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vendredi 18 décembre 2020

SURPRISE AU RÉFECTOIRE... Instituteur toujours...


 

En temps normal, les trois repas de la journée se prenaient au réfectoire. En fin de semaine pour la vingtaine de pensionnaires venant de loin (Haute-Loire, Hautes-Alpes, Ardèche, Aude...) et ne rentrant pas chez eux, on allait avec un encadrant (pouvant sévir en tant que surveillant...) en cortège manger au lycée technique plus bas, spécialisé dans tout ce qui concerne le tissage si c'était encore le cas...   


 


Mais pour Noël, la tradition, comme dans tous les établissements de l’État, était d'offrir  aux élèves un menu spécial fêtes. En 1971 pour les FP1 et FP2 soit six classes d'élèves-maîtres, donc deux centaines de personnes tout au plus en comptant le personnel. Non... moins vu qu'il y avait des externes et des demi-pensionnaires...en congé puisque nous sommes le jeudi qui se transformera en mercredi à partir de 1972... 



On mangeait pas mal d'habitude et là ce menu de Noël classique mais de bon aloi, ne pouvait que mettre les potaches en joie ! 

Chaque feuille est tapée à la machine... On pouvait polycopier à l'alcool alors pour obtenir des caractères violacés (mais aussi du rouge, du vert pour les croquis... Pas  encore de photocopieuse, il fallait dupliquer à la manivelle... Quant à la décoration de ce menu, toute une équipe avait dû s'affairer autour du professeur de dessin, un homme déjà âgé mais aussi distingué que chaleureux, respecté et aimé de tous... J'ai son nom sur le bout de la langue mais qui m'échappe... Je m'en veux ! Si quelqu'un peut m'aider... 

 

C'était le 16 décembre, un jeudi, sur le plateau de la Croix-Rousse, entre Saône et Rhône. De retrouver ce papier fut une surprise vibrante... . 

Ah ! que cette page de vie à l'École Normale d'Instituteurs a pu me réconcilier avec la société et moi-même. Et quand je lis ou relève sur ce blog même ce que partagent les maîtres et les élèves, comment ne pas réaliser combien l'instituteur peut compter dans le développement des enfants à considérer, comme cela s'est confirmé avec le temps, en tant que personnes respectables à part entière... 

Quant à la laïcité, force est de constater que vis à vis d'une chrétienté  majoritaire sans concurrence, l'interdépendance entre l’État et le religieux rétrogradé ne posait pas problème... 

mardi 22 septembre 2020

21 septembre 1971

 

Lettre aux parents...

C'est un mardi. 400 kilomètres pour savoir si je suis reçu, est-ce raisonnable ? Je n'ai gardé que l'essentiel de cette campagne qui me vit prendre ma première responsabilité d'adulte. Et dans les archives classées et gardées précieusement par le brave homme qui fut mon père, ma lettre du 21 septembre 1971. 

Je ne suis parti de mon village audois qu'à 10 heures mais la 403 beige a bien ronflé. Pas un mot de ma part sur le copain de Narbonne venu passé aussi le concours de l'Ecole Normale d'Instituteurs... Pourtant il me semble me souvenir que bien qu'en échec il me fit part de ses vœux amicaux... 

La Croix Rousse, la colline qui travaille, en haut de la Saône et du Rhône, quartier des canuts au travail de la soie, je l'aime déjà inconsciemment. Maintenant je sais qu'elle est le décor d'un acte où le soutien inconditionnel d'un père joua le premier rôle. J'en étais, dussé-je en rester modeste, l'acteur principal. Il n'empêche, seule cette force tranquille pouvait me rendre aussi confiant que léger... Bien sûr que je vais le décrocher ce concours ! Même ma monture s'est moquée des 400 kilomètres ! 

"... Rue Anselme, 18 h 05 mn, la cour d'honneur était pleine de candidats silencieux, qui écoutaient les noms des élus, quelques pas de plus, et j'entends Demalla... Déric... il me faudra attendre la fin pour savoir si je suis admissible ; le professeur a fini la liste et ceux qui comme moi sont arrivés un peu en retard vont le rejoindre... il feuillette des papiers verts et les donne, dans le lot, Dedieu Jean-François. je resterais donc jusqu'à samedi à Lyon. Sur les 140 élèves qui se sont présentés, ils en ont gardé 78 pour l'oral. Pour ma part, je passerais l'oral jeudi à 13 h 30 mn ; Vendredi je saurais à quoi m'en tenir, si je suis reçu, je passe la visite médicale samedi matin dès 8H. ; dès lors tout sera précipité... la rentrée ayant lieu le lundi 27 Septembre à 10H. Voilà ce qu'il en est actuellement pour l'examen..." 

Ces mots il faut bien les assumer 49 ans plus tard... Demalla ? Déric ? des noms inventés puisqu'ils ne seront pas en FP1B (mon nom est le premier sur la liste de cette classe). Et le futur instit se doit de bien conjuguer au futur ! "Je resterais" ! "Je passerais"! Pourtant le "s" d'aurais a été barré... Etourderie peut-être... 140 candidats ? La vanité m'a donc fait dire 400 à tort pendant un demi-siècle... pourquoi ? 60 d'entre nous vont être admis... 18 vont donc échouer à l'oral... Et l'orthographe, maître ? La majuscule à "Vendredi" après un point-virgule ? Majuscule à Septembre alors que les noms de mois ne sont pas des noms propres (1) ? Mais à 20 ans, sous réserve des progrès restant à accomplir, on ne peut qu'être pardonné...   

(1) et ils prennent la marque du pluriel ! "Les octobres sont plutôt doux..." sont plutôt étranges surtout ! 




dimanche 17 septembre 2017

« PENDANT QUE J.F. COMPOSE... » / Lyon, la Croix-Rousse, l'École Normale

Dans l’été finissant, des vélos remontent la rive droite de la Saône, une étape qui devrait les mener vers Mâcon ou Pont-de-Vaux, moins loin sûrement s’ils font un crochet par la Croix-Rousse. Or l’un d’eux, le plus âgé, y tient particulièrement à cet itinéraire. 





Il le vit comme un retour aux sources et s’il n’a pas grandi avec les gones, les canuts, les traboules, il reste attaché à cette ville. Ils ont marqué une pause en bas du quartier Saint-Jean, manière d’évoquer les montées, les petites rues tortueuses du quartier où Bernard gardait la porte ouverte pour les copains de promo. Jovial, notre homme, costumé de velours, avait aux pommettes des reflets de Côte-rôtie et ses rires apportaient du soleil même sous la grisaille. C’est vrai qu’on était en janvier, « Avec le temps » passait à longueur de journée mais à vingt ans, l’on ne se sent pas plus "blanchi comme un cheval fourbu" que "floué par les années perdues" ! Ferré me fourrait le cafard... 

La passerelle les fera passer rive gauche. Ensuite, depuis la Montée de la Butte, la vue devrait donner de l’autre côté, sur la colline de Fourvière d’où ils descendaient à ski, sur la piste synthétique de la Sarra ! toute une histoire cette piste en pleine ville et cinquante ans en arrière ! Faudra la raconter un jour...  

La montée rejoint un boulevard... c’est par là qu’ils descendaient, les samedis et dimanches en tant que commensaux d’un lycée technique historique, dans la continuité de l’école de tissage liée directement à la soie. 


Saint-Jean, la passerelle, la Sarra, les métiers des canuts, sont pour lui une approche aussi sentimentale qu’agréable avant de déboucher sur le plateau. Le quatrième arrondissement, la Croix-Rousse et à gauche, à un moment, un vaste espace aéré, le fameux clos Jouve des origines de la boule lyonnaise ! Derrière, autre symbole de l’école de la République pour tous, la grande et belle maison des apprentis instituteurs ! Ah l'EN ! l’École normale, rue Anselme ! Elle paraît guindée, classique avec ses angles droits, ses grilles, sa cour d’honneur, à la française sinon grand-siècle puisque le XIXème vaut bien celui du grand roi ! 




Mais ce n’est qu’une apparence, elle n’est que sourire et demeure à jamais sous le ciel pur et bleu des souvenirs avec ses tuiles qui annoncent déjà le sud. Il aimerait retrouver les noms des professeurs, des copains mais ils sont trop nombreux à lui échapper. Le philosophe qui dit, concernant les êtres, que tout ce qui appartient au passé appartient à la mort aurait raison sauf qu’on a envie d’objecter qu'en s'aidant d' un journal avec le détail de nos jours, le passé resterait bien vivant. Mais il ne va pas embêter les jeunes avec ses pensées loufoques. Plutôt continuer à remonter avec eux le boulevard pour sentir l’atmosphère de la Croix-Rousse, l’esprit de révolte contre l’injustice qui vit tous ces soulèvements de canuts. Oui, l’esprit de la Commune, cette détermination à mourir pour vivre dignement ne sont pas l’exclusivité de Paris. L'expression de Jules Michelet : « L’opposition des deux montagnes, de la montagne mystique et de celle du travail...» dit bien l’antagonisme qui perdure entre les quelques trop riches et les autres. 


Remontée vers la place centrale. Il craint de ne plus percevoir cet air de village, cet accent, le charmant tableau de la place à l’ombre des platanes, les bistrots, le marché, autant de senteurs, d’effluves s’ouvrant au voyageur, autant d’impressions qui s’offrirent, en 1971, l’année du concours à l’École normale... 



Au bout du boulevard de la Croix-Rousse, le Gros Caillou apporté par un glacier et finalement déplacé, à trente mètres près, dans le Ier arrondissement, au grand dam des Croix-Roussiens. De là-haut, la vue domine le Rhône et l’écrin vert du Parc de la Tête d’Or au nord tandis qu’au loin, par temps clair, se dessinent l’arête du Bugey et la ligne brisée des Alpes enneigées ! 


Allons, revenons sur nos coups de pédales. Un dernier regard sur ce qui reste à jamais la maison des instituteurs, s’appellerait-elle IUFM ou ESPE (1). La Montée des Esses dans le sens où ça va tout seul. La Saône à nouveau, le pont Masaryk du nom du président d’un pays alors nouveau la Tchécoslovaquie... C’est là-bas que nous allons, 1200 kilomètres environ, encore dix jours de balade...

Lyon-Mâcon, la cinquième étape d’un voyage à vélo à faire avec mes fils. Deux sont partants... reste à en parler au troisième. N’allez pas penser que j’invente, que je mens. Et si je rêve de nous voir pédaler en file indienne, je suis sûr que le jour «J» nous monterons à la Croix-Rousse. Même que nous y retrouverons leur papi aussi, mon père qui a tant contribué pour que la Croix-Rousse me prenne dans ses bras. Il m’y a amené avec la 504, il a trouvé l’hôtel. Je dois à mon supporter numéro un d'avoir été là, bien qu’en retrait, pour une sérénité, une confiance si nécessaires à l’instant de faire ses preuves. Le plateau, la Saône, Fourvière : il a marché et visité. Il en reste ses diapos intitulées « Pendant que JF compose », un énoncé forçant ma réserve et qui a déclenché mon papier d’aujourd’hui, serait-il encore virtuel. 
Rêver c’est vivre plus intensément... Tâchons de garder nos rêves, beaucoup beaucoup de rêves, en réserve, à condition d’avoir toujours à en réveiller un au moment «T» ! Ils portent trop bien la vie pour rester en sommeil !   

(1) Institut Universitaire de Formation des Maîtres (IUFM), Ecole Supérieure du Professorat et de l’Education (ESPE).   

Crédit photos : 1, 2, la Saône François Dedieu 1971. 6 & 7 Ecole normale françois Dedieu 1971. 
3. Lyon Croix-Rousse Rhône Author Xavier Caré Wikimedia Commons CC-BY-SA. 
4. Lyon vue depuis Fourvière1917 Source BnF Gallica 
5. École de Tissage, Lyon, 43 Cours du Général-Giraud 69001-0707 Author Dashiell 
8. Lyon Place Croix Rousse Author Olivier Aumage permission CC-BY-SA-2.0-fr
9. Lyon Gros Caillou entre 1901 et 1902 Author E. de Rolland & D. Clouzet BnF domaine Public
10. Lyon Gros Caillou Author Frachet
11. Lyon Pont Masaryk avant qu'il ne devienne passerelle pour transit doux (piétons, vélos) Author Maarten Sepp