1. Hannibal, le Rhône, les Alpes, Gaulois, Romains...
Punique, la deuxième, cette énième guerre... Rome, Rome, Rome : sur les bancs du collège, seule Rome a droit de cité, d'être citée ; Carthage ne doit d'être mentionnée qu'en tant que puissance vaincue et détruite. « Delenda est Carthago », pour le plaisir rhétorique des racines latines, la formule scandée par Caton l'Ancien, au début sinon à la fin de ses discours, quels qu'en fussent les sujets : Carthage devait être détruite... Si Hannibal n'avait pas remonté les côtes ibériques puis le littoral du Golfe du Lion pour porter la guerre en Italie, le renom de ce célèbre général, relevé par ses éléphants, n'aurait jamais éclairé la destinée de Carthage. Mais pour aller au devant des Romains, trois barrières forment obstacle : un fleuve, le Rhône, des montagnes, les Alpes, et les Romains, débarqués à Marseille, qui ferment la route côtière, soutenus, sur le fleuve, par des tribus gauloises.
Hannibal's_army_crossing_the_Rhone 1878 Domaine public Auteur Henri Motte (1846-1922). |
Pour passer le Rhône, il y a le débit du fleuve mais aussi, de l'autre côté, ces tribus gauloises alliées aux Romains, qui défendent la rive. La configuration du lit et des îles ne pouvant être celle de 2250 ans en arrière, il est admis que, suite au passage préalable de Hannon, un des commandants d'Hannibal (chargé de redescendre attaquer l'ennemi sur l'autre rive), la traversée fut possible entre les confluences avec l'Ardèche au nord et la Durance au sud, en gros, entre Pont-Saint-Esprit et Avignon.
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Quant au passage des Alpes, autant l'empreinte laissée par Hannibal et ses éléphants reste forte dans les esprits, autant le mystère demeure concernant l'itinéraire et le passage d'un col donnant sur la Gaule Cisalpine, la plaine du Pô habitée par des Celtes, des Gaulois... l'Italie n'était pas si romaine encore que cela...
L'Occitanie, les rivières qui vont vers le fleuve et la Méditerranée, les flux de tant d'écrivains provençaux, l'Histoire que parasitent sensations et souvenirs personnels, ouvrent le champ des possibles pour cette part du Midi, du Sud, faisant passer du climat des cigales aux eaux vives et aux neiges des montagnes. La grande aventure du train y prend aussi sa part, notamment grâce à ce magnifique auteur qu'est Henri Vincenot (1912-1985), bourguignon, pas occitan pour vingt sous sans que cela accrochât quelque part, au contraire... Les personnages emblématiques sont universels, sont à tout le monde, surtout parce qu'ils s'ouvrent aux autres, sans distinction, ce qui ne peut que valider l'ouverture en grand, à l'opposé d'un repli sur soi mortifère ou consistant à tout ramener à soi (Paris, si tu nous lis...). À force de pression, nous en sommes arrivés à ingérer des propositions lapidaires de « France périphérique », de « diagonale du vide », pire, de « “ désert ” français » ! Nos chers professeurs de géographie auraient-ils contribué à imposer ces décrets laconiques (à corps défendant, j'espère), sans contrebalancer, avec l'évocation des petites villes, de tous ces foyers si nombreux de vie sociale, artistique, intellectuelle, de culture populaire, ces partis pris restent banals et boiteux ? À nous de ne pas rabâcher tels des zombies ! (à suivre).