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lundi 2 mars 2020

LES VIOLETTES Explications de textes / Fleury-d'Aude en Languedoc.

Pas question, comme pour le bac, d'expliquer, de dégager un quelconque intérêt philosophique. Il ne s'agit pas de critiquer. Quant à notre opinion, elle ne peut qu'abonder, s'agissant de textes choisis. Dans un tableau fleuri de coucous, jonquilles et violettes (mettez moi aussi une giroflée parfum d'enfance s'il vous plaît) nous nous ferons narcisses mais pour prouver que tous les individualismes issus d'un même terreau donnent quand même un bouquet de vivre ensemble... 
 
Des frères Rosny, je ne connaissais que l'aîné, auteur du célèbre "La Guerre du Feu". L'ai-je seulement lu tant l'adaptation de Jean-Jacques Annaud se superpose, imprimant dans nos esprits à la fois l'animalité sexuelle suivie d'une humanité amoureuse et sous une magnifique pleine lune, la beauté et le mystère de la planète Terre, plus prégnant encore quand les menaces présentes se précisent...  


A gauche en regardant la mairie, l'ancienne école de garçons.
Mais restons-en à cet amour infini qui monte dans l'âme, si bien porté par la poésie, si bien traduit par le jeune Rimbaud qui, à seize ans à peine, écrit "Sensation". Pour les écoliers, le ferment poétique est particulièrement marquant. Mars rime avec floraison et printemps et Théophile Gautier reste un passeur d'émotions. Pour un enfant aussi déphasé que rebelle, la matière "Récitation", en apparence stricte, martiale, donnait, de gré ou de force, l'ouverture pour le renouveau, la nature, les élans de vie ravivés.    
"Regardez les branches comme elles sont blanches..." : un vers, un rythme, une rime suffisent à ouvrir la porte. 
Devenue le siège de la police municipale, ma vieille école est aussi un des bureaux de vote du village. Plus que le bulletin et le contrôle administratif du votant, s'ils savaient qu'en secret, à la vue des verres dépolis du bas censés interdire la rêverie, mon âme sort toujours une clé buissonnière.  

"Tandis qu'à leurs œuvres perverses,  
Les hommes courent, haletants, 
Mars qui rit, malgré les averses, 
Prépare en secret le printemps..." Le printemps, encore Théophile !

Des extraits, un texte très coupé encore, comme pour Gaston Bonheur jouer avec la légalité (70 ans de droits protégés après le décès de l'auteur) même si l'ebook est libre et gratuit,

 https://www.ebooksgratuits.com/html/colette_vrilles_de_la_vigne.html#_Toc131670736

même si mes écrits n'ont rien de lucratif. Faites l'effort de retrouver ce texte. Colette (1873-1954) y relate une conversation, une complicité avec son aimé... sinon son aimée, Colette ayant eu une vie si libre de mœurs (bisexuelle, détournement de mineur, pratiques intimes révélées...). Quoi qu'il en soit même si ce fut confirmé pas plus tard qu'hier, à la télé dans "Sous les jupons de l'Histoire" (et oui rien de plus racoleur que des allusions et incitations au sexe...), pour Colette, pour nous et pour toi, avec les violettes, c'est un retour en arrière sur "les printemps de ton enfance". 

Grands pins à Pézenas, quartier de la gare du Nord.
Pour les avoir aimées, si petites et cachées au pied des grands pins si voyants (voir plus tôt sur mes pages), j'ai redécouvert et encore vibré (bien sûr qu'il faut relire et relire toujours un livre, des lettres aimées : les écrits ne livrent chaque fois que des parcelles de leur trésor). 
Oh que ces quelques lignes de mon père m'ont touché. 
Avec la 504, la balade au pays de Pierrou fait défiler notre Languedoc si divers. De la plaine qui forma le plus grand vignoble au monde (aujourd'hui c'est la Mancha, le pays de Don Quijote, en Castille), on passe en 50 kilomètres à peine à vol d'oiseau de la mer au Massif Central, du Golfe du Lion aux Monts-de-l'Espinouse et plus haut encore aux Monts-de-Lacaune, le pays de Pierrou. je ne suis plus sûr mais je crois que c'est autour de la commune de Gijounet (José si tu nous lis, serais-tu très occupé en ce moment...). Pierrou et les siens, comme les nôtres descendus de l'Ariège pour le bas-pays, a fait un jour et pour toujours le trajet inverse. Pierrou c'est la maison d'en face, dans cette rue qui alignait ses portails de remises et de caves dont une avec une poutre cintrée, toujours gaillarde, en guise de linteau. Pierrou avait les bras plus longs que sa femme pour ouvrir les volets le matin ; la bonne occasion pour se dire bonjour et échanger quelques mots au hasard de l'inspiration. A nous les violettes, les fraises des bois puis les châtaignes et les champignons, l'en-cas ou le pique-nique sous les tons chauds de l'automne. Aux Mountagnols, les fermes isolées et presque en autarcie, les pentes difficiles, les sols pauvres, le long hiver de froid et de neige sur plus de cinq mois !.. Pourtant, que la montagne est belle... 
Et ces deux lignes seulement sur les violettes du grand parc délabré de la comtesse à Saint-André-de-Sangonis ! Mais si fortes ! Par quelle intuition inconsciente ai-je pu parler il y a un mois à peine, de ces mêmes petites fleurs, courbées sur leurs tiges frêles comme pour une révérence timide, dans le grand parc de Saint-Christol, à Pézenas, toujours dans cette même plaine de l'Hérault ? 


Mon père, précepteur logé du petit comte (1953) puis professeur locataire d'un autre parc (1960) avec, entre les deux, un séjour de trois ans au Brésil pour trouver de quoi nourrir les siens. 
Et pour finir à Saint-André où, malgré les plans détaillés (geoportail), les banques de photos, il m'a été impossible de retrouver le château et le grand parc délabré... Rien non plus sur le passé de cette branche Worms de Rumilly, les châtelains dont le village n'a rien voulu garder on dirait... 

Sa rue, sa maison.

à regarder si l'incendie continue dans la garrigue. (2013)

Quant à la rue où est sa maison, à présent, en face, des stores sans cachet, électriques et qui ne s'ouvrent plus tels ces volets d'hier, sur un bonjour partagé au soleil du matin.        

dimanche 1 mars 2020

LES VIOLETTES DE SAINT-ANDRÉ / Les écrits restent...

Violettes Wikimedia Commons Auteur Cronimus

«... les fossés se remplissaient de coucous et les dernières primevères s’épanouissaient, mêlées à l’herbe des prairies…. Des bordures de violettes embaumaient l’air, tandis que, plus orgueilleux, des narcisses marqués d’incarnat, des jonquilles jaunes se dressaient sur leurs tiges creuses. Les tulipes, semblables à de petites flammes , égayaient un parterre.» J.H. ROSNY Jeune, La Leçon de la Vie. (Biblioth. d’éducat.)
 
Théophile Gautier 1856 wikimedia commons Author Nadar

« [...] Tout en composant des solfèges,
Qu'aux merles il siffle à mi-voix,
Il sème aux près les perce-neige
Et les violettes aux bois...»
Premiers signes du Printemps. Théophile Gautier
Colette 1932 BnF Domaine public

«... Et les violettes elles-mêmes, écloses par magie dans l’herbe, cette nuit, les reconnais-tu ? Tu te penches, et comme moi tu t’étonnes ; ne sont-elles pas, ce printemps-ci, plus bleues ? Non, non, tu te trompes, l’an dernier je les ai vues moins obscures, d’un mauve azuré, ne te souviens-tu pas ? […] Plus mauves… non, plus bleues […] à tes narines le parfum invariable de ces violettes changeantes [...]  regarde comme moi ressusciter et grandir devant toi les printemps de ton enfance… Plus mauves… non, plus bleues […] Une enfant prisonnière le jour, dans une école, et qui échangeait des jouets, des images, contre les premiers bouquets de violettes des bois, noués d’un fil de coton rouge, rapportés par les petites bergères des fermes environnantes… Violettes à courte tige, violettes blanches et violettes bleues, et violettes d’un blanc-bleu veiné de nacre mauve, - violettes de coucou anémiques et larges, qui haussent sur de longues tiges leurs pâles corolles inodores… Violettes de février, fleuries sous la neige, déchiquetées, roussies de gel, laideronnes, pauvresses parfumées…Ô violettes de mon enfance !... »
LES VRILLES DE LA VIGNE (1908). Le dernier feu. Colette.
 
Lacaune_musée_enfant_sauvage Wikimedia Commons Auteur Fagairolles 34

«... je t’ai envoyé hier, avec « La mésange », ce magnifique texte de Colette qui évoque si bien les modestes violettes. A ce propos, nous étions allés un jour, maman et moi, avec la 504, au pays de Pierrou, le père de Toutou Hérail, et grand-père de José, et ces violettes parsemaient les petits fossés bordant la route. Les maisons abandonnées prêtaient à l’imagination des tableaux rustiques enfouis dans le passé, et j’entendais Pierrou me dire : « Nous étions voisins : il habitait à peine à deux heures de chez moi. » Il entendait bien sûr « deux heures à pied », soit environ 8 kilomètres. J’avais aussi trouvé ces petites violettes si odorantes dans le grand parc délabré mais si évocateur du château de Saint-André-de-Sangonis, où elles avaient choisi un coin bien à elles que nous fréquentions rarement...»
CORRESPONDANCE 2003. François Dedieu. 

Vue_des_Monts_de_Lacaune_du_Pic_du_Montalet Wikimedia Commons Author Céline Rabaud

2587 pages copiées-collées sans compter les lettres papier. Prendrai-je seulement le temps de tout reprendre ? En attendant ce qui est pris date de mars 2003. Bien sûr, c'est grappillé dans plusieurs courriels, papa n'était pas du genre à se mêler avec de grands auteurs reconnus. Au contraire, pour lui comme pour moi, c'était puiser et partager puisque nous avions un volet littérature dans nos affinités culturelles. Me concernant, c'est vraiment par politesse et pour ne pas passer pour ce que je ne suis pas que je le cite en dernier. Il n'empêche, cela me permet de traduire comme dans un scenario crescendo, la force trop parlante d'un sentiment aussi profond qu'impérissable.