mercredi 10 avril 2019

LE VAL DE DAGNE, JOSEPH DELTEIL... du patois à l'OCCITAN

Val de Dagne... val de Diane... petit pays retiré et secret de nos Corbières nimbées de mystères ! 

"Aude Pays cathare" fait la promo du val de Dagne : 


" Connaissez-vous le Val de Dagne et ses villages ?
Pas très loin de Lagrasse, on peut y faire de très belles balades à la découverte du petit patrimoine rural, des villages tranquilles, d'églises anciennes, de ponts médiévaux, et de la nature, vignobles, collines, rivières...
(photo : La Bastide en Val )
Auteur de la Photo : Gite Pyrenes" 

Oui, oui, "petit patrimoine"... mais si plein, si dense, si enraciné quand le voyageur de commerce qui ne vend rien sinon son âme l'habite ! 

Le Val de Dagne, pays natal de Joseph Delteil (1894 -1978), l’écrivain-poète monté à Paris mais retourné vivre au pays, « al pais », puisque c’était écrit. Né d’un père charbonnier et d’une mère « buissonnière », à Villar-en-Val, mystérieux petit pays perdu dans des Corbières à l’écart des trépidations et trafics modernes, puis installé à Pieusse, terre de Blanquette...

Delteil et l'occitan : 
 « Cette langue descendue en droite ligne de la paléolithie, c’est le patois : « On s’étonne parfois de mon goût pour le patois, un peu vif, mais que voulez-vous, le patois est la langue de maman, ma langue maternelle. Je l’aime. Je devrais dire : l’occitan, je sais, qui est le terme correct, et le plus stratégique. Mais occitan, ça fait savantasse, ça fait intelligentsia. Jusqu’à cinq ans, je n’ai parlé que le patois. Le français m’est une langue étrangère. […]
« Je crois à l’oral, plus proche de l’esprit et des choses. Prononcez et savourez les tastets, ces mots crépitants qui se tâtent à belles dents ! Et comment ne pas saliver devant cette langue cocagne, assaisonnée de croustets gradaillés, de rousillous et de millas. Le français fait piètre mine et, comme le crottin de cheval ramassé par Joseph et Marie, il pourrait bien finir à la gourbeilh. Aussi, redonnons à la langue ses lettres de jouvence et mameillons le patois nourricier : « Las poupos, volumineuses, laiteuses, c’est bien autre chose que les seins ». (Joseph Delteil / La Delteilherie / L'âge d'Homme, 1998). 

Premiers écrits en languedocien, un sonnet  paru dans
L'Almanac patoues de l'Arièjo, un almanach édité de 1891 à 1936 !

Sounet a l’almanach patoues



Dins un bosc desertat, sans cansous et sans amo,

Un joun un aousel ben, bastis un nis, y poun.

Les pitchous espeillits, la tristesso se foun,

Et le bosc tressaillis de cants blus dins la ramo.



Le patouès, el tabès, éro coum’ uno lamo

Roubillado, coum’un sac cendrés sans noun.

Ero’n bosc sans aousels per fioula tout le joun

Pascap de musicien per y mounta la gamo.



Un matis, debès Fouich, un libré nous arribo,

Escrit dins le parla que s’entend su la ribo;

Et toutis escoutan aquelo douço bouès.



Uno tendro cansou bob dins las campagnos,

Nostro sounoro leng’ engrano sas iragnos,
Et nostre cor palpit’ es I’almana patoués!

Autres articles sur ce blog : 

https://dedieujeanfrancois.blogspot.com/2015/12/traditions-noel-sud-languedoc-aude-aude.html

https://dedieujeanfrancois.blogspot.com/2015/12/les-lumieres-de-noel-sud-languedoc-aude.html

https://dedieujeanfrancois.blogspot.com/2018/06/introduction-au-bassin-de-limoux-la.html 

Joseph-Delteil-1972 d'après photo de Pierre-Calmettes.-ConvertImage / Qu'un aire petejaire ou petonejaire... sabi pai mai coumo se dis... e tapau poutounejaire per lous poutous que petoun... enfin, que fa de bulos coumo la blanqueto ! I bèl e poulit aquel omé ! E coumo me rapelo l'ounclo Noé qu'aimaben tant...
PS : Poutous a la pitchouno d'Andrée qu'a inspira aquèl papièr... e a Papaul soun omé... 



mardi 9 avril 2019

AVEC DES FLEURS ET DES CHANSONS (fin) / Je me fous du monde entier...



Oh mais ça a démarré un cran de plus en amont, grâce à Émilien qui a mis en ligne les grappes opulentes de sa glycine ! Elles ont fleuri tôt cette année ! Les plantes sont comme nous, de la même espèce mais toutes différentes. Par exemple cette glycine de juillet 2014, à Saint-Pierre, avec beaucoup de verdure et peu de fleurs, très en retard, peut-être dans un milieu défavorable, tout à fait à l'opposé de celle d’Émilien. 

 


https://www.youtube.com/watch?v=2SgiC2PaDdA



Serge Lama avec mon salut cordial pour l'ami pérignanais qui a grandi à la Pagèze, cette campagne avec vue depuis le balcon ultime de la Clape, la garrigue dans le dos, l’Aude, les marais et la mer au fond et plein de souvenirs partagés généreusement. Merci Émilien !



Vous êtes perdus ? Moi aussi… Reprenons avec le décor : l’ordi sur le bureau, la télé. 
Banal.

L’ordi m’a montré que les glycines avaient déjà fleuri ! Aussitôt, les printemps qui ont colorié ma mémoire sont revenus avec les giroflées de la rue du bassin et les « Leçons de Choses » du Cours Moyen. 


 "Giroflée, girofla... lève la queue et puis s'en va..."... une chanson encore, dans une version locale... sinon, pardon si ma mémoire flanche. 

Il y aurait bien les glycines mais elles m’obligeraient à lever un coin du voile sur des fantasmes de garçon... Sardou l'a si bien exprimé dès les premières notes : 

 https://www.youtube.com/watch?v=mLY2A8vhdhw

Entre temps, une "amie fb" est venue tourner des pages fermées pourtant depuis deux ans, une éternité, immédiateté technologique oblige. Coïncidence, encore des fleurs, de celles qui poussent au pays, les plus chères, si fragiles sur les dunes, entre mer et sansouire. Ramène moi au pays qui m'a vu naître...
 

Sur ce, les documentaires d’Arte pour que nous considérions la diversité naturelle avec respect et non sous le crible d'une dangereuse productivité à tout prix.  Une autre leçon de choses m’a alors parlé de mauvaise herbe (le livre de "Leçons  de Choses" le dit , ce que je n’ai jamais accepté parce qu’au début de années 50, la vigne de Perrucho, au pied de Caboujolette, était un champ de blé, bien plus haut que moi, avec bleuets et coquelicots… Du bleu, du blond et du rouge pour un symbole bien raciné…

 


Et les 480 « Je me souviens » de Pérec…



Sauf que « Je me souviens, c’est la devise du Québec. Et mon envie de fleurs s’accompagnant de chansons, la première qui est venue, « Frédéric » (1961), pour dire que je me fous du monde entier quand la vie si pleine du pays revient palpiter, toujours sans crier gare, toujours aussi vivante et foisonnante, est de Claude Léveillée, né à Montréal. Heureusement qu’Internet est là !

Oh la Belle Province, déjà un lâchage de la France du roi… j’en ai encore un haut-le cœur. Ça pue chez les absolutistes et plus encore chez les contaminés de la jacobinite. « Vive le Québec libre ! » De Gaulle, heureusement, pour un soupir de consolation.

Oh le Québec, à chaque piqûre de rappel, le vent sur la dune de Pissevaches en a mes larmes aux yeux. André Pédrola, le fils d’Elise, la voisine de ma grand-mère, André, le frère de François dit Francis, le grand copain de papa, a émigré à Montréal dans les années 50. Un homme formidable, de ceux qui passent sans qu’on les remarque ou qui vous percutent du trop-plein d’amour dont ils débordent. André a partagé, voulu donner à voir de son sillage depuis la guerre… Ces hommes-là vous offrent une force plus forte que le vide qu’ils laissent un jour…  Tant que nous parlons d’eux c’est qu’ils sont encore là…     



Je me fous du monde entier. Et pour cause :



« … Après, la vie t'a bouffé
Comme elle bouffe tout le monde,
Aujourd'hui ou plus tard,
Et moi, j'ai suivi.
Depuis le temps qu'on rêvait
De quitter les vieux meubles,
Depuis le temps qu'on rêvait
De se retrouver tout fin seuls,
T'as oublié Chopin,
Moi, j'ai fait de mon mieux.
Aujourd'hui, tu bois du vin,
Ça fait plus sérieux.
Le père prend un coup de vieux

Et tout ça, fait des vieux… »



Devenir vieux... l'unique alternative à la mort... Claude Laveillée a perdu son fils de vingt ans. Lui-même a subi deux avc en 2004, jusqu’à ce qu’un troisième, en 2011, referme son livre, à 79 ans.



C’est ainsi que les hommes vivent et comme le précisait Marcel Pagnol :

« … Telle est la vie des hommes. Quelques joies, très vite effacées pas d’inoubliables chagrins.  Il n’est pas nécessaire de le dire aux enfants… »

Je me fous du monde entier...