jeudi 5 septembre 2024

L'EXTENSION habitable du village. Fleury-d'Aude en Languedoc.

Au niveau de la vie d'une commune qui forcément évolue avec le temps, pour se rendre compte de ce qu'il en est, il n'est pas inutile de remonter le cours des initiatives et projets... parfois en suspens.  

À Fleury, l'extension des zones bâties autour du village correspond à l'augmentation du nombre de résidents. De tous côtés, de nouveaux quartiers sont sortis de terre. Aux maisons individuelles se sont ajoutés, faute de devoir payer des amendes à l'État, des ensembles sociaux. 

À cette dynamique s'est greffée la nécessité de décongestionner un centre ancien pas du tout adapté à l'engorgement actuel de voitures particulières. (La réalisation récente de parkings ne parvient pas à résorber cette invasion de bagnoles ; les voies sont envahies ; les propriétaires en arrivent à s'approprier la rue devant chez eux...). 

Au stationnement des riverains s'ajoute le transit, à plus forte raison l'été, vu la proximité des stations balnéaires. Joignant le contournement effectif nord et est pour le trafic venant de l'Hérault, une rocade ouest est dans les papiers depuis l'automne 2018, depuis qu'un « ...Conseil Municipal a arrêté les objectifs du projet de la ZAC du Moulin, dans sa délibération du 25 septembre dernier... » 

Cherchez les espaces verts... mais tant que le moulin (colline de Montredon) et la colline Derrière l'Horte restent libres de l'emprise humaine, cet aménagement à venir semble raisonnable.

Cette délibération répond à des diagnostics énoncés dans un prêchi-prêcha écolo-technocrate, à savoir dans une redondance des évidences : le paysage, la proximité du village, une bonne desserte, des « équipements publics  et des commerces de proximité » (vrai qu'il ne sont pas nombreux), des « déplacements doux ». Plus recevable, d'abord la prise en compte de contraintes climatiques dont le risque important d'épisode méditerranéen, ensuite la gestion des flux routiers grâce à la réalisation de la rocade ouest pour un double bénéfice, la traversée du village vers les plages et la desserte des nouveaux quartiers d'habitation. 

Cette délibération se décline en objectifs, celui de créer un nouveau quartier « proposant une mixité sociale dans la programmation des logements » et tenant compte des diagnostics. Si l'étude semble globalement recevable, le jargon employé pour la présenter rebute plutôt : 

« Objectif 2 : Participer à un aménagement qualitatif de l'entrée de Ville et porter la réflexion sur la qualité des espaces publics par un traitement  du boulevard urbain et la création d'un espace de centralité. » (sic !)

De même, encore ce jargon sur « ...les mobilités douces, sur les formes d'habitat et l'usage des énergies renouvelables... » (objectif 5). « ...Conforter des liaisons avec les sites naturels et avec le village pour faciliter les perméabilités avec ce nouveau quartier... » (objectif 6)

Après les formules oiseuses, la dernière demi-colonne de l'étude, par contre, donne des chiffres : 

* 30.000 m2 de planchers. 

* 300 logements (individuels, individuels groupés, petits collectifs (3% du total devant être obligatoirement social). 

* des commerces et service de proximité sont prévus autour d'une place centrale (petits immeubles et cellules commerciales en rez-de-chaussée). 

* côté coopé-déchetterie, un secteur économico-public (caveau de vente de la coopérative entre autres). 

Le projet a été présenté à la population le 13 novembre 2018 (Salle des Fêtes). 

Cette Zac reste dans ses cartons depuis 6 ans ; les technocrates de la communication auraient dû continuer dans leur jargon plutôt que de parier sur l'avenir « Aujourd'hui un projet... /... demain une réalité ! ! » 

 


De même, on ne peut que regretter une forme d'arrogance de leur part lorsqu'ils se targuent de présenter un paysage qui leur reste étranger, tant les erreurs sont flagrantes ( le Carroux avec deux R, la colline d'Ensérune mal située, le château d'eau apparemment vendu à Salles d'Aude). 

Question plus inquiétante... N'y avait-il pas un Pérignanais dans le secteur ? un indigène disponible à portée ? 

 

Vieil INDIEN, vieilles LUNES, le voyage en TCHÉCO (31)

Lire, corriger, relire, reprendre, s'y remettre, relire encore : un cycle toujours recommencé pour qui veut faire passer son émotion, ses sensations, ici par le tamis des mots mais ce doit être la même chose avec les mains, la voix, des notes de musique, un pinceau, un burin... 

Un exercice, une addiction presque, pour laquelle il faut se limiter si un produit fini doit être publié, exposé, livré au public... au bout de trois relectures, il faut larguer les amarres... vous qui portez une sympathie certaine aux articles proposés, pourriez en témoigner. 

Ce voyage en Tchéco, en Tchécoslovaquie, qui paraît en feuilleton depuis le 25 juillet, s'avère être aussi une introspection, un voyage en soi, un voyage, également, avec ceux, proches ou connus qui ont accompagné notre vie, ajouté à notre culture et encore un voyage dans l'Histoire de nos semblables, dans notre propre histoire (d'où l'importance que devrait avoir une majuscule). Et revient ce dicton attribué au peuple du vent, aux Tziganes, aux Gitans « Ce n'est pas le but du voyage qui compte, c'est la route », « Le but, c'est le chemin » aurait dit Goethe aussi... 

La famille, les cousins constituent bien un but de voyage, surtout après six années d'éloignement, quand on s'aime... La route, le véhicule, ce vecteur virtuel, ne sont qu'amour, un domaine pour lequel on ne compte pas. A-t-il un coût seulement puisqu'il rend plus riche ? Partir sans aller vers l'autre enlève bien du prix à un voyage pourtant cher payé...

Ces considérations brouillonnes qui pourraient relever du travail préparatoire à une dissertation, amènent à parler d'amitiés particulières rappelant une situation qui ne s'est heureusement pas reproduite depuis, celle de la Deuxième Guerre Mondiale faisant s'entretuer des gens... et en naître d'autres qui sans cela ne seraient pas... laissons un auteur remarquable l'exprimer sans ambiguïté aucune :

« La guerre, un massacre de gens qui ne se connaissent pas, au profit de gens qui se connaissent mais ne se massacrent pas. » Paul Valéry. 

En partant pour la Tchéquie, dans ce voyage vers les autres, il faut s'arracher à son monde, à sa partie de monde. Ici c'est celle, liée à la naissance, l'enfance, une des périodes qui comptent le plus mais pas “ romaingaryesque ”, tournée vers son nombril, aurait-on été un éminent écrivain... Un jugement lapidaire, à l'emporte-pièce, sûrement pour avoir abordé Gary avec « La promesse de l'aube »... et puis pour ce que ça vaut, venant d'un obscur écrivaillon poussif, bréhaigne (oui, surtout au masculin) ... et, à moins que ce ne soit plus complexe, pure jalousie, certainement. 

Alors on se défend de l'autobiographie trop sucrée, on veut l'aspartamer sinon seulement l'évoquer en parlant des autres, ici, du père et ses amitiés particulières. D'ailleurs, à peine plus loin, juste une touche légère sur Pézenas et les trois années qui ont compté, passées là-bas :

« Pézenas : l’ancienne nationale a gardé ses platanes mais les herbes ont repris le goudron… difficile d'évoquer la Dauphine bleue de papa, qui, le lundi matin, à 110 à l’heure, nous ramenait vers nos classes, vu qu’une inondation n'est jamais venue nous offrir un lundi sans école. » 

Béziers, le Pont Vieux, la cathédrale Saint-Nazaire ; la montée de Tour Ventouse est à sa gauche, au pied des arbres.

Revenons à Béziers, le 17 juin 2024, là où, collé au macadam, le voyage commence, recommence à peine. 

Lundi 17 juin 2024.

143.894 km. Départ de son bout du Monde vers 17h 45. Arrêt pipi sur le terre-plein juste après le pont sur l'Aude. C’est malin ! À peine deux kilomètres parcourus !

À peine plus loin, la cité, Béziers, s’affichant en tant que plus vieille ville de France quand ce n’est pas comme capitale du vin ; et là, c’est par la vue magnifique, sur son éminence, de la cathédrale Saint-Nazaire ; empêchée la voie montant au lycée, l’accès par Tour Ventouse, là où, de la tour des remparts, ne reste que le vent… et encore on ne sait plus trop tant, de nos jours, l’atmosphère est perturbée. Le lycée Henri IV, papa y enseigna (1957-1959). Le lycée Henri IV, déjà une invitation au voyage lors de la conférence du répétiteur d’allemand, dans les profondeurs du bâtiment sud, si en hauteur, avec accès extérieur. Martin, il s’appelait… Était-ce son nom ? son prénom ? s’appelle-t-il encore ? Il venait des hauteurs du Bodensee. Beaucoup de monde et le ressenti enthousiaste de l’enfant de huit ou neuf ans qu’il était, accompagnant son père élevé à un rôle de co-vedette puisque Martin, invité à la maison, faisait désormais figure d’ami. Dans cette salle, déjà une invitation au voyage, oui, si empreinte de paix espérée entre les peuples, c’est ce à quoi il pense, soixante-six ans plus tard, dans une réflexion tout à fait anachronique mais positive de la distanciation temporelle forcée.

Son père n’échangeait-il pas, malgré la guerre, avec le notaire de Murrhardt pour avoir des nouvelles d’Hermann, le fils, avec qui il correspondait depuis le lycée ? Hermann avait raconté comment il avait échappé à bien des dangers en faisant, prélude à la déroute annoncée, retraite avec la Wehrmacht depuis les steppes précaucasiennes. À pied.

Et la mise en avant de Martin, treize ou quatorze ans après la guerre, ne traduisait-elle pas un fond d’humanité opiniâtre face aux débordements sanglants menaçant l’espèce d’une autodestruction récurrente ? Une dichotomie encore évidente lorsque l’empathie prend le pas sur l’affrontement. Étonnants ces liens entre la soldatesque d’occupation et les villageois, ce cuisinier allemand demandant à mon oncle Noé s’il ne pouvait le dépanner avec des oignons, ces soldats pleurant auprès des locaux parce que Hitler les envoyait en Russie… de quoi revenir sur les bons, les méchants, le blanc et le noir… 

Markdorf_vom_Gehrenberg 2008 under the Creative Commons Attribution 3.0 Unported license Author Andreas Praefcke

 
Markdorf_Ittendorf - Andreas-Strobel-Straße 2010 under the Creative Commons Attribution-Share Alike 3.0 Unported license Author Franck Vincentz 

Bodensee, lac de Constance, 1976.

Martin, du plateau souabe, de Markdorf… à deux pas du Bodensee, le lac de Constance ; ils y sont passés une fois : ses vieux parents avaient encore leurs vaches… des bouses, des fruitiers d’une Allemagne rustique, paysanne, au destin solidaire ; des gens concrets, aux sourires sincères, pas des nazis viscéraux aux visages figés, possiblement croisés sur la route et devant honnir une Dauphine à la plaque étrangère. La candeur, la fraîcheur des premiers prévalent toujours, chez les hédonistes, sur les ferments vindicatifs des fanatisés.

La Tour Ventouse étant bloquée par des travaux qui s’éternisent, il faut aller jusqu’au rond-point de la route de Murviel, sinon, pour qui connaît, cet itinéraire permettant de ne pas prendre la longue déviation par l’ouest de la ville, reste pratique.