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jeudi 26 octobre 2023

6. THAU des HUÎTRES.

Une série d'articles de septembre 2014 confrontant clovisses et palourdes concernait la pêche et la conchyliculture de l'Étang de Thau. Ce sixième article avec pour sujet les huîtres, apporte un complément intéressant... 

Étang_de_Thau  2013 Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported L'extrémité est de l'étang de Thau depuis le mont Saint-Clair à Sète, Hérault, France. Au premier plan, une partie de la commune de Frontignan et sur la gauche une partie de celle de Balaruc-les-Bains, et derrière les deux la Montagne de la Gardiole. Auteur Christian Ferrer

Une histoire vieille de 160 ans ! Vers 1865, dans un parc à proximité de Roquerols, des pieds de cheval de Méditerranée ainsi que des huîtres d’Arcachon grossirent mais sans se reproduire.

En 1889, il s’est dit qu’on avait trouvé de belles huîtres le long du remblai du chemin de fer entre Cette et Balaruc, ce qui incita à des essais. Les huîtres d’Arcachon doublèrent de taille en été pour être idéales, grosses et de très bon goût, dès l’hiver. Monsieur Lafite de Cette, auteur de cette expérience, en lança l’élevage suite à la réussite de monsieur Vidal obtenteur sur des tuiles, à Agde, de naissains de 150 à 200 individus (des piles de tuiles chaulées ont fait partie du décor du film « Le Petit Baigneur » pour des scènes tournées aux Cabanes-de-Fleury). Malheureusement, dès la deuxième année, une algue verte étouffa les jeunes huîtres et on se contenta d’élever des huîtres importées d’Arcachon dans les canaux de Cette. 

Sète_from_Loupian,_Hérault 2013 Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported Le Mont Saint-Clair (commune de Sète) et l'étang de Thau avec ses parc à huîtres depuis la commune de Loupian Author Christian Ferrer

Filière de coquillages 2014 Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International Author Selmoval

En 1900, surprise : des bancs naturels étranges apparaissent dans le bassin de Thau, étranges car la variété n’est pas plus celle d’Arcachon que la pied de cheval, non, c’est l’huître des Romains, accueillie fraîchement par les pêcheurs de clovisses. Il n’empêche que cette nouvelle filière est prometteuse : ces huîtres grossissent plus vite, frayent deux fois l’an et pondent plus qu’à l’océan. Mais cette manne va vite se retrouver compromise par l’inconduite, le manque de réflexion : on se met à draguer excessivement, la densité dans les caisses d’affinage est trop forte dans des eaux peu profondes à la qualité douteuse, l’expédition se fait en sacs, en vrac...

S’ensuivirent des intoxications, des fièvres typhoïdes. Le commerce des coquillages s’en ressentit : l’Océan se ligua contre Thau pour que les huîtres méditerranéennes soient destinées à l’élevage et non à la commercialisation. Heureusement, et contrairement aux pêcheurs, les délégués sudistes firent des propositions toutes de finesse. D’abord en délimitant dans l’étang, les zones saines de celles à éviter ; ensuite, en autorisant la vente du 15 septembre au 15 avril, en dehors des périodes chaudes, seulement suite à une stabulation dans des eaux pures strictement contrôlées ; enfin, il faudra émerger périodiquement les huîtres pour les habituer à se fermer, ce que les mouvements de marée assurent dans l’Atlantique et la Manche...

Note 1 : Cet effet de flux et reflux est actuellement pratiqué par certains ostréiculteurs dans l’Étang de Thau. 

Huîtres_de_Bouzigues étang_de_Thau 2004 Creative Commons Attribution 2.0 Generic Auteur INRA DIST

Note 2 : Cet article s’inspire de l’œuvre de Jacques Captier (pas de dates) « Les Marins-Pêcheurs du Languedoc » Paris, 1909.        

     

dimanche 6 août 2023

O SOLE MIO (fin)

Avec Sète, « L'Île Singulière » de Valéry encore surnommée « L’Île Bleue » la « Venise languedocienne » , le Pérignanais que je reste ne pouvait que vibrer en entendant parler des lamparos, des tartanes et catalanes du thon rouge et des poissons bleus, des baraquettes du Mont-Saint-Clair, du temps des dimanches à la bonne franquette.

Sète où les vieux loups de mer ravaudent encore les filets en chantant le bel canto parce qu'ils n'ont pas oublié Cetara, la cité-mère, au sud de l'Italie. Dans les entrailles du Théâtre de la Mer, d'ailleurs, un peu comme là-bas, des grottes marines se visitent en barque.

Et puis, au levant, cette Méditerranée qui est la nôtre, aux couleurs reconnaissables entre toutes, sous son soleil à part, son ciel réservé... 

Sydney_rock_oyster_on_half_shell_with_two_empty_shells 2020 Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International Author Pelagic

Aussi, quand j'ai vu ce New-Yorkais, pas de ces " Américains " l'arme au poing, la Bible dans l'autre, non, de ceux, justement, de ce Nouveau Monde dans ce qu'il a de valable, de positif ; ce privilégié donc, natif de " la ville debout ", tourné vers les friselis du marin, gobant des huîtres dans un restaurant du lido en disant « Magnifique ! » tandis que je pensais, " New-York, la Grosse Pomme ne nous a pas attendus pour en gober des tonnes, d’huîtres " ; et cet homme, comme il sait apprécier, comme il le dit du fond du cœur ! lui, venu de si loin ! évidemment de « l’Amérique qu’on aime », à l’opposé de celle toujours coincée par un obscurantisme puritain exaspérant, aux tendances hégémoniques, aux œillères racistes, extrémistes ; et moi, que pouvais-je bien faire, si loin de cette lumière, de ces bleus du ciel, de la mer, des vagues qui baragouinent toujours pareil au petit marin du large, si bon et fidèle sous la véranda de roseaux à la Barjasque, le campement des copains, de quand nous étions jeunes et sans soucis... autant de bonheurs qui accompagnent la mâche appliquée, voluptueuse, d'une huître en bouche... 

Plage_de_la_Baleine,_Sète licence Raimond Spekking  CC BY-SA 4.0 (via Wikimedia Commons) Authors Raimond Spekking & Elke Wetzig

Mais qu’est-ce que je pouvais, qu'est-ce que je peux bien foutre, moi, si loin de ce bonheur trop bien reconnu ! La tête de l'Américain m’est restée en mémoire... Je l'embrasse en frère, pour voir et apprécier avec lui, la beauté pure de notre Méditerranée du Lion, l'aurait-on, par chance, tous les jours sous les yeux, l'aurait-on, par chance, tous les jours, au cœur !

O sole, o sole mio...   

http://www.france3.fr/emissions/thalassa/diffusions/03-10-2014_260591 (15 avril 2023 « cette page est momentanément indisponible »... je crois plutôt qu’elle ne sera plus jamais disponible à moins de faire l’objet d’une rediffusion).

De Sète à Agde, le lido, cette langue de sable où se côtoient la N 112, la voie ferrée Tarascon-Narbonne, les vignes de sable du Listel. L’été, sur une vingtaine de kilomètres, s’alignaient les voitures stationnées, les caravanes, sans un point d’eau potable, sans wc, et une myriade de moustiques. Tout cela est dépassé, du passé, tant les estivants du camping sauvage que les sauvages moustiques.

C’est à une autre menace qu’il faut faire face : entre la nature et l’action des Hommes, une côte si fragile bien que de six milliers d’années se retrouve confrontée à la submersion marine et à l’érosion du trait de côte. Cinquante hectares ont été perdus en cinquante ans, plus de cinquante millions d’euros ont été investis solidairement (État & UE pour moitié, Sète, le département, la région pour l’autre). L’ancienne route aux caravaniers a été détruite, remplacée par une voie verte végétale et végétalisée. La nouvelle route est proche de la voie de chemin de fer. Les dunes ont été fixées par des palissades de pieux de châtaignier, les ganivelles ainsi que par la plantation de centaines de milliers de plants d’oyat. Suite à cinq années d’aménagements, l’effort a été porté en mer.

Dans le but de reconstituer la largeur de la plage, des drains empêchent le reflux des vagues d’emporter le sable ; un atténuateur de houle (un tube qui oblige les vagues à déferler loin, plus efficace que les drains), long de plus de deux kilomètres, est fixé, parallèle au bord, à 350 mètres ; une partie de la plage a été rechargée avec du sable venant des fonds de l’Espiguette. Au bout de six ans (2013-2019), douze mètres ont été gagnés.  

Sans quoi, la mer aurait peut-être déjà envahi le bassin de Thau, causant la ruine de l’activité conchylicole, celle des campings du lido et des vignes des sables !

Bon, on regarde si on n’a rien oublié parce qu’il faut continuer de l’autre côté de Sète, après Frontignan. Seul compterait le voyage alors, qu'il aboutisse ou non ? Mais cela relève d'une philosophie transcendantale dont j'ose à peine aligner les deux mots...    

jeudi 1 juin 2023

FRONTIGNAN, pétrole, muscat, poissons...

Frontignan,_Hérault, 2013 cuves de pétrole filiale de BP depuis la Gardiole the Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported  Auteur Christian Ferrer

On avait tant l’habitude de traverser avec la nationale de Montpellier à Béziers par Sète (un contournement aujourd’hui) que c’étaient surtout les torchères et les vastes cuves d’hydrocarbures qui marquaient (seulement les cuves à présent)... On en oublie d’autant plus l’Étang aux coquillages que sur le triangle bleu qui revient à la ville, Géoportail a mentionné « Usine de gestion de déchets industriels ». certainement liés, en plus du pétrole, à la chimie du soufre, des superphosphates, au sulfate de cuivre, à une production pharmaceutique, à la cimenterie. Vraiment pas envie de presser un citron ! 

Muscat_de_Frontignan the Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported Auteur Véronique Pagnier. 

* Frontignan est célèbre pour son muscat connu dès le XVe s.. Une légende imagée raconte qu’Héraclès aurait vrillé la bouteille pour en tirer la dernière goutte... en marque de reconnaissance, le verre torsadé juste sous le goulot. Le muscat de Frontignan est aussi le nom du cépage reconnu en AOC (Appellation d’Origine Contrôlée), dès 1936. Un commerce de vins qui a favorisé la tonnellerie locale.   

* Suite à la construction, sous Louis XIV, du canal du Rhône à Sète, l’accès à la plage étant empêché, les habitants ont demandé un pont. D’abord en pierre il s’est mué en pont métallique et tournant avant de devenir pont-levant (trois fois par jour, il permet le passage des pénichettes puisque le tourisme a pris le pas sur la navigation de commerce).

* Après Sérignan et Balaruc pour ce que nous avons vu du territoire, Frontignan dut aussi en céder une partie lors de la création du port de Sète. 

La_Pointe-Courte,_Sète 2017 the Creative Commons Attribution 4.0 International Auteur Christian Ferrer

Addendum suite à l’apport d’Achille Munier (voir plus loin) : alors que les Frontignanais tergiversent pour une meilleure santé des gens grâce l’ouverture d’un grau entre Thau et la mer, une chasse d’eau en provoque un de naturel au départ de la plage de la Bordigue (la Pointe Courte). Aussitôt les pêcheurs de Frontignan s’y installent ; la pêche y est si bonne que les cabanes en roseaux deviennent vite des maisonnettes. Cette colonie prospère alors que Colbert, à côté, décide la construction d’un port à Cette (1666)... aux dépens de Frontignan. Achille Munier déplore même que la fête de la Barque Maure des pêcheurs désormais sur le grau de la Bordigue, laissée pour compte à Frontignan, ait alors été aussi adoptée par Cette qui, n’étant pas née, n’a jamais connu le pirate sarrasin ! Il n'empêche, c'est à Cette désormais qu'on brûle la barque des envahisseurs ! L’auteur considère que la fille dépouille sans pitié la mère et que ce n’est qu’un début ! 

À Cette, vers 1830, une nouvelle race de négociants hardis venus du Nord a demandé la Bordigue. Frontignan a cédé... Malheur, le nouveau port, les gares, les grandes sécheries de morues, les chantiers de bois, de tonnellerie, les abattoirs, la gendarmerie, sur ce qui était le territoire frontignanais ! de quoi attiser les jalousies en effet ! Ensuite vint le tour des Eaux-Blanches contre une indemnité promise mais verbalement seulement : tout bénéfice pour Cette avant que Balaruc ne connaisse le même type d’arnaque ! Vers 1874, Achille Munier prédit que le quartier de la Peyrade sera le chaînon qui verra in fine l’annexion de Frontignan par les Cettois... la fille aura dévoré la mère ! Un siècle et demi plus tard, nous pouvons le rassurer... Frontignan est restée Frontignan !

vendredi 26 mai 2023

AU BOUT DU THAU.

 BALARUC-le-VIEUX. 

Balaruc-le-Vieux,_Hérault  2014 Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International Auteur Christian Ferrer

Le muge en est l’animal totémique, symbole d’un conflit à propos d’impôts sur la pêche avec l’évêque de Maguelone. Mais ce n’est qu’en 2002 que son effigie a été bâtie et des chansons crées pour l’accompagner lors de sorties célébrant le Moyen-Âge par l’entremise de Guilhem de Balaruc, troubadour du XIIIe siècle. Partie de la séparation en deux communes datant de 1886, le vieux et petit village présente un plan en circulade à l’abri des remparts. S’élevant à 2680 habitants, la population a été multipliée par cinq depuis les années 60.

BALARUC-les-BAINS. 

Balaruc-les-Bains,_Hérault 2014 Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported Auteur Christian Ferrer

La station thermale d’importance exploite des eaux chaudes (50°) remontant par des failles (certaines doivent donner directement dans l’étang). À deux pas de la côte ouest, un grand cercle d’une centaine de mètres de diamètre, déjà un grand bleu, celui de la Vise, la source qui sourd trente-deux mètres plus bas, participant à raison d’1/10e au renouvellement de l’eau du bassin de Thau.

Quand Brassens descendait, souvent il s’arrêtait directement chez Lolo (Laurent Spinosi), un copain de l’enfance à Sète, installé là et qui avait depuis toujours, la manie de monter des cabanes, genre maisonnette de pêcheur. Nous gardons une image d’un Brassens créateur libre, bourru, un peu ours, peu sociable ; une vision fausse... comment faire en effet pour se faire connaître, sans Paris, sans réseau. Du beau monde à qui il a parlé de Lolo, lui encore, inclassable, inconditionnel de l’étang, peintre d’instinct, le verbe facile, entouré de chats, de singes, de perroquets... en dehors de Manitas de Plata, Sétois aussi, bien des gens connus sont venus manger la bonne cuisine de la cabane... Salvador Dali, Eddy Barclay, Brigitte Bardot qui aurait bien débauché Lolo cuistot pour la servir à La Madrague.

La municipalité a livré une fresque en trompe-l’œil de la cabane et des principaux intéressés ; elle a aussi donné le nom Brassens-Spinosi à une promenade qui longe l’étang.  

POUSSAN. 

Poussan_cochon 2009 Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International Auteur Fagairolles 34

Par souci de précision, citons Poussan qui possède ce petit bout de Thau où se montraient les flamants, en face de la crique de l’Angle et de Balaruc-le-Vieux. Poussan, encore un vieux village plein d’Histoire et de charme (villas gallo-romaines, église St-Pierre deux ou trois fois rebâtie sur ses bases d’avant l’an 1000, remparts avec une seconde enceinte au XIVe suite à la croissance démographique, riches maisons de maîtres datant du grand boum de la vigne au XIXe s., halles de type Baltard avec poutrelles de fer, piliers de fonte).

Le totem, pour remonter au riche colon romain Porcius, est le cochon seize soupapes, pardon seize jambes, c’est un minimum, sous la carcasse, pour le promener... 

mercredi 24 mai 2023

BOUZIGUES, Étang de Thau.

Lou cranc (du latin « cancrum », accusatif de « cancer »), le crabe en est l’animal totem mais c’est l’oursin qui représente le village lors des festivités (est-ce pour éviter de faire doublon avec Marseillan ?). Et le blason, lui, n’a été créé qu’en 2003, oh, en suivant bien des règles vieilles de mille ans au moins...

La population (1600 hab.) a perdu une centaine d’habitants depuis 2012, une tendance inverse à ce qui se passe pour les autres localités du secteur.  

Au début étaient les pêcheurs qui n’utilisaient les terres que pour des besoins ponctuels. Ensuite arrivèrent les agriculteurs devenus viticulteurs et riches grâce au succès de la vigne par rapport aux petites maisons toujours pauvres des pêcheurs, en bas, au bord de l’eau. Longtemps les deux communautés ne se sont pas fréquentées, que ce soit pour boire un coup ou jouer aux boules. Ont-ils connu des Roméo et Juliette aux tragiques destins ?  

Bouzigues_(Hérault,_France) the Creative Commons Attribution 3.0 Unported Auteure Stéphanie de Nadaï

C’est d’ici, au début du siècle dernier, qu’est partie l’idée d’élever des huîtres et des moules.

Nous quittons la nationale exprès pour descendre dans Bouzigues jusque sur le quai, c’est l’année où on a suivi le rugby, avant 1963. J’étais loin de me douter que dans ce coin, seul le foot comptait alors... Papa avait encore la Dauphine bleue. Quelle heure pouvait-il être ? Onze heures a quicon proche, à quelque chose près, soit, peu importe, debout, sur le quai même nous avons mangé des moules sur le pouce, de Bouzigues, bien entendu. L’appellation est restée même si Mèze et Marseillan produisent davantage et pèsent bien davantage en population. Papé debout, le couteau et une moule à la main, je le revois. Un ciel bien bleu, plein soleil. La nuance de lumière me reste. C’est la fois où nous avons pique-niqué au Pont du Gard... 

Aux vendanges, papé Jean et de dos, l'oncle Noé.

Et maintenant cette petite cousine de loin qui tient un restaurant ici, à Bouzigues... C’est tout saudada et nostalgie mais ça plonge profond et cet instantané d’un souvenir revenant de la mort, cette sincérité de l’instant me touchent vraiment. 

vendredi 19 mai 2023

LOUPIAN, loup y es-tu ?

Oh qu’il est beau ce loup qui claque des mâchoires, éparpille les pitchous comme une volée de sauterelles et fait crier les filles, même si elles ne portent plus de jupes ! Depuis le XVIIIe siècle, il est le totem d’un village tranquille, entre ce qui fut la nationale et ce qui est l’autoroute. Loupian. Le loup sort pour les fêtes ; l’animal jupon qu’une jeunesse énergique fait courir, sauter et caracoler, offre un plus à chacune de ses sorties. C’est l’occasion de profiter des rues médiévales, des remparts... Si nous restons d’abord attirés par l’installation des riverains de l’étang (Marseillan, Mèze, Bouzigues, Balaruc), le village de Loupian, bien qu’en arrière, en possède une belle portion avec ses tables conchylicoles. Une situation discrète inversement proportionnelle aux nombreux centres d’intérêts historiques du village.  

Chronologiquement,

* la voie Domitienne des Romains, de terre battue mais sur des fondations empierrées (elles n’étaient pavées que dans les villes comme à Narbonne par exemple). Une portion en a été mise au jour en 2022 sur le territoire de Loupian. La voie centrale où les militaires et officiels étaient prioritaires compte six mètres de largeur (les usagers privés se mettaient sur les voies latérales moins élaborées). 

Loupian Villa gallo-romaine des Prés-bas Creative Commons Attribution Share Alike 4.0 International license Auteur JYB Devot

* la villa gallo-romaine des Prés Bas. Datant des Ier et IIe siècles, le domaine qui cultivait la vigne pouvait stocker 1.500 hectolitres dans d’énormes amphores fabriquées et estampillées sur place (MAF). Sur l’étang, un port permettait d’exporter ce vin. Au Ve siècle, les riches propriétaires font couvrir le sol des thermes d’une bonne douzaine de mosaïques aux noms imagés : « aux pampres de vigne », « du printemps », « aux chardons », « aux gaines d’acanthe », « aux oiseaux »...

* une église paléochrétienne des plus anciennes de France (Ve siècle) contenant une cuve baptismale (le corps devait être immergé pour le baptême).

* La chapelle Saint-Hippolyte, un édifice roman du XIIe siècle faisant partie de la défense du village présentant des apports architecturaux originaux dont un arc wisigoth ou musulman, des tores décoratifs normalement inusités dans l’art roman avant tout fonctionnel. 

Loupian_Ste-Cécile Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International license Auteur fagairolles 34

* Église Ste Cécile (1100-1400) peut-être héritière d’un édifice paléochrétien. Cette étrange construction semble une forteresse, massive, sans clocher, en dehors du village sur le cami romieu, le chemin des pèlerins. 

Loupian,_Hérault Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported license Auteur Christian Ferrer

* Par Loupian, depuis ou vers la route de Marseillan, un itinéraire bis officieux afin de couper de possibles engorgements à Mèze. Côté Étang de Thau, c’est une belle aire de pique-nique dominant le plan d’eau avec le Mont Saint-Clair en face... sauf que et l’Internet reste motus bouche cousue, des gens qui dormaient dans leur véhicule se sont fait tuer... en pourcentage le risque ne doit pas représenter grand chose même s’il est à 100 % pour ceux qui y laissent la vie... c’est quand même lâche et malhonnête, afin de prévenir toute paranoïa, de laisser croire qu’entre humains si solidaires et pleins d’amour, nous pouvons vivre tranquilles et sans inquiétude.    

Sur le site de la mairie :

* le château seigneurial avec ses fenêtres à meneaux...

* des maisons bourgeoises renaissance.

* en 1906, lors de l’Exposition coloniale de Marseille, les agriculteurs locaux ont présenté à dessein le Loupian, un raisin de table tardif de ceux qui se vendent bien en Angleterre.

* un manifestant s’étant enchaîné, le maire s’est prévalu d’une loi pour le faire emmener derechef dans un centre psychiatrique... des choses qu’on entend concernant les pays menés par des autocrates, entre Moskova et Volga, par exemple.  

* Loupian comptait encore 122 agriculteurs en 1988 et plus que 17 en 2020. 

mercredi 17 mai 2023

MÈZE, Étang de THAU.

Totem de la ville, le buou relève d’une histoire vieille de deux millénaires marquant le regret sinon davantage d’une famille d’agriculteurs qui perd ses bœufs (1) de travail. En souvenir, ils en gardent la peau qu’ils sortent sur une carcasse de bois, en procession. Depuis, à Mèze, à chaque fête, on sort le buou mené par le bouvier et son aiguillon ; huit porteurs sous la carcasse le font sauter et caracoler tandis que l’un d’eux imite le beuglement grâce à une peau d’âne tendue, qu’un autre manipule la tête et les mâchoires qu’il projette vers les spectateurs (peut-être, dessous, se relaient-ils entre les six qui portent et les deux qui font le bœuf). Et sur le blason pourtant, tout d’azur, de sable, d’argent et de gueules, un agneau pascal tenant une croix de sa patte « senestre » : l’autorité établie contestant l’antériorité au paganisme toujours vivant...  

Le_boeuf_de_Mèze the Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported Auteur Élisabeth Delquignie
 

Ibère, Phénicienne, officiellement fondée avant Agde par les Phocéens, Mèze compte plus de 2600 ans d’existence. Les vétérans romains y cultivèrent la vigne au point de provoquer un problème de concurrence avec Rome. Suite à l’occupation et aux destructions des Sarrasins chassés en 736 par Charles Martel, Charlemagne offrit des parcelles afin de favoriser l’installation d’Espagnols fuyant la main mise des Arabes sur leur péninsule. Entre voisins et plus avec l’Espagne, un peu différemment avec l’Italie, les apports de population dans le Sud ne datent pas d’hier. À noter que, donnée par Simon de Monfort à l’Église, la ville sera gérée par l’évêque d’Agde jusqu’à la Révolution, comme quoi le pouvoir et la religion officielle ont historiquement été cul et chemise en France. 

Mèze_(34140),_Le_port,_Quai_Baptiste_Guitard the Creative Commons Attribution 3.0 Unported Auteur Sebastien GUERIN

Quoi qu’il en soit, il a quelque chose de plus cet Étang de Thau... avec l’air iodé, le petit hippocampe si rare comparé aux moules, aux huîtres, aux palourdes et clovisses par millions depuis qu’elles se récoltent et se vendent, ce plus si volatile a pourtant fait converger ici des rayons de poésie, de musique, d’inspiration. Après y avoir fondé un festival de musiques du Monde (1990), passé par le Lubéron, le Sénégal, Pierre Vassiliu (1937-2014) s’installe à Mèze en 2000. Il y a du Boby Lapointe dans les effets recherchés, les jeux de mots, il y a un peu de Brassens quand il dit « pisser » dans plus d’une chanson. Il y a beaucoup d’humour avec le martien « Qui c’est celui-là ? », avec « Alice », « Armand », ou « Ivanhoé », de la douceur sentimentale : « Amour, amitié », « Dans ma maison d’amour », de la poésie urbaine « J’ai trouvé un journal dans le hall de l’aéroport »... Pierre Vassiliu est mort à Sète de Parkinson ; ses cendres ont été dispersées dans l’Étang de Thau. 

(1) Sûr que lors des repas de fêtes qui s’ensuivent s’entonnent les chansons sur les bœufs. En occitan « Quand lou bouvier ven de laura... », antérieure à 1749 où elle fut pour la première fois, écrite. Et en français « J’ai deux grands bœufs dans mon étable... », chanson de Pierre Dupont (1821-1870), poète, chansonnier à Paris, estimé par Auguste Fourès. À Lyon où il revient après avoir perdu sa femme et le bonheur, malgré les amis voulant lui rendre le goût de vivre, il meurt à 49 ans... Sa vie contredit quelque peu les paroles de sa chanson où la vie des bœufs est préférée à celle de l'épouse. Une rue porte son nom, non loin de l’École Normale à la Croix-Rousse, qui m’accueillit en septembre 1971.

samedi 13 mai 2023

Le CRABE de MARSEILLAN, lou cranc de Marselhan.

L’animal totémique de la commune est le crabe... Maintenant, pour la couleur, restera-t-il vert ? et si on dit que ce crabe vert est « enragé »... comment qualifier alors le nouvel envahisseur bleu ? Attila ? 

Callinectes_sapidus_(blue_crab)_(Cayo_Costa_Island,_Florida,_USA) the Creative Commons Attribution 2.0 Generic Author James St. John

Alors que l'eau s'est réchauffée de deux degrés depuis 1975, qu'il pleut moins, que les touristes laissent des sous certes, à certains, mais des déchets certains à tous, que des traitements de la vigne, longtemps autorisés, ont favorisé la prolifération d'algues tueuses, que les interdictions de commercialisation de coquillages ne sont pas rares (encore début 2023 pour une bactérie causant des diarrhées), avec l'échangisme heureux, vers 1980, des cousines de méduses ont immigré dans le ballast des bateaux, oh gentillounettes, pas piquantes, mais d'une densité de bouillie de maïzena qui affame les poissons, étouffe les anguilles, à parler des crabes, parlons-en de ce crabe bleu venu aussi avec le ballast des bateaux, costaud comme un chatka, pouvant atteindre le double-décimètre, capable d'ouvrir une huître mi-adulte et de sectionner un doigt (impossible de le tenir par l'arrière tant ses pinces sont longues !). Sa chair est excellente, maigre consolation si après lui c'est le désert marin.   

MarseillanHarbour under the Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International Author Martinvl

Non Marseillan, loin de nous l'idée de vous moquer... embarqués que nous sommes dans le même rafiot ! Pour des propos plus souriants : entre terre et mer la localité qui se partage entre viticulteurs et pêcheurs est particulièrement jumelée avec Caudete, ville d’origine d’une bonne part des immigrants espagnols.

Marseillan, aux Onglous, c’est l’entrée ou l’aboutissement du Canal du Midi, suivant le sens dans lequel on embouque.

Les établissements Noilly-Prat y fabriquent le plus ancien vermouth français depuis 1813.

En marbre, le Monument aux Morts de la Grande Guerre montre un casque et un étendard comme sur un autel avec trois orphelins ; sur la marche permettant de se tenir contre, le plus grand se recueille tandis que le second, sur la marche au-dessous, tire le petit frère par le bras pour l’aider à monter : sur le ruban du bouquet du dernier, une inscription « À notre père » ; on doit ce Monument pouvant être considéré comme pacifiste, à H. Oechslin sculpteur, auteur aussi des Monuments de Cébazan (34) et Saint-Michel-de Lanès (Aude) qui eux, montrent des Poilus. A priori, Oechslin travaillait sur commande... Était-il aussi le marbrier de Béziers d’où provenait le bloc à sculpter ? Travaillait-il en indépendant ou pour ce marbrier ? 

Monument_aux_morts Archives_départementales_de_l’Hérault he Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International Collection Marseillan