vendredi 12 juin 2020

PARTIR (6) / Beau comme un paquebot !

Bien sûr que c'est beau un paquebot ! Je ne parle pas de ces buildings flottants obèses et luxueux d'aujourd'hui qui emmènent des croisiéristes, je fais référence aux transports maritimes de passagers historiquement liés aux vagues migratrices et forcément aux colonisations s'agissant de maintenir les affaires et le lien avec les métropoles. L'échange de courrier motive même la création de la Royal Mail Steam Packet Company en 1839 pour desservir les Caraïbes et l'Amérique du Sud.

Royal_Mail_Lines_House_Flag.svg wikimedia commons Auteur Ayack and Greentubing (Crown of Saint Edward.svg).
Vivotant à la fin du XIXème, la compagnie se redresse (1920) jusqu'à devenir la plus importante suite au rachat de la White Star Line, liée au tristement célèbre Titanic. Condamnée pour des comptes falsifiés, l'entreprise est liquidée en 1931. Refondée en 1932, la Royal Mail Line est impactée par l'essor de l'aérien dès les années 50.
Elle n'a plus que deux unités sur la ligne de l'Amérique du Sud au lieu de quatre avant la guerre. Et en 1949, elle perd pour son voyage inaugural son plus moderne et récent navire, le Magdalena (11500 tonnes), ouvert sur les récifs de Tujica à quelques milles de la plage d'Ipanema (Rio de Janeiro) et qui, remorqué vers le port, a pourtant coulé dans la baie de Guanabara. 

Alcantara_à_Rio wikimedia commons Auteur Kenneth Shoesmith
Mais tout ça, je le sais en 2020, sinon que peut-on en connaître en 1953 ? Il n'empêche, un paquebot reste beau, ce qui relève et de l’esthétique et du rapport de l’homme à la mer, cela reste vrai soixante-sept ans plus tard. Et là, c'est l'ALCANTARA, 200 mètres de long, 24 de large, 22.209 tonnes de déplacement, 18 nœuds au maximum (mais le Ruban Bleu ne se joue que sur New-York), 1430 passagers dont 432 de 1ère classe, 223 de deuxième, 775 de troisième classe. Les flots d'émigrants cessent, les Etats-Unis devenant plus stricts sur la santé. La concurrence avec l'avion... Le chant du cygne pour de magnifiques paquebots, Queen Mary, Queen Elisabeth, Bremen, Europa, Aquitania et... Alcantara... 

82 de 1ère classe et 115 passagers de seconde classe figurent sur ce carnet. L'embarquement à Southampton ou à Cherbourg est précisé ainsi que la destination. Les passagers dont le billet a été pris plus tard n'y figurent pas. Des pages sont prévues à la fin pour les autographes.





dimanche 7 juin 2020

MARCEL SCIPION, Le Clos du Roi.


Un Clos dit “ du Roi ”, un vallon où emmener les moutons l'été à transhumer. Faire son pain mais pas pour rigoler (50 kilos de farine, 15 jours de miches pour la dizaine de personnes d'une famille élargie), faire ses patates, ses choux, son miel, sa médecine même avec les limites qu'on sait, son vin, distiller son marc en fraude, braconner les sangliers, le lièvre les nuits glacées de pleine lune malgré les gendarmes... Et tout ça conté presque au coin du feu... Oh c'est rustique, presque un cliché pour citadin mal à l'aise, rêvant d'un retour impossible à la nature... 

Pourtant cette prise de conscience ne date pas d'hier. Il y a bien 50 ans qu'elle s'est formée. Une extravagance de nantis au début mais qui petit à petit devient une obligation sans quoi nous allons à la catastrophe de plus en plus annoncée. De timide, le changement de cap devrait se préciser avec moins de bagnole, moins de produits, finie l'obsolescence programmée, il faut des circuits courts, il faut retrouver le bonheur de manger ce que donne un jardin sain... On ne parle de sa vie que parce qu'il y a eu rupture ; Marcel Scipion et bien des auteurs bêtement traités de régionalistes ont pris conscience de la mise en danger du planétaire, de l'universel, déjà avant 1980.  

Mais l'homme ne vit pas que de nourriture terrestre. Aussi au risque de passer pour un ethnocentré (je m'en fous c'est moins grave que le nombrilisme jacobin), je me laisse aller à apprécier notre penchant méditerranéen. Le littoral oui mais l'arrière-pays surtout, qui aborde vite l'altitude, chez nous, Corbières, Pyrénées, Montagne Noire, Espinouse, Cévennes, Monts de Vaucluse, Préalpes de Digne ou de Castellane avec une végétation qui rompt avec les garrigues et maquis. 

Gabachs ou gavots, partout des montagnards de quand la montagne était belle. Et ces mots, cette langue qui se doit de résister tant qu'une domination d'un autre âge n'a de cesse que de l'effacer pour ne pas qu'il soit dit qu'elle a été soumise... 
"Dijous ma finestro i a un ametlièr que fa de flours blancos coumo de papièr"... 
Et ce n'est pas parce qu'entre la science, le réchauffement climatique et l'épuisement des nappes phréatiques, l'amandier pousse plus au nord qu'il en a perdu pour autant sa portée symbolique.