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mercredi 15 février 2023

LA NOURRITURE, avant, dans nos contrées... (1)

Un résumé d'un très bon article " L'alimentation en Languedoc et dans le Comté de Foix de 1850 à nos jours " de la revue Folklore n° 61, hiver 1950, par René Nelli (1906-1982), poète occitan, philosophe, historien du catharisme. 
L'âge me le permettant désormais, je joins, dans le troisième volet, ce qu'on mangeait à la maison et au collège en demi-pension, dans les années 60... et là il faudra m'aider pour tout ce qui m'a échappé... 

Sorgeat licence wikimedia commons 3.0 Unported Author jack ma

Vers 1828, dans la montagne d'Ax-les-Thermes, entre la farine de sarrasin, le lait, les patates et jamais de pain, l'ordinaire était plus que limité. L'auteur confirme les disettes récurrentes de 1845, de 1853. En 1846, le préfet écrivait au ministre " On ne vient pas à bout du désespoir avec des bayonnettes. ". En temps normal, la situation des paysans est aussi misérable qu'insuffisante. Avec 10,20 francs par semaine, un journalier peut à peine nourrir sa famille de 5 enfants sans acheter de viande, seulement 2 douzaines d'œufs. la situation ne connaîtra une amélioration qu'à la fin du XIXe siècle. 

Cassagnoles Montagne Noire Hérault Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International Author Tybo2

Dans la Montagne Noire, c'est un peu mieux si on peut faire venir le cochon, avoir une chèvre et cultiver un potager (légumes verts, graisse, lait). Dans la montagne on cuit du pain de seigle, en moyenne altitude, on mange du millas. Ils ne boivent du vin que pour les grandes fêtes et lors des grands travaux (fenaison, moisson) c'est le propriétaire qui fournit. Du vin ils en auront quand ils pourront se payer une vigne dans la plaine... ce sera toute une expédition pour l'entretenir et vendanger (voir les derniers épisodes des filles du Poumaïrol). 

Pour remplacer la viande, au moins en avoir l'odeur et un peu le goût, il est d'usage d'utiliser le " sabourial ", un morceau de lard plus que rance enfermé dans un tissu cousu, trempé un moment grâce à une ficelle dans la soupe aux choux avant puis mis à sécher à nouveau sous le manteau de la cheminée. 

Ferme caussenarde Causse Méjean Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International Author HPB48150

Sur les Causses, les gens mangent aussi la soupe aux choux, du lait caillé ou du fromage, des pommes-de-terre, du potage au riz. le pain est toujours d'orge ou de seigle. 

En Lozère, la disparition des grandes fougères fut préjudiciable aux troupeaux qui en disposaient malgré la neige et surtout aux abeilles.

 


Dans les Cévennes, sous forme de bouillies, de galettes, de soupe, de castagnous au lait, les châtaignes permettent de tenir la moitié de l'année. partout, le mildiou a causé une grave crise dans la production de pommes-de-terre. 

Plaine de l'Aude depuis l'Alaric au niveau de Barbaira creative Commons Attribution-Share Alike 4.0 International Author Tylwyth Eldar

En plaine, on mange mieux (80g/j de viande en moyenne (boucherie, volaille, gibier)sinon du poisson, des oeufs et 1/2 l de vin. pourtant, à Carcassonne le pain est la nourriture principale (le Baron Trouvé en donna un détail trop optimiste). Les tisserands ne disposaient souvent que d'un œuf unique écrasé dans une sauce très allongée (farine, ail, persil) pour y tremper le bout de pain. Parfois il y a des harengs mais pas de viande. Les salaires ne permettent pas une nourriture suffisante. Les ouvriers agricoles et valets de ferme sont mieux lotis que les artisans et ouvriers Jusqu'en 1914, la différence de situation était grande entre les favorisés et les pauvres. 

Vue vers Lespignan de la plaine de l'Aude depuis la route entre Fleury et Les Cabanes.

 
Agde le Port début XXe siècle Domaine public Auteur Spedona

Dans la plaine littorale, au début du XXe siècle, on mange de la morue, des harengs saurs, des échalotes, tomates, piments et ail, une nourriture méditerranéenne aussi chez les Italiens et Espagnols qui économisent pour acheter une vigne.  Au bord de la mer, le poisson a nourri la population côtière durant trois siècles (bourrides). L'huile d'olive et le miel ont de toujours augmenté la valeur nutritive de la nourriture.           

mercredi 18 mai 2016

SIX MOIS D’HIVER ! / Fleury d'Aude en Languedoc

     A quoi pensez-vous quand on vous dit Languedoc ? A la Méditerranée, au soleil, au sable, aux vignes, à la garrigue, aux vacances, à une douceur de vivre ? Ce n’est que dans un deuxième temps que les montagnes, derrière, viennent à l’esprit avec des paysages et la vie qui diffèrent du tout au tout. Avec les Pyrénées, les pays de Sault viennent à l’esprit. Avec le Massif Central, la Montagne Noire, le Caroux, l’Espinouse et un peu de ces hauteurs suspendues que sont les causses, c’est un horizon, une ligne bleue vers le nord. 



    Les Causses, des pays rudes, isolés et peu connus si on excepte l’éminent Larzac (912m au Puech de Cougouille / Ste-Eulalie-de-Cernon) dont les croupes pelées s’offrent aux itinérants de l’A75. Ils viennent ajouter à la géographie affective de ceux qui n’ont pas lâché la main du gamin qui contribua à les forger.
    Ce gamin devenu jeune homme a continué de s’émerveiller du lien entre les paysages et les hommes, un envoûtement que les voyages ne pouvaient qu’entretenir. Certes, après nos grands-pères qui faisaient le voyage de leur vie grâce au service militaire, on ne bougeait pas tant qu’aujourd’hui. A une exception près, notable bien qu’aléatoire et que nous devons au sport-roi du Sud, le rugby. En effet, lorsque la providence poussait nos bleus et noirs en phase finale du championnat de France, c’était l’occasion, en voiture ou en bus, de voir du pays, vers les rives du Rhône, l’Ariège, l’Armagnac ou l’Aveyron. 



    Ainsi, au fil de la grimpette au Pas de l’Escalette, lorsque la Nationale 9 en direction de Millau débouchait sur le plateau, un esprit curieux avait tôt fait de voir que le printemps commençait à peine, avec la première fleur, la prime verdure aux buissons, malgré un mois de mai bien entamé. On se dit alors que le climat est rude, qu’on doit vite passer des beaux jours aux mauvais, que les bergeries trapues jusqu’aux lauzes des toits n’ont que l’épaisseur des murs pour se garder des congères et du vent déchaîné. Ici, l’hiver installe ses rigueurs d’un coup, pendant six mois, sept mois même pour le Méjean, plus loin, plus haut, plus enclavé (à suivre)... 




 
photos autorisées commons wikimedia :
1 Larzac depuis le puech de Cougouille  2007 auteur Musaraigne.
2 A75 aire du Caylar (735 m alt / Hérault)
photo personnelle :
3 La Dourbie a séparé les causses Noir (au nord) et du Larzac (au sud) (vue prise vers l'amont, vers l'est).