De la part de ceux qui ont de la bouteille, des responsabilités et du
bagou, surtout pour noyer le poisson puis le rouler dans la farine (1),
nous avons droit, soit au silence assourdissant, soit au « ni
responsable ni coupable ». En écho au mutisme du Gouvernement de la
République à Mayotte (voir la 1ère partie de l’article), voyons les
arguties des irresponsables innocents...
Le « ni responsable ni
coupable » émane des hauts fonctionnaires chargés de faire appliquer la
loi, toute la loi, rien que la loi alors que Mayotte n’est pas tout à
fait la France tant que le décalage n’est pas rattrapé (entendons nous).
Grand écart ou pas, comme me l’asséna, en 1991, ce brave inspecteur de
l’Éducation Nationale, « un fonctionnaire doit choisir sa sécurité
plutôt que son honnêteté ! » ! Parce qu’il ne faut surtout pas être le
premier à dire que ça va mal, par honnêteté ! La Fontaine nous « fit
bien voir » ce qui arrive à « ce pelé, ce galeux d’où venait tout le mal
» : rien n’a changé depuis ses animaux malades de la peste (2). Le
risque est moins sanglant de nos jours mais il serait mal vu de
reconnaître ses erreurs, de s’exposer en pointant les confrères, surtout
quand cette solidarité de corps conforte une promotion espérée que la
probité compromettrait. Entre parenthèses, cela justifierait peut-être,
de la part de fonctionnaires rongés de remords, la création de
collectifs alimentés anonymement pour reconnaître les errements d’une
administration institutionnellement complice.
Venons-en au « tout
ce que j’ai fait pour toi », l’argument-roi en surenchère du « ni
responsable ni coupable » ! Le 3 avril, en effet, le directeur de
cabinet du vice-rectorat et le secrétaire général s’exprimaient sur les
violences et le droit de retrait qui s’ensuivit de la part des
personnels du collège K1 (Kaweni... la banlieue aux favelas).
Conformément au processus décrit plus haut, un des représentants de
l’autorité a osé et insisté à plusieurs reprises sur « L’école ne peut
pas tout mais elle fait beaucoup ». Celui-ci a confirmé ensuite que le
problème était pris à bras le corps avec les 120.000 euros prévus pour
la réfection du grillage de protection, que l’école ne pouvait pas
devenir la prison de Majicavo et que si c’était pour faire des murs, il
se serait fait maçon !
En prenant soin d’appliquer notre grille
de lecture, si ce monsieur sous-entend que les parents et peut-être
d’autres instances de l’État sont concernés, la deuxième partie de son
leitmotiv nous heurte car le « beaucoup » n’est jamais « trop »
concernant nos enfants ! Imaginez un enseignant qui affirmerait qu’il
fait « beaucoup » alors que la conscience et la modestie lui
commanderaient plutôt de dire qu’il « fait ce qu’il peut » ! Il réduit
ensuite l’ouverture de l’école sur le quartier et l’extérieur, à
l’édification d’un mur de prison... Manque de chance, coïncidence, huit
jours plus tard, c’est madame le vice-recteur qui nous informe qu’une
butte doit être élevée, au collège de Majicavo, justement, parce que
depuis leurs grilles, les détenus harcèlent les collégiennes... Un
collège à côté de la prison, ce doit être l’ouverture sur l’extérieur,
suis-je bête... Quant à la butte pour ne pas se faire traiter de... (ça
rime), est-ce une idée du secrétaire-général avec sa hantise des murs
alors que ceux de la maison d’arrêt sont trop bas... à moins que la
prison ne soit trop haute pour cause de surpopulation ?
Ah !
j’allais oublier les 120.000 euros parce que notre cher responsable, qui
doit émarger dans les 24 cadres les mieux payés de l’Éducation à
Mayotte, a précisé qu’ils SERAIENT DÉFALQUÉS DU BUDGET PÉDAGOGIQUE !
Vraiment sans vergogne, l’outrecuidant ! (à suivre)
(1) Signalons qu’en ce moment, c’est pour rendre le vote obligatoire
dans un contexte autoritaire rappelant la triste époque de la
francisque. Ra Hachiri ! Restons vigilants ! ... Formons nos bataillons !
(2) Guy Béart aussi a chanté « Le premier qui dit la vérité,
il doit être exécuté... ». Si quelqu’un veut bien me donner la suite...
photos autorisées commons wikipedia 1. Administration coloniale 1950. 2. Quartier de Majicavo-Lamir.
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