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mardi 13 octobre 2020

ALCANTARA 1 / Un voyage en bateau en 1953.


 Avant-propos : en apport principal à la série PARTIR (11 volets parus ici entre le 29 mai et le 10 juillet 2020) l'original par François Dedieu (1922 - 2017), auteur de ces pages et de mes jours. Dans l'impossibilité de trouver les fichiers, j'en retape le texte. 

Al Eglise Saint-Andre de Sangonis wikimedia commons Author Vpe

 

"En guise de prologue. 

Le 11 janvier 1953 - un dimanche- mon père vint de Fleury à Saint-André de Sangonis (Hérault) à moto, avec mon oncle Noé. ils m'apportaient une lettre du Ministère des Affaires Etrangères, qui était pour moi de la plus haute importance. J'espérais depuis près de trois ans, après notre expulsion de Tchécoslovaquie où j'étais étudiant boursier, puis professeur de français recruté sur place, enfin chef traducteur à l'Ambassade de France - j'ai attendu en vain ma carte orange de diplomate, demandée à Paris, et à une semaine près, ma vie ne eût été changée, peut-être pas dans le bon sens d'ailleurs - un poste de professeur de français à l'étranger. Etait-ce enfin le bout du tunnel ? J'aurais certes pu avoir un poste de professeur de français à COLOMBO, dans l'île de Ceylan qui devait devenir SRI LANKA en 1972, mais il n'était à pourvoir qu'en juin 1953. Les autorités dites compétentes - quel mensonge ! - essayaient ainsi bien tardivement de se racheter de leur grossière erreur qui consistait à affirmer contre toute raison que j'avais refusé un poste en Cyrénaïque (quelle fable !). J'avais été, comme me le confirma Mlle D... au Ministère, "victime d'une homonymie' avec Jean Dedieu, professeur à Rodez. Et passez muscade, le tour était bien joué. 

AL COLOMBO_SRI_LANKA_JUNE_2011 Author calflier001

Al Vue_sur_Managua_et_le_lagon Author Ch.M
 

Il m'avait été formellement précisé que si une autre solution se présentait avant juin 53, elle me serait soumise. La promesse, pour une fois, était tenue : un poste de professeur allait être à pourvoir à avril à l'Alliance Française de MANAGUA, la capitale du NICARAGUA, en Amérique centrale. Tel était le contenu de la lettre. J'acceptai aussitôt, par retour du courrier, et, comme il m'était conseillé de me rendre à Paris pour régler définitivement cette affaire, je profitai d'une fin de semaine, juste avant les vacances de Mardi gras, pour faire un voyage éclair dans la capitale. Résultat : au lieu d'une place, il m'en est proposé deux. La première est toujours la capitale du Nicaragua, et la seconde, une ville du Nord-Est du Brésil dont la croissance a été ultra-rapide : elle a doublé sa population en moins de dix ans. Son nom : CAMPINA GRANDE. Avantages d'une capitale , comme Managua, avec toutes ses ambassades, ses relations, même s'il faut aller chercher un peu de fraîcheur sur les hauteurs environnantes ? Ou bien prévoir une existence de pionnier à Campina Grande, où nous risquons fort d'être la seule famille française, où tout sera à faire, ce qui sera exaltant ? J'accepte ce dernier poste. Depuis février pourtant, les choses vont traîner en longueur. L'ambassade de France à RIO DE JANEIRO va mettre près de deux mois à communiquer au ministère les précisions et renseignements demandés. Bref nous quittons le château de la comtesse de Romilly, où je m'acquittais des fonctions de précepteur de son fils Maxence, élève de Troisième, le mercredi 13 mai, et c'est à FLEURY que nous passerons nos deux dernières semaines et recevrons la grande nouvelle : notre départ est fixé le samedi 30 mai 1953. Nous embarquerons à CHERBOURG.   

Al Viaduto Elpídio de Almeida Campina Grande Paraíba Brasil Author A.Jùniorl


lundi 22 juin 2020

PARTIR (9) / L'Alcantara pour l'Amérique du Sud, Madeira...


Wikimedia Commons. Image extracted from page 037 of Heures africaines. L'Atlantique-Le Congo…, by VANDRUNEN, James. Original held and digitised by the British Library.

Fin de la lettre du 3 juin 1953 : 
"... Nous sommes à Madère, à Funchal. J'ai acheté quelques cartes postales mais nous ne descendons pas à terre car il faut prendre des bateaux spéciaux et payer. Nous devons repartir sous peu, dans une heure et il est midi (nous avons maintenant l'heure de Fleury). Il est très pittoresque de voir toutes ces barques autour du navire. Chacune propose des souvenirs de l'île qu'on fait passer, en cas d'achat, avec des cordelettes lancées adroitement jusqu'au bastingage. Au milieu des barques à souvenirs, l'une d'elles, avec seulement un homme adulte aux rames et un jeune garçon, âgé de huit ans peut-être, en maillot, et qui nous fait signe. Non loin de nous, un monsieur distingué retient le chapeau sur sa tête pour lancer une monnaie le plus près possible. Le petit plonge et émerge bientôt montrant la pièce entre pouce et index. "Like in Port Said !" dit le monsieur au chapeau.../ 

Vista da baía do Funchal, 1930 environ, wikimedia commons, Source Arquipelagos Author Unknown author

... Que vous dire de plus du paquebot ? Les ponts sont désignés par les lettres de l'alphabet, le pont A étant le plus profond. Au dessus, au pont B, nous avons notre cabine. Ce sont des ponts intérieurs. Au niveau A se trouve la salle à manger de 2e classe. C semble être un entrepont. Je vous écris du niveau D (salon de repos aux sièges capitonnés, divans très profonds, verts et beiges). Tout à l'heure j'étais à l'étage au-dessus (pont E), où il y a un bar : apéritifs, bières, eaux minérales, cigarettes, cigares et tabac. On peut consulter la carte des vins dans la salle à manger. On trouve encore à bord une boutique-mercerie (pull-over - souvenirs - bas - fil - chevillère - rubans - livres - appareils photo - chapeaux - valises - jouets - parfums - chocolats - bonbons - friandises - etc.), une banque pour le change mais on accepte l’argent français à bord) un bureau de renseignements, une blanchisserie, des salles de bains, une piscine, le magnifique salon de repos des 1re classes, qui fait aussi salle de cinéma. Nous y sommes allés dimanche soir, alors que la sirène du bateau, à cause du brouillard du Golfe de Gascogne, se faisait entendre régulièrement pour signaler notre présence) et salle de bal (hier soir on y dansait en robes longues à l'occasion du couronnement).../... Le salon de repos, le fumoir et la salle à manger des 1re classe sont aussi splendides, chacun possédant son style propre.../
 
... Les ponts sont désignés par les lettres de l'alphabet, le pont A étant le plus profond. Au dessus, au pont B, nous avons notre cabine. Ce sont des ponts intérieurs. Au niveau A se trouve la salle à manger de 2e classe. C semble être un entrepont. Je vous écris du niveau D (salon de repos aux sièges capitonnés, divans très profonds, verts et beiges). Tout à l'heure j'étais à l'étage au-dessus (pont E), où il y a un bar : apéritifs, bières, eaux minérales, cigarettes, cigares et tabacs. Les ponts extérieurs sont d'une grande variété : ponts couverts et vitrés, ou bien protégés par des bâches. Le bastingage est élevé : aucun risque pour le petit. On a aussi des ponts à l'air libre : partout sont des bancs, ou des chaises longues, ou des fauteuils d'osier munis d'un gros coussin rouge. On passe d'un étage à l'autre soit par les escaliers extérieurs soit par ceux de l'intérieur. Dans la cage de l'escalier, en regardant du bas vers le haut, on se croirait en bas d'une maison de cinq étages.../

... Demain nous serons à Las Palmas, aux îles Canaries.
Gros baisers aux enfants. Embrassez mamé, tante et l'oncle pour nous trois. 
François."  


mercredi 17 juin 2020

PARTIR (8) / LISBONNE et la REINE !

Suite de la lettre du 3 juin 1953 : 

Ce devait être là...
En-tête d'un menu du bateau.

"... Le lendemain 2 juin, ce fut Lisbonne et le Portugal. J'ai tiré quelques photographies. J'espère en avoir réussi la plupart. 

Pas grave... Qui n'a pas raté ses photos ? On voit bien "l'envolée" des pavillons... Un beau souvenir.  
La capitale nous apparut sur les bords du large estuaire du Tage, et son port bien abrité des tempêtes offrit pour quelques heures ses eaux calmes aux flancs de l'Alcantara, le beau navire qui, tiré par les remorqueurs, s'approchait doucement du quai, arborant ce jour-là à la poupe un immense drapeau britannique, tandis qu'une myriade de pavillons montait en une belle envolée jusqu'au sommet du mât arrière, s'élançait de là jusqu'à l'autre mât, et venait aboutir en une molle courbe à la proue du paquebot : c'était le jour du couronnement de la reine Elisabeth II.../... Nous l'avons fêté avec du champagne suite à une minute de silence. Tout était brillamment décoré et chacun a reçu un menu-souvenir avec le tableau en couleurs de la reine (tableau de Dorothy Wilding). Le menu était imprimé en anglais et en français. 



Après l'excellent dîner en musique (l'orchestre jouait sur une petite tribune) dans l'immense salle à manger des premières classes, sur ce bateau doucement bercé, les toilettes des grands jours firent leur apparition dans le grand salon, pour le "Bal du Couronnement".


samedi 6 juin 2020

PARTIR (5) / Vigo, Galicia.

Centro_e_porto_de_Vigo wikimedia commons Author  User Dantadd

"... Nous avons accosté à Vigo ce matin. Nous y étions à 7 heures, et, à 9 heures et demie, avec Georgette et Jean-François nous avons foulé le sol d'Espagne et visité la ville..." 

620 milles marins en 38 heures soit 16,3 nds à l'heure : la pointe de la Bretagne et le Golfe de Gascogne apparemment passés sans problème. 

"... Vigo, l'eau vert-bleu de sa baie splendide inondée de soleil. Les maisons accrochées à la montagne verte. De jolies choses dans cette ria de Galice : les boutiques ouvertes toutes grandes sur la rue, un beau parc non loin du port, femmes et filles portant un panier ou fardeau sur la tête, les maris à côté, bras ballants. A la banque, les employés avaient suspendu des cruchons à rafraîchir aux fenêtres. Une église au hasard de la promenade. Le marché aux vives couleurs, aux légumes variés, aux poissons d'un bleu miroitant, des fleurs aux cent nuances. Habits vaporeux des Espagnoles, taillole rouge des garçons. belles notes locales de Galice. Une pensée pour monsieur Fariña d'ici, mon professeur d'espagnol à Prague. Dommage la fumée noire de l'Alcantara quittant son mouillage..." 
François Dedieu / lettres et notes sur le voyage en bateau de 1953.    
Vigo_dende_o_monte_do_castro wikimedia commons Author Publicada por kai670

 

mercredi 3 juin 2020

PARTIR (3) ALCANTARA ! La ligne pour l'Amérique du Sud.

Gare transatlantique Cherbourg 2012 wikimedia commons Author Mr Oucho

Gare maritime Cherbourg, salle des pas perdus  wikimedia commons Author Haguard DuNord (talk)

Gare Maritime Cherbourg wikimedia commons Author de Couville

La Gare Transatlantique de Cherbourg : des proportions impressionnantes ! A l'origine, une halle des trains de 240 mètres, à l'intérieur une salle des pas perdus aussi impressionnante sur laquelle s'ouvraient les bureaux des compagnies, les boutiques, le service des douanes, le grand salon. Tout le long du quai de France, sur près de 500 mètres, la galerie d'embarquement permettait de monter à bord grâce aux grosses passerelles mobiles, sur rail, couvertes aussi.

En juin 1944, onze ans après l'inauguration, les Allemands font sauter une partie de la gare dont le campanile qui ne sera pas reconstruit.

Inaugurée à nouveau le 22 mai 1952, la gare Transatlantique retrouve sa superbe, nombre de passagers et de célébrités. Jusqu'en 1960, le Queen Mary et le Queen Elisabeth font escale tous les quinze jours ainsi que des paquebots de taille plus modeste mais toujours de ligne comme le Royal Mail Liner Alcantara, en opposition aux navires de croisière. 

ALCANTARA liner at sea 1928 wikimedia commons Author Kenneth Shoesmith... Quand il avait ses deux cheminées...




"Le lundi 1er juin 1953.
Bien chers Parents...
/... et à 5 heures du soir nous avons levé l'ancre. Le bateau était tiré par deux remorqueurs "Abeille". Bientôt on a entendu le ronronnement des machines et le magnifique port maritime de Cherbourg s'est éloigné avec le Cotentin. On distinguait les champs et les prés verts comme des petits carrés..."

Pas moyen d'avoir les noms et photos de ces remorqueurs.