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vendredi 19 mai 2023

LOUPIAN, loup y es-tu ?

Oh qu’il est beau ce loup qui claque des mâchoires, éparpille les pitchous comme une volée de sauterelles et fait crier les filles, même si elles ne portent plus de jupes ! Depuis le XVIIIe siècle, il est le totem d’un village tranquille, entre ce qui fut la nationale et ce qui est l’autoroute. Loupian. Le loup sort pour les fêtes ; l’animal jupon qu’une jeunesse énergique fait courir, sauter et caracoler, offre un plus à chacune de ses sorties. C’est l’occasion de profiter des rues médiévales, des remparts... Si nous restons d’abord attirés par l’installation des riverains de l’étang (Marseillan, Mèze, Bouzigues, Balaruc), le village de Loupian, bien qu’en arrière, en possède une belle portion avec ses tables conchylicoles. Une situation discrète inversement proportionnelle aux nombreux centres d’intérêts historiques du village.  

Chronologiquement,

* la voie Domitienne des Romains, de terre battue mais sur des fondations empierrées (elles n’étaient pavées que dans les villes comme à Narbonne par exemple). Une portion en a été mise au jour en 2022 sur le territoire de Loupian. La voie centrale où les militaires et officiels étaient prioritaires compte six mètres de largeur (les usagers privés se mettaient sur les voies latérales moins élaborées). 

Loupian Villa gallo-romaine des Prés-bas Creative Commons Attribution Share Alike 4.0 International license Auteur JYB Devot

* la villa gallo-romaine des Prés Bas. Datant des Ier et IIe siècles, le domaine qui cultivait la vigne pouvait stocker 1.500 hectolitres dans d’énormes amphores fabriquées et estampillées sur place (MAF). Sur l’étang, un port permettait d’exporter ce vin. Au Ve siècle, les riches propriétaires font couvrir le sol des thermes d’une bonne douzaine de mosaïques aux noms imagés : « aux pampres de vigne », « du printemps », « aux chardons », « aux gaines d’acanthe », « aux oiseaux »...

* une église paléochrétienne des plus anciennes de France (Ve siècle) contenant une cuve baptismale (le corps devait être immergé pour le baptême).

* La chapelle Saint-Hippolyte, un édifice roman du XIIe siècle faisant partie de la défense du village présentant des apports architecturaux originaux dont un arc wisigoth ou musulman, des tores décoratifs normalement inusités dans l’art roman avant tout fonctionnel. 

Loupian_Ste-Cécile Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International license Auteur fagairolles 34

* Église Ste Cécile (1100-1400) peut-être héritière d’un édifice paléochrétien. Cette étrange construction semble une forteresse, massive, sans clocher, en dehors du village sur le cami romieu, le chemin des pèlerins. 

Loupian,_Hérault Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported license Auteur Christian Ferrer

* Par Loupian, depuis ou vers la route de Marseillan, un itinéraire bis officieux afin de couper de possibles engorgements à Mèze. Côté Étang de Thau, c’est une belle aire de pique-nique dominant le plan d’eau avec le Mont Saint-Clair en face... sauf que et l’Internet reste motus bouche cousue, des gens qui dormaient dans leur véhicule se sont fait tuer... en pourcentage le risque ne doit pas représenter grand chose même s’il est à 100 % pour ceux qui y laissent la vie... c’est quand même lâche et malhonnête, afin de prévenir toute paranoïa, de laisser croire qu’entre humains si solidaires et pleins d’amour, nous pouvons vivre tranquilles et sans inquiétude.    

Sur le site de la mairie :

* le château seigneurial avec ses fenêtres à meneaux...

* des maisons bourgeoises renaissance.

* en 1906, lors de l’Exposition coloniale de Marseille, les agriculteurs locaux ont présenté à dessein le Loupian, un raisin de table tardif de ceux qui se vendent bien en Angleterre.

* un manifestant s’étant enchaîné, le maire s’est prévalu d’une loi pour le faire emmener derechef dans un centre psychiatrique... des choses qu’on entend concernant les pays menés par des autocrates, entre Moskova et Volga, par exemple.  

* Loupian comptait encore 122 agriculteurs en 1988 et plus que 17 en 2020. 

mercredi 3 mai 2023

LA VILLA LAURENS

Quand il n’y en a plus, il y en a encore comme disait l’autre !

Lorsque le train quitte la gare, la vue s’ouvre d’un coup sur un canal qu’on croit du Midi. Ensuite, avant l’Hérault et le déversoir d’eau étincelante presque irréelle sous le soleil méditerranéen, là, sous les voies, dans un cadre verdoyant, apparaît un bâtiment remarquable par sa taille. Le quant à soi du voyageur ne s’embarrassant pas de la réalité qui lui échappe pense à un centre de gestion du canal, à des bureaux de techniciens. Ce n’est que récemment, seulement au bout de longs travaux de réhabilitation, comme si on ne voulait dévoiler qu’un projet une fois achevé que ceux qui savaient ont bien voulu le dire.

La villa Laurens, il est vrai affublée du logo « château » sur la carte IGN, rappelant les maisons des esclavagistes d’" Autant en emporte le vent ", a été construite à partir de 1898 par un riche héritier collectionneur, Emmanuel Laurens (1873-1959). Art nouveau, néo-grec, égyptomania, orientalisme, autant de courants modernes et seulement ouverts à qui dispose de la richesse permettant de décréter, d’encourager le beau, de le confisquer aussi, aux yeux de tout le monde... de ce point de vue, le destin de Vincent van Gogh, souvent, m'interpelle. 

Le père n’est qu’ingénieur mais l’héritage d’un baron, cousin de loin, tombe. Sur ce coin appelé « Belle Isle », va s’édifier cette villa où les dépenses fastueuses en architecture, en décors de peintures, en faïences, vitraux, meubles, expriment un art de vivre réservé aux richards : voyages exotiques, collections rares, rencontres d’artistes, mondanités de caste, soirées.

Bien que propriétaire d’une villa du même genre à Boulouris sur la Côte d’Azur, Laurens en arrive à vendre son château d’Agde en viager. Souillée par des gravures et dessins dus à l’occupant teuton, la villa tombe à l’abandon. On ne sait pas ce qu’est devenu le bénéficiaire du viager. 

Agde Hérault River Agde under the Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International license. auteur Christian ferrer 2013

En 1994, la ville rachète la villa, le château Laurens. Après 11 millions mis dans la restauration, elle devrait ouvrir au public en ce moment (avril 2023).

Providence, adversité... au moins l’échéance de la mort nous met-elle à égalité... tant que les riches, si on les laisse faire, ne trouvent pas le moyen de durer sur notre dos...  

(merci à Annie qui m'a mis sur la voie)

lundi 30 décembre 2019

PAS CE JEU D'ARGENT POUR GOGOS PANURGISTES (1) / LE LOTO, le vrai

Une chance sur 19 millions ! Faut avoir la foi pour y croire !.. et qui plus est se retrouver complice d'un truc amoral qui voit quelqu'un gagner au moins l'équivalent de sept propriétés et non sept gagnants d'une propriété chacun ! C'est malsain et plus encore concernant ceux qui viennent de prendre des actions à la Flambeuse des Jeux ! C'est dit mais je contrôle mon débit venimeux ! Pas question de me pourrir la vie à cause des bas instincts de notre espèce ! C'est au contraire d'une liesse générale que je veux vous entretenir... Il fut un temps où Noël et le passage à l'année nouvelle voyaient rentrer chez eux, fiers comme des bar-tabacs, des villageois chanceux chargés des gains qu'une suite heureuse de numéros avait bien voulu leur offrir. Qui donc pouvait se douter que le jeu de loto aurait été importé d'Italie par François Ier ? 

Dernièrement, à l'occasion d'un coupé du ruban rue de la Poste, en marge de la photo d'usage, une affiche sur un mur pour le loto du ping-pong à Lespignan, le village à côté, parce que là-bas, dès le mois de novembre on annonce la reprise de la saison des lotos ! Chez nous, c'est tout juste si quelques rares "loteries familiales" (pourquoi cette étrange appellation intimiste ?) sont organisées... Aïe mama, à devoir encaisser ce genre de coup bas pernicieux, je me demande si je suis encore de Fleury !
Et pourtant, il était une fois mon village plein comme un œuf, plein comme la médina aujourd'hui désertée, plein au point qu'il ne nous serait pas venu à l'idée de considérer le cimetière en tant qu'endroit le plus peuplé de la commune ! Entre les commerces dont les épiceries, la coopérative agricole, le marché, le forgeron, le bourrelier, le tonnelier, les menuisiers, le cagnard, les cafés, le cinéma, des flux de vie se croisaient et se recroisaient. Bien sûr, les ragots colportés, flirtant avec le temps avec de la diffamation pure et simple constituaient l'inconvénient majeur de cette promiscuité. Mais cela choquait moins que la vacuité actuelle... même les hommes se font rares devant la mairie, à peler le monde, à critiquer la municipalitad à espépisser les passants et à tailler une réputation à l'emporte-pièce au passage pimpant de belles gambettes. Aussi prosaïquement, on ne se perdait pas de vue alors, on renouait le lien, à la messe, aux enterrements, au match de rugby, lors des fêtes et des bals qui rythmaient l'année... Souffrez que j'en remette une couche parce que l'an passé je me suis fait l'impression d'un  chien abandonné, à errer dans les rues désertes, un soir de 11 novembre, pour la saint Martin, la fête du village, une fête désormais sans flonflons, sans personne, avec seulement les fantômes de mon passé. Je n'aurais jamais dû descendre de ma machine à remonter le temps !

La saison des lotos resserrait assurément les liens de la communauté. Ils étaient organisés par les associations et clubs divers : le rugby, les donneurs de sang, les chasseurs, peut-être le judo vers la fin des années cinquante... L'activité étant normalement bénéficiaire, il faut un roulement, la fin de saison étant moins suivie. Le nombre de parties, le prix des cartons, l'importance des lots sont mis en balance, attirant parfois des joueurs extérieurs. Rien de comparable cependant à ces lotos géants, il y en eut à Coursan, dans l'Ariège avec une voiture et même une villa sise à Narbonne-Plage, à gagner (1) ! Quand la vie de tous les jours se ressent encore de la guerre (le pain est resté rationné jusqu'en novembre 1949 !), malgré la paix retrouvée, la nourriture demeure le premier des soucis, celui aussi qui grève le plus le budget, alors même le filet garni, avec la boîte de petits pois, le litre d'huile et le kilo de sucre font plaisir. Ne parlons pas de la dinde (au moins dix kilos, le coup de fourchette était à la hauteur de la rareté du festin !), du jambon et, nec plus ultra, synonyme du menu de luxe, la langouste.    
Simca Ariane wikimedia commons Auteur Ruben de Rijcke  
Simca Aronde wikimedia commons Auteur Pibwl

(1) Le loto « Étoile » qui se déroulait simultanément dans tout le département de l’Aude, présentait des lots très importants : non seulement une voiture (une année c’était une Simca, alors à la mode), mais également des ensembles de meubles : salle à manger complète, et même… des villas sur la côte. Plus tard, tout cela fut interdit. En attendant, Marthe, cousine germaine de mamé Ernestine, mère de Nicole et fille aînée de tante Marie et Gérard du quai Vallière à Narbonne, gagna à ce loto une villa à Narbonne-Plage. Il est vrai qu’ils avaient pris les cartons à deux  – avec un prof de musique de Coursan, je crois – et ils ont vite monnayé la maison pour pouvoir partager. (Pages de vie à Fleury II, Caboujolette, François Dedieu, 2008.)