le 8 mars. Et comme pour ajouter à cette palette très Sud, discrète, la nuance ocre rose de la tuile canal, voyante, la touche verte des palmiers phoenix...
Le_Vieux_Phare_du_Grau-du-Roi 2010 Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported, 2.5 Generic, 2.0 Generic and 1.0 Generic Author Airair |
« Bleu, blanc... » l’impérieux appétit de vie pour le monde d’après 1945 et cet élan pour aller, pleins de curiosité bienveillante, vers les autres. : il y a de ça dans les peintures que ce cadre motive. Il y a aussi le pathétique d’un vieux monde, d’un “ vieux phare ”, comme les habitants du Grau disent avec, au pied, de vieilles barques aux voiles latines carguées.
Le_Grau_du_Roi-Pointe_de_l'Espiguette-Zone_humide 2015 Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International Author Daniel VILLAFRUELA |
Le vieux phare d’Aigues-Mortes, haut de 18 mètres, a fonctionné de 1829 à 1869 seulement : un rapide ensablement du golfe l’a rendu inopérant. Il sera remplacé par celui de l’Espiguette mais les gardiens continueront à occuper les logements, les conditions de vie dans le nouveau phare s’avérant trop difficiles l’hiver.
Entre mer et lagune, Le-Grau-du-Roi est un port de pêche dynamique, le deuxième derrière Sète mais le tonnage des prises ne cesse de s’infléchir, la flotte est de moins en moins nombreuse. Au Grau, on disait qu’après des jours de Mistral, le vent du sud pouvait donner de bonnes prises, et que s’il n’y a le Mijour qui fait danser les coques, ni le Levant, pas plus que l’Intre, une tramontane de l’intérieur, c’est calmasse, la pétole, un temps de curé.
Une autre ressource le long de la côte sableuse, jusqu’en Camargue, les tenilles (tellines, haricots de mer) et bien sûr le tourisme d’été.
Concernant surtout Agde puis Sète, notre intérêt avait versé vers les bateaux-bœufs. Au-Grau-du-Roi, jusqu’au début des années 60, existaient les « mourres de porc » (mourre pour museau). Quant au gréement des bateaux-bœufs, ces pêcheurs dérivés de la tartane provençale, notons un détail, à ce jour, attestant de l’importance de la langue mère :
* la mestre est la grande voile latine.
* les focs sont lou trinquet, lou gran et lou pichot défès...
Un gréement basique permettant une manœuvre souple, ne nécessitant que peu de matelots, rappelé ici pour ses noms en occitan... (source l’excellente revue du Chasse-Marée).
(1) Tiré du Pastel des teinturiers aussi appelé “ Herbe du Lauragais ”.