jeudi 16 avril 2015

LES MOTS QUI TUENT ! (1) / Mayotte, France en Danger



De la part de ceux qui ont de la bouteille et des responsabilités, nous avons droit soit au silence assourdissant, soit au « ni responsable ni coupable ». 



Le silence assourdissant soit parce qu’on fait le gros dos, en attendant que la tempête passe, soit parce qu’on fait avancer la caravane tandis que les chiens aboient. Je veux bien en être, de la meute, la langue bien pendue, le fouet leste, et « on » serait monsieur le préfet d’abord aux champs, lors de sa tournée des villages, puis dans ses quartiers tant ce qu’il a vu l’a accablé à moins que ce ne soit pour relever ses manches.  
Ils doit avoir les oreilles qui sifflent quand même ! Pas plus tard que ce matin, à Kwezi, un patron de l’aquaculture en déconfiture ne lui a pas envoyé dire en lâchant tout de go que certains éléments de l’administration viendraient à Mayotte pour « deux ans de dolce vita et une promo à la sortie » ! La radio a évoqué un dossier soumis en janvier 2013 et toujours pas réglé, plus de deux ans après... L’aquaculteur, toujours maître de ses propos mais manquant de réalisme, a même regretté qu’il n’y ait pas plus de fonctionnaires mahorais, plus concernés que ceux qui viennent vivre une parenthèse sous les cocotiers...  Oui, oui, en théorie... quoique, pardon de me répéter, mais les hommes étant ce qu’ils sont, c’est l’institution qui doit les garder dans les rails... En attendant, pour l’entrepreneur qui a des tonnes d’ombrines qui crient famine depuis plus d’un mois (est-ce lié ?), ça « ne bouge pas » à la Préfecture.
Attention de ne pas accuser à la légère, parce qu’au moment de fermer l’antenne, le journaliste a fait état d’un communiqué de la préfecture, une dernière minute, une réaction du tac-au-tac du préfet ! Il a dit texto (ou SMS) que le classement, pris en haut lieu, peut-être dans la nuit, relatif au patrimoine , protégeait désormais les... cases d’un certain quartier où un ex-architecte de la Sim, à Mayotte depuis plus de vingt ans lui ! pas comme ces ronds-de-cuir de la dolce vita ! faisait face au tracto-pelle des démolisseurs (au sens propre !).
Alors, les médisants ? En attendant il a parlé non ? Les poissons d’élevage ne sont pas à un mois près ! Et puis s’ils finissent comme ceux du lagon parce qu’au large, Europe oblige, des bateaux-usines razzient la ressource, ils compatiront, à la préfecture... 

photo autorisée wikipedia et l'haiku promis, comme bol d'oxygène !

 

mercredi 15 avril 2015

LA BUVETTE DES ROSIERS / Pézenas (suite).

LA BUVETTE DES ROSIERS / Pézenas (suite).

Or, curieusement, l'accès direct au boulevard "de ceinture" avec la possibilité de rejoindre l‘ancien cours Molière où se tient le traditionnel marché du samedi, est resté, ou devenu, piétonnier. Une promenade bordée de platanes court en effet vers la ville, mais sur à peine plus d‘une centaine de mètres, stoppée, fermée net par la balustrade style rocaille d‘un jardin public, avec son portillon grillagé, ses arbres, ses massifs, son buste commémoratif, son bassin aux poissons gonflés d'œufs (1). Existait-il antérieurement à la gare et à la promenade ? On se dit qu'il y eut bataille entre les classiques et les modernes. Qui a gagné ? Qui y perdit ? Le collège de jeunes filles, sur cette promenade en cul-de-sac, a-t-il pesé sur l‘accessibilité des lieux ? Et dans quel sens ? Entre la gare et la ville, la circulation hippomobile puis automobile se fait, à droite, de façon détournée, en joignant la route de Roujan. Ce qui a pu être une belle avenue ne forme qu‘un trajet confidentiel, une allée aux platanes, réservée, presque, au collège de jeunes filles. Bloqué par la balustrade, il continue néanmoins, descendant à droite jusqu‘à l‘habitation du voisin, l‘initiateur à la pêche au bouchon dans la rivière proche. Sa famille est la seule, je crois, de ce côté de maisons-immeubles qui donnent aussi, à l‘opposé, mais un niveau plus haut sur la route de Roujan. Encore à droite, donnant dans ce terrain en contrebas qui commence à se lotir, le tracé en £, le symbole de la Livre anglaise en reste à sa boucle.

Un mot sur la place (aujourd’hui un rond-point), au-delà du square, aux limites du territoire, en bordure de la ville. En face des cabinets publics, une salle ou un foyer des fêtes ou du peuple, il a oublié, où se donnaient les conférences de Connaissance du Monde (2). Un dimanche après-midi, agacé de sentir le lundi si proche, il en a même voulu à ces petits chanteurs orphelins portant leur croix qui bêlaient „Ne pleure pas Jeannette...”, comme si tous les enfants obligés de reprendre la classe, et lui en premier, n‘étaient pas à plaindre, eux...

A gauche de la buvette, toujours en regardant la ville, le rail, par un pont de fer, traversait „... un trou de verdure où coule une rivière...” ; la Peyne, un paradis de joncs, de roseaux à cigares, de plantes aquatiques dans le courant, de calmes plus profonds où brèmes, gardons et goujons taquinaient le bouchon rouge vif d'un pêcheur au coup. On en oublie que la voie ferrée, les routes et les chemins semblent exhaussés et qu'en aval le lit de la rivière est bétonné tant elle inquiète la ville. Corsetée, forcée dans un canalet central, l'eau vive ondule de longues algues vertes, cheveux d‘une ondine qui se hâterait de fuir cet aménagement urbain, pressée de recouvrer sa pleine nature. Un gentil débit. Gardons-nous, cependant de moquer l‘ondine... Comme tous les cours d‘eau méditerranéens, la Peyne peut offrir le spectacle dantesque d‘une crue causée par un aigat, „l‘épisode cévenol” des météorologues, quand les quartiers bas se retrouvent inondés et que le niveau dans le lit bétonné atteint l‘arche du pont de la nationale (3).


Mais revenons au pont, désaffecté, de la voie ferrée. Au delà de l'enchevêtrement calculé de poutrelles, comme un hameau rustique, un havre oublié, tout proche pourtant, de tuiles, de potagers et de vergers imbriqués, bien lové au bord de la rivière libre, bien qu‘ exposé à ses colères.

Pour situer le coin, en rayonnant depuis la gare : dans la perspective, le jardin public, à droite la route de Roujan, à gauche le pont, le hameau, la rivière. Et lui au milieu puisque son père travaille ici. La famille loue "La Buvette des Rosiers", vidée depuis longtemps de ses rires, des vives discussions, des allées et venues vers le bourg. Il y a belle lurette que les élégantes et leurs ombrelles ont déserté la tonnelle rouillée... Sa mémoire cherche en vain un rosier grimpant. De l'autre côté du carrefour délaissé, dans la Dauphine bleu séraphin du papa, à l'abri sous ce large auvent de gare qui n'a rien de languedocien, sur la plage arrière, il voit une minette qui attend, habituée à nomadiser, le temps d'un jeudi, d'un dimanche ou des vacances scolaires, du lieu de travail jusqu‘au village, ancrage aussi natal que viscéral. (à suivre).


(1) il s‘agit plutôt du Monument aux Morts, avec le soldat à la canne entourée d‘un serpent, portant son casque de l‘autre main. La mémoire persiste à induire en erreur. Alors que le monument est imposant, avec un portique en arc de cercle où les morts sont inscrits, elle fait confondre avec le square, vers la passerelle sur la Peyne, où se dresse le buste de Molière. Est-ce que cela correspondrait, au début des années 60, à un oubli volontaire des guerres dont la Grande, la première ? Comment le devoir de mémoire était alors transmis aux jeunes générations ?

(2) Les Mahuzier en Afrique, Lionel Terray à l‘Annapurna, pour celles qui reviennent en mémoire et encore, vu que je confondais avec Maurice Herzog...

(3) ces aigats soudains survenaient plutôt en automne lorsqu‘une perturbation en forme de crosse d‘évêque fait tomber un déluge sur le rebord du Massif-Central avant de le faire dévaler sur l‘amphithéâtre languedocien. En 1907, la crue a démoli la passerelle donnant sur la distillerie et le quartier des Calquières Hautes.
 

photo 1 & 4 autorisées commons wikipedia / 2 & 3 François Dedieu 1963.