jeudi 26 octobre 2023

6. THAU des HUÎTRES.

Une série d'articles de septembre 2014 confrontant clovisses et palourdes concernait la pêche et la conchyliculture de l'Étang de Thau. Ce sixième article avec pour sujet les huîtres, apporte un complément intéressant... 

Étang_de_Thau  2013 Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported L'extrémité est de l'étang de Thau depuis le mont Saint-Clair à Sète, Hérault, France. Au premier plan, une partie de la commune de Frontignan et sur la gauche une partie de celle de Balaruc-les-Bains, et derrière les deux la Montagne de la Gardiole. Auteur Christian Ferrer

Une histoire vieille de 160 ans ! Vers 1865, dans un parc à proximité de Roquerols, des pieds de cheval de Méditerranée ainsi que des huîtres d’Arcachon grossirent mais sans se reproduire.

En 1889, il s’est dit qu’on avait trouvé de belles huîtres le long du remblai du chemin de fer entre Cette et Balaruc, ce qui incita à des essais. Les huîtres d’Arcachon doublèrent de taille en été pour être idéales, grosses et de très bon goût, dès l’hiver. Monsieur Lafite de Cette, auteur de cette expérience, en lança l’élevage suite à la réussite de monsieur Vidal obtenteur sur des tuiles, à Agde, de naissains de 150 à 200 individus (des piles de tuiles chaulées ont fait partie du décor du film « Le Petit Baigneur » pour des scènes tournées aux Cabanes-de-Fleury). Malheureusement, dès la deuxième année, une algue verte étouffa les jeunes huîtres et on se contenta d’élever des huîtres importées d’Arcachon dans les canaux de Cette. 

Sète_from_Loupian,_Hérault 2013 Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported Le Mont Saint-Clair (commune de Sète) et l'étang de Thau avec ses parc à huîtres depuis la commune de Loupian Author Christian Ferrer

Filière de coquillages 2014 Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International Author Selmoval

En 1900, surprise : des bancs naturels étranges apparaissent dans le bassin de Thau, étranges car la variété n’est pas plus celle d’Arcachon que la pied de cheval, non, c’est l’huître des Romains, accueillie fraîchement par les pêcheurs de clovisses. Il n’empêche que cette nouvelle filière est prometteuse : ces huîtres grossissent plus vite, frayent deux fois l’an et pondent plus qu’à l’océan. Mais cette manne va vite se retrouver compromise par l’inconduite, le manque de réflexion : on se met à draguer excessivement, la densité dans les caisses d’affinage est trop forte dans des eaux peu profondes à la qualité douteuse, l’expédition se fait en sacs, en vrac...

S’ensuivirent des intoxications, des fièvres typhoïdes. Le commerce des coquillages s’en ressentit : l’Océan se ligua contre Thau pour que les huîtres méditerranéennes soient destinées à l’élevage et non à la commercialisation. Heureusement, et contrairement aux pêcheurs, les délégués sudistes firent des propositions toutes de finesse. D’abord en délimitant dans l’étang, les zones saines de celles à éviter ; ensuite, en autorisant la vente du 15 septembre au 15 avril, en dehors des périodes chaudes, seulement suite à une stabulation dans des eaux pures strictement contrôlées ; enfin, il faudra émerger périodiquement les huîtres pour les habituer à se fermer, ce que les mouvements de marée assurent dans l’Atlantique et la Manche...

Note 1 : Cet effet de flux et reflux est actuellement pratiqué par certains ostréiculteurs dans l’Étang de Thau. 

Huîtres_de_Bouzigues étang_de_Thau 2004 Creative Commons Attribution 2.0 Generic Auteur INRA DIST

Note 2 : Cet article s’inspire de l’œuvre de Jacques Captier (pas de dates) « Les Marins-Pêcheurs du Languedoc » Paris, 1909.        

     

mercredi 25 octobre 2023

ODE AU-DELÀ DU DELTA... / Rhône, Aude, Llobregat, Èbre

 « ... Mais l’amour infini me montera dans l’âme,
Et j’irai loin, bien loin, comme un bohémien,
Par la Nature, ~ heureux comme avec une femme. »

Sensation, Arthur Rimbaud (1854-1891).

Le Rhône embrasse ses îles et pousse les terres de Camargue vers le sud, et pas seulement dans sa propre limite. La situation climatique, entre hautes pressions au nord et la situation dépressionnaire due à la Méditerranée, mer chaude, une situation à l’origine de violents transports d’air entre les deux états ; le Mistral, les Cers, liés aux couloirs rhodanien, audois, de l’Èbre en Catalogne, en forment les porte-bannières tandis que, plus généralistes, les tramontanes, comme le nom l’indique, descendent des montagnes. Transports d’alluvions aussi, tirées des montagnes, venues combler les avancées de la mer. La géographie, en effet, duplique le schéma camarguais d’engraissement avec ses lagunes et lidos, d’érosion, aussi, de la côte. 

Du Rhône à l'Èbre.  Atlas Classique, Schrader & Gallouédec Hachette 1953


A quatre cents kilomètres, chez nos frères de Catalogne, c’est l’Èbre qui avance ses bras dans cette même Méditerranée Occidentale. Entre les deux, le Llobregat comme épongé par Barcelona (1) mais réservant encore des espaces naturels intéressants. Et, pardon de le mettre en avant « parce que c’était lui, parce que c’était moi », si présent dans ce qu’il a de sanguin, de sudiste, d’occitan, le fleuve qui continue d’échapper aux hommes venus le dompter, l’Aude qui rendit l’île de la Clape au continent, la “ rivière ”, redoutée mais familière des Pérignanais de toujours, l’Atax d’un delta aussi caché que mystérieux... 

(1) si quelqu’un peut préciser pour le Riu Fluvia (Golfe de Roses) ainsi que le Riu Tèr d’une trilogie catalane lexicale : Têt, Tech, Tèr... Sinon on parle du Mistral, du Cers du Rhône à l'Aude, de Mestral, Magistrau, des Cerç ou encore Çerç, de Tarragona à l'Ébre.