Jean Camp (1891 - 1968). Sallois de naissance, auteur dramatique, poète, félibre, hispanisant, conférencier, il a écrit le roman Vin Nouveau en 1929.
Un extrait sur les vendanges :
"... Porteurs et presseurs sont à
l'affût du moindre grappillon oublié sous les pampres. On l'arrache d'un
coup pour en barbouiller la joue de la vendangeuse négligente. La fille
a beau baisser la tête, opposer sa croupe tendue à l'assaillant,
celui-ci n'est pas une mauviette. Muscles gonflés, il dompte la volonté
rebelle qui l'affronte, tord d'un poing rude les bras hâlés qui veulent
l'affronter, écrase la grappe tiède sur la joue brune ; puis, goulûment,
dans le brouhaha excitant que fait l'assistance, il mord le visage en
sueur que le raisin rougit, les lèvres humides, le cou flexible, et ne
lâche sa victime que lorsque, de guerre lasse, elle lui a rendu ce
baiser goulu qu'il vient de lui donner, âcre et sucré et enivrant comme
l'essence même de la vendange..."
Dans "Vin Nouveau", Jean Camp a décrit ce dernier voyage :
"La dernière charretée de vendange.
La dernière charretée de vendange
arrivait dans une gloire de poussière et de feuillage. Les trois chevaux
aux colliers pointus tiraient à plein poitrail dans un carillon de
grelots de cuivre avec les pompons rouges chasse-mouches, des rubans aux
gourmettes, des houppettes de tamarin fleurissant les rênes sous
l'entrelacement des touffes de roseaux et de pampres verts.
Sur la charrette, les comportes
étaient cachées par des branches de saules et de sarments feuillus.
Par-dessus, deux longues planches faisaient un siège dur mais solide aux
vendangeuses qui, de la vigne dépouillée au cellier regorgeant, semaient
sur la route leurs refrains, leur gaîté et leurs sonores bavardages.
Les hommes suivaient, par derrière,
accrochés aux ridelles, traînant les seaux, la masse de bois à l'épaule,
la chemise échancrée sur la gorge velue et barbouillée de jus violet...
Leur barbe de huit jours trouait leur peau tannée et leur donnait
l'air de brigands. Ils répondaient à tue-tête aux chœurs des
vendangeuses qui rythmaient le chant aux cahots de l'équipage.
Les larges câlines pendaient dans le
dos des coupeuses; Quant au charretier, la verge de son fouet était
tressés de fleurs et il fallait voir comment claqua sa mèche en arrivant
aux premières maisons du pays.
Les belles vendanges ! Pas une goutte
de pluie pendant vingt-cinq jours, pas trop de moustiques, pas trop
d'à-coups !... le dernier convoi apportait aux cuves les dernières
comportes. Demain, la fête traditionnelle de la fin des vendanges. Un
coup d’œil au ciel dégagé semblait dire : "A présent, qu'il pleuve ! Mon
vin est à l'abri.
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