dimanche 15 avril 2018

Des IRIS DE TITOLE au CERISIER DE CAUSSÉ (suite des iris de Nissan) / Fleury-d’Aude en Languedoc.


Et ces iris nains de Catherine alors ? 

Iris nain aquarelles de J Eudes dans  A. Guillaumin Les Fleurs de Jardins tome I  Les Fleurs de Printemps Paul Lechevalier 1929 Author J Eudes

L’iris pumila Bertoli, l’iris nain, des garrigues,  peut être bleu, blanc bleuté, violacé, violet pourpré (le blanc et le bleu pâle se font rares).  L’irone, le principe odorant de son rhizome (celui de l’iris blanc de Florence est [était en fonction des phénomènes de mode ?] distillé à Grasse[1]) sent la violette alors que  l’essence de violette, rare et chère en parfumerie, n’en contient pas.
L’iris chamaeiris Bertoli qu’on dit nain, prostré, peu élevé, tendant vers le jaune comme son nom l’indique dans la variété lutescens. 

Iris lutescens (?) near el Perelló (Catalonia) Author Hans Hillewaert
Ces iris xérophiles, adaptés à la sécheresse, poussent sur les calcaires âgés d’une trentaine de millions d’années[2] comme entre Nissan et Lespignan ou quatre fois plus vieux tels ceux qui me gardent toujours sous leur charme, autour du Puech de la Bade. Ils sont plus généralement présents sous le climat méditerranéen nord, de l’Espagne à l’Italie. Les rhizomes ont le mérite de retenir la terre marneuse (entre calcaire et argile) issue de la dissolution du calcaire par l’eau pénétrant les fissures (diaclases).  

En parlant de toutes ces variétés d’iris, la science dit crûment les choses et si elle nous fait réviser la géographie avec l’iris balkanique, dalmate, transcaucasien, ruthène, biélorusse, russe, de Crimée, de Sibérie, de Jordanie, de Tanger, d’Alger, de Hollande et de Florence, elle n’a que faire de la sensibilité poétique avec le fétide, le bâtard, le gigot, puant en prime, le jaunâtre. Il existe même le barbu ! Viendrait-il d’Allemagne ou plutôt d’Arménie pour l’être doublement vu que la barbe, ce mimosa de poils jaunes sur les tépales inférieurs est assez commun aux iris ?

A propos, vous avez vu qu’un Titole (surnom pérignanais de Bertoli) était dans le coup, certainement inventeur ou pour le moins associé au nom de la variété définie ? C’est la famille à  Crimplon, le maçon ? Je ne sais plus si ces surnoms figurent dans la liste d’Henric das Barris annotée par mon père, dans la mesure où il connaissait ou avait entendu parler des personnes concernées. Au village, les gens savaient qui était qui et ce, sur plusieurs générations… A présent, j’exagère mais en ville, c’est à peine si on dit bonjour à son voisin !
Crimplon ? un brave homme vraiment, surtout pour le cerisier entre le four à chaux et la copé, au milieu des potagers. Je vous raconterai, une autre fois… Le cerisier, lui, ne le cherchez pas, il a disparu sous l’autoroute, en 1974 je crois. Des bigarreaux qui attiraient tous les loustics du village comme des papillons de nuit. Le plaisir de manger dans l’arbre ! A croire que nous vivions sur une autre planète.
Léonce en avait plusieurs, à Granouillet. Mais je pense surtout à celui de Caussé (déformation de José… l’Espagne n’est jamais loin) pas pour les fruits, ni le plaisir de rôder la nuit, d’entretenir la geste des lascars, aux beaux jours revenus. L’arbre était tordu, efflanqué, vivotant seulement dans un coin où il ne se plaisait guère. Et pourtant, quel cadre ! Voilà que je m’égare avec ces maraudes aux cerises…

Faudra encore attendre juin...

[1] L’iris a aussi été cultivé dans l’Ain, à Anglefort (sud de Seyssel / 1835). 
[2] A Fleury, on trouve ces calcaires dits lacustres (puisque la Clape était une île) ou d’argiles, de galets, curieusement le long de la limite avec Salles, entre Carabot et Besplas d’une part, le Phare et le Puech de la Pistole (lauzes) vers le sud. Idem pour les limites avec Vinassan (bois de Marmorières). Les collines du moulin de Périmont, du Puech Azam (là où ceux qui ne voulaient pas payer montaient voir le rugby au stade de l’Etang !), l’ancienne décharge, le long de l’autoroute jusqu’au décroché de, Liesse la Glacière et le Mourre (entre le chemin du pont des Pastres et la montée de Bouisset, limitrophe de formations quatre fois plus anciennes).   

samedi 14 avril 2018

IRIS BARBU, « THOMAS DE LES HUÎTRES », CLODION LE CHEVELU / Fleury d'Aude en Languedoc

Aux marcheurs d’Au fil du Temps qui nous laissent de jolies photos en écho de leurs balades. 


Photo de Catherine, collines de Nissan, début avril 2018.

Le 10 avril, Catherine surprend une colonie d’iris nains main dans la main. Eux aussi marquent le printemps dans nos garrigues. La nature nous fait dire qu’il serait temps de prendre soin d’elle, de l’accompagner plutôt que de détruire !



IRIS, dans la mythologie grecque, fille de Thaumas et d’Electre, messagère des dieux aux ailes irisées, qui voyage entre ciel et terre. L’arc-en-ciel est son écharpe. La généalogie ès coumplicat et alors chez les Grecs, je vous dis pas ! Pour Electre, Elektra, on a l’embarras du choix mais ce Thaumas et sa drôle d’orthographe, mystère… D’ount sourtis aquèl Thaumas ? A Fleury, on en connaissait un de toumato, euh, un Thomas. C’est papa qui nous le rapporte, dans ses pages sur les surnoms de Fleury :



 « … Toumassou (le petit Thomas) Alban Biau de Salles avec qui nous avons vendangé plusieurs années. Il travaillait parfois pour l’oncle Noé, a été également ramonet pour Henri Carrière, après Bantoure, et estropiait le français de façon plaisante :

« Je te l’avais pas fa bu[1] ? C’est ma nebeude ! » (rapporté par Pujolet le peintre).

« Je l’ai compris au remènement des pots »,

« Le cagarot, il a des banes »,

« Dans un obus, quand ça pète, es pas tant lou machin que fa mal, ès mai que mai lou dacòs[2] ! »,

« Quand eri sus la Côte d’Usure[3], vejeri qu’abion uno guerro d’azur » etc. c’était le frère de « Thomas de les huîtres ». 



iris pseudacore auteur Jonathan Billinger Creative Commons licence. 

Revenons à nos si jolies fleurs, les IRIS, apparus il y a 80 millions d’années dans un secteur qué s’appelario Antarctique aujourd’hui !

Le plus représentatif, pas celui qu’on pense, est l’iris des marais faux acore, aux tépales dépourvus de barbes. Encore une énigme ! Les sépales, verts d’ordinaire, comme supportant les pétales autrement colorés, on connait. Les tépales sont à mettre entre les deux, plus tout à fait sépales et pas encore pétales… Cet iris jaune, emblème de Lille, de la région Bruxelles-Capitale aussi, apprécié par la médecine d’autrefois pour ses propriétés astringentes et hémostatiques (qui arrête les hémorragies), poussait abondamment sur les rives de la Lys…

La fleur de Lys qui figurait sur le blason du seigneur d’Armentières fut adoptée par Clodion le Chevelu (vers 440), roi des Francs Saliens, nouveau suzerain après ses conquêtes au sud des bouches du Rhin, sur un territoire correspondant à la Belgique actuelle. Par ailleurs, une légende liée à la bataille de Vouillé (507),  raconte qu’initialement repoussé par les Wisigoths sur les rives fangeuses de la Vienne, Clovis (peut-être l’arrière-petit-fils de Clodion), voyant une biche emprunter un gué, put faire traverser ses hommes là où les iris fixent les berges de leurs rhizomes. Finalement vainqueur, le roi des Francs gardera la fleur comme symbole. 

Wikimedia Commons Fleur de lys blanc Author No machine-readable author provided. PRA assumed (based on copyright claims).
Tout se complique avec les Carolingiens soucieux de s’appuyer sur la Bible avec les fleurs ornant le Temple à Jérusalem, le lis, insigne de pureté, de sainteté, fleur du roi Salomon, le polygame au millier de femmes et plus tard de Marie, enfantant Jésus sans le concours d’un homme. 

Wikimedia Commons Fleur_de_lys Artist Sodacan


La confusion entre l’iris et le lis viendrait du dessin stylisé de la fleur. L’eusses-tu cru en voyant cet iris jaune pseudacorus qui pousse derrière les tamaris, entre les vignes de Gaysart et les marais de la Joncasse (piémont nord-est de la Clape) ? 



[1] « Je ne te l’ai pas montrée ? C’est ma nièce ! »
« Je l’ai compris au remuement des lèvres »
« L’escargot, il a des cornes. »

[2]  « Dans un obus, quand ça pète, ce n’est pas tellement le machin qui fait mal, c’est principalement le truc ». “Dacòs” désigne un objet ou une personne dont on a oublié le nom : presta-me lo dacòs, prête-moi l’objet ; dacòs es pas vengut, un tel n’est pas venu’.


[3] Usure et Azur: Toumassou confondait les deux mots (ou faisait son numéro…).