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jeudi 21 novembre 2024

PROVENCE du RHÔNE (15) François bidasse à Tarascon

Gare_de_Tarascon 2021 under the Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International license. Auteur Olivier


Révélation ! Mince alors ! Tarascon n'est pas au bord du Rhône : la rive gauche du fleuve appartient à Beaucaire, la ville en vis à vis, côté Gard ! 
Le savait-il, François, quand il s'est retrouvé sur le quai, un beau matin du mois de mai ? François à Tarascon, billet de train payé pour la caserne Kilmaine, au centre de Sélection de la Région militaire. 

grade de sergent-chef. Wikipedia

1968, quelques années avant « Le Rire du Sergent » de Sardou : 

« Je suis arrivé un beau matin du mois de mai
Avec à la main les beignets qu'ma mère m'avait faits.
Ils m'ont demandé
Mon nom, mon métier... »

François est convoqué à l'armée pour les « Trois Jours ». Boh ! pour lui, pas de beignets, rien à la maison à ce sujet, pas plus que sur cette convocation... peu d'échanges, pas de dialogues pour remédier sereinement aux tensions, comme toujours, depuis toujours, sur presque tout. Rien non plus, sur ce quai. Ils doivent être un certain nombre à descendre, pour la même raison, François ne s'est pourtant pas joint à d'autres... François, toujours aussi à l'écart avec ses ratés de post adolescent traînés depuis gosse, ado. 

Quartier_Kilmaine 2021  under the Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International license Auteur Olivier

Ce sont des petits groupes qui se présentent au planton de garde à la barrière. De l'allure, la caserne, avec ses grands bâtiments, les beaux platanes un peu partout. Il ne se souvient que vaguement mais les dortoirs seraient à gauche dans les étages, la cantine au fond, les bureaux des huiles à droite, au rez-de-chaussée (1). 
Le matin des tests, ils sont deux ou trois à ne savoir ni lire ni écrire. 
Suite au repas, ma foi aussi correct que celui au lycée, il s'ennuie dur l'après-midi, à subir les documentaires sur l'armée française en manœuvres diverses (s'ils savaient ce que notre Défense Nationale est devenue... à bien faire marrer Lavrov !). 
Le soir il est désigné d'office comme chef de chambrée. Il est donc responsable du bordel lors de la bataille de pelochons : les troufions le lui firent bien voir. Barrettes ou pas sur épaulettes, ils balancèrent rois paires de godillots à cirer en punition. François ne cirera qu'un pied droit sans trop se soucier du gauche et des conséquences... aussi, 45 de pointure, ils exagèrent ! 
Au clairon du matin ils ne seront sommés que de se lever pour le petit déjeuner ; passe pour la punition, passe pour les godillots... 
Jour 2 : la visite médicale : 

«... Je m'suis présenté tout nu devant un infirmier.
Moyennant dix sacs, il m'a dit : "Moi, j'peux vous aider...» 1971. Michel Sardou.  

Publicité_pour_le_slip_kangourou_de_marque_Erby._Paris_Musées_20230527085738 under the Creative Commons CC0 1.0 Universal Public Domain Dedication. Auteur france illustration editeur

Michel ? tout nu ? c'est si vieux que ça ton service ? Pour François la mode était au slip kangourou, d'ailleurs ils étaient trois à se poiler pour l'histoire de celui qui n'en avait pas... Mais si, et qui demande au prêteur comment ça se porte... Vous non plus, vous ne savez pas ? Le jaune devant, marron derrière... 
Plus sérieusement, cela prêterait à rire, après les mesures et contrôles, l'entretien psychologique; Un qui en sort explique qu'il faut dire que ça ne va pas, que l'officier exempte : pas de service militaire. À son tour, François explique qu'à la maison c'est pas terrible, que le moral tombe souvent dans les chaussettes : 
« Je vous mets dans les parachutistes, qu'il a dit le gradé, vous verrez, cela vous fera le plus grand bien ! ». Jaune et marron le François en slip kangourou... On a dit qu'il ne fallait pas rire !   

« ...Le rire du sergent,
La fleur du régiment,
Avait un cœur de troubadour. » 

Et non, pas un cœur de troubadour... Un qui y va, l'autre non, qui sait ? comme à l'époque du tirage au sort... 
Sinon, tout ce petit monde fut libéré ensuite... À nouveau sur le quai, François s'est dit qu'après tout, para ou pas, avec le sursis pour études, il avait bien le temps de voir venir... 

Un jour et demi pour trois jours, l'armée au moins prenait soin de ne pas grever son budget, de ne pas charger le déficit, pas comme de nos jours... pour des raisons peu avouables sans doute...   

Quartier_Kilmaine_-_Le_Grand_Manège 2006 under the Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported license Auteur Gerard MARIN

(1) L'armée alors ne faisait pas visiter le manège de Kilmaine, pourtant assez unique avec un ou deux autres manèges en France seulement dont celui, célèbre, du Cadre Noir, proche de Saumur.  

lundi 13 avril 2020

UNE SAINT-LOUP EN SLIP KANGOUROU / Fleury-d'Aude en Languedoc

(reprise d'un texte datant d'avril 2017).


Lundi de Pâques. Si à Coursan on fait « Pâquette(s) », à Fleury, comme dans bien d’autres localités de l’Aude, on fête Saint Loup. Nul besoin de couvrir ce saint que je ne saurais voir, les Loup canonisés ne manquent pas sauf que pas un seul ne marque le lundi de Pâques. Vous avez vu aujourd'hui, encore ce temps gris avec la fraîcheur du marinas ! Du marin, de l'humidité froide depuis un mois ! Au moins les confinés ne seront-ils pas tentés par un matin lumineux. 
Aux temps heureux et insouciants, la Saint-Loup était l’occasion de faire un grand pique-nique avec l’omelette ou les œufs de Pâques à l’honneur. Les familles, les groupes de jeunes s’égayaient dans la garrigue, les prés, la plage ou les pins au bout de la barre de Périmont. Du riz froid en salade composée pour la première fois de ma vie. Mais c'était en famille, au début des années 60. A la fin de cette même décennie, toujours à Saint-Pierre-la-Mer, ma Saint-Loup nous fit naviguer sur le radeau des copains d'abord mais pas en adolescents si peinards que cela.  

Georges de Narbonne, Antoine d’Ouveillan sont venus, à mobylette, se calant sur ma vitesse, à vélo. Au menu, aucun souvenir. Par contre, pour l'amitié, le plaisir de rire ensemble, la déconne d'ados retardés, une journée inoubliable ! Un ciel bleu, du soleil, un petit Cers un peu frais mais rien que de plus normal début avril. La plage est toute encombrée de ces bois flottés que l’Aude a charriés. D'où l'idée de génie du radeau ! 
Une corde, quelques mailles d’un filet déchiré, un bidon en fer à l’origine plein d’huile d’olive, un tonneau que les flots ont échoué, à fourrer sous une structure, providence de robinsons sur le sable
Mise à l'eau. C'est instable. Du mieux grâce à une branche en guise de partègue (perche, gaffe). Avec l'équilibre, Georges et Antoine lèvent l'ancre, lèvent les bras, s'agitent, rient de manquer tomber, se rattrapent. Moi au bord, je fais Tarzan, je les salue, les encourage. Une gaffe part à l'eau à force de faire les andouilles. On rit encore mais vite je crie qu'il faut revenir, que le nord pousse vers le large. Les zigomars qui rient toujours ricanent quand ils réalisent. Antoine se jette à l'eau. Georges craint et plus cabochard essaie de jouer de sa partègue. En vain et pas longtemps ! Ce serait fou de ne pas rejoindre le bord. Ils n'avaient plus pied déjà ! 
Naufragés, nos marins partis pour des courses lointaines. Rieurs pour rester dignes, rigolards même de devoir tenir d'une main le slip kangourou qui pendouille presque jusqu'au genou ! Le fou rire pousse les rescapés à se venger et je me retrouve à la baille ! De quoi s'en taper le ventre ! 
Retour au calme tels des cormorans séchant leurs plumes. Au loin le radeau joue à cache-cache avec l'onde marine avant de disparaître dans le bleu soutenu du Golfe du Lion. 

Merci Saint-Loup, patron des franches rigolades. Merci d'être bien solidaire et de nous donner la pluie en ce 13 avril 2020 !